Palestine : C’est la guerre.Une guerre d’extermination

Silvia Cattori

Je suis revenue de Palestine, brisée. Non pas parce que je suis une âme faible, ou parce que – à l’aéroport Ben Gourion – les fonctionnaires de police israéliens m’ont fait l’ultime humiliation de me déposséder à jamais (1) de tout mon matériel de travail ; enregistreur professionnel Kudelsky, ordinateur Machintoch, appareil de photo Leica, ainsi que de tout leur précieux contenu.

Je suis revenue brisée de ce que j’ai vu, de ce que j’ai compris de la tragédie vivante dont j’ai été témoin : de la guerre d’extermination raciste qu’Israël mène contre des civils impuissants à se défendre, et que le monde se refuse à voir.

Les Palestiniens sont en grand danger.

Je crois que peu de gens ont pris la vraie mesure des horreurs auxquelles les soldats israéliens se livrent dans ces lieux de torture, dans ces prisons à ciel ouvert que sont Gaza, Naplouse, Balata, Jenin, Tulkarem et dans tant d’autres villages – prisons qui partagent le même sort tragique.

Ce qui se passe en Palestine est bien plus terrible que ce que l’on s’imagine au-dehors, et qu’il est impossible de dénoncer par des images, car Israël veille à la sienne : les soldats israéliens ont l’ordre de ne pas laisser les journalistes et les cameramans se tenir à proximité des lieux où ils commettent des atrocités. Donc ils brutalisent les témoins, les forcent à partir en les menaçant de leur arme, ou même les tuent.

C’est pourquoi, en revenant, j’éprouve de l’écoeurement quand j’entends ce que j’entends. Et ce soir j’ai résolu de sortir de mon trou de silence pour le dire. J’entends, jour après jour, dans les divers médias, des personnages se livrer à des intimidations, proférer des menaces voilées, contre les défenseurs des victimes Palestiniennes.

Ces condamnations d’antisémitisme, nous ne pouvons plus continuer de les supporter. Nous devons avoir le courage de nous rebeller avant que trop de mal soit fait.

Honte à tous ceux qui veulent faire dévier le regard de ce qui se passe en vérité de gravissime en Palestine. Honte à ces hommes et ces femmes qui veulent continuer de jeter une couverture sur les crimes odieux perpétrés par l’Etat d’Israël. Au lieu de condamner la politique criminelle de cet Etat, au lieu de se distancer de sa politique génocidaire.

Qui a entendu les cris de douleur de ces volontaires internationaux, dont certains ont perdu la vie, qui accompagnent les Palestiniens laissés dans la plus grande des solitudes, comme Kelly et Mika à Naplouse et Balata, ou Laura à Rafah, (2) qui disent les horreurs dont ils sont encore présentement les fidèles témoins ?

Quels sont les gouvernements qui finiront par comprendre que l’on ne peut laisser quelques volontaires internationaux défendre seuls, de leurs mains nues, des millions de Palestiniens menacés par les tanks et la sauvagerie de soldats qui exécutent des crimes sur ordre. On se le demande ?

Où sont les organisations humanitaires internationales qui possèdent véhicules tout terrain et grands moyens ? Hormis les équipes de secours palestiniennes épuisées dont je tiens à louer l’héroïsme, nous n’en avons vu aucune agir véritablement sur le terrain où l’armée israélienne opère et où il y a urgence humanitaire.

Par bonheur il y a encore, de par le monde, quelques âmes nobles, toutes croyances et confessions confondues (Chrétiens, Musulmans, Juifs) qui souffrent de cette situation épouvantable et cherchent à agir avant qu’il ne soit trop tard.

Voici ce que m’écrivait aujourd’hui Elias Davidson (3) avec qui j’ai eu de longs entretiens depuis mon retour de Palestine, et qui a, lui, compris le système redoutable que l’armée israélienne a mis en place en Palestine :

« Je comprend l’urgence. Il faut absolument que les Palestiniens obtiennent une protection militaire contre le génocide que les Israéliens leur préparent. C’est urgent. Il faut alerter les gouvernements. La ghettoïsation des Palestiniens est – comme avait été celle des Juifs – la première phase de l’extermination. Car les sionistes – contrairement aux sud-africains – ne veulent pas exploiter la main d’oeuvre arabe, mais se débarrasser purement et simplement d’elle. La politique sioniste est bien plus proche de celle des nazis que de celle qu’avait pratiquée la minorité blanche en Afrique du Sud (…) »

Nous devons faire intervenir les gouvernements pendant qu’il est encore temps.

28 janvier 2004

silviacattori@yahoo.it

(1) La police des frontières israélienne a retenu mon matériel de travail – sans aucune justification, aucune raison – après qu’il ait passé sans problème tous les services de contrôle de sécurité. Ils m’ont dit que je pouvais partir tranquillement tout en me promettant qu’ils m’enverraient ces effets, le lendemain. Malgré les efforts de ma compagnie, je n’ai plus aucune chance de récupérer mes biens. Ce qui m’est arrivé est chose courante et n’est pas pour nous étonner.

(2) Nous avons traduit et fait circuler leurs écrits. Voir les sites :

www.ism-france.org

www.ism-suisse.org

(3) Elias Davidson, compositeur, réside en Islande.