Révolte en guyane
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Catégorie : Global
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Un long article publié dans le fanzine « Spasme » revient sur le mouvement qu’a connu la Guyane au printemps 2017 :
Révolte en Guyane : La possibilité d’une île ?
Encagoulés de tête des manifs, blocages, syndicat de combat, grève générale et port spatial, mélange d’images pour cocktail équatorial, bizarre. Entre mars et avril 2017, la Guyane est paralysée par une lutte sociale d’une ampleur historique et qui plus est, victorieuse. Réjouissant non ? Le mouvement est toutefois assez éloigné de l’image qu’on peut se faire d’une grève générale…
On peut lire cet article dans a version papier du fanzine ou sur le blog de Spasme : https://spasme.noblogs.org/2017/08/30/revolte-en-guyane-la-possibilite-dune-ile%e2%80%89/
Il est complété par une chronologie des événements (février à mai 2017) uniquement disponible sur le blog : https://spasme.noblogs.org/2017/07/26/chronologie-de-la-revolte-en-guyane-au-printemps-2017/
EXOTISATION DES LUTTES : PLUS LA VIOLENCE EST LOINTAINE, PLUS ELLE SERAIT ACCEPTABLE ?!!
« L’exotisation est un processus de construction géographique de l’altérité propre à l’Occident colonial, qui montre une fascination condescendante pour certains ailleurs. » Jean-François Staszak [10] .
L’exotisation des luttes est un travers courant. Cela consiste à ne pas considérer les luttes de la même façon selon la proximité culturelle ou la distance à notre propre point de référence, la démocratie occidentale. Comment réagir à la valorisation d’une lutte dans tel ou tel pays dits du « sud » y compris dans ses dimensions dites « violentes », quand les mêmes personnes condamnent avec la plus grande fermeté des pratiques similaires en fRance, sous l’argument de la violence ? [11]
J’ai déjà vu des personnes enthousiastes de telle lutte en Amérique du Sud, où les gens faisaient des barricades enflammées pour bloquer les routes, pour être entendu.es et établir un rapport de force avec les autorités. Mais lorsque, dans le mouvement social du CPE, après les manifestations légales, des cortèges sauvages parcouraient la ville pour exprimer une rage trop contenue et encadrée par les organisations officielles, renversaient des poubelles sur les routes et y mettaient le feu, ces mêmes personnes criaient aux casseurs, à la violence gratuite et au vandalisme et dépolitisaient ainsi ces pratiques de luttes. Replacées dans une démocratie occidentale comme la nôtre, certaines formes de luttes deviennent sûrement moins exotiques.
L’exotisation est problématique en soi dans ce qu’elle suppose de vision post-coloniale du monde. C’est une vision paternaliste et raciste qui place la société blanche occidentale sur un piédestal, comme l’incarnation de la meilleure civilisation existante (Progrès, Démocratie, Émancipation, Liberté…) et qui exotise tous les autres modèles de société comme « cultures », les excluant par là de la sphère politique [12] .
[10] Jean-François Staszak, Qu’est-ce que l’exotisme, 2008, département de géographie, université de Genève
[11] Il ne s’agit pas de dire que toutes les pratiques de luttes déployées dans le monde seraient opportunes ici. Mais si elles ne le sont pas, c’est pour des raisons de stratégies, de contexte politique… et non pas parce qu’elles seraient violentes.
[12] Dans la même logique, certain.es anarchistes exotisent les révoltes des quartiers populaires avec une « fascination condescendante » pour leur côté insurrectionnel. Souvent, ils et elles retiennent uniquement les pratiques employées (incendies de voitures, de bâtiments publics, …) sans les contextualiser et sans se positionner. Par exemple, pendant les émeutes de Villiers-le-Bel en 2007, lors d’une manifestation organisée en soutien, j’ai vu un jeune homme blanc issu de classe moyenne supérieure porter une pancarte qui disait « Ils [la police] tuent nos frères, c’est la guerre ». Par le mot « frères », la personne semblait se retrouver dans une même réalité de vécu que les émeutier.es. Ou en tout cas pensait qu’une telle situation de révolte (à laquelle il ne participait pas) unit tout le monde dans une sorte de communauté de lutte qui transcenderait tous les rapports structurels.
https://www.nantes.indymedia.org/articles/34072
ben justement cet article est assez critique de l'”exotisation” qui a subjugué les militants à propos du mouvement en Guyane.