Proposition de loi pour l’interdiction de michel onfray dans l’ensemble de l’espace public
Catégorie : Global
Thèmes : Resistances
Exposé des motifs
Il est question, ces derniers jours, ces derniers mois et ces dernières années ainsi que ces prochains jours, ces prochains mois et ces prochaines années, d’une nouvelle loi d’interdiction de la burqa et/ou du niqab et/ou du voile intégral et/ou du bandana islamique et/ou du bandeau islamique et/ou du chignon islamique et/ou de la casquette islamique et/ou du verlan islamique et/ou de l’identité islamique et/ou du repli islamique et/ou des minarets islamiques et/ou des Quick hallal et/ou de la liste NPA Vaucluse et/ou de Tariq Ramadan et/ou du Coran et/ou des menus sans cochon et/ou des boissons non-alcoolisées.
Nous considérons que la méthode est excellente : dans notre démocratie malade et dévirilisée, il est temps de remettre un peu d’interdit et de répression. Il faut, pour reprendre le joli mot de Fadela Amara, éradiquer ! [1] Ou pour reprendre les jolis mots de Nicolas Sarkozy : liquider et nettoyer ! Ou, pour reprendre le joli mot d’Élisabeth Lévy : remettre un peu de schlague ! [2]. Mais nous estimons qu’il y a erreur sur la cible. Nous considérons quant à nous que l’urgence, pour la sauvegarde de la démocratie, pour l’avenir de la pensée et pour notre épanouissement personnel, est à une interdiction absolue de tout affichage ostensible de la grande gueule de Michel Onfray – dans le services public de télévision et de radiodiffusion, naturellement, mais aussi dans les lieux d’enseignement et de recherche, dans les administrations, dans les hôpitaux et dans tout l’espace public.
Il s’agit pour nous d’une question de principe : Michel Onfray doit être banni de l’espace public car il est incompatible avec les valeurs de la démocratie, de l’émancipation humaine et du simple bon goût. Sa suffisance et ses poses philosophantes sont une insulte ostensible à toute la corporation des philosophes ; son catéchisme antireligieux est une insulte à ce que la libre-pensée a produit de meilleur ; son anticalotinisme crétin, son hédonisme benêt et son aristocratisme puant sont une insulte à Épicure, à Lucrèce, à Spinoza, à Nietzsche, à Deleuze, à Bourdieu et à tous les grands auteurs dont il se réclame et qu’il ne fait que trahir, salir et détourner à son profit.
Ne soyons pas angéliques : la « gauche radicale » qu’il dit incarner est une mystification, un double discours dans lequel il est passé maître ! Son opportunisme et son inconstance l’ont amené à soutenir en quelques mois Olivier Besancenot, Ségolène Royal, José Bové, de nouveau Olivier Besancenot puis de nouveau Ségolène Royal et pour finir Marie-George Buffet, en démolissant au fur et à mesure de ces retournements de veste les candidat-e-s et les partis qu’il venait à peine de soutenir [3].
Sur le plan idéologique, la duplicité est encore plus stupéfiante : comme pour mieux nous embrouiller, Michel Onfray se dit lui-même, et sans rire, libertaire et libéral [4], gauchiste et gaulliste [5], anarchiste et partisan de l’économie de marché [6], propalestinien et sioniste [7]. Il affirme également, sans honte, que c’est Camus qui avait raison contre Sartre sur la question algérienne – en clair : qu’on a raison, lorsqu’il s’agit d’Algériens, de « préférer sa mère à la justice » et de refuser à un peuple le droit de disposer de lui-même.
