Vivre, travailler et militer en russie. entretien avec une membre du skt
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Themes: Actions directesImmigration/sans-papierEs/frontieresLuttes salariales
-Comment en es-tu arrivée à t’intéresser au militantisme syndical et pourquoi as-tu rejoint le SKT ? VG : Ma conviction de base a été qu’un-e bon-ne citoyen-ne devrait se former sa propre opinion sur la société et se battre pour ses droits. Avant que je joigne le SKT, j’ai eu l’expérience de divers mouvements gauchistes, les ceux autoritaires. Dans les « partis de gauche », vous trouviez toujours un chef qui voulait seulement plus de pouvoir et qui en bout de ligne, laissait tomber ses idéaux, une fois qu’il avait acquis une certaine influence. J’ai détesté leurs hiérarchies strictes et leur soif de pouvoir, alors j’ai commencé à avoir des idées comme celles-ci. Deux ans plus tard, j’ai rencontré 2 membres du SKT qui avaient des idées similaires. J’ai aimé leur structure – tou-te-s les membres sont égales et égaux et aucun-e ne lutte pour la centralisation du pouvoir.
-Durant ton séjour en Suède, tu t’es fait posé beaucoup de questions sur comment c’est de vivre, de travailler et de militer dans la Russie d’aujourd’hui. Comment est-ce que tu résumerais la vie et le travail en Sibérie ?
Présentement, la classe ouvrière russe est freinée par les vues très conformistes. Durant les années 1990 et pendant un bout de temps durant les premières années du 21ième siècle, les travailleurs et travailleuses étaient capables de lancer des grèves et d’organiser des rassemblements publics ou des piquets dans le but de se battre pour leurs droits. Des syndicats autonomes étaient créés d’en bas. Maintenant, ce n’est plus possible de former quelque nouveau syndicat que ce soit dans les milieux de travail. Vous ne pouvez riposter contre un employeur dans le cas de salaires manquants, de trop lourdes charges de travail ou de crimes selon la législation du travail. La classe ouvrière commence de plus en plus à considérer ces choses comme quelque chose dont seul l’État a le pouvoir de corriger.
Les silovikis [les gens avec un passé dans les services de sécurité maintenant dans de hautes positions dans l’État], la police et les administrations locales mettent constamment de la pression sur les dépareillés syndicats indépendants comme le SKT, le RKAS à Moscou (Confédération Révolutionnaire Anarcho-syndicaliste), le syndicat des usines Ford et les brigades indépendantes de cheminots, entre autres.
-Quel genre de pression ?
Ils suivent une procédure bien établie. Ils commencent avec des menaces de mise à pied afin d’effrayer les activistes dans les lignes de production. Ensuite, si la législation du travail n’accorde aucun support au licenciement, la pression est étendue au-delà du milieu de travail. Ils se présentent au lieu de résidence de l’activiste, disent à son ou sa conjoint-e qu’elle ou il risque son emploi, qu’ils ne permettront pas à leurs enfants de terminer leurs études. De plus, l’activiste est menacé-e d’être inscrit-e sur une liste comme un-e « extrémiste » et d’être subséquemment condamné-e.
-En avez-vous des exemples récents ?
Les derniers événements entourant le conflit à la mine Raspadskaïa* est un exemple très clair de comment cette procédure peut casser la construction des luttes ouvrières – les tentatives de former un syndicat indépendant sont considérées comme des crimes dans la forme d’« activité terroriste ». Les personnes les plus actives dans les manifestations qui y ont eu lieu sont maintenant en train d’être accusées de tels crimes. Ces mesures entravent les activités de tous les syndicats indépendants. Ils sont tout simplement classifiés comme illégaux.
-Qu’en est-il des autres syndicats ?
C’est un sérieux problème pour nous que les syndicats jaunes aient réussi à corrompre la signification même du mot « syndicat ». Ils ne voient pas comme faisant parti de leur mission de défendre même les droits les plus fondamentaux garantis par la loi. Le SKT fait de l’agitation pour créer de réels syndicats – indépendants. Avec le niveau d’exploitation du travailleur et de la travailleuse russe, il y a un besoin criant pour leur formation. Les journées de travail de 12 à 14 heures ne sont pas chose rare, les plans de prévention des accidents de travail sont totalement dysfonctionnels et nous faisons face à un salaire moyen de 200 à 300 euros par mois.
Malheureusement, le climat de travail épuisant ne donne pas naissance à des protestations par lui-même – au contraire, il génère la peur de perdre son emploi et de devenir incapable de rembourses ses énormes dettes. Ici, le défi pour nous est de montrer que ces dures conditions peuvent être changées, pour le mieux seulement, seulement par une lutte unie – par exemple canalisée dans la création de syndicats révolutionnaires.
