L’époque

Changement d’année, de décénnie, l’heure des bilans. On construit l’histoire immédiate : qu’est-ce que c’était les années 2000 ?
L’espace temps politique, ce n’est pas une fresque chronologique, c’est un plan, un champ de batailles : les 80’s assassinent les 70’s, notre époque invoque et exorcise 68 ou 1944-45 et les commémorations de la chute du mur de Berlin achèvent une nouvelle fois 1917. L’histoire n’est pas une somme exhaustive d’évènements, la mémoire est sélective, mythogène, l’imaginaire opère et donne prise sur le réel.

Penser la situation présente, c’est se mouvoir entre les mythes, les dates, les époques, s’y confronter. L’action politique, c’est traquer le cours des choses dans ce plan historique. C’est aussi prendre en compte la fusion de ce plan avec le temps cyclique, celui des saisons, du calendrier, celui qui rythme le quotidien et où s’élaborent patiemment des vies.
Le rapport au temps est un rapport au monde ; voilà la signification du temps politique. Et voilà la nécessité de comprendre notre temps comme un temps qui se cherche, un temps d’instabilité. Rupture, crise économique, désastre écologique, ce ne sont pas de pures opérations politiciennes, ce sont aussi les noms de projets d’aménagements : déblayer le terrain, pour commencer, et penser les nouveaux dispositifs qui viendront assurer la sécurité et la pérennité de la zone – développement durable, nouvelle gouvernance, moralisation de l’économie. Pas vraiment l’instauration d’un ordre nouveau, plutôt une refondation : tout chambouler pour que rien ne change.

Le monde est en phase de restructuration, les ma^itres d’oeuvres de ce chantier sont multiples, et avancent en rangs dispersés. Derrière une assurance de façade, ils tentent, reculent, changent de cap, se plantent. Copenhague coule si lamentablement qu’ils ne cherchent même pas à camoufler le naufrage, alors mêm que le sommet devait être l’avènement d’un capitalisme vert qu’ils appellent tous de leurs voeux. Le coup médiatico-politique autour de l’affaire Tarnac est en train de finir en eau de boudin. L’instauration du service minimum n’a pas empêché la plus longue grève à la RATP depuis 1995.

Nous vivons un temps qui se cherche, c’est le moment de remettre la main sur le cours des choses.