5 et 6 novembre 1956 : massacre français en egypte
Catégorie : Global
Thèmes : Guerre
C’était il y a 55 ans. Après qu’en 1952 la monarchie ait été renversée par les officiers de l’armée égyptienne, le nouveau gouvernement cherche à s’affranchir de la domination des puissances européennes. Le 26 juillet 1956, c’est la nationalisation du canal de Suez encore aux mains de capitaux franco-britanniques.
Dans un discours prononcé à Alexandrie, Gamal Abdel Nasser déclare : « La pauvreté n’est pas une honte, mais c’est l’exploitation des peuples qui l’est. Nous reprendrons tous nos droits, car tous ces fonds sont les nôtres, et ce canal est la propriété de l’Égypte… ».
La compagnie européenne veut riposter en retirant ses techniciens, mais, peine perdue, ils sont aussitôt remplacés par d’autres provenant de pays du Tiers-Monde, de l’Inde en particulier.
La France et la Grande-Bretagne s’assurent de la complicité de l’Etat d’Israël et décident de renverser militairement Nasser et de récupérer le contrôle du canal. Les dirigeants français sont en outre persuadés que ce coup de force sera fatal au FLN algérien dont ils attribuent la résistance à ses appuis extérieurs.
Les trois gouvernements parviennent à un accord tenu secret – les protocoles de Sèvres.
C’est ainsi que le 29 avril 1956 Israël lance une attaque surprise contre l’Egypte.
Ces combats servent de prétexte aux Français et aux Britanniques pour lancer un ultimatum exigeant des deux belligérants qu’ils se retirent de la zone du canal. Le refus de Nasser – qui était assuré – permet à la coalition franco-britannique d’attaquer à son tour l’Egypte.
Le 5 novembre 1956, sans le moindre aval de l’ONU, sans déclaration de guerre, les forces aériennes franco-britanniques procèdent à une vague de bombardements sur l’Egypte tandis que des navires de guerre pillonent la côte. Leur agression se poursuit avec des parachutages et des débarquements maritimes d’hommes et de chars dans la région de Port Saïd.
L’armée égyptienne se défend. De violents affrontements se produisent dans les airs comme sur terre, y compris des combats de rue en milieu urbain. La ville de Port Saïd subit de nombreux incendies.
En France, le gouvernement conduit par le socialiste Guy Mollet obtient, sans difficultés, l’approbation de la majorité du parlement pour cette action qui viole la légalité internationale [1]. Par contre, en Grande-Bretagne, le gouvernement conservateur rencontre une forte opposition qui lui reproche d’avoir enclenché une guerre sans l’accord des Communes.
Finalement, une mise en garde très ferme de l’Union soviétique et le peu d’enthousiasme des Etats-Unis à suivre leurs alliés belliqueux mettront fin à l’entreprise militaire israélo-franco-britannique.
Les troupes françaises quitteront piteusement l’Egypte mais non sans laisser derrière elles des milliers de victimes : 1.650 morts et 4.900 blessés. La ville de Port Saïd est en partie détruite, 15.000 civils ont perdu leurs maisons durant l’attaque des forces françaises et britanniques. [2]
A 55 années de distance, il y a beaucoup d’analogies entre cette expédition militaire criminelle contre l’Egypte et celle – non moins criminelle – qui vient d’intervenir en Libye.
On remarquera, notamment, une campagne similaire de la presse française participant à « l’hitlérisation » [3] de Gamal Abdel Nasser tout comme elle vient de le faire avec Mouammar Kadhafi. [4]
[1] Seuls les députés du Parti communiste français et ceux du mouvement de Pierre Poujade voteront contre.
[2] Les troupes françaises ne compteront que 10 morts et 33 blessés. Ce qui atteste de la dissymétrie de cette « guerre ». Elle n’a été, en réalité, qu’un coup de main gagné par surprise et grâce à une disproportion considérable de forces et de matériels. La coalition israélo-franco-britannique réunissait 250.000 hommes (contre 70.000 pour l’armée égyptienne) et était soutenue par 155 bâtiments de guerre dont 5 porte-avions.
[3] L’expression est de Philippe Muray, L’empire du Bien, Ed. Les belles lettres, 2010. Philippe Muray écrit : « Aux généreux distillateurs de la bonne pensée garantie, il faut des méchants de même métal que leur propre vertu de pacotille. […] Aussi l’hitlérisation de l’adversaire deveint-elle une sorte de réflexe ».
[4] En 1956, du moins, L’Humanité a su se distinguer des autres quotidiens en alertant l’opinion sur les visées des agresseurs et en combattant les mensonges propagés sur Nasser.
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