Sur la contre-insurrection a athenes “une pincée de sucre et tout s’adoucit…”
Catégorie : Global
Thèmes : GuerreLogement/squat
Une pincée de sucre, et tout s’adoucit…
Depuis deux mois, la stratégie de contre-insurrection mise en œuvre par l’État grec après les événements de décembre est entrée dans une nouvelle phase : c’est aujourd’hui une stratégie de contre-insurrection totale. Si nous parlons de contre-insurrection et non de répression, c’est parce que la première, à la différence de la seconde, ne relève pas tellement de l’intervention militaire en tant que technologie politique et sociale visant à produire de l’adhésion, de la peur et du défaitisme. La stratégie de contre-insurrection ne vise pas à anéantir rapidement les insurgés, mais plutôt à réduire leur espace de vie : la contre-insurrection s’attaque aux dimensions conceptuelles, affectives et culturelles de l’insurrection. C’est une stratégie préventive qui a pour cible les nombreuses possibilités qui ont fleuri lors des événements de décembre.
Le principe de base de la contre-insurrection est d’un côté de «gagner les cœurs et les esprits» et d’un autre côté de «ne pas sortir le poisson hors de l’eau mais d’assécher la mer où les insurgés sont comme poissons dans l’eau». Et cela passe par la double technique de la dissociation et de l’union. Il s’agit d’isoler les insurgés des espaces des possibles qu’ils ont dégagés en décembre, d’isoler en eux leurs affinités politiques et sociales, d’isoler les insurgés pour que leur rencontre même soit impossible. De façon concomitante, il s’agit de fédérer les mécontents autour de la réforme en présentant l’insurrection comme un recul, et de finalement rallier la majeure part de la population à la répression, en figurant celle-ci comme le fait de gens empreints d’humanité, œuvrant du côté du peuple dans un grand souci d’efficacité.
I
La première étape lors d’une contre-insurrection est d’isoler de leur terrain d’action favorable les éléments incontrôlables au sein des insurgés. Un procédé qui s’applique dans le quartier d’Exarchia, à la franchise universitaire, sur l’avenue Patission jusqu’aux environs de la place d’Omonia et l’avenue Acharnon [L’avenue Patission est l’axe traditionnellement emprunté par les manifestations et où se déroulent la plupart des affrontements. L’École Polytechnique et la faculté d’économie d’Athènes se trouvent sur cette avenue ; Acharnon délimite la zone où résident la plupart des immigrants. Le long d’Acharnon se trouve la place Agios Panteleimonas où les néo-nazis terrorisent les migrants avec l’appui de la police.]. Le quartier d’Exarchia est perçu actuellement comme le foyer de rassemblement des éléments incontrôlables de la jeunesse — les anarchistes, les gauchistes et tous ceux qui, s’ils ne s’engagent pas dans des attaques violentes, ne leur sont pas très hostiles. Et c’est précisément sur ce terrain — de sympathie ou de tolérance — que l’appareil contre-insurrectionnel est mobilisé. Une première occupation par la police pendant trois jours du quartier en octobre a permis de démontrer la supériorité militaire de l’État, et sa capacité à déployer des forces plus grandes encore. Depuis cette occupation, le moindre incident provoque une invasion totalement disproportionnée où la visée principale n’est pas d’arrêter les fauteurs de troubles, mais plutôt de se livrer à une revanche collective sur quiconque pourrait se trouver sur place au même moment. Il s’agit d’une stratégie de guerre psychologique dont l’objectif est d’étouffer toute tolérance et/ou sympathie, et qui met en œuvre des procédés de (auto) contrôle sur les bases d’un calcul inversé de la relation entre l’incident et ses conséquences. Car il est certainement beaucoup plus simple de contenir un mécontentement «intérieur» que la peur de la répression, quand on ne parvient pas à arrêter les attaques qui ont lieu régulièrement dans la métropole athénienne.
Dans le même temps, le discours dominant sur la franchise universitaire [Selon la Constitution grecque, les universités constituent un sanctuaire que la police ne peut violer] a substitué à une lecture première faisant de celle-ci une base arrière pour la préparation des attaques une lecture la présentant comme un espace anomique que l’État et les universitaires doivent reconquérir. En d’autres termes, la franchise universitaire est présentée dans le discours comme un terrain à réoccuper dans sa totalité, et ce d’une façon continue — et non comme une institution qui produit des phénomènes isolés devant être contenus. Ainsi, le problème se situe plus du côté d’un travail dans le long terme, d’une situation permanente, et non du côté de régimes d’exception particuliers.
