Révolution en tunisie
Category: Global
Themes: Luttes salariales
I- Le régime du RCD
L’indépendance de la Tunisie et des pays africains après la seconde guerre mondiale a été acquis de haute lutte par les masses au bénéfice des bourgeoisies nationales. Les luttes ouvrières et paysannes ont été subordonnées au nationalisme arabe par les partis « communistes » stalinisés et à cause de la capitulation de la direction de la 4ème Internationale devant le stalinisme et le nationalisme arabe. La lutte pour l’indépendance est restée aux mains de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie.
En 1956, la Tunisie obtient l’indépendance. L’ancêtre du RCD, le Néo Destour dirigé par Habib Bourguiba met fin aux luttes des travailleurs et à la guérilla, interdit les partis ouvriers et fait de l’Islam la religion d’Etat comme inscrit dans l’article premier de la Constitution.
Les nouvelles nations prétendaient rompre définitivement avec le passé colonial grâce à un Etat bourgeois hégémonique sur la société et dirigeant les principaux secteurs économiques. Mais le développement économique basé sur les secteurs nationalisés ne pouvait s’affranchir de la tutelle de l’impérialisme, en premier l’impérialisme français. L’Etat hégémonique et policier se soumettait aux exigences des nations impérialistes.
La dictature ne donnait que très peu de libertés démocratiques et les forces de répression étaient partout. La police politique arrêtait et torturait les opposants. Les partis politiques jugés dangereux pour le régime étaient interdits.
Cependant le régime policier de Ben Ali était soutenu par toutes les grandes puissances. Ben Ali était reçu par les présidences de tous les pays occidentaux. Son parti le Rassemblement Constitutionnel Démocratique appartenait à l’Internationale Socialiste. Les médias français ont révélé certains liens d’affaires et personnels entre les capitalistes français et la dictature.
Les difficultés économiques des travailleurs, des petits paysans et de la jeunesse étaient de plus en plus dures à supporter. La crise économique mondiale de 2008 qui a frappé l’ensemble des travailleurs et de la petite bourgeoisie rendait la situation extrêmement difficile pour la population.
Les conditions de vie difficiles et la quasi absence de droits politiques ont engendré la révolte des masses tunisiennes contre la dictature et le dictateur.
II- L’opposition politique-les organisations politiques
L’UGTT
Le syndicat UGTT est la principale organisation de travailleurs. Sa direction soutient la candidature de Ben Ali en 2004 et 2009.
Conciliante avec le régime du RCD, les luttes des travailleurs étaient entravées et n’aboutissaient pas favorablement. La direction de l’UGTT était un soutien au régime de Ben Ali.
Conciliante avec le gouvernement transitoire après le début de la révolution, elle joue alors un double jeu. Tout en participant ou en organisant des protestations contre le gouvernement transitoire, elle se déclare favorable à son maintien. Elle ne prendra jamais la tête de la révolution sur une base intransigeante.
Conciliante avec les islamistes modérés, elle reconnait le gouvernement islamiste après les élections législatives.
Beaucoup d’espoirs naîtront du pouvoir dont elle dispose sur les évènements. L’UGTT a créé des « Fronts » avec des pans de l’opposition. Certains communistes avançaient qu’elle aurait du prétendre au pouvoir.
Le PCOT
Le Parti Communiste des Ouvriers de Tunisie (PCOT) est un parti marxiste-léniniste persécuté sous le régime du RCD. Il optait pour une « révolution démocratique nationale et populaire » et non une révolution socialiste. Jugé dangereux pour le régime, il était illégal depuis sa fondation. Ses militants ont connus la répression, les arrestations, la torture ou encore l’exil.
Les « démocrates » : Ettajdid, CPR, Ettakatol
Ettajdid est une organisation dite de centre-gauche provenant de l’ancien Parti Communiste Tunisien marxiste-léniniste. Ayant évolué vers un démocratisme bourgeois, elle donne un ministre de l’Enseignement au premier gouvernement transitoire. Cette organisation fait partie d’un « Pôle Démocratique Moderniste ».
Le Congrès Pour La République (CPR) a été fondé en 2001 est une organisation existant exclusivement en France jusqu’à la révolution suite à son interdiction en Tunisie. Son dirigeant Moncef Marzouki est président de la république tunisienne après la révolution. Cette organisation est composée de démocrates bourgeois.
Ettakatol est une organisation dite de centre-gauche. Elle donne un ministre de la Santé publique dans le gouvernement transitoire de Ghannouchi. Elle se répartie les pouvoirs avec le CPR et les islamistes d’Ennahda après les élections législatives de novembre.