Si Michel Onfray se réclame volontiers du peuple de gauche, la seule compagnie populaire qu’il affectionne est une petite bourgeoisie suffisamment docile et complexée pour aller l’écouter religieusement lorsqu’il pontifie à « l’Université populaire de Caen » [8]. En dehors de cette relation pas franchement libertaire et égalitaire avec une plèbe pas franchement plébéienne, l’engagement politique de Michel Onfray se résume à :
des billets soporifiques pour Siné Hebdo ;
des livres aussi creux et sinistres que leurs titres sont grandiloquents et prétentieux (attention : L’art de jouir, La sculpture de soi, La sagesse tragique, La puissance d’exister, Politique du rebelle, Traité de résistance et d’insoumission, À côté du désir d’éternité, Fragments d’Egypte ou encore Pour une érotique solaire ! – sans oublier les grotesquissimes quatre volumes de son Journal hédoniste intitulés, tenez-vous bien : Le désir d’être un volcan, Les vertus de la foudre, L’Archipel des comètes et La lueur des orages désirés !) ;
quelques escales opportunistes à Saint-Germain-des-Prés, au cours desquelles sa puissance d’exister se prosterne avec la dernière servilité devant le Nabab BHL (comme l’a révélé dernièrement Le Plan B) [9] ;
un brunch philosophique en compagnie du chef de file de l’extrême droite plurielle, Nicolas Sarkozy en personne, au cours duquel notre philosophe tragique et volcanique ne pousse pas très loin la rébellion, la résistance et l’insoumission : « Ce qu’il y a de sympathique chez vous [Nicolas Sarkozy], c’est le souci forcené de l’action et la pensée pragmatique. Je suis de ceux qui prônent également une philosophie empirique, concrète, et cette attitude n’est pas très répandue dans ma corporation » [10] ;
et enfin d’innombrables apparitions télévisées au cours desquelles son érotisme solaire crève moins l’écran que sa cuistrerie, son égo surdimensionné et son invraisemblable mépris de l’autre.
Par ailleurs, puisque la question du sexisme a été soulevée à propos du voile, nous tenons à préciser que Michel Onfray est un gros sexiste. Son Panthéon est quasi-intégralement couillu, son œuvre totalement androcentrée, son ethos et ses postures ridiculement virilistes.
Il ne faut pas oublier non plus le misérable concours de bites télévisuel auquel Michel Onfray se livra un jour avec le romancier François Bégaudeau : le jeune coq venait de publier un Anti-manuel de littérature presque aussi mauvais que l’onfresque Anti-manuel de philosophie, et le vieux coq, en bon capitaliste libertaire, pour le coup plus capitaliste que libertaire, était sorti de son épicurienne ataraxie [11] et avait eu l’élégante idée de réclamer des royalties pour le « concept » tellement génial et tellement novateur de l’anti-manuel ! Le masque tombait définitivement : derrière les austères lunettes rectangulaires et la philosophale crinière grisonnante, un petit entrepreneur obsédé par l’argent. Sous le costume trop grand pour lui du sage qui méprise les « désirs vains » de gloire et de fortune [12], un petit Jacques Séguéla, sans la Rolex et les UV.
De surcroît, en bon VRP de lui même, Michel Onfray surfe depuis longtemps sur la vague islamophobe qui s’est emparée du pays [13] :
on se souvient notamment d’une minable prestation télévisée au cours de laquelle, avec l’air inspiré du grand sage qui nous révèle le secret de fabrication de l’eau tiède, il expliqua que la plus nuisible de ces nuisances fondamentales que sont les religions était, devinez laquelle, gagné : l’Islam ! [14] ;
on se souvient aussi d’une pétition raciste qu’il a lancé « pour un soutien sans réserve » au catholique anti-mahométan Robert Redeker [15] ;
on se souvient encore d’une préface à un indigent pamphlet anti-musulman, dans laquelle il appelle à la « défense » des « valeurs de l’Occident » [16] ;
on se souvient enfin d’une apocalyptique mise en garde digne d’Oriana Fallacci, Maurice Dantec ou Philippe de Villiers : « désormais l’islam place des coins dans le vieux marbre d’une Europe qui ne croit plus en elle, en ses valeurs, en ses vertus, et ce avant destruction définitive » [17] – et d’une récidive télévisuelle délirante prophétisant la mort inéluctable de l’Occident sous les coups conjugués de la « brutalité chinoise » et d’une « Oumma mondiale » !
