Campismes
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Catégorie : Global
Thèmes : RacismeResistances
Selon le second principe, la solidarité vis-à-vis de mon camp implique de renoncer à toute critique à son endroit. C’est un principe qui limite ce que je peux et dois penser de mon camp. Ces deux principes pris ensemble se traduisent en une double injonction : choisis ton camp et défends-le contre toutes les attaques !
Le campisme offre un cadre simple et probablement confortable pour les paresseux. Sur le fond, il est une véritable nuisance, particulièrement aujourd’hui quand des courants politiques réactionnaires travaillent activement au brouillage des repères.
On voit le premier principe à l’œuvre dans toute une mouvance, pas tant à l’extrême gauche qu’à l’extrême droite, mais quand même aussi à l’extrême gauche, dans la posture dite « anti-impérialiste ». Sous couvert d’un rejet légitime de l’impérialisme états-unien et plus généralement occidental, incluant l’Union européenne et Israël, on en vient à considérer que des États tels que Cuba, la Bolivie de Morales, mais aussi l’Iran de Ahmadinejad, la Libye de Kadhafi, la Syrie de Assad ou la Russie de Poutine sont dans notre camp. C’est évidemment mettre tout ce beau monde dans un même sac et oublier, ou feindre d’oublier, que certains de ces États comme la Syrie ou la Russie, jouent leur carte dans le concert des impérialismes et méprisent le droit des peuples autant que les grands impérialismes. Autre posture similaire à déclinaison nationale, le « souverainisme » qui, sous couvert d’un rejet légitime des institutions de l’Europe patronale, propose l’union du « peuple » et de la « nation », toutes classes et toutes tendances politiques confondues, pour restaurer sa souveraineté. On sait comment ce genre de stratégie se termine, la dernière personnalité ayant emprunté le toboggan étant Jacques Sapir, souverainiste « de gauche » qui va ouvrir la prochaine université d’été du FN.
Le premier principe du campisme a pour trait commun de se déployer sur des bases partielles et partant de conduire à des délimitations erronées. À rejeter l’impérialisme, ou les institutions internationales, ou le capital financier, ou les grands projets inutiles… on ne rejette jamais le capitalisme en tant que tel et on ne construit pas son camp sur des bases de classe. On se trouve dès lors potentiellement allié à certains de nos pires ennemis, comme en témoignent les nombreuses passerelles vers l’extrême droite, construites et entretenues par toutes sortes de militants confusionnistes qu’on ne citera pas ici. Le campisme est ici dramatique en ce qu’il conduit à s’allier à ses propres adversaires.
Le second principe est plus subtil, et certains y succombent même en ayant résisté au premier – même si l’inverse est généralement faux. Ce principe est de l’ordre du réflexe qui veut qu’on ne touche pas à la famille quand bien même cette famille aurait des cadavres dans les placards. Le mouvement ouvrier politique du XXe siècle ne s’est pas relevé de cette forme de campisme : la solidarité de classe envers la révolution russe s’est muée en adhésion majoritaire aux crimes staliniens. Mais le campisme communiste n’est pas le seul. D’autres positionnements du mouvement ouvrier ont conduit et conduisent encore à fermer les yeux sur des aspects de dominations considérés comme secondaires car ne relevant pas de l’exploitation de l’Homme par l’Homme : la domination masculine, le racisme issu du colonialisme, l’homophobie… Cette stratégie ouvriériste peut aller loin, jusqu’à soutenir des positions antiféministes comme le PCF dans les années 1960. Symétriquement, des mouvements luttant contre diverses formes de domination ont succombé au campisme, en priorisant leur lutte au détriment des autres. On a vu et on voit ainsi des féministes (sincères) ignorer les questions de dominations sociale ou raciale, des soutiens (sincères) de la cause palestinienne ignorer l’antisémitisme, des supporters (sincères) de la laïcité ignorer le racisme. Les campistes sont alors les premiers idiots utiles de l’instrumentalisation de leur cause par certains de leurs pires adversaires.
Dernier avatar du campisme, celui que Jacques Fortin, militant LGBT et d’extrême gauche, a appelé l’islamocampisme (voir sur son blog). C’est ce positionnement des opposants légitimes et sincères au racisme antimusulman, qualifié d’« islamophobie », qui ignorent tout ce que l’islam comme religion et l’islamisme comme courant politique portent de régressif pour le droit des femmes, des homosexuel.le.s et, plus généralement, pour les libertés. Cela conduit certains des défenseurs, encore une fois légitimes, des musulman.e.s contre le racisme dont ils sont victimes, à ignorer totalement les autres dominations subies par nombre de musulman.e.s (second principe), et dans le pire des cas, à ne pas être gênés de la compagnie d’islamistes plus ou moins « modérés » dont les valeurs sont à l’opposé des leurs (premier principe). Il y a eu une expression symptomatique de ce campisme à l’occasion de l’affaire du burkini cet été, quand de nombreux communiqués d’extrême gauche et libertaire ont dénoncé à juste titre les décrets anti-burkini et les arrestations sur les plages, mettant en avant la liberté individuelle des musulmanes mais ignorant totalement le sens politique, collectif, de la progression des voiles et burkinis sous toutes les latitudes. (Pour lire quelques textes qui prennent le contrepied de ce positionnement, voir ici.)
En agglomérant systématiquement à son camp certains de ses adversaires ou au moins certaines de leurs positions, le campisme est l’ennemi de l’émancipation. Résister au campisme suppose de refuser certains alliés faciles et de ne rien lâcher dans le rejet des dominations. Lutter sans hiérarchie contre les dominations sociales, de genre, d’orientation sexuelle, religieuse ou nationale, lutter contre ces dominations non seulement quand elles sont incarnées par l’adversaire mais aussi dans notre propre camp, c’est à ce prix que nous pourrons contribuer à l’émancipation.
Raph
Article paru dans RésisteR ! #44, le 17 septembre 2016
Une des bases de la rhétorique islamophobe est de refuser que l’islamophobie soit qualifiée de racisme, parce que « les musulmans ne sont pas une race ». L’argument, porté aussi bien par individus allant de l’extrême droite à l’extrême gauche, en passant bien sûr par Gilles Clavreul le nouveau grand patron du DILCRA, nouvelle arnaque de l’antiracisme d’Etat, se veut d’une logique implacable. Du moins, pour ceux qui le diffusent.
Parce qu’il y a pourtant une faiblesse conséquente à cet argument comme nous le verrons, particulièrement lorsqu’on se prétend « universaliste », et en mission contre les « racialistes » supposés. Entendez par là, tout le spectre de mouvements antiracistes autonomes vis à vis du pouvoir, dont la première des particularités est d’être menés par les victimes du racisme elles-mêmes en tant que corps politique constitué – et non pas individus isolés dans une grande soupe « universaliste », c’est à dire blanche. Son autre particularité est de cibler un racisme dit systémique, mettant en cause l’Etat entre autres, et non pas uniquement des individus qui seraient méchants et dont les idées seraient simplement à corriger par des campagnes appelant à l’amour de son prochain. Cet antiracisme autonome, c’est l’ensemble de mouvements qui ont été obligés de requalifier leur lutte en accolant le terme de « politique » après antiracisme, donnant ainsi l’antiracisme politique, afin de se réapproprier un combat dont la captation par des officines d’Etat n’a fait que dépolitiser et vider de tout sens les mots « racisme » et « antiracisme ». Et c’est bien cette dépolitisation qui explique que tout et n’importe quoi puisse être dit au sujet de l’islamophobie, notamment des remarques indignées que l’on « confonde racisme et islamophobie ». […]
https://joaogabriell.com/2016/07/14/ce-que-releve-lune-des-phrases-preferees-des-islamophobes-lislamophobie-nest-pas-un-racisme-car-les-musulmans-ne-sont-pas-une-race/
le camp des « padamlgam » en fait
Les camps c’est comme les prisons : FAUT LES BRÛLEEEEEER !!!!
« On n’a pas de « camp » à défendre et on aimerait que les « antiracialistes » fassent de même. »
Ça devient comique. Une preuve que le fanatisme rend vraiment aveugle. Nous avons ici une sorte de « troisième camps » (pardon pour l’expression) qui apparaît, mais les petits soldats continuent de voir leur monde en deux camps …
Cela fait très longtemps qu’il y a une critique des politiques d’identités, des religions, etc.
Par quelle magie ces idées là sont transformées en celles « des antiracialisateurs » ?
Et lorsqu’il y a une critique de l’avancée du burkini et autres, c’est en référence à ce qu’il se passe ailleurs .. l’Iran, l’Afghanistan, tout ça tout ça, ça vous dit quelque chose, ou bien votre mauvaise foi vous empêche de reconnaître ce que les personnes doivent subir sous des lois religieuses ? La liberté des femmes à ne pas cacher leur corps, et à conduire, suivre une instruction, ne pas dépendre d’un père ou d’un mari, être libres sexuellement, etc, en somme à vivre tout simplement, c’est tellement anecdotique qu’il vaut mieux ignorer ce qui se passe, et soutenir les tentatives de reproduire les mêmes chose ailleurs, sous nos yeux pourquoi pas. Soutenir les pires réactionnaires, au nom d’antiracisme, la bonne blague !