-De quoi avez-vous parlé durant les rencontres avec des socialistes libertaires en Suède ?
Nos rencontres avec le SAC et le SUF ont beaucoup tourné autour de nous-mêmes, de la situation du SKT dans les dernières années. Une courte réponse à cette question est que nous avons souffert d’une sérieuse perte de membres. En est grandement responsable, la mise en faillite de compagnies où nous avions plusieurs membres. Nous avons également expliqué les mécanismes de la répression par l’État des militant-e-s syndicaux-ales et des diverses formes d’harcèlement. De plus, de nombreux meurtres politiques ont eu lieu en Russie. De façon générale, tou-te-s les activistes de gauche d’aujourd’hui sont dans la mire de la machinerie d’État et devient victime de sa répression.
Les jeunes syndicalistes voulaient davantage en apprendre à propos du fascisme dans notre pays. Nous avons choqué plusieurs auditeurs-trices en décrivant les attaques sur les travailleurs-euses sans-papiers non-russes, sur les antifascistes et sur le système juridique. Les fascistes ne représentent pas une aussi grande menace ici en Suède – leur cruauté n’est pas aussi répandue. Les pouvoirs qui contrôlent les choses sont différents aussi. L’appareil d’État russe se concentre sur les extrémistes de gauche. Les fascistes ne sont considéré-e-s seulement que comme des « hooligans » et les criminel-le-s fascistes reçoivent des peines de prison très courtes.
-Alors, quelle est ton impression de ce pays, après plusieurs rencontres syndicales dans 4 villes suédoises ?
D’abord et avant tout, nous avons eu une bonne impression sur les suédois-e-s. Les gens ont vraiment beaucoup de compassion, sont généralement gentil-le-s et cultivé-e-s. Nous somme surpri-se-s de la sécurité totale dans la vie publique. C’est un signe qu’il existe une société civile en Suède. Ça se ressent pour une fois. Les syndicalistes locaux-ales nous ont reçu et ont organisé des rassemblements avec des activistes suédoi-se-s dans toutes les belles villes que nous avons visité. Nous avons été surpri-se-s du grand nombre de supporters jeunes, actifs-ves et sérieux-euses de la SAC. Nous aimons leurs méthodes, leur ample auto-organisation et leur haut niveau de conscience idéologique.
Dans sa ville natale d’Omsk, Valerija Guz a participé à la création du mouvement de jeunes anarcho-syndicalistes SAM (Mouvement de la Jeunesse Autonome), qui est proche du SKT.
– Que fait le SAM et avec qui est-ce que vous militez ?
Tout-e-s les jeunes peuvent nous rejoindre. Les étudiant-e-s, les travailleurs et travailleuses et les sans-emplois. Le SAM travaille dans deux directions principales. Premièrement, nous organisons des séminaires ouverts et des discussions dans le but d’amener plus de jeunes au militantisme syndical. Deuxièmement, nous organisons diverses formes d’actions directes. Il s’agit parfois de campagnes contre l’abus de pouvoir par la police, des campagnes antifascistes et la défense des droits sociaux des gens. Le SAM initie également des actions indépendantes dans le secteur de l’éducation et fait de l’agitation pour les idées d’auto-organisation via les syndicats étudiants.
Le désastre de Raspadskaïa
En mai cette année 2010 deux puissantes explosions ont tué 90 travailleurs-euses dans la mine de charbon de Raspadskaïa. En 1991, celle-ci avait été la première entreprise minière soviétique à être réformée en une compagnie par action dont des travailleurs-euses étaient copropriétaires. En 1993, la privatisation était complétée. Aujourd’hui, la majorité des parts sont la propriété de l’oligarque de Londres, Roman Abramovitj, ensemble avec deux oligarques locaux qui se qualifient de « pères fondateurs » de la compagnie.
La communauté locale de la ville minière Mejdouretchensk a réclamé une meilleure sécurité, une augmentation salariale de 200% et la reconnaissance du syndicat indépendant sur le site de la mine. Après que les manifestations locales aient été écrasées par la police antiémeute, une commission d’État a été lancée, avec Poutine comme président. La bénéfique compagnie a maintenant à payer des compensations aux proches des travailleurs-euses décédé-e-s et plusieurs d’entre eux et elles ont également reçu des voyages nolisés en Grèce payés par le parti Russie Unie. Ceci alors que les gens qui ont formé le syndicat indépendant vont maintenant être condamné-e-s comme extrémistes.
Linus Valtersson
Traduction : Mikael Altemark (Suédois à l’anglais) Blogue du Collectif Emma Goldman (Anglais au français) Publié dans l’hebdomadaire du SAC « Arbetaren Zenit »
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