Les « islamistes modérés » : Ennahda
Ennahda est une organisation fondée en 1981 sur le modèle des Frères musulmans d’Egypte. Elle est interdite par le RCD dès sa fondation. Ennahda est réprimé par le régime dans les années 1980 et 1990. Dans les années 2000, Ben Ali fait libérer les détenus du parti islamiste encore en prison.
Pendant la révolution, Ennadha veut le retour de l’ordre en Tunisie. Ce parti reçoit le soutien de la bourgeoisie tunisienne et de la petite bourgeoisie ainsi que le soutien des impérialismes français et américain.
Absent de la première période de la révolution, il prendra une emprise sur une partie de la société tunisienne comme garant des intérêts de la bourgeoisie. Ennadha est le principal parti de la contre-révolution.
Les islamistes salafistes
Les fondamentalistes musulmans, complètement absents du début de la révolution, reprennent une activité politique vers la fin de la révolution. Organisant des marches sur des slogans réactionnaires, ils reçoivent le soutien du gouvernement islamiste après les élections législatives. Les salafistes organisent des expéditions punitives dans les expositions artistiques, dans la rue et dans les quartiers ouvriers. Une partie des salafistes a des contacts avec Al Qaïda.
III- La chute de Ben Ali
La révolution tunisienne a été déclenchée par l’immolation par le feu d’un marchand pauvre devant un bâtiment administratif dont les policiers avaient saisis la marchandise à Sidi Bouzig le 17 décembre 2010. Face à cet évènement tragique, de petits commerçants et de jeunes chômeurs manifestent devant la préfecture de Sidi Bouzig. Le 24 décembre, les manifestations de protestation gagnent Bouziane. Elles sont réprimées par la police qui tire sur la foule. La révolte gagne Tunis les jours suivants. Le 28 décembre le président fait une allocution à la télévision et juge « qu’une minorité d’extrémistes et d’agitateurs ait recours à la violence et aux troubles dans la rue est inacceptable. »
En janvier, le mouvement s’étend et prend un caractère politique. La contestation gagne les banlieues de Tunis le 11. Les manifestants scandent : « Ben Ali dégage » et ont des pancartes où ils ont inscrit cette revendication.
Ben Ali intervient pour la deuxième fois à la télévision le 10 et dénonce des « actes terroristes provoqués par des éléments étrangers ». Il promet la création de 300 000 emplois. Le 12 il décrète le couvre-feu à Tunis et sa banlieue. L’armée peut abattre « tout citoyen qui ne se plierait pas aux ordres. » Le 13 Ben Ali fait une troisième allocution à la télévision nationale. Il s’engage à quitter le pouvoir en 2014, promet la liberté de la presse, annonce une baisse des prix et ordonne la fin des tirs contre les manifestants. Pendant son discours à la télévision l’armée fait feu sur une manifestation à Tunis et tue 13 personnes.
Le 14 janvier à Tunis, les manifestants veulent le départ immédiat de Ben Ali. Les manifestations sont gigantesques, les manifestants affrontent courageusement la police qui tire à balles réelles. La situation est critique pour le régime. Le président annonce le limogeage du gouvernement et la tenue d’élections législatives anticipées dans les six mois. Trois-quarts d’heure plus tard, il décrète l’état d’urgence et impose le couvre-feu dans tout le pays. Pour reprendre le contrôle de la situation, les généraux décident le départ de Ben Ali. Il quitte la Tunisie dans la soirée par avion pour l’Arabie Saoudite.
La chute du dictateur a provoqué une vague de protestations en Afrique du nord et au Moyen orient. En Egypte, en Libye, en Syrie les manifestations et les grèves devaient se transformer en révolution.
IV- Le gouvernement de transition
L’approfondissement de la révolution
Le 17 janvier, le premier ministre Mohammed Ghannouchi annonce le remaniement du gouvernement devant inclure « toutes les composantes de l’opposition » pour former un gouvernement de transition. Ce gouvernement « d’union nationale » est dirigé par le premier ministre du président en fuite, comporte une majorité de responsables du Rassemblement Constitutionnel Démocratique, le parti de Ben Ali. Il est chargé d’organiser des élections législatives dans moins de 6 mois, comme l’avait annoncé Ben Ali peu avant sa fuite.
