ETC Group nous parle aujourd’hui d’une nouvelle cuvée de technologies du
génie
génétique, présentées comme une solution biosécuritaire à la
dissémination non
désirée des transgènes de cultures, arbres et plantes pharmaceutiques GM. En
pratique, la commercialisation de ces technologies permettra aux
multinationales des
semences d’affermir leur emprise sur les semences exclusives et de
gruger les droits
des agriculteurs.
Le communiqué d’une trentaine de pages examine d’abord le projet
Transcontainer de
l’Union européenne, qui développe pour l’Europe des arbres et cultures
GM que l’on
peut « confiner biologiquement » grâce à une « stérilité transgénique
réversible ».
Issu du 6e Programme-cadre de l’UE, ce projet de trois ans étaye
l’objectif de
coexistence – le principe controversé de la coexistence pacifique entre
cultures GM et
non GM – pour convaincre la population d’accepter les cultures GM.
« Nous savions que l’industrie des semences ne renoncerait jamais à une
technologie
aussi lucrative que Terminator, lance Hope Shand, d’ETC Group, mais
c’est une
honte que l’Union européenne consacre des deniers publics à la mise au
point de
méthodes de stérilisation génétique des semences. » Elle ajoute : « Le
financement du
projet Transcontainer par l’UE est d’autant plus troublant que le
Parlement européen
s’est fermement opposé à Terminator l’an dernier seulement. » Le Parlement
européen a adopté en mars 2006 une résolution pressant les délégués
européens à la
rencontre de la CDB (Convention des Nations unies sur la diversité
biologique) à
Curitiba, au Brésil, de maintenir le moratoire de fait sur Terminator. À
la rencontre,
les États ont unanimement réaffirmé et renforcé le moratoire qui recommande
d’interdire les essais en champ ou la commercialisation de semences
génétiquement
modifiées pour produire des graines stériles à la récolte. GURT
(technologies de
restriction génétique) est le terme utilisé par les Nations unies pour
parler de
Terminator.
Les défenseurs du projet Transcontainer allèguent que son but n’est pas
de limiter
l’utilisation des semences, mais bien de confiner les transgènes,
ajoutant que la
technologie à l’étude est différente de Terminator en raison du
caractère réversible de
la stérilité – les semences pourront redevenir fertiles, sans doute sous
l’action d’un
produit chimique quelconque. Hope Shand rétorque : « Un scénario qui
force les
agriculteurs à acheter un produit chimique pour rétablir la viabilité
des semences
crée une situation de monopole permanent pour l’industrie semencière.
Même si ces
semences-zombies n’ont pas pour but exprès de limiter l’utilisation des
semences, elles
obligent en fait les agriculteurs à payer chaque année le privilège de
rétablir la
fertilité de leurs semences. Les semences-zombies ne sont pas plus
acceptables que
les semences-suicide. La technologie Terminator ne sera jamais sûre ni
acceptable,
quelle qu’en soit la forme », conclut Shand.
Le rapport d’ETC examine aussi les nouvelles recherches sur les technologies
d’excision des gènes (des méthodes moléculaires pour extraire les
transgènes à un
stade de la vie de la plante). Qualifiée d’exorciste par ETC Group,
cette technologie est
à la fois une stratégie de bioconfinement et un moyen de limiter l’accès au
germoplasme exclusif. En principe, l’excision de l’ADN peut être activée
à n’importe
quel stade de développement – avant que la plante GM fleurisse ou
produise du
pollen, par exemple, ou avant qu’elle devienne aliment. Le processus
d’excision peut
être activé par un stimulus chimique ou lié à l’environnement externe.
On peut aussi
faire survenir l’excision à un stade précis de la vie de la plante.