Les opérations de type psychologique menées tant à Exarchia qu’en matière de franchise universitaire ont été précédées par une opération de nettoyage social dans le centre d’Athènes et ses environs. Nettoyage social qui s’est articulé autour d’un contrôle des populations défavorisées et des migrants. La criminalisation de leurs rassemblements et la problématisation biopolitique de leur co-habitation posée en termes hygiénistes (comme dans le cas du squat d’Efeteio [Tribunal laissé à l’abandon près de la place Omonia, occupé par des migrants et évacué par la police aidée des néo-nazis au printemps dernier]) a au départ permis d’isoler des centres politique et économique les éléments les plus incontrôlables de l’insurrection. Puis il s’est agi, sous couvert du voile protecteur de la social-démocratie, d’assujettir des catégories particulières, notamment les migrants : par leur assimilation, en leur promettant la régularisation des enfants, le droit de vote aux élections municipales, la construction d’une mosquée à Athènes et en leur demandant même leur aide dans les commissariats de police [Le culte musulman est interdit à Athènes et dans la plupart des villes en Grèce ; les immigrants de la seconde génération n’ont aucun droit politique ; aucun immigrant, même s’il a des papiers, ne peut travailler dans la fonction publique]. Ceci constitue la méthode de contre-insurrection par excellence axée en premier lieu sur la neutralisation du terrain, qui a donné naissance aux concepts de collectivisation, et en second lieu sur la réunification imaginaire des catégories particulières via la récupération opérée par l’État démocratique.
II
À un second niveau, la contre-insurrection essaie de dissocier le mécontentement général de l’insurrection en tant que dynamique et en tant que possibilité, afin de le rallier à la réforme. L’invention d’un objectif pour les insurgés, et son unification à une restructuration systémique, les dépossède de tout but et fait de toutes leurs actions quelque chose de particulièrement incongru et inutile aux yeux de la population. L’obligation de répondre à des questions posées par l’ordre dominant lui-même constitue déjà la moitié du travail de la contre-insurrection. Cette stratégie s’illustre par exemple dans la rencontre entre des élèves et le ministre de l’Éducation. L’interprétation qui en a été faite en général était la suivante : l’explosion de violence était le résultat d’un déficit démocratique à l’école et la solution dépendait de l’élaboration d’un «nouveau contrat social» entre les élèves, les enseignants et le ministère. L’initiative du ministère de l’ordre public consistant à créer un «bureau de réclamation pour les victimes d’actes arbitraires» [Cette autorité devra supposément restreindre et condamner les actes de brutalité policière] participe de cette stratégie. La tactique centrale de toute stratégie contre-insurrectionnelle menée par la social-démocratie, c’est-à-dire la tentative de contenir un mécontentement largement répandu parmi la population (mécontentement qui selon l’État a été à l’origine des événements de décembre), est une technologie du pouvoir qui non seulement promet la réunion pacifiée des antagonismes sociaux et économiques, mais présente également l’insurrection comme la cause d’un recul, comme le masque qui empêche de voir le bout du tunnel.
Ce rôle d’acteur de la paix et du retour à la normale est joué par la gauche parlementaire, dont le cœur et l’esprit ont été du côté de l’État depuis des décennies. À travers une grille de lecture moralisatrice de la violence révolutionnaire, la gauche reprend tout son rôle dans la reproduction sociale en condamnant «la violence d’où qu’elle vienne», violence qui serait d’après elle le catalyseur primordial d’un retour imaginaire vers l’autoritarisme. Selon la gauche, tout acte de violence est par essence «un acte de violence gratuite», un acte commis par des militants de droite encagoulés devant être mis à l’écart soit par le biais de condamnations ou de manifestations, comme celle qui a été soutenue par le POSDEP (syndicat des professeurs d’université) [Le POSDEP est contrôlé par des syndicalistes de gauche qui ont appuyé une manifestation contre la violence. Manifestation qui n’a jamais eu lieu.]. Cette tactique, fondée sur une prise de distance équivalente par rapport à tout type de positions radicales, a trouvé son expression lorsque l’État a émis dans le même temps des mandats d’arrêt contre les trois anarchistes recherchés par la police et contre les agresseurs de K. Kouneva [Les trois anarchistes sont recherchés suite au braquage d’une banque, lors duquel Yannis Dimitrakis a été blessé par balle au moment de son arrestation. L’État les accuse de faire partie d’un supposé groupe anarchiste («les hommes en noir») qui serait impliqué dans des vols. L’État promet 600’000 euros par tête. Dans le même temps, le ministère a annoncé accorder une récompense d’un million d’euros à quiconque fournirait des informations permettant l’arrestation de l’agresseur de K. Kouneva, la syndicaliste indépendante employée dans une société de nettoyage qui avait été brûlée l’an dernier au visage par de l’acide.].