Pour les démocrates bourgeois et la bourgeoisie impérialiste, la révolution tunisienne doit s’arrêter là. La presse bourgeoise tente de s‘opposer à l’approfondissement de la révolution et mène campagne contre « le chaos ». La bourgeoisie et les généraux souhaitent la fin de la révolution. Le premier ministre appelle au calme et réclame aux travailleurs tunisiens de retourner « au bureau et à l’usine ». Le gouvernement de transition est soutenu par les classes aisées qui s’opposent aux travailleurs, aux petits paysans, aux jeunes chômeurs qui veulent poursuivre la révolution.
Les négociations de Ghannouchi avec l’opposition aboutissent à ce que l’UGTT, les partis PDP, FDTL, le Mouvement Ettajdid fournissent des ministres au gouvernement de transition le 17 janvier. Mais dès sa création, les travailleurs et les jeunes contestent le gouvernement de transition et exigent le départ des ministres du RCD et du premier ministre pour « ne pas se faire voler la révolution ».
Les manifestations continuent mais maintenant contre le gouvernement de transition. Les trois ministres UGTT et le ministre FDTL quittent le gouvernement le 18. Le 21, les ministres du RCD annoncent qu’ils quittent leur parti.
Le 20 janvier est constitué le « Front du 14 janvier », regroupant l’essentiel des organisations de gauche dont le PCOT et les nationalistes. Pendant deux mois, ce Front organise les manifestations et est aux premiers rangs de la révolution.
Les grèves et les manifestations se suivent jour après jour. La révolution s’approfondit et oppose les classes aisées et les travailleurs et paysans pauvres. Alors que la petite bourgeoisie, constituée de cadres, de marchands, d’intellectuels soutient le gouvernement de transition, les travailleurs et les paysans s’opposent à celui-ci. La continuation de la révolution et sa « sauvegarde » devient le mot d’ordre principal de la révolution tunisienne.
Au cours des évènements révolutionnaires des comités locaux voient le jour. Les uns contre les bandes armées que Ben Ali avait laissées derrière lui, les autres pour gérer les affaires locales courantes après le renversement des autorités municipales. Un début de coordination de ces structures se met en place au niveau régional.
Mais le programme du socialisme n’est défendu par aucune organisation. L’UGTT qui est de fait à la tête de la révolution soutient le gouvernement transitoire et se borne à réclamer, outre des revendications sociales, des aménagements au sein du gouvernement et des conquêtes démocratiques. La direction de l’UGTT est le meilleur soutien du gouvernement et ne prétend absolument pas à le renverser et postuler au pouvoir sur un programme socialiste.
Pour le PCOT et son leader Hamma Hammami une révolution socialiste n’est pas à l’ordre du jour car « le mouvement communiste est encore assez faible dans notre pays, même s’il progresse beaucoup ». Le PCOT réclame une « république démocratique » et des nationalisations « sous contrôle de la population » sans renversement du capitalisme, sans destruction de l’Etat bourgeois et sans expropriation des principales industries et services. Le PCOT marxiste-léniniste juge que la révolution tunisienne ne peut pas apporter le socialisme.
Les organisations ouvrières l’UGTT et le PCOT répandent des illusions sur l’armée qui n’intervient pas contre le peuple mais laisse faire le travail répressif à la police. Le PCOT et l’UGTT qualifient les soldats d’« enfants du peuple » alors que l’armée est sous contrôle des généraux de l’ancien dictateur Ben Ali. Le risque d’une répression sanglante à grande échelle est réel, tandis que les organisations ouvrières, démocrates et nationalistes n’agissent pas pour prévenir cette éventualité.
La trahison des organisations ouvrières
Le mécontentement des masses envers le gouvernement transitoire est si puissant que la majorité de l’opposition, y compris l’UGTT, constitue un « Conseil National de sauvegarde de la révolution » à partir du 11 février. Le Conseil National regroupe vingt huit organisations dont le PCOT et les partis de gauche, démocratiques et nationalistes déjà rassemblés dans le «Front du 14 janvier», mais aussi d’autres partis comme le parti islamiste Ennadha et le Congrès pour la République.
L’UGTT soutien malgré tout le gouvernement transitoire en se déclarant favorable au maintien du premier ministre en place Ghannouchi.
Le Conseil national de sauvegarde de la révolution a pour programme de structurer la révolution par des comités locaux et régionaux, d’exiger le départ de tous les tenants du régime de l’ancien dictateur au sein de l’Etat mais aussi de faire adopter une réforme constitutionnelle pour une véritable Assemblée constituante.
Le Conseil national n’a pas pour programme le renversement de l’Etat et du capitalisme, mais repose sur des revendications démocratiques et économiques pour aménager le capitalisme et le préserver des masses révolutionnaires.
