CPE, CNE, LOI DE PROGRAMME POUR LA
RECHERCHE, LOLF… C’EST L’ASSERVISSEMENT DU
TRAVAIL ! NOUS DEMANDONS LE RETRAIT DE
CES MESURES

Déclaration de la Plateforme « Indépendance des
Chercheurs », 25 Mars 2006

,
indep_chercheurs@yahoo.fr

Faisons converger l’ensemble de nos revendications !
Dans sa déclaration du 5 mars dernier,
,
notre collectif avait demandé un report du vote parlementaire sur l’actuel
projet de loi de programme pour la recherche. Nous ne pouvons que
confirmer notre déclaration et demander le retrait de ce projet de loi,
de la LOLF et des mesures récentes (CPE, CNE) mettant en cause les
droits des travailleurs et notamment ceux des plus jeunes.
Un ensemble qui ne manquerait pas de s’appliquer à la recherche
française dans le cadre de la prétendument « nouvelle » loi.
Aujourd’hui, l’enjeu essentiel réside dans la garantie de
l’indépendance des scientifiques et de l’exercice de leurs
missions dans la durée sans ingérence d’intérêts privés.
Le « modèle américain » bien vieillot sur lequel on voudrait
s’aligner avec la « nouvelle » ( ????) loi sur la recherche
traverse une crise sans précédent qu’on ne peut pas
valablement ignorer.

Comme nous l’avons discuté en détail dans notre précédente
déclaration, le projet de loi sur la recherche a été présenté au
moment même où : a) une crise sérieuse des instances
dirigeantes du CNRS a conduit à la démission de son
Président, à un changement de Directeur Général et à la fin
des fonctions d’un Directeur Scientifique Général dont les
missions sont reprises par le nouveau Directeur Général;
c’est un dénouement partiel de la spirale de bureaucratisation
des deux dernières décennies ; b) le jugement en appel a mis
en évidence la déroute des experts du procès d’Outreau, parmi
lesquels se trouve entre autres un professeur des Universités
directeur de laboratoire et responsable pédagogique d’un
important diplôme universitaire qui forme notamment des
magistrats et des officiers de police judiciaire ; ce qui, de
notre point de vue, fournit matière à réflexion sur le fonctionnement
des coupoles scientifiques et de certains groupes professionnels;
c) l’opinion publique a pu découvrir l’affaire « coréenne », mais
en réalité internationale, des résultats falsifiés sur les cellules
souches humaines que la revue américaine Science
avait publiés à deux reprises et, en même temps, d’autres
affaires de falsification de résultats scientifiques publiés dans
des revues britanniques et américaines et impliquant des
équipes de plusieurs pays bénéficiant de financements divers ;
il s’agit d’une crise sans précédent d’un fonctionnement basé
sur le pouvoir discrétionnaire de quelques « sommités » et le
« lobbying » à l’échelle internationale. Ces faits, et bien d’autres,
dévoilent un sérieux problème de fond que le Parlement
n’a, ni constaté, ni analysé. Il ne nous semble pas qu’on puisse
valablement promulguer une loi dans de telles conditions.

MOBILISONS-NOUS POUR OBTENIR LE RETRAIT DES
LOIS SUR LA RECHERCHE ET SUR LES CONTRATS PREMIERE
ET NOUVELLE EMBAUCHE, ET DE LA LOLF !

Lorsque, début 2004, une surprenante convergence s’était manifestée
pour réclamer une nouvelle loi sur la recherche ignorant les acquis
de la loi en vigueur depuis 1982 et de celle de 1984 sur l’éducation,
nous avons été quasiment les seuls à nous y opposer. Notre collectif
a maintenu cette position, estimant que rien de positif ne pourrait sortir
d’une loi élaborée dans la situation actuelle, et s’est bien gardé de
presser le gouvernement à présenter son projet de loi. Il nous semble
que les faits nous donnent largement raison. La coïncidence dans le
temps de cette loi « nouvelle » sur la recherche avec celles de casse
du Code du Travail (Contrats Nouvelle Embauche et Première Embauche)
n’a rien de fortuite : ces lois s’inscrivent dans le cadre d’une
politique globale, en France, en Europe et dans le monde.
Elles auront notamment pour résultat d’instaurer la précarité dans
la recherche, de démanteler ses structures, d’ouvrir la voie à
sa délocalisation et au dumping social… La précarité des jeunes sera
également utilisée comme une arme contre les « moins jeunes ».
C’est donc une réponse globale qu’il faut opposer à
l’ensemble de cette politique.

