Russie, pakistan, chine, etc. : catastrophes naturelles ou nature catastrophique du capitalisme ?
Catégorie : Global
Thèmes : Ecologie
Cet été, de violentes catastrophes se sont abattues sur les populations partout dans le monde: les flammes ont embrasé la Russie et le Portugal, des moussons dévastatrices ont noyé le Pakistan, l’Inde, le Népal et la Chine () sous la boue, des inondations ont également frappé l’Europe de l’Est et une partie de l’Allemagne. La liste des catastrophes de l’été 2010 est encore longue.
La multiplication des ces phénomènes et leur gravité croissante n’est pas le fruit du hasard, ni une triste fatalité contre laquelle on ne peut rien et dont personne n’est blâmable. De l’origine à la gestion des catastrophes, le capitalisme et ses lois fondamentales portent une très lourde responsabilité.
Le capitalisme détruit la planète
Selon l’avis de nombreux scientifiques, le réchauffement de la planète joue un rôle important dans la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes, comme les canicules, les pluies diluviennes, les cyclones, etc.: “Ce sont des événements qui sont appelés à se reproduire et à s’intensifier dans un climat perturbé par la pollution des gaz à effet de serre” (). Et pour cause, de 1997 à 2006, alors que la température de la planète ne cessait d’augmenter, le nombre de catastrophes, de plus en plus intenses, a augmenté de 60 % par rapport à la décennie précédente. Comme un symbole de ce réchauffement global de la planète, au début du mois d’août, un gigantesque iceberg de 250 km² s’est détaché de l’Océan arctique, réduisant, pour la quatrième année consécutive, la taille du glacier à moins de 4 millions de km². Cet été, des records de chaleur ont d’ailleurs été enregistrés, comme le stupéfiant 53,5 °C du 26 mai au Pakistan: “La température moyenne de la planète montre, selon les relevés et analyses de l’équipe de James Hansen au Goddard Institute for Space Studies (Nasa), que les six premiers mois de l’année 2010 détiennent le record de chaleur depuis cent trente ans” .
Les scientifiques des compagnies pétrolières, les politiciens et les chroniqueurs de télévision peuvent s’agiter en déclarant que le réchauffement planétaire n’est pas le résultat d’une pollution massive de l’atmosphère, l’ensemble des recherches scientifiques sérieuses démontrent une corrélation évidente entre le rejet des gaz à effet de serre, le réchauffement climatique et la multiplication des catastrophes naturelles. Cependant, les scientifiques se trompent lorsqu’ils affirment qu’un peu de volonté politique des gouvernements est en mesure de changer les choses. Le capitalisme est incapable de limiter les rejets de gaz à effet de serre car il faudrait alors s’opposer à ses propres fondements, ceux du profit, de la production à moindre frais et de la concurrence. C’est pour répondre à ces lois que la bourgeoisie pollue avec, entre autres exemples, son industrie lourde, ou qu’elle fait parcourir à ses marchandises des milliers de kilomètres.
La responsabilité du capitalisme dans l’ampleur de ces catastrophes ne se limite d’ailleurs pas à la pollution atmosphérique et au dérèglement climatique. La destruction méthodique des écosystèmes, à travers, par exemple, la déforestation massive, le stockage des déchets dans les zones naturelles de drainage, ou l’urbanisation anarchique, parfois jusque dans le lit des rivières asséchées et au cœur de secteurs notablement inflammables, a fortement aggravé l’intensité des catastrophes.
Les incendies en Russie manifestent les contradictions du capitalisme
Alors que nous écrivons ces lignes, plusieurs centaines de feux font encore rage dans une large région autour de Moscou, brûlant des centaines de milliers d’hectares de forêt, de tourbière, de zone agricole, urbaine, etc. Le feu aurait déjà tué plus de 50 personnes et laissé des milliers d’autres sans abri (). Plusieurs jours, une épaisse fumée, dont les conséquences sur la santé ont été catastrophiques au point de doubler le taux quotidien de mortalité, a envahi la capitale. Et pour faire bonne mesure, des risques nucléaires et chimiques importants menacent les populations bien au-delà des frontières russes, en particulier à cause des incendies sur des terres contaminées par l’explosion de la centrale de Tchernobyl, des sites nucléaires eux-mêmes menacés par les flammes et des entrepôts d’armes et de produits chimiques plus ou moins oubliés dans la nature, qui n‘ont d’ailleurs curieusement pas bénéficié du même engouement médiatique.
Ces incendies ont été l’occasion d’étaler toute l’incurie de la bourgeoisie et l’étiolement de la société capitaliste. En effet, l’un des aspects les plus frappants de ces événements est l’incapacité de l’Etat russe à maîtriser les incendies. Le Premier ministre Vladimir Poutine peut jouer les super héros devant les caméras de télévision en pilotant un bombardier d’eau, ce désastre est le résultat de plusieurs décennies de politiques typiquement bourgeoises, à la fois cynique et aveuglées par le profit.