Kathy Jo Wetter
d’ETC Group explique : « Sous sa forme actuelle, l’exorciste est loin
d’être une
stratégie de bioconfinement à toute épreuve – il n’est pas efficace à
100 %. Même s’il
ne peut confiner entièrement les transgènes, il peut cependant servir de
mécanisme
biologique d’application des brevets en limitant l’accès à des traits
exclusifs. »
Enfin, le communiqué d’ETC Group examine des méthodes de bioconfinement
extrêmes – des méthodes moléculaires fondées sur des « gènes de létalité
conditionnelle » capables d’exterminer les plantes et leur ADN transgénique
advenant l’échec d’autres stratégies de bioconfinement. L’idée, c’est
qu’une plantekamikaze
puisse être détruite à l’activation du gène mortel – sur application d’un
produit chimique externe, par exemple – en emportant avec elle le trait
GM. Si le
gène mortel n’est pas activé, la plante survit et peut transmettre ses
gènes étrangers à
la génération suivante. De toute évidence, ces plantes-kamikazes sont
conçues pour
servir de stratégie de bioconfinement de dernier recours.
« Il y a aussi une autre possibilité, plus sinistre, suggère Silvia
Ribeiro d’ETC. C’est
que l’entreprise qui détient un brevet puisse télécommander le harakiri
des plantes
cultivées sans concession de licence. On a déjà vu des sociétés de
biotech recourir à
des tactiques sordides pour dépister les agriculteurs soupçonnés de
contrefaçon de
brevet. Dorénavant, les sociétés pourraient utiliser la menace de
l’activation du gène
mortel ou tout simplement l’activer pour confirmer ou infirmer leurs
soupçons. »
Ribeiro conclut : « Semences-zombies, semences-exorcistes et
plantes-kamikazes : ce
sont toutes des technologies bancales incapables de prévenir la
dissémination non
désirée des transgènes de cultures GM. Mais si on parvient à convaincre
les pays que
le confinement biologique est possible à partir de l’une ou l’autre – ou la
combinaison – de ces techniques, on ouvre toute grande la porte à de
nouveaux
marchés pour les plantes biotechnologiques, dont les cultures GM et les
arbres
cultivés comme biocombustible. Le résultat : des subventions encore plus
généreuses
aux multinationales et un risque décuplé de contamination transgénique. »
Les pays réunis à Rome à la Commission des ressources génétiques pour
l’alimentation et l’agriculture de la FAO envisagent l’adoption d’un
code d’éthique en
biotechnologie. « Si on avait besoin de preuves pour se convaincre de
l’urgence
d’adopter un code d’éthique en biotechnologie, on vient de les trouver
avec les
semences-zombies et les semences-suicide! » s’écrie Pat Mooney d’ETC Group.
Les organismes de la société civile réunis à Berlin (du 18 au 21 juin)
pour le 2e Forum
européen sur le développement rural durable doivent étudier la
possibilité d’exiger
que la Commission européenne cesse de financer la recherche sur les
semenceszombies,
notamment en raison de ses répercussions dangereuses pour le 1,4 milliard
de personnes qui ont besoin des semences prélevées à la ferme pour survivre.
Le rapport d’ETC Group conclut avec des recommandations sur ces GURT à
double
usage – de nouvelles techniques de modification génétique conçues à la
fois pour
confiner les transgènes et limiter l’accès au germoplasme exclusif. Le
SBSTTA
(Organe subsidiaire chargé de fournir des avis scientifiques, techniques et
technologiques) de la CDB qui se réunira à Paris, en France, du 2 au 6
juillet 2007, doit
recommander que les pays participant à la 9e Conférence des Parties à la
CDB (à
Bonn, en Allemagne, du 19 au 30 mai 2008) renforcent le moratoire des
Nations unies
sur Terminator en préconisant l’interdiction de cette technologie.
Pour plus d’information
ETC Group (Carrboro, C.N., É.-U.)
Hope Shand
Kathy Jo Wetter
hope@etcgroup.org
kjo@etcgroup.org
Tél. : +1 919 960-5223
ETC Group (Mexico)
Silvia Ribeiro
silvia@etcgroup.org
Tél. : +52 5555 6326 64
ETC Group (Ottawa, Canada)
Pat Mooney
etc@etcgroup.org
Cellulaire : +1 613 2610688 – en Europe jusqu’au 15 juin
ETC Group (Montréal, Canada)
Jim Thomas
jim@etcgroup.org
Tél. : +1 514 516-5759