On se souvient en outre d’une récente émission (« Ce soir ou jamais » du 5 novembre 2009) au cours de laquelle il fit preuve d’une paternalisme inouï à l’égard d’Houria Bouteldja, porte-parole des Indigènes de la republique. Cette dernière le lui fit remarquer simplement, poliment mais fermement, ce qui provoqua cette réaction extravagante en forme d’aveu :
« Arrêtez, sinon je vais finir par embrasser Éric Besson sur la bouche ! ». [18]
Et pour finir en apothéose, lui qui vendrait père, mère, frères, sœurs, fils, filles et amis pour une minute de prime time chez Frédéric Taddéi, Guillaume Durand ou Franz Olivier Giesbert, lui qui n’a jamais participé à quoi que ce soit de collectif dont il ne soit pas le chef, lui qui n’a sans doute pas collé d’affiches ou distribué de tracts depuis fort longtemps (à moins que ce ne soit depuis toujours), lui qui ne roule que pour lui-même, lui qui ne vit que par et pour les grands médias, Michel Onfray donc, a jugé utile d’aller, dans une tribune publiée par Le Monde le 19 février 2010, cracher son venin sur Ilham Moussaïd, « la voilée du NPA », en lui reprochant devinez quoi, à elle, jeune femme issue des quartiers populaires d’Avignon, elle qui milite au quotidien dans un parti anticapitaliste, elle qui n’a rien demandé à personne et qui s’est fait littéralement harceler par les grands partis et les grands médias ? De n’être qu’une petite écervelée en quête de… gloire « médiatique » ! [19]
Pour toutes ces raisons, et bien d’autres qu’on ne saurait répertorier ici de manière exhaustive , mais auxquelles pourra se consacrer une mission parlementaire , nous estimons qu’il est urgent de réagir. Un bras de fer s’est engagé entre la démocratie et l’occidentalisme intégriste de Michel Onfray. Seul un signal fort pourra mettre un frein au communautarisme blanc, à l’obscurantisme franchouillard, au mépris social et à la haine raciale dont Michel Onfray est le porte-drapeau. C’est pourquoi nous soumettons au peuple de France la proposition de loi suivante.
Article unique
La grande gueule de Michel Onfray est interdite dans l’ensemble de l’espace public.
Toute infraction à cette loi est punie d’un entartage.
p.-s.
La SPINOZA est la Société Pour l’Interdiction des Nuisances Onfresques Zet Anarkozystes. Cette initiative est soutenue par Jean-Claude Abdouloussen, Abd-El-Kader Aït Mohamed (militant antilibéral et antiraciste), Gaëtan Andrieux (militant écologiste), Nathou Bouh (militant queer), Sam Cabannes, Causeuse Musulmane (bloggeuse), Sylvain Chomienne (étudiant), Manuel Colinas, Olivier Cyran (journaliste), Christine Delphy (sociologue), Patrick Druart, Marie Geaugey (étudiante), Nolwenn Guellec (chargée de production), Judith Lefèvre (secrétaire du Collectif des féministes pour l’égalité), Hakima Manseri, Sébastien Marchal (graphiste), Maria Grazia Meriggi, Anne Gaelle Moulinier (docteur en psychologie), Anne Leila Ollivier (chomskienne favorable à une interdiction de causer essentiellement symbolique), Nicolas Plagne (enseignant), Damien Préault, Princesse de Clèves Islamogauchiste (bloggeuse), Ali Rahni (militant associatif), Faysal Riad (enseignant), Maël Richard, Lubomira Rydzek, Claudine Vegas, Pierre Tevanian (enseignant), Michel Tibon-Cornillot (philosophe, EHESS), Louise Tréby, Rémi Verbraeken (dessinateur), Roger Zandonella
Pour soutenir cette initiative, adressez vos signatures à l’adresse suivante : contact.lmsi@hotmail.fr.
notes
[1] Sur cette charmante formule amarienne, cf. Isabelle Stengers et Philippe Pignarre, « Les plus religieux ne sont pas ceux qu’on croit ».
[2] Sur cette délicieuse formule léviste, cf. cette réaction.