Un élément essentiel pour comprendre le rôle de la bourgeoisie dans l’envergure des incendies est l’état stupéfiant d’abandon des forêts. La Russie est un pays immense doté d’un parc forestier très important et dense, nécessitant un soin particulier pour circonscrire rapidement les débuts d’incendies afin d’éviter qu’ils ne se répandent jusqu’à devenir incontrôlables. Or, beaucoup de massifs forestiers russes ne sont même pas dotées de voies d’accès, si bien que les camions de pompiers sont incapables d’atteindre le cœur de la plupart des incendies. La Russie compte d’ailleurs sur seulement 22 000 pompiers, soit moins qu’un petit pays comme la France, pour lutter contre les flammes, et sur les gouverneurs régionaux, notablement corrompus, qui préfèrent employer les maigres moyens dont ils disposent pour la gestion des forêts à l‘achat de voitures de luxe, comme l‘ont révélé plusieurs scandales.
Le même cynisme vaut pour les fameux feux de tourbière, zones dont le sol est constitué de matière organique en décomposition particulièrement inflammable () : en plus de laisser les tourbières à l’abandon, la bourgeoisie russe a favorisé la construction d’habitations sur ces zones alors que des incendies avaient déjà fortement sévi en 1972. Le calcul est bien simple: sur ces secteurs dangereux, les promoteurs immobiliers ont pu acheter des terrains, déclarés constructibles par la loi, à un prix dérisoire. C’est de cette manière que le capitalisme transforme des phénomènes naturels humainement maîtrisables en véritables catastrophes.
Au Pakistan, des millions de sinistrés sont victimes des luttes impérialistes
Depuis le mois de juillet, des pluies torrentielles s’abattent sur le Pakistan (), occasionnant des inondations majeures, des glissements de terrain, des milliers de victimes, plus de 20 millions de sinistrés et des dégâts matériels considérables. La famine et la propagation de maladies, notamment le choléra, sont venues empirer une situation déjà désespérée. Pendant plus d’un mois, au milieu de cet horrible tableau, la bourgeoisie pakistanaise et son armée n’ont fait qu’étaler une incompétence et un cynisme hallucinants, accusant l’implacabilité de la nature, alors que, comme en Russie, entre urbanisation anarchique et services de secours impuissants, les lois du capitalisme apparaissent comme l’élément essentiel pour comprendre l’ampleur de la catastrophe.
Mais un aspect particulièrement écoeurant de cette tragédie est la manière dont les grandes puissances impérialistes essayent de tirer profit de la situation, au détriment des victimes, en utilisant les opérations humanitaires comme alibi. Les Etats-Unis soutiennent en effet le gouvernement très contesté de Youssouf Raza Gilani et ont très rapidement profité des événements pour déployer un important contingent militaire constitué de porte-hélicoptères, de navires d’assaut amphibie, etc. Au nom de la lutte contre le terrorisme , les Etats-Unis ont quadrillé le Pakistan et freinent toujours l’arrivée de “l’aide internationale” venant d’autres pays, “aide humanitaire” elle aussi constituée de militaires, de diplomates et d’investisseurs sans scrupules.
Comme pour chaque catastrophe d’ampleur, tous les moyens sont mis en œuvre par tous les Etats pour faire valoir leurs intérêts impérialistes. Parmi ces moyens, la promesse de dons est devenue une opération systématique: tous les gouvernements annoncent officiellement une manne financière substantielle qui n’est officieusement accordée qu’en échange de la satisfaction des ambitions des donateurs. Par exemple, à ce jour, 10 % seulement de l’aide internationale promise en janvier 2010 après le tremblement de terre à Haïti a été effectivement versée à la bourgeoisie haïtienne. Et le Pakistan ne fera bien sûr pas exception à la règle ; les millions promis ne seront versés qu’à titre de commission d’Etat contre services rendus.
Le capitalisme et la bourgeoisie sont bien directement responsables de la multiplication et de l’ampleur meurtrière des catastrophes climatiques. La classe ouvrière ne doit se faire aucune illusion sur la capacité de la classe dominante à protéger l’humanité contre les phénomènes naturels violents: ce n’est pas en substituant aux cliques gouvernementales en place des dirigeants plus “verts”, en espérant des réformes écologiques, que nous sauveront la planète et l’humanité du chaos environnemental. Les fondements du capitalisme, la recherche du profit, la concurrence, etc., sont, à tous les niveaux, au cœur de la problématique. Il nous faut les détruire.
Courant Communiste International
En plus des inondations et des coulées de boues dans plusieurs provinces, la Chine a subi, en prime, une gigantesque marée noire liée à l’explosion d’un oléoduc.
Jean-Pascal Van Ypersele, vice-président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), AFP.
Sylvestre Huet (journaliste scientifique), Libération, 12 août 2010.
Ces chiffres sont à lire avec beaucoup de précautions car le gouvernement russe est passé maître dans l’art de la désinformation. Le mensonge sur les chiffres n’est d’ailleurs pas une spécialité slave puisque, d’après plusieurs témoignages, l’inondation dans le Var, que nous avons traité dans notre précédent numéro, aurait fait bien plus de victimes et de dégâts que ceux communiqués par le gouvernement français.
Les autorités russes en sont réduites à attendre le gel de l’hiver pour éteindre les incendies de tourbière en profondeur.
L’Afghanistan, la Chine, l’Inde et le Népal ont également été touchés de manière importante.
Le gouvernement pakistanais, dans une situation particulièrement instable, a rapidement averti de l’imminence d’une insurrection des talibans réfugiés à la frontière de l’Afghanistan, pour justifier de nombreuses mesures répressives. A la fin du mois d’août, en guise d’insurrection, une bande de pieds nickelés islamistes, se réclamant d’Al Qaïda, a (enfin !) attaqué une obscure milice à la solde du gouvernement, causant deux morts.
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