Pourquoi nous refusons de quitter
le boulevard du Temple

Le 24 juin dernier, nous avons été gazés, sauvagement matraqués, expulsés de la Bourse du travail de Paris au moyen d’une opération paramilitaire de la CGT appuyée par les forces de police. Les sans-papiers de la CSP 75 (coordination des sans-papiers 75) sont des travailleurs, et nous occupions ce haut lieu des luttes ouvrières depuis 14 mois, depuis le 2 mai 2008, pour faire valoir notre droit à la régularisation en tant que travailleurs isolés, notre droit d’avoir des papiers tout comme les autres travailleurs sans-papiers.

Lorsque nous avons été expulsés, nous sommes restés camper sur le trottoir de la Bourse du travail. C’est comme cela qu’en ont décidé spontanément les sans-papiers, par un refus unanime de quitter les lieux, malgré les appels contraires des dirigeants de la CSP 75.

Plus tard, pour faire partir du boulevard les sans-papiers qui y campaient à plusieurs centaines (entre 400 et 500 à se relayer, la nuit venue, pour coucher à même le sol), la préfecture a proposé d’examiner « avec bienveillance » 300 dossiers. Déjà ce nombre réduit ne pouvait pas avoir l’approbation de la majorité des sans-papiers : cela revenait, pour beaucoup, à partir sans avoir obtenu gain de cause, sans un titre de séjour objet d’une lutte si longue et pour laquelle tant d’efforts ont été dépensés. Alors, par un vote improvisé et bidon, les dirigeants ont passé outre à la volonté des sans-papiers et ont fait passer leur acceptation de la proposition de la préfecture et de la ligne des associations (quitter le trottoir coûte que coûte) comme une décision de l’assemblée générale.

Ils ont ensuite dressé une liste de 300 noms tenue secrète, et, quand les premières convocations ont commencé à arriver, nous avons pu constater qu’il y en avait qui étaient pour des personnes que nous n’avions jamais vues, ni à l’occupation, ni aux manifestations, ni sur le trottoir. Comment pouvions-nous accepter ces procédés arbitraires !

Pour finir, le vendredi 17 juillet, les dirigeants, en accord avec les associations, ont appelé à un rassemblement place du Châtelet. Ils ont ordonné à tout le monde de partir, de prendre ses affaires. Nous ne savions pas qu’après le rassemblement on allait occuper un autre lieu. La plupart ne voulaient pas partir. Alors les dirigeants ont eu recours au chantage, d’abord personnel puis public. Pour faire partir les sans-papiers récalcitrants, le coordinateur est passé parmi les gens qui ne voulaient pas bouger en criant et insistant avec le mégaphone : « Qui ne quitte pas le trottoir ne fait plus partie de la CSP 75 ! »

Plusieurs sont partis, se joignant à la centaine qui attendaient dans la rue pour prendre le métro à République. Mais nous sommes 104 à être restés sur le boulevard en face de la Bourse du travail et à continuer à nous relayer pour l’occupation du trottoir. Personne parmi nous n’a reçu de convocation en préfecture.

On nous a déclaré que nous ne faisons plus partie de la CSP 75. Nous avons donc formé un autre collectif de sans-papiers : le « CSP Solidaire de Paris ». Et nous avons élu deux représentants.

Nous faisons appel à tous les soutiens, à toute personne de bonne volonté, aux médias, pour nous aider et pour faire connaître les raisons de la continuation de notre lutte.

Nous faisons appel à Monsieur le Préfet de police pour que nos représentants soient reçus en Préfecture, ou pour qu’un représentant de la Préfecture vienne nous voir, afin que nous puissions expliquer nos raisons et instaurer un dialogue.

Nous ne demandons que des papiers, notre régularisation sans conditions. Dès que nous l’obtiendrons nous quitterons définitivement le trottoir du boulevard du Temple.

Oser lutter, c’est aussi oser dire la vérité !

Régularisation des tous les sans-papiers !

25 juillet 2009

CSP Solidaire de Paris