[3] Cf. Sébastien Marchal, « Girouettisme : Onfray mieux d’se taire ! »
[4] Cf. Jean-Pierre Garnier, « Le libertaire du président ».
[5] Propos tenu dans Le Nouvel Observateur du 25 janvier 2007 : « Je défends la Constitution de 1958. Je suis gaullien, “gaullo-gauchiste” aurait dit Maurice Clavel ! ».
[6] Propos tenus sur France Inter et Radio Libertaire :
« Moi, je suis capitaliste, pour le capitalisme, je pense qu’effectivement la propriété privée est tout à fait défendable. »
« L’enseignant est infecté par son statut de fonctionnaire ».
« Je suis un antilibéral absolu. En revanche, moi, je ne suis pas anticapitaliste car le capitalisme, c’est la possibilité de créer des richesses avec des gens qui possèdent, qui investissent… Alors je ne vois pas d’alternative à ça » (Radio libertaire, 3 février 2004).
[7] Propos tenu dans L’Express du 10 septembre 2008 : « Je suis sioniste : je défends la cause palestinienne aussi bien que la cause juive ».
[8] Vendues en CD et multidiffusées sur France Culture, ces conférences de « l’Université populaire » sont construites sur le modèle le plus académique du cours magistral d’histoire de la philosophie. Elles sont de facture médiocre, dépourvues de toute originalité et mortellement ennuyeuses, malgré les pathétiques efforts du maître des lieux pour les ponctuer de « bons mots » d’une ringardise achevée.
[9] Dans une dépêche intitulée « Un BHL en culottes courtes », Le Plan B n° 22, de février 2010, relate :
« Le Plan B allait-il débourser 18 euros pour s’infliger le “débat” organisé le 19 janvier par Le Monde, en partenariat avec la FNAC et le club du 3ème âge de Saint-Germain-des Prés ? Oui, car l’événement était de taille : dans la cave qui lui sert d’auditorium, le quotidien du soir élevait Michel Onfray au rang de philosophe pour retraités germanopratins (PPRG), en l’invitant à disserter sur Albert Camus avec Jean Daniel et Bernard-Henri Lévy. Devant 250 octogénaires somnolents et l’ambassadeur de Suède, le penseur “libertaire” fait le paon pour séduire “Bernard” (sic). Il secoue sa chevelure en citant Nietzsche, Heidegger, Kierkegaard, Wagner, Helvétius, Plotin ; béachélise Camus en louant son “hédonisme tragique” ; applaudit aux sentences du maître (“Tout est juste, je consens à tout ce qu’a dit Bernard”), le cajole (“On peut avoir une belle plume et être un vrai philosophe, Bernard l’incarne”). Cette assertion loufoque provoque des rires dans l’assistance, qui commence à se traîner vers la sortie, mais le petit Michel trépigne pour finir son oral : “Quand j’ai lu La Barbarie à visage humain [le premier livre, nul, de BHL], j’y ai vu du lyrisme” ».
[10] Cf. Philosophie magazine, n°8, printemps 2007. Sur cette sympathique causerie, et plus largement sur la connivence idéologique entre les deux convives, cf. notre analyse à paraîre aux Éditions Spinozistes : De qui Michel Onfray est-il le con ?.
[11] L’ataraxie, absence de trouble, est l’idéal de sagesse que préconise Epicure, le maître à penser de Michel Onfray.
[12] Epicure préconise un recentrage de la libido sur un nombre limité d’objets facilement accessibles, et un refus radical de la fortune et de la gloire, qui sont dans toute son oeuvre l’exemple par excellence de ce qu’il nomme désir vain. Cf. Epicure, Lettres et maximes, Presses Universitaires de France
[13] Ce qui lui a valu cet amusant éloge dans le journal Libération, le 5 décembre 2006 : « Pronucléaire, pro-loi sur le voile, Michel Onfray pense tout seul, à l’écart des dogmes. »
[14] Cf. « De l’athéologie à l’islamophobie. À propos d’une prestation télévisuelle de Michel Onfray.
