Ce message vous est adressé à l’occasion du lancement de la campagne liberté et justice pour Atenco :

http://www.atencolibertadyjusticia.com/

Beaucoup d’entre vous se souviennent sans doute de la lutte victorieuse des paysans de San Salvador Atenco contre un projet d’implantation d’aéroport en 2001 et 2002, et, en représailles, de la répression sauvage qui, plusieurs années après, a frappé les habitants de cette petite ville du bassin de Mexico. L’opération de police coