L’affichage libre c’est quoi ?

C’est tout l’affichage qui se fait « librement » dans la rue, utilisé depuis longtemps pour annoncer toute sortes d’évènements : fêtes, concerts, pièces de théâtre … mais aussi manifestation et affiches politiques. Depuis 1982 chaque commune doit offrir à ses administré-e-s des zones d’affichages libres (12m² + 5m² par tranche de 10.000 habitants pour les grandes villes), ces espaces étant définis comme des « emplacements destinés à l’affichage d’opinion ainsi qu’à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif » [1]

L’affichage est aujourd’hui légalement cantonné aux « espaces d’affichage libre » offerts par les maries (en dehors des affichages publicitaires commerciaux). Collez des affiches en dehors de ces panneaux et vous vous retrouvez dans l’illégalité : vos affiches seront décollées par la mairie, vous pourrez être sommé-e de payer des amendes, voir être poursuivi-e-s en justice. Le tout dépendant de la politique de la mairie et du contenu des affiches.

Calmez vous, y’en aura pas pour tout le monde !

La ville de Brest offre 200 panneaux d’affichage libre (soit 365m²). Rapporté à sa surface ainsi que son nombre d’habitants c’est peu, notamment si on le compare à l’espace dédié à l’affichage commercial (pub dans les arrêts de bus et tramway, sucettes sur les trottoirs, grands panneaux des boulevards …) qui bénéficie d’emplacements plus nombreux et beaucoup mieux situés. En plus de subir la concurrence spatiale et visuelle de l’affichage publicitaire, les utilisateurs-rices de ces panneaux se concurrencent de fait entre eux, forcées de coller les unes par dessus les autres par manque de place. L’espace actuellement disponible pourrait être suffisant si il était réellement « réservé à l’affichage d’opinion et à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif », comme le dit la loi.

En réalité les espaces d’affichage libres sont majoritairement utilisés à des buts lucratifs, pour annoncer des événements commerciaux (Le Vauban, la Carène et maintenant l’Arena en sont de grands utilisateurs …). Il est en effet facile pour les grandes salles de spectacles et autres machines à concerts d’imprimer de grandes quantités d’affiches et d’embaucher des colleur-euse-s pour inonder les panneaux sur l’ensemble de la ville, plusieurs fois par semaine, s’appuyant sur des installations publiques pour engranger leur profits privés.

Ces opérations d’affichage illégales n’ont pas l’air de déranger la mairie, alors qu’elle sont en contradiction avec la loi qu’elle dit appliquer. Quand la mairie brandit l’arme de la sanction financière, ceci ne concerne pas les vendeur-euse-s de culture qui collent sur l’espace d’affichage de « libre », mais bien celles et ceux qui, n’ayant pas le même pouvoir financier, sont obligé-e-s de coller leurs affiches sur les murs ou les abri bus pour qu’elles soient vues.

En effet, quel autre choix s’offre à nous pour communiquer ? Comme l’immense majorité des gens, nous n’avons pas les moyens financiers pour imprimer des affiches de grande taille et en assez grandes quantité pour faire des collages réguliers. Nous savons aussi par expérience que nos affiches seront recouvertes en quelques jours, voir en quelques heures si nous les collons sur ces panneaux.

Devrions nous abandonner et arrêter de nous exprimer ?

Notre liberté s’arrête là où commencent les projets de BMO

Il y a quelques années les murs de Brest étaient encore régulièrement recouverts d’affiches par des colleurs-ses qui ne s’embarrassaient pas d’utiliser uniquement les espaces dédiés, s’aménageant par elles-même la place pour communiquer.

La mairie de Brest, qui a des prétentions à tenir une place dans la compétition entre métropoles, tiens à faire de l’hyper-centre une vitrine où rien ne dépasse. Depuis la mise en place du tram en 2012, elle organise la campagne publicitaire Devenez un sérial cleaner, qui en plus du jeu de mot accablant met en scène de manière grotesque des gens « normaux » dans une ambiance esthétique façon Les experts.
Cette campagne propose à tout un chacun de faire la chasse aux mégots et aux prospectus, qui sous couvert de rendre les rues brestoises plus « propres » assimile toute forme d’expression non désirée par la marie à une pollution, au même titre que les crottes de chien.

L’expression « être traité comme de la merde » semble ici convenir. La ville paie probablement très cher cette campagne de pub à la grosse boîte de com Phileas, à se demander combien de mètres carré d’affichage libres elle aurait pu financer avec cette somme ?