[15] Cf. Pierre Tevanian, « La faute à Voltaire ? Quelques réflexions sur la liberté d’expression, à l’issue de l’affaire Redeker ». Ce texte démontre le caractère raciste de la pétition onfresque
[16] Cf. Sébastien Fontenelle, « Défense De L’Occident – Et Lancement D’Un Appel D’Offres Pour La Production D’Un Individu Post-Islamique ». Cf. aussi, Alternative Libertaire, Confus : L’impasse islamique.
[17] Éditorial publié en mars 2006 sur le site personnel de Michel Onfray.
[18] Cf. Causeuse musulmane, « Le baiser du philosophe hedoniste Michel Onfray sur la bouche du ministre de l’immigration et de l’identité Éric Besson ».
[19] Notre cathodique intégriste disqualifie l’engagement politique d’Ilham Moussaïd en le qualifiant de « combat médiatique », avec cet argument imparable : « Dans un monde où la télévision constitue le réel, ce morceau de tissu assure qu’on attirera les caméras et les polémiques ». Nous dirons pour notre part que la télévision constitue le réel de nos piètres penseurs, et que le port de ce « morceau de tissu », quelles que soient ses motivations profondes, aura toujours comme effet indésirable d’attirer les Michel Onfray.
Onfray vs. Fourest, le match
Un peu de légèreté, dans cette période difficile.
Dans sa grande série des pontifiants de notre époque, la Vipère vous propose un jeu : deviner qui le premier, de Michel Onfray et de Caroline Fourest, du bouffeur-de-curés-hédoniste-cool et de la féministe-antiburka-vigilante, lâchera un sourire et fera preuve d’humour sur un plateau de télévision.
Prévenons les compétiteurs : cela peut prendre du temps ! Des années peut-être ! Car jamais on n’a vu Onfray sourire ! Et jamais on n’a vu Caroline Fourest plaisanter !
En cadeau pour le vainqueur : un best-of du groupe Gold, connu en son temps comme le groupe qui ne riait jamais !
http://vipere-litteraire.over-blog.com/article-27553704….html
Un ami m’a envoyé ce texte de Michel Onfray que je place à la fin pour que chacun juge jusqu’où l’anticommunisme et le désir d’exister peut conduire quelqu’un qui prétend au titre d’intellectuel.
Mon premier réflexe a été de ne pas m’en préoccuper. Périodiquement il surgit quelque libelle de ce type. De surcroît je m’estimais mal placée pour critiquer Michel Onfray vu que de sa pléthorique production je n’ai lu qu’un truc sur les cyniques tellement racoleur qu’il m’est tombé des mains. Quelques « bonnes feuilles » de son machin sur Freud qui m’ont incitée à éviter l’ouvrage.
Que faire alors de ce médiocre compte rendu d’un livre dont je pense qu’il ne passera pas à la postérité même si Michel Onfray nous assure qu’il a été publié dans « la très sérieuse maison d’édition Larousse dans une collection dirigée par Emmanuel Thiébot qui fit un temps partie de l’équipe de l’Université Populaire de Caen« . L’université populaire de Caen étant on le sait la créature du dit Michel Onfray.
Michel Onfray a subi une véritable illumination devant cet ouvrage. Au point à partir de cette unique lecture de traîner dans la boue Guy Mocquet, excusez du peu. A partir d’un seul livre, il est vrai publié dans la très sérieuse maison d’édition Larousse dans une collection dirigée par Emmanuel Thiébot qui fit un temps partie de l’équipe de l’Université Populaire de Caen« . D’autres intellectuels ayant eu une telle illumination tenteraient de se ressaisir, ils multiplieraient les lectures, les références avant de s’engager.