Cette injonction consistant à faire corps avec le système de valeurs de l’État, compris non pas en tant que sujétion à la loi et à l’ordre mais en tant que système de dialogue, de négociation et de compromis, isole le mécontentement largement répandu de ce qu’il peut réaliser réellement, et le transforme en l’expression d’une demande répétée d’inclusion dans le bourbier de la relation au Capital.
Idéalement, la contre-insurrection est une guerre qui ne connaîtrait aucune bataille réelle. Une guerre fondée sur l’isolement, l’assèchement, une guerre remportée grâce à l’agitation des instincts les plus conservateurs de la société, et la récupération de la grogne et de la protestation générales dans le cadre de la pacification et de la réforme.
III
En dernier lieu, la campagne de contre-insurrection a pour but de miner la cohérence et l’unité de l’insurrection, en mettant en œuvre une stratégie d’isolement allant d’une définition catégorielle des insurgés (sous l’angle social, politique ou psychologique…) à une coupure avec leurs propres vécus. D’un côté, on exige des insurgés qu’ils délaissent les identités mouvantes qu’ils ont créées en décembre — ce qui a déstabilisé toutes les identités alors existantes — et qu’ils s’enferment plutôt dans leurs postures initiales : l’élève doit rester un élève, l’anarchiste un anarchiste, l’immigrant un immigrant, le tox’ un tox’. Si des mondes différents se sont rencontrés en décembre dans les rues et se sont battus ensemble dans cette œuvre de destruction, ils ont prouvé que le renversement supposément impensable des catégories sociales est chose possible. Les frontières existant entre ces mondes doivent alors disparaître à jamais.
Par ailleurs, le récit moralisateur du ministère de l’ordre public au sujet des «enfants et des professeurs», des «hooligans et des politiques», des «émeutiers et des idéologues» ressort aussi de ce schéma tactique. Une part essentielle de cette logique consiste donc à amener une partie des insurgés à imposer d’eux-mêmes une dissolution ou à ramener le reste du groupe à la raison, selon un code moral ayant reçu l’approbation de l’État. Il s’agirait d’une attitude basée sur le «fair play» qui garantirait une inclusion des antagonismes de classe vers un retour à la normale sondé et contrôlé non pas tant par le Bureau pour la Protection du Régime que par les insurgés eux-mêmes. Ce contrôle des insurgés contre toute déterritorialisation de leurs pratiques, cet ascétisme de la patience et de l’espoir, ont été une technologie de sujétion centrale mise en œuvre par l’appareil de normalisation le plus efficace du siècle passé, appareil de normalisation qui s’appelle «la gauche».
Dans le même temps, la criminalisation de certains choix et de certaines pratiques est une tactique classique de la dépolitisation. Elle permet en effet de réprimer facilement tous ceux qui se sont engagés dans ces voies. Cependant, l’une des conditions nécessaires à la réalisation de cet exercice est de les isoler d’un milieu politique et social avec lequel ils sont liée. Cette recette a été couronnée de succès lors de l’été 2002 via la lobotomie pratiquée autour de la question de la mémoire sociale, et ce avec l’assentiment de la gauche [Lors de l’été 2002, après qu’une bombe a explosé dans les mains d’un homme d’âge moyen dans le port du Pirée, l’État a lancé une chasse à l’homme d’envergure qui a impliqué des dizaines de personnes appartenant au groupe «17 Novembre» qui pratiquait la guérilla urbaine. Le ministère de l’ordre public, sous l’impulsion du ministre de l’époque, Chrisochoidis, a alors dicté aux médias publics et privés la ligne à suivre. Il s’agissait de renverser la perception que la population avait des «guerilleros», perception qui leur était favorable, les actions des guerrilleros étant tout au moins tolérées. Il fallait faire de 17 Novembre un gang criminel et leur renier toute filiation avec la résistance aux Généraux et à la république collaborationniste qui a suivi.]. Les mandats d’arrêt émis aujourd’hui plus ou moins secrètement contre tous ceux qui sont accusés de participer à des «entreprises terroristes» [Ces mandats d’arrêt ont été émis depuis octobre, en lien avec La Conspiration des Cellules de Feu, un groupe pratiquant la guérilla urbaine] visent à contenir une population radicale et incontrôlable plus large.