A Brest, tout se fait, tout se paie

La guerre à l’affichage sauvage allant de paire avec celle contre les graffitis, un énorme travail de nettoyage systématique est effectué dans une « zone rouge », située dans l’hyper-centre ainsi que le long du parcours du tram, deux vitrines commerciales de la ville. Le nettoyage de tag et d’affichage sauvage est aussi possible sur demande dans toute la ville. La mairie tente d’intimider celles et ceux qui bravent l’interdiction de collage en envoyant des lettres ou mails, menaçant de leur faire payer les frais d’enlèvement des affiches (306,54 euros par tranche de 2h d‘intervention), passé un premier avertissement.
Ces interdictions sont valables pour tout collage sur le mobilier urbain, mais aussi pour le simple scotchage d’affiches, ce qui démontre bien la volonté de la mairie non pas d’empêcher la « dégradation » du mobilier urbain, mais bien sa volonté de contrôler totalement l’espace urbain, au travers de ses aménagement et de sa politique de suppression de tout ce qu’elle ne veux pas y voir.

Pour toutes ces raisons, nous n’abandonnerons pas la pratique du collage « sauvage », seul moyen de communication à notre disposition dans l’espace public. Nous continuerons de refuser la domination de celles et ceux qui ont les moyens financiers de s’offrir des espaces publicitaires ou de monopoliser les emplacements d’affichage libre.

Le collectif d’animation et de modération de brest.mediaslibres

Nous publions ici la réponse envoyée par mail à la mairie.

Objet : décollage sauvage – avertissement sans accusé de réception

Métropole, métropol,

Nous avons bien reçu votre courrier relatif à l’affichage sauvage. Nous sommes heureux de savoir que notre stratégie de communication commence à porter ses fruits, et nous sommes maintenant assuré-e-s de savoir que vous connaissez l’existence d’un nouveau média qui tend à couvrir l’actualité des luttes et résistances locales.
Nous espérons que vous aussi, vous viendrez publier prochainement des informations sur votre mouvement de grève pour exiger de meilleures conditions de travail, une majoration de 86% de vos salaires, la titularisation des postes précaires, ou bien votre séquestration du maire pour la gratuité des transport pour tous et toutes, votre analyse de la politique interne de BMH, les gros coups immobiliers réalisés par l’entourage du maire, le harcèlement moral d’Alain Masson, et que savons-nous encore.

Cependant, nous sommes attristé-e-s de savoir que vous participez activement à lutter contre la diffusion et le partage de l’information relative à l’existence de l’outil Brest-info, et ce faisant vous privez de nombreuses personnes de la nécessité d’être informé-e et de partager de l’information et des analyses. Nous dirons même que cela nous à terriblement attristé-e-s dans un premier temps, puis nous à révolté-e-s. Nous vous demandons, à titre exceptionnel, de ne plus faire intervenir vos services pour décoller nos affiches, tracts ou autres graffitis, ni celles des autres d’ailleurs (à l’exception des affiches de concerts payants, de partis politiques, de publicité capitalistes, ou celles à caractère raciste/homophobe/sexiste/classiste…).

Nous vous informons que pour les années à venir, vous êtes inscrits dans nos fichiers informatiques. En cas de constatation d’une nouvelle infraction de “décollage sauvage” d’affiches mettant en cause votre organisation, vous vous exposez aux dispositions de la réunion du collectif d’animation n° AK-47 du 3 juillet 2015. Cette dernière prévoit que les frais de collage (impression, achat d’une imprimerie, temps de collage, matériel de collage, stress policier inhérent à l’activité) sont supportés par celles et ceux qui ordonnent de décoller, décollent bénévolement, ou à défaut profitent du décollage. Un montant forfaitaire minimal de 864,986 € vous sera facturé par tranche de 2 affiches décollées, et vous sera réclamé par notre huissier conseil, Christophe Guéganton.
Nous vous informons de même que pour chaque affiche décollée, 5 autres recouvrirons dans les 24h l’espace public non prévu à cet effet.

Comptant sur votre vigilance future à ne plus faire décoller des affiches par vos employé-e-s.

Nous vous prions d’agréer, madame, monsieur, personne ne se reconnaissant pas dans ces catégories, nos distinctions saluées.

Le collectif d’animation de brest.mediaslibres

Notes:

[1http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000332878&dateTexte=&fastPos=1&oldAction=rechTexte/