Mais non Michel Onfray a ceci de commun avec Bernard Henri Lévy qu’il leur suffit d’un seul livre de quelque auteur peu ou mal connu pour se faire une opinion définitive, pour adopter une « posture » : Guy Mocquet serait en fait un pro-nazi parce que communiste. Et Michel Onfray de nous inviter à regarder en face la vérité sinon le nihilisme nous menacerait. Heureusement Michel Onfray et BHL sont là, avec eux l’essayiste n’a plus une attitude morale mais une morale de l’attitude… Sur rien, sur un livre feuilleté à la hâte dont on tire une exaltation incontrôlée des sphincters de l’égo…
Et tout cela en reprenant le grand air du pacte germano-soviétique et du communisme stalino-hitlérien. Michel Onfray n’a visiblement pas consulté la montagne d’ouvrages qui a été écrite sur le sujet , il a une révélation. Comme pour Freud, il n’argumente pas il dévoile l’anecdote dont il vient de prendre connaissance, un ragot peut-être qu’importe.
Se trouvera-t-il un historien digne de ce nom pour perdre son temps à réfuter ce grand air de la calomnie devenu ou plutôt redevenu évangile pour Michel Onfray ? Je crains que non alors je ne vais pas me lancer non pas dans l’entreprise de reprendre toute la période historique, l’alliance du Front populaire se cassant le nez sur la Guerre d’Espagne, le refus des socialistes d’intervenir, la lutte antifasciste des communistes.
Munich, la trahison de Chamberlain, Daladier. L’originalité du parti Communiste française qui justement a refusé la ligne classe contre classe et a constitué un Front populaire antifasciste. Il faudrait tout reconstruire pour contextualiser ce que Michel Onfray résume au pacte germano soviétique et à la seule demande de parution de l’humanité aux troupes d’occupation. Ce qui n’a pas été le fait du « parti » mais d’un seul dirigeant qui s’est trompé et s’est illustré dans la Résistance, lançant l’appel à la résistance avant celui du 18 juin. mais voyez la canaillerie du texte, cela devient « nous avons des ennemis communs les anglais, les juifs »…
Alors même qu’en 1938, il y a eu la conférence d’Evian, le refus général d’accueillir les juifs, cela devient les communistes qui sont antisémites pour Onfray… Minable.. ; Des historiens décriront mieux que moi cette lutte antifasciste menée par les communistes français depuis 1934 alors même que comme l’a décrit Annie Lacroix-Riz le patronat avait fait déjà alliance avec les nazis.
Mais je vais apporter un témoignage. J’ai écris sous forme de dialogue les mémoires de Gaston Plissonnier et nous avons beaucoup discuté de cette période. ce que m’a décrit Gaston Plissonnier qui à l’époque était en Bourgogne c’était la situation du parti à ce moment.
En 1938, il y a eu Munich, la Tchécoslovaquie a été livrée. Puis le pacte germano-soviétique comme réponse à Munich. Alors même que le gouvernement français ne prépare pas la guerre contre l’Allemagne, que le patronat est déjà allié aux nazis, le pacte germano-soviétique fournit prétexte à se débarrasser de ceux qui combattent dans les usines, ont imposé les congés payés, la répression s’abat sur les militants communistes jusque dans les syndicats en bas où, les communistes étaient majoritaires : ils seront dissous par le ministre de l’Intérieur, 620, au total.
La moitié du Comité central et trois membres du Bureau Politique Cachin, Sémard et Billoux sont en prison mais Maurice Thorez reçoit l’ordre de partir à Moscou et Jacques Duclos, Benoît franchon et Charles Tillon partent en clandestinité. Ce que me décrit alors Gaston Plissonnier c’est un parti qu’il faut reconstituer en le faisant entrer en clandestinité.
Il m’a raconté comment il allait de ferme en ferme alors même que les jeunes hommes (jusqu’à quarante ans) étaient mobilisés et que le parti était interdit et il ne savait pas à qui il avait affaire. Mais comme Monmousseau était envoyé à Marseille, Charles Tillon à Bordeaux, lui tente de recréer un parti illégal dans sa Bourgogne. Ils se battent pour la survie du Parti, sur des bases de classe, ce moment est très proche du refus de Blum de soutenir les Républicains espagnols face au fascisme, de l’internement de ces espagnols dans des camps. Donc de l’analyse de la complicité entre la bourgeoisie et les fascistes et de la mollesse des socialistes.