D’un côté, ils ont pour objectif de forcer chacun à mener son propre examen de conscience afin de trouver en soi des éléments à charge éventuels, et d’un autre côté, de provoquer calme et soulagement chez ceux qui, faisant partie d’un groupe qui ne jouerait qu’un rôle politique mineur selon l’État, à savoir le groupe des «idéologues» et des «gens sérieux», ne pourraient être associés à certains groupes plus ciblés. Le ministère crée ainsi une atmosphère morbide où règnent la confession, la suspicion, la peur, voire l’indifférence : «Suis-je soupçonné de quoi que ce soit ?» «Avec quel genre de preuves pourraient-ils m’arrêter ?» «Pourrais-je être lié sans le savoir à quelque chose ou à quelqu’un qui pourrait me porter préjudice ?» Ou bien : «Il n’ont aucun moyen de nous retracer, le glas sonnant seulement pour ceux qui n’ont pas de principes.» etc. Cette paranoïa jouant sur deux échelles — infinitésimale et infinie toute à la fois — comprise en tant que produit par excellence d’une gouvernance de la police secrète, a pour but d’isoler le sujet de son propre vécu, de son propre être-au-monde. Cette paranoïa vise à faire de tout être un être pensant comme l’État, en d’autres termes, pensant comme des lignes de flics, comme cette armée de patriotes morts-vivants, comme la substance du Parti de l’Ordre. Penser et parler comme Lui sacrifie la possibilité d’un devenir insurrectionnel et amène à entretenir la certitude d’une dette envers l’existence éternelle de l’État.
flesh machine // ego te provoco // comrades – 4 décembre 2009.
Just a spoonful of sugar
helps the medicine go down
During the last two months, the strategy of counterinsurgency developed by the greek state since December has passed to a new phase of totalisation. If we speak of counterinsurgency and not of repression it is because the former in contrast to the latter is not so much a military type intervention, as an integrated political and social technology producing consent, fear and defeatism. It aims not at the immediate annihilation of the insurgents, but at the removal of their living space: the conceptual, affective and cultural plane of the insurgency. This is a preventive strategy whose object is the wealth of possibilities that sprouted out of the insurrectionary event. It is a low intensity warfare, a politico-psychological warfare, in the sense that its goal is the corrosion of the political, social and psychological consistency of the insurgency. The basic principle of counterinsurgency is, on the one hand, to “win hearts and minds”, and, on the other hand, “not to take the fish out of the sea, but to dry the sea where the insurgents swim like fish”. And it does this by “separating and uniting”. Separating the insurgents from their possibilities, separating the insurgents from their political and social affinities, separating the insurgents from each other. And at the same time uniting social discontent with the call of reform, by representing the insurgency as a cause of backwardness, and uniting the forces of repression with wide segments of the population, by presenting the former in as both humane, pro-people and effective.