C’est vrai que les lois laïques et républicaines c’est vachement mieux…
ni lois laïques ni lois républicaines ni lois divines
« A bas la loi! » (Stirner)
« C’est vrai que les lois laïques et républicaines c’est vachement mieux… »
NON, juste moins pire.
moins pire c’est toujours pire
« pour moi, IL N’Y A AUCUNE DIFFÉRENCE FONDAMENTALE ENTRE LES PAYS QUI IMPOSENT LE VOILE (OU LE BURKINI) ET CEUX QUI L’INTERDISENT. »
Entre me prendre une amende pour port de burkini, et me faire condamner à mort pour « fornication » (où me prendre des coups de bâtons pour adultère), j’ai fait mon choix.
Après peut-être que tu considères que se prendre une amende ou mourir c’est la même chose, mais là c’est une vision très personnelle que peu de gens doivent partager je pense
(et je dis ça, parce que la charia ça n’est pas que le port du voile …).
Loin de moi l’idée de défendre la démocratie, mais je préfère vivre en France qu’en Iran … mon quotidien est quand même moins restreint, je peux aller faire mes courses toute seule en étant habillée et peignée comme je veux, je peux habiter seule, je peux baiser avec qui je veux quand je veux, je peux avorter, je peux ouvrir ma gueule, je peux participer à des activités avec des hommes, etc. Tant de choses que d’autres dans le monde ne peuvent pas faire, parce qu’elles vivent sous des lois religieuses (et je ne parle pas que de la charia … on peut citer la situation des femmes en Inde, celle des homosexuels en Ouganda, etc).
Défendre des idées réactionnaires et particulièrement conservatrices sur Indy me semble quand même un peu paradoxal … et ça ferait du bien à certains de sortir un peu de leurs pantoufles et d’aller dans ces endroits qu’ils idéalisent, de vivre ces obligations … se baigner dans la mer avec ses fringues c’est hyper désagréable, d’autant que les mecs eux sont en maillot de bain. Et trouver ça normal que les femmes n’aient pas le droit de faire ce que font les hommes est carrément hallucinant !!
Ça me fait penser à tous ces connards qui idéalisaient Cuba et Castro, malgré tout ce qu’il s’y passait ! Bon, les néo-nazis idéalisent le III Reich aussi … il faut de tout dans ce monde.
Sinon, les adolescentes en France à qui les parents font régulièrement des tests de virginité te remercient pour ton je-m’en-foutisme … on t’as déjà fait un test de virginité ? Sans parler des pratiques sexuelles chez les ados qui découlent de ce genre de situation .. eh ouais, des tas d’adolescentes et jeunes adultes ont la sodomie comme seule pratique sexuelle jusqu’à leur mariage … parce que ces interdits à la con imposés à des personnes qui ne les ont pas choisis amènent forcément à des détournements (https://www.youtube.com/watch?v=pwB7_HvMghQ )
Je suis persuadée que c’est plus sain de donner une éducation sexuelle aux ados, leur dire de mettre des capotes et de prendre leur pied, plutôt que leur interdire tout rapport au nom de lois millénaires … mais effectivement, ça doit être efficace pour les dégoûter de baiser.
Cet article aurait être plus court.
Je le réécris :
Campismes
Le campisme c’est nul, mon camp est pas nul.
FIN
« Entre me prendre une amende pour port de burkini, et me faire condamner à mort pour « fornication »… »
Ça, c’est de l’argument choc pour justifier les lois racistes et sexistes dans notre belle démocratie et les condamner en Iran ! C’est beau la dialectique associée à la novlangue. Quand bien même les peines en Iran seraient les mêmes qu’en France, ça ne justifierait en rien les lois racistes et sexistes ni en Iran ni en France.
Mais les autres arguments ne sont pas mal non plus : en résumé « si ça ne te plaît pas ici, va voir comment ça se passe ailleurs » ou « je préfère vivre en France qu’en Iran » ! ! Bravo ! c’est pas seulement réac post-colonial, c’est carrément le langage des beaufs !
Et sans oublier l’inévitable amalgame Castro – IIIe Reich !
Super, C’EST ÇA, L’EXEMPLE PARFAIT DU CAMPISME, de ces personnes qui ont choisi le CAMP des démocraties (ces démocraties qui ont commis bien plus de crimes, mais pas chez elles, c’est mieux de les importer chez les autres) et le CAMP des méchants, qui n’ont pas su nous imiter complètement. On croirait un discours de Donald Trump !