Gaston me racontait que les structures clandestines qui se recréaient se faisaient sur ces bases, le prolétariat et les intellectuels ralliés à lui étaient les seuls à n’avoir pas trahi, ce que Mauriac confirmera en disant que « la classe ouvrière est la seule à être resteé fidèle à la patrie profanée ».. Les femmes jouent un grand rôle dans ce temps de mobilisation, l’épouse de Gaston mais aussi l’union des jeunes filles de France avec Danielle Casanova.
Ce témoignage de Gaston qui insistait sur non seulement les difficultés de réorganiser un parti clandestin puisque le gouvernement qui pactisait de fait avec les nazis avait organisé la répression des communistes mais aussi sur les objectifs de résistance et la nécessité que ce soit le parti lui-même qui organise sa propre résistance a été également confirmé par mon mari qui lui avait organisé la résistance du pays d’Aix et qui à ce titre avait été torturé par la Gestapo, puis fut emprisonné à la Centrale d’Eysses et ensuite déporté à Dachau.
Il m’a décrit le même travail qu’il a du faire dans les mêmes conditions pour recréer un parti, son effroi devant la foule qui se pressait lors de la venue de Pétain. Il avait adhéré en 1936 pour mener la lutte antifasciste pour lui en réorganisant le parti comme l’avait fait partout des communistes à la même époque, celle de la drôle de guerre puis celle de la débâcle des armées mal préparées et le début de l’occupation nazie, il n’y a jamais le moindre doute sur la nature de leur combat.
Face à cela, voyez comment Michel Onfray glisse, comment il accuse les communistes d’avoir saboté les armes dans les usines, d’être quasiment à l’origine de la débâcle de l’armée française, le patronat celui qui s’est réellement entendu avec les nazis « plutôt Hitler que le Front populaire » est blanchi c’est la faute aux ouvriers…
Je dois dire que quand j’ai lu ce torchon de Michel Onfray j’ai repensé à tous ces gens, à ce jeune communiste torturé et qui s’était coupé la langue pour ne pas parler et je me suis dit que cet individu déshonorait le nom d’intellectuel, non seulement par ses méthodes de travail, le ragot, la provocation se substituant à la recherche des preuves mais parce qu’il s’attaquait à quelqu’un qui le dépassait de cent coudées pour rien, comme ça pour le plaisir de faire parler de lui…
triste…
Danielle Bleitrach
http://histoireetsociete.wordpress.com/2011/11/10/miche…l-onf…
La chronique mensuelle de Michel Onfray | N° 78 – Novembre 2011 GUY MÔQUET, LE CONTRAIRE D’UN RÉSISTANT
Je viens de lire un livre terrible intitulé L’Affaire Guy Môquet sous-titré Enquête sur une mystification officielle publié dans la très sérieuse maison d’édition Larousse dans une collection dirigée par Emmanuel Thiébot qui fit un temps partie de l’équipe de l’Université Populaire de Caen. Bravo aux auteurs Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre. Que dit ce livre ? Que Guy Môquet ne fut pas résistant. Thèse sidérante tant elle va contre la mythologie qui fait de ce jeune garçon de seize ans fusillé par les nazis l’emblème de la résistance communiste à l’occupant allemand. Guy Môquet est le fils d’un cheminot qui doit son ascension sociale au Parti Communiste auquel il voue un culte. Quand les communistes russes et les nazis signent le pacte germano-soviétique, le PCF obéit à la décision de Staline. Dès lors, le Parti se réjouit de la défaite de juin 40 : selon eux, elle signe l’échec de la démocratie parlementaire, du capitalisme juif, de la bourgeoisie d’affaire. De plus, elle prépare la France à la révolution bolchevique ardemment souhaitée. L’Allemagne peut donc envahir la Pologne, puis la France, l’URSS ne bouge pas, les communistes français approuvent. L’Angleterre décrète un blocus économique contre l’Allemagne nazie, mais l’Union Soviétique laisse transiter sur son territoire les produits qui ravitaillent les nationaux-socialistes. Le