CONTRE LA PRECARITE ET L’EMBRIGADEMENT :
« MANAGEMENT » STOP

Deux topiques fort peu scientifiques se sont répandus au
cours des deux dernières décennies. Le premier, reprenant
de vieux clichés, porte sur le caractère prétendument « stimulant »
de la précarité d’emploi : on rendrait un service aux jeunes
chercheurs en leur imposant des contrats de durée limitée, avec
des droits exigus et sous la coupe de personnes influentes.
Il s’agirait, semble-t-il, d’encourager la « productivité ». On ne
voit point en quoi, mais force est de constater que dans la
pratique le jeune chercheur ainsi recruté devient une sorte
d’OS confiné dans des activités sans emprise sur le programme
de recherche global et à faible qualification par rapport au métier
qu’il est censé exercer. Le deuxième topique tend à marginaliser
la créativité scientifique et à nier le rôle du travail original et
de terrain, au bénéfice de tâches de « direction », « gestion »,
« coordination », « administration »… qui se voient accorder la
primauté. On entend même dire que, dans la recherche de notre
époque, « l’important est d’être un bon meneur d’hommes,
de savoir faire travailler… »
. Cette conception conduit à
l’asservissement pur et simple du travail intellectuel et ses effets
sont très négatifs. Elle instaure une autre forme de précarité :
le créateur et le professionnel compétent se trouvent exclus des
cercles décisionnaires et peuvent à tout moment être dépouillés
du fruit de leur travail et de leurs acquis professionnels par un
« gestionnaire ». Un travail de recherche peut être arrêté ou
bloqué de façon autoritaire pour des raisons étrangères à sa
valeur réelle et à l’intérêt général. Les deux formes de précarité
(emploi d’une part, prérogatives professionnelles de l’autre)
sont complémentaires et tendent à se répandre.

Nous pensons qu’il est nécessaire et urgent d’opérer un retour
aux sources, de façon à rétablir une réelle indépendance des
chercheurs, l’accès effectif des créateurs scientifiques et techniques
aux prises de décisions au plus haut niveau, la stabilité d’emploi
garantissant la possibilité d’effectuer un travail dans la durée…

Pour y parvenir, il est impératif de juguler la « course au management »
qui s’était développée inspirée par l’idéologie officielle d’un
« modèle d’entreprise » d’autres pays, vétuste et en crise depuis
longtemps. L’ensemble des tendances négatives risque de
s’aggraver avec la mise en application de la LOLF (loi
organique de 2001 relative aux lois de finances), loi de renforcement
des pouvoirs discrétionnaires
à tous les échelons des
hiérarchies. C’est pourquoi notre action tend également à
l’abrogation de cette loi.

Ces problèmes ne sont pas spécifiques au monde de la recherche :
on les retrouve de plus en plus dans l’ensemble du monde
du travail. Mais la stabilité d’emploi obtenue par les scientifiques
avec les lois de 1982 et 1984 est devenue une cible de choix.
Déjà, pour les doctorants, ces lois qui stipulent que la préparation
du doctorat constitue un travail n’ont jamais été vraiment appliquées
et c’est l’une des sources de précarité dans la recherche. Les
lois de 1982 et 1984 ne prévoient, non plus, les statuts précaires
« post-doctoraux » qu’on a vu proliférer au cours des années
récentes. Ce n’est pas par une « nouvelle loi » qu’il sera
possible de mettre fin à cette précarité mais par une réelle
application des progrès sociaux que comportent les lois de 1982
et 1984.

NOUS DEMANDONS DONC LE RETRAIT DE LA LOLF,
DU PROJET DE LOI DE PROGRAMME POUR LA RECHERCHE,
DU CPE ET DU CNE QUI ENTRE AUTRES MENACENT
GRAVEMENT L’EMPLOI SCIENTIFIQUE, ET LA MISE EN PLACE
D’UNE REFLEXION ACTUALISEE, OUVERTE ET TRANSPARENTE,
SUR LES PROBLEMES DE LA RECHERCHE.

Indépendance des Chercheurs (attn. Luis Gonzalez-Mestres)
17 rue Albert Bayet, appt 1105 , 75013 Paris

Infos : ,
Port. 0620601187