Le Conseil national demande au gouvernement transitoire que toutes les décisions du gouvernement transitoire soient soumises à son approbation. Le gouvernement transitoire refuse cette proposition. Le Conseil national ne s’impose pas au gouvernement transitoire et n’apparait pas comme une alternative politique ni un organe de pouvoir.
Les travailleurs ne s’organisent pas en masse dans les comités. La révolution n’a pas de structure démocratique à elle issue des organisations politiques de l’opposition, comme l’aurait pu être un réseau national de comités locaux et régionaux démocratiques et décidant de l’avenir de la révolution.
La révolution continue pourtant. Dans certains secteurs et dans des régions, les travailleurs se mettent en grève contre le gouvernement de transition avec des revendications sociales et sectorielles. Dans la rue les manifestants clament : « Ghannouchi, dégage ! ».
Le 27 février, sous la pression des masses révolutionnaires, le premier ministre est contraint de démissionner.
Après la démission de Ghannouchi, le nouveau premier ministre parvient à canaliser dans un cadre institutionnel la plus grande partie des forces politiques ayant participé à la révolution. Il crée à cet effet, le 14 mars, une « Haute instance » visant à rassembler l’essentiel des forces politiques et sociales du pays. Le but de l’organisme est de préparer les élections législatives.
Le Front du 14 janvier se divise sur l’attitude à tenir et tombe progressivement en sommeil. Chaque organisation se consacre à la campagne électorale et donne comme perspective aux masses les élections.
Le PCOT accompagne la liquidation de la révolution. Il revendique toujours une « république démocratique » et des « nationalisations sous contrôle de la population » avec le maintien du capitalisme. Le programme du PCOT accompagne la consolidation de l’Etat bourgeois et la continuité du capitalisme.
V- La contre-révolution
La lutte des travailleurs s’opposait dès le début à la bourgeoisie et au capitalisme par ses revendications démocratiques et sociales. Mais en laissant les généraux et les bourgeois au pouvoir, sans programme de renversement du capitalisme dans le court terme, les organisations qui auraient du jouer ce rôle, les organisations ouvrières, ont laissé les mains libres aux contre-révolutionnaires.
Jamais les organisations ouvrières et les organisations soi disant démocrates n’ont eut de position intransigeante avec les courants islamistes. Au nom de l’unité des forces politiques pendant la révolution, l’UGTT et le PCOT ont conclus des accords avec les courants nationalistes, démocratiques et islamistes. Mais l’unité avec des démocrates bourgeois et des islamistes n’a pas servi la lutte des travailleurs et de la jeunesse. Les « Fronts » de toute l’opposition ont abouti à un programme de réformes et conciliateur avec le gouvernement transitoire.
La montée des islamistes est une conséquence du réformisme et de la politique conciliante des deux organisations des travailleurs qui ont de fait mis la révolution dans une impasse.
Après la période de début de la révolution dont ils étaient absents, les islamistes et les démocrates bourgeois ont eut assez de temps pour s’organiser et prendre en main une partie de la population.
Des manifestations islamistes sont organisées par les islamistes modérés accompagnés des fondamentalistes. Ces manifestations rencontrent de plus en plus de succès devant l’impasse dans laquelle se trouve la révolution des travailleurs.
Lors des élections, les partis islamistes ont le soutien de la petite bourgeoisie et de la bourgeoisie qui souhaitent le rétablissement de l’ordre et de pouvoir continuer les affaires normalement.
Les partis islamistes, en premier Ehnnada, ont néanmoins un certain prestige surtout du fait de leur persécution sous le régime de Ben Ali.
Les élections ont permis à Ennahda de prendre le pouvoir et de réprimer les manifestations des forces révolutionnaires qui ne veulent pas s’avouer vaincu.
VI- La continuité du capitalisme-conclusion
L’auto-organisation est venue des masses elles-mêmes qui ont constitué des groupes d’auto-défense de quartier et des comités dans certaines régions. Mais la généralisation de ces comités et leur centralisation au niveau national revenaient aux organisations des travailleurs. La constitution d’un Conseil national élargi aux forces démocratiques bourgeoises et aux nationalistes a été un échec et a contribué à faire refluer les forces révolutionnaires. Sans la perspective de prise du pouvoir par les masses, les partis d’opposition ont ouvert la voie à la réaction islamiste.