I
A first orientation of the counterinsurgency is the separation of the uncontrollable segment of the insurgents from the advantageous ground of their action. A process that spreads from Exarcheia, the university asylum and the axis of Patision avenue, till the area around Omonoia square and the axis of Acharnon avenue [Patision Avenue is the traditional axis of protests and unrest, along its course is the Polytechneio and the Athens School of Economics; Acharnon marks the main axis of the part of the metropolitan centre’s immigrant populated areas, along its course is Agios Panteleimonas square where neo-nazis have imposed a reign of racist terror with the backing of the police]. Exarcheia are perceived as a hypertopical metropolitan centre where the uncontrollable segments of youth gather — the anarchists and the leftists and all those who if not producing violent attacks are surely not annoyed by them. And it is precisely on that terrain —of sympathy or toleration— that the apparatus of counterinsurgency is mobilised. An initial three-day police occupation of the area in October demonstrated the military superiority of the state, carrying with it the assurance that it is but a slice of the force that can be activated. Ever since, the smallest incident ignites a totally unbalanced invasion, whose main scope is not the arrest of the perpetrators but a kind of mass and collective revenge on whoever might be moving in the area at the time. This is a strategy of psychological warfare aiming at the dissolution of toleration/sympathy, putting in motion processes of (self)containment on the bases of a reversed calculation of the relation between incident and its consequences. For it is certain that an “internal” discontent is much more likely to minimize if not stop the often attacks in the wider area than the fear of repression.
At the same time, the dominant discourse on the university asylum is moving from a reading of it as a base of attacks, to its characterisation as a space of anomie in itself that has to be reconquered by the state and the academic community. In other words, the university asylum is being constructed as a ground that has to be reoccupied in its entirety, uninterruptedly and continuously — not as an institution that produces isolated phenomena that need to be contained. The problem thus is placed with endurance not the moment, with the permanent situation and not with specific states of exception.
The psychological operations on Exarcheia and the university asylum [According to the greek constitution university grounds form an asylum where the police cannot enter] were preceded by a cleansing operation of the wider metropolitan centre, articulated in terms of population management on the miserable but also massified immigrants. The criminalisation of their gatherings and the biopolitical problematisation of their co-habitation in hygienic terms (as in the case of the Efeteio squat [Deserted court-house next to Omonoia occupied by immigrants and evacuated by a combination of police and neo-nazi forces last spring]) initially removed the most uncontrollable subject of the insurgency from the spatial centre of political and economic procedures. Then, it tried to subjectivate, under a social-democratic umbrella, its partial segments, through the political assimilation of immigrants via the promise of legalising their children, giving them the right to vote in local elections, allowing them to build a mosque in Athens and even asking for their assistance in police departments [Public worship of Islam is illegal in Athens and most greek cities; second generation immigrants have no political rights; no immigrants, even with papers, can be employed in the civil services]. This is a method of counterinsurgency par excellence centred on the dissolution of the ground that gives birth to the terms of collectivisation, and on the imaginary re-unification of the segmented subject within the contours of democratic-statist recuperation.
II
On a second level, the counterinsurgency is trying to separate the general discontent from the insurgency as a dynamic and as a possibility, and to unite it with reform. The invention of an aim for the insurgents, and its unification with a systemic restructuring, leaves the insurgents without an object and renders any further action on their part out of place and pointless in the eyes of others. The imposition of dominant answers to questions posed by power itself in the first place is already half the work of the counterinsurgency. Part of this strategy is, for example, the meeting of the minister of education with a group of pupils. The dominant interpretation saw the explosion of violence as a result of a lack of democracy in schools and proposed to solve this problem with a “new social contract” between the pupils, the teachers and the ministry. The same spirit emanates the initiative by the ministry of public order to create “bureaus of confronting incidents of arbitrariness” [This office will supposedly contain and punish police violence]. A central tactic of every strategy of counterinsurgency, this enclosure of wide-spread discontent, which has been diagnosed by the state as a cause of December, is under the direction of social-democracy; a technology of power that not only promises the pacification of social and economic antitheses, but portrays the insurgency as cause of backwardness, as the source of delaying the exit from the tunnel.
A basic role in this injunction to peace and normality is relegated to the institutional left, the heart and mind of which has been with the state several decades now. Through the erection of a moralistic problematisation of revolutionary violence, the left is taking up its role —social reproduction— by condemning “violence wherever it might be coming from” as a basic catalyst of an imaginary backwardness towards authoritarianism. Every violence, says the left, is in essence “a violence for violence”, a “hooded right-wing” that must be isolated either with condemnations or even with marches like the one sponsored by POSDEP (the union of academics) [POSDEP is controlled by left-wing syndicalists who sponsored a march against violence. The march was never realised.]. This tactic of equal distance from the extremes was expressed by the state in the simultaneous warrant against the three wanted anarchists and the perpetrators of the attack against K. Kouneva [The three anarchists are wanted in relation to the bank robbery during which Yannis Dimitrakis was shot and arrested. The state implicates them in a fictional anarchist robber group “the men in black” and is giving 600,000 euros for every one of them. At the same time, the ministry announced a 1,000,000 euros reward for information leading to the perpetrator of the attack with sulfuric acid against the cleaner autonomous unionist K. Kouneva last year burning her face and entrails.]. This injunction to give oneself up to the value system of the state, not as a system of subjection to law and order but as a system of dialogue, negotiation and compromise, is separating widespread social discontent from what it can really do, and subjectivates it as a series of demands of inclusion to the bog of the Capital-relation.