PCF ne dit rien. Le 29 septembre 1939, nazis et communistes demandent la fin de la guerre afin que Staline garde les territoires conquis et Hitler les siens. Les députés communistes envoient une lettre en ce sens à Edouard Herriot, le Président de la Chambre. En cas de refus, la France et l’Angleterre porteront la responsabilité de la guerre qui deviendrait impérialiste ! La France refuse. Le PCF invite alors ses militants au sabotage. Ils ne s’en privent pas et causent la mort de soldats français envoyés au combat avec du matériel qui les lâche en plein milieu de la bataille. Le père de Guy Môquet soutient cette ligne, il est arrêté et emprisonné. Le fils clame haut et fort qu’il reprend le flambeau et continue le combat du père qui, on le voit, n’est pas un combat de résistance, mais de collaboration avec les nazis liés aux staliniens par le pacte. Des tracts sont distribués, voici ce à quoi invite l’un d’entre eux le 27 juillet 1940 : « Les soldats allemands sont vos frères, pactisez, ne vous trompez pas, votre ennemi c’est le grand capital, les trusts de France, d’Angleterre, d’Amérique »… Les tracts distribués par Guy Môquet n’appellent pas à la résistance : ils épargnent les nazis, accablent les capitalistes français, justifient le pacte germano-soviétique, attaquent l’Angleterre et les Anglais, insultent de Gaulle, font de l’URSS le pays de la liberté et de la démocratie. Guy Môquet est arrêté par la police de Vichy le 13 octobre 1940, non pas comme résistant, mais comme communiste stalinien appelant à pactiser avec l’occupant nazi. Il est interrogé, mais pas torturé. Il vit dans le camp sous un régime qui n’est pas concentrationnaire. Le 22 juin 1941, Hitler envahit l’URSS. Fin du pacte germano-soviétique brisé unilatéralement par les nazis. Les communistes changent de stratégie, presque un an après la déclaration de la guerre, ils entrent enfin dans la résistance. Des nazis sont abattus dans les rues. L’occupant organise des représailles et prélève des otages dans les prisons. C’est dans cette configuration que Guy Môquet est fusillé le 22 octobre 1941. Le PCF qui a demandé la reparution de L’Humanité le 20 juin 1940 à l’occupant nazi sous prétexte qu’ils avaient des ennemis communs, (les juifs, les capitalistes, les anglais, la ploutocratie, le parlementarisme, lire le détail dans Juin 40. La négociation secrète de Jean-Pierre Besse et Claude Pennetier), ont eu besoin de se refaire une santé à la Libération – avec l’assentiment du général de Gaulle… Guy Môquet fut un moment idéal dans le dispositif légendaire communiste : ce jeune homme stalinien qui défendait l’union des communistes avec les nazis contre la démocratie parlementaire, autrement dit le contraire de la Résistance, devint la figure emblématique d’une résistance communiste totalement inexistante à cette époque. Il y eut d’autres moments dans cette légende : le PCF fabriqua un faux pour faire croire qu’il avait appelé à la Résistance dès le 10 juillet 1940, « l’appel du 10 juillet » ; il s’intitula « le parti des 75.000 fusillés », alors qu’il y eut au total 4100 fusillés et que tous n’étaient pas communistes ; il présenta fautivement quelques noms de communistes comme résistants de la première heure (Tillion, Guingouin, Havez) alors qu’ils furent de bons soldats du pacte hitléro-stalinien ; etc. « Qu’avez-vous encore contre les communistes ? » me feront savoir nombre de mails ou de courriers que je sais déjà insultants… « Rien ». Rien contre les communistes, mais tout pour l’Histoire. Qu’il s’agisse de Freud et des freudiens, de Sartre et des sartriens, des communistes et de leur saga, le combat contre la légende et les mythes s’effectue moins « contre » que « pour » – en l’occurrence : pour l’histoire. Car le déni de l’histoire constitue et nourrit le nihilisme.
Michel Onfray, novembre 2011
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