Pas de campistes sur Indymedia !
« c’est carrément le langage des beaufs ! »
Oui, si par beaufs il faut comprendre progressistes car c’est une position progressiste donc haïssable.
Excuse-moi, l’Iran est une ancienne colonie française ??
J’ai raté une étape. Pourquoi donc post-colonial ?
Et le Pérou c’est doublement post-colonial ? (puisque les Incas étaient des colons, eux-mêmes colonisés par les espagnols).
Et les post-coloniaux ils pensent quoi du système des castes en Inde ? Si ça vient pas des anglais c’est que c’est à défendre ? Le système de dot ? L’obligation des femmes à brûler vives sur le bûcher de leur défunt mari ?
Puis t’as raison, les démocratie européennes elles sont cacas, c’est tellement mieux les dictatures !
Chaque année je pars en vacance dans des pays qui gèrent leur population d’une main de fer .. Corée du Nord, Arabie Saoudite, Iran, Belarus … j’ai pleuré la mort de Castro bien sûr, cela fait un type bien en moins. J’espère qu’il n’arrivera rien à Kim Jong Un et à Loukachenko, parce qu’alors je risque de déprimer grave.
Ils sont de plus en plus intéressants ces post-bidules … on a l’impression de faire une plongée dans les abysses de la connerie quand ils étalent leurs idées mal digérées … comparer la lapidation pour adultère (en Iran), à des amendes pour port de burkini en France ne leur fait pas froid aux yeux … c’est un peu effrayant quand même cette capacité à relativiser des choses aussi graves. On voit bien là le problème de l’exotisme … tout ce qui vient d’ailleurs est mieux.
« Chaque année je pars en vacance dans des pays qui gèrent leur population d’une main de fer .. Corée du Nord, Arabie Saoudite, Iran, Belarus … »
bah voilà on le savait que t’étais pété d’tunes
Comme cet article est en attente depuis le 18/12, je le passe en débat.
Indymédia Nantes a choisi sur le sujet «« antiracistes contre antiracialistes »» de prendre une position politique, car le collectif ne souhaite pas être le vecteur de la contamination des milieux libertaires et anticapitalistes par l’islamophobie ambiante. Ici, l’article est très malin et commence par énoncer un certain nombre de choses plutôt pertinentes avant de révéler ce qui semble être son but premier : faire du trollage, en rajouter une couche sur un conflit qui occupe inutilement le temps l’équipe d’Indymédia, alors qu’elle a bien mieux à faire (participer aux luttes, développer les méédias alternatifs…).
Il y a une cinquantaine d’années, la droite et l’extrême droite nous disaient à peu près la même chose :
« Si vous n’êtes pas contents de votre sort ici, allez donc en URSS, dans les pays de l’Est, à Cuba, voir si c’est mieux. »
On n’aurait jamais cru que cinquante ans plus tard ce serait des gauchistes reconvertis qui tiendraient le même discours.
Quant à « apprendre » à des militant-e-s antiracistes, anticolonialistes et féministes ce qui est bon pour elles/eux, il faut avoir un certaine dose de cynisme, surtout avec des arguments aussi débiles. L’Iran colonie française, les Incas colons, les castes en Inde, les femmes brûlées sur le bûcher de leur mari… Tu te crois où, là ? Sur Indymedia ou dans la cour de maternelle ?
Les antiracistes se sont battus contre ça toute leur vie, c’est pas pour voir des racistes récupérer leurs luttes pour imposer aujourd’hui leurs propres lois racistes tellement plus acceptables. Si tu ne sais pas ce qu’est le racisme post-colonial, renseigne-toi avant de dire n’importe quoi pour soutenir la pensé unique dominante !
« À la question « Peut-on parler d’un racisme post-colonial ? », nous répondons par une autre question : Comment peut-on ne pas en parler ? Comment peut-on parler des formes contemporaines du racisme sans évoquer deux de ses principales généalogies : les systèmes esclavagiste et colonial ? Comment peut-on nier qu’existe aujourd’hui un profond racisme qui trouve son fondement dans des institutions, des pratiques, des discours et des représentations qui se sont élaborées dans le cadre de l’empire colonial français ? »
http://lmsi.net/Un-racisme-post-colonial
Ça te ferait du bien de t’instruire un peu…
Ce sont ceux qui ont choisi le camp du plus fort et l’ordre moral de la Ve République.