Counterinsurgency is ideally a war with not a single real battle. A war of isolation, of drying out, of cutting away, which wins by mobilising the most conservative instincts of society while recuperating social discontent and protest in a context of pacification and reform.
III
Finally, the counterinsurgency campaign is aiming to corrode the internal consistency and unity of the insurgency, promoting a series of separations that start with the fragmentation of the insurgents into categories (social, political, psychoanalytic etc.) and finish with separating them from their very lived experience.
On the one hand, the insurgent are injucted to abandon the fluidity of December that destabilised all identities and to return to their post: the pupil must become a pupil, the anarchist an anarchist, the immigrant an immigrant, the junkie a junkie etc. The gates of the different worlds that met on the streets of December and acted together in the common negative work of destruction proving in practice that the phenomenally impossible subversion of social categories is feasible must forever close.
On the other hand, a central tactic on this scheme is the moralistic narrative of the ministry of public order regarding “children and instructors”, “hooligans and politicos”, “rioters and ideologists”. An essential part of this tactic is the injunction of a segment of the insurgents to separate itself or to bring the rest back to reason, based on some moral code approved by the state; on a “fair play” that guarantees the inclusion of social/class antagonism in a curve of normality surveyed and controlled not by the bureau of protecting the polity, but by the insurgents themselves. This self-disciplining of the insurgents against any deterritorialisation of their practice, this asceticism of patience and hope, has been a pivotal technology of subjectivation of the most successful apparatus of normalisation of the last century: the left.
At the same time, the criminalisation of certain choices and practices is a classic tactic of depoliticisation, rendering their agents easy pray to repression. Yet a necessary condition for this is their isolation from a wider political-social milieu with which they are linked. This recipe was tested with success during the summer of 2002 via the lobotomy plan of social memory which enjoyed the complete cooperation of the left [In the summer of 2002, after a bomb exploded in the hands of a middle-aged man in the harbour of Peireus, the state launched a huge manhunt which implicated dozens of people in the urban guerrilla group November 17. The Ministry of Public Order under the current minister, Chrisochoidis, directly managed private and public media broadcasts on the case with the purpose of bending the social perception of the guerrillas, which had been favourable or at least tolerant to their activities, and portraying the N17 as a criminal gang, not a child of the resistance to the junta and the collaborationist republic that followed it.]. The secret and not-so-secret warrants for “terrorist activity” today [Such warrants have been circulating since October in relation to the Cells of Fire Conspiracy urban guerrilla group] aim at the enclosure of a wider uncontrollable and radical population. They aim, on the one hand, to force everyone into a self-examination in order to discover any causes for his or her possible incrimination, and on the other hand, to cause quietism and relief to those who feel there is no way they can be linked since they belong to an unofficially recognised political factor, the one of “ideologues” or “serious people”. The ministry is thus creating a morbid atmosphere of confession, suspicion, fear and even indifference: “Am I perhaps suspected?” “With what evidence could they arrest me?” “Might I be involved in someway or with someone in a manner unknown to me that can get me in trouble?” Or else: “There is no way they are referring to us, the bell is tolling for those who have no principles”, etc. This mass, and at the same time molecular, paranoia, as a product par excellence of a secret police governmentality, has as its aim to separate the subject from his/her very lived experience, from her/his being-in-the-world: to force it to think like the state, in other words just like those piles of copses, the zombie army of patriots, the organic matter of the Party of Order, think and speak — to bring about the sacrifice of the possibility of the now of insurrectionary becoming to the certainty of the completion/ payment of the debt towards the eternal being of the state.
flesh machine // ego te provoco // comrades – December 4th, 2009
After The Greek Riots.
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