Si les organisations ouvrières l’UGTT et le PCOT n’ont pu accomplir leur programme de réformes démocratiques et sociales, ce n’est pas la faute des travailleurs et de la jeunesse qui ont combattu avec courage. La perspective de réformer le régime en instaurant une « république démocratique et sociale» ne correspondait pas au cours des évènements révolutionnaires. En laissant le régime en place et sans attaquer le capitalisme, elles ont permis aux forces contre-révolutionnaires de grandir et de se renforcer et finalement de prendre le pouvoir.
Le bilan de la contre-révolution aujourd’hui est la détérioration de la condition des femmes, le chômage n’est pas résorbé, les conditions de vie ne sont pas améliorées. Malgré les libertés politiques et démocratiques acquises pendant la révolution -liberté de la presse, de se réunir et légalisation des partis politiques- les réactionnaires salafistes, avec la bienveillance d’Ennahda, répriment les manifestations et dans les quartiers ouvriers.
Les objectifs d’une « république démocratique » et des « nationalisations avec un contrôle de la population » en conservant le capitalisme constituent un programme illusoire car il est impossible d’obtenir une réelle démocratie et le pouvoir des travailleurs avec le maintien du capitalisme. Le pouvoir politique et économique ne peut pas être réparti entre la bourgeoisie tunisienne et l’impérialisme d’une part et les travailleurs d’autre part. Le pouvoir ne peut être obtenu que par l’expropriation des grandes entreprises capitalistes, la destruction de l’Etat bourgeois et la construction d’un Etat ouvrier.
A défaut d’un programme pour la révolution socialiste, les organisations ouvrières ont contribuées avec les démocrates bourgeois à mettre les islamistes dans une position dominante.
Il est ridicule de remettre en question la « force » ou la « puissance » des masses tunisiennes dans leur mouvement. Il n’a pas manqué de courage et de volonté aux masses tunisiennes, mais un parti ouvrier révolutionnaire qui aurait pu constituer avec les masses des soviets, promouvoir un programme pour transformer la révolution en révolution socialiste comme la fait le parti bolchevik en 1917 en Russie.
Je ne crois pas que l’insurrection en Tunisie était une révolution.
Mais le texte ne s’explique pas sur ce point. C’est pourtant un point qui conditionne le reste…
Ce qui a eut lieu en Tunisie est bien une révolution.
Comment un ou des groupes révolutionnaires ne peuvent-ils pas reconnaitre une révolution quand elle a lieu?
Le texte traite des évènements en Tunisie “comme si” c’était une révolution. Elle n’est pas non plus le copié collé de la révolution bolchevik pour plusieurs raisons:
1) l’expérience politique du prolétariat est sensiblement différente entre aujourd’hui et la Russie de 1917. Les travailleurs héritent d’organisations de masse qui n’apprennent à leurs membres que le respect des institutions bourgeoises.
2)les acquis politiques du mouvement ouvrier ont quasiment disparu. Toutes les méthodes sont à redécouvrir et à revérifier par les masses. Constitution de comités, de soviets, mots d’ordre d’expropriation, de grève générale et connaissance de l’histoire du mouvement ouvrier… sont aujourd’hui disparu ou défendu que de quelques individus dans le monde.
3)il n’y a pas et ceci est lié aux deux premiers points, d’organisation révolutionnaire de masse, d’internationale ouvrière révolutionnaire. les mouvements ont bien lieu dans la lutte des classes: grands mouvements, révolution mais il manque un facteur essentiel pour le socialisme: un parti mondial de la révolution. C’est l’axe majeur du texte.
À moins que les mots n’aient changé de sens, une révolution, ça signifie une situation de double pouvoir, des conseils ouvriers, une classe ouvrière qui cherche à prendre le pouvoir à la classe dominante, et au passage, pour des marxistes, ça veut dire des révolutionnaires et un parti qui les regroupe. On ne trouve rien de tout cela dans les « printemps arabes », ce qui signifie que, la bourgeoisie et son État n’ayant jamais été renversés ni même menacés de l’être, il n’y a pas eu de révolution en Tunisie ni ailleurs au Maghreb.
Il y a bien eu des insurrections dans les pays du Maghreb, mais si il faut les saluer parce qu’elles montrent que les exploités et opprimés de ces pays ne sont pas des moutons et réagissent à leurs conditions de vie épouvantables, il faut aussi dire que ce ne sont pas des révolutions, et qu’il y a un pas énorme à franchir entre ces révoltes d’Egypte et de Tunisie et la révolution communiste.
Du reste, on voit assez aujourd’hui que la bourgeoisie est toujours au pouvoir en Tunisie comme en Egypte, alors que l’insurrection a obtenu le départ des dictateurs. Une preuve de plus que la « révolution » en Tunisie n’en était pas une.