Convoi « cap vers la cop » etape 3 – la flèche ne se laisse pas abattre
Publié le , Mis à jour le
Catégorie : Local
Thèmes : Contre-sommetsEcologieMslc21Resistances
Lieux : AngersLa flècheSeiches-sur-le-loir
+++++ Convoi « cap vers la cop » Etape 3 – La flèche ne se laisse pas abattre
Départ d’Angers. Dans une brume opaque, on avance à travers les zones commerciales, les ronds points et les échangeurs, jusqu’à s’arrêter devant une grille soudée. Derrière se dessine la silouhette d’une grande bâtisse. On empile les vélos sur le bas-coté . Un barnum est monté avec une banderole « Respect du droit d’asile – réouverture de la Pignonnière ». Une bande d’angevins, d’âge mûr mais d’une vivacité intacte, nous servent le café. L’un d’eux nous explique au mégaphone l’histoire de cette maison et de leur combat au long cours aux cotés des migrants : lui et ses ami-e-s s’arrangent très régulièrement pour ouvrir l’accès à des immeubles laissés à l’abandon et fermés. Ils s’adonnent joyeusement à ces pratiques, que la loi juge répréhensible mais qu’ils estiment néanmoins justes, et ce pour accueillir des réfugiés, majoritairement africains – soudanais, somaliens, tchadiens, érythréens, entre autre… Autant de demandeurs d’asile qui seraient autrement laissés à la rue malgré les engagements de l’Etat français à les loger. Les occupations restent précaires et après quelques mois de répit et de procédures juridiques, les migrants se font généralement expulser un sale matin par la police. Nos compères angevins se remettent alors en selle pour une nouvelle ouverture. La Pignonnière, devant laquelle nous marquons un arrêt ce matin, fait partie de ces bâtiments expulsés et qui est resté vide ensuite. Ils projettent sans s’en cacher de l’occuper une nouvelle fois et sont content-e-s que le passage du convoi donne un coup de projecteur à cette envie. On leur souhaite de parvenir à leurs fins. Angers n’étant pas loin de la Zad, on propose aussi de venir leur filer des coups de main au besoin.
Après quelques tronçons de route nationale hier, le choix du jour est la « mini-route de campagne ». Vous savez, ces voies délaissées qu’il ne viendrait pas à l’idée au commun des mortels d’emprunter pour se rendre de Nantes à Paris, mais que nous avons la chance de découvrir tranquillement aujourd’hui. Quand on croise du monde dans les villages, que l’on capte un geste de main ou un regard curieux, des cyclistes parmi nous se détachent et vont causer un peu. L’escorte de gendarmes à moto et voitures ne sert pas à grand chose mais s’obstine à nous suivre.
A midi, la salle omnisport de Seiches sur Loire nous ouvre ses portes. L’atelier vélo se déploie. Au 3e jour de route, tout le monde tient à être bien graissé et bien gonflé. Devant la salle, après le repas, un habitant de Seiches prend la parole pour nous informer d’une lutte que lui et d’autres mènent contre la privatisation de 500 hectares de forêt publique, que le conseil général souhaiterait vendre au plus offrant. Ils font tout pour maintenir leur bois en tant qu’espace gratuit et ouvert. Un paysan de la Confédération paysanne, qui offrait un peu plus tôt à la cantonade des bouchons de cognac avec un grand sourire, explique qu’il monte à Paris pour une réunion du syndicat le lendemain : il promet d’appuyer notre arrivée en île de France malgré les interdictions.
La balade de l’après-midi est splendide, pleine de grands bois jaunis et arrosée de lumière cristalline. On traverse des villages avec des châteaux, de vieux fours à briques et des champs de pommiers. Au passage de la frontière, des gendarmes sarthois en nombre prennent le relais de ceux du Maine et loire, et nous rappellent que malgré les moments de grâce bucolique, nous ne sommes pas seulement en train de faire du cyclotourisme.
Notre soirée à la Flèche a été l’objet d’un ardent bras de fer local. Les militants du comité avaient demandé à obtenir un complexe sportif pour nous héberger au sec, mais M. Chauveau, député-maire PS et pro-aéroport s’y est fermement opposé. Nos hôtes ont pu tout juste obtenir in-extremis de louer une salle pour la réunion publique du soir. Dans ce contexte, un couple de paysans a décidé d’accueillir les véhicules et la logistique du convoi chez eux, en tenant le lieu secret jusqu’au dernier moment pour éviter les pressions. Et pour résoudre les questions de logement, le comité a lancé un appel aux fléchoises et fléchois pour un hébergement à domicile. Nos hôtes sont fiers de pouvoir annoncer avoir trouvé 180 lits chez l’habitant en un rien de temps. Un beau pied de nez. Dans la grande salle de conférence, pendant qu’un vin chaud nous est offert, une jeune fille coiffée d’un chapeau nous dispatche chez les uns et les autres en nous donnant de petits tickets, et des explications sur les modalités de couchage et les heures de réveil. Ces échappées hors du grand groupe sont autant d’occasions d’échanges plus interpersonels et de récits à partager le lendemain quand on retrouve le reste du convoi.
Après le repas, à 20h30 pétantes, Marylène, notre contact énergique pour cette étape, entre en scène. Elle essaie de couper tant bien que mal les conversations qui se poursuivent aux différentes tablées, un rien indisciplinées. Elle est bientôt rejointe par un groupe de personnes munies de perruques et tambours, qui accompagnent de rugissements et roulements chacune de ses déclarations. Chauveau, le cacique local en prend pour son grade sous les clameurs de la salle. Marylène rappelle l’engagement inébranlable de nombreux flèchois-e-s pour la sauvegarde du bocage nantais ou de sites précieux à proximité, comme la Monnerie, espace aquatique riche d’oiseaux rares. Après un temps de discussion sur la Zad, un de nos hôtes a préparé une intervention sur les raisons pour lesquelles, en aucun cas, le nucléaire ne pourra être considéré comme une solution à la question du réchauffement climatique. Chacun repart ensuite aux 4 coins du bourg.
En ce mardi matin, tout le monde est bien content d’avoir profité d’une nuit au chaud car une pluie battante accompagne le départ de la tracto-vélo. Nous croisons Michel qui va passer la journée assis le volant à la main sur un tracteur sans cabine. Nous le plaignons un peu, nous rigolons et il me dit « cest pas grave dans ces cas-là, moi je voyage dans ma tête et je pense aux tropiques ». Alors c’est parti : direction Le Mans et les tropiques ! Le convoi coulera-t-il ou poursuivra-t-il sa route malgré les aléas climatiques et les ardeurs du ministère de l’intérieur ? Vous en saurez plus demain, au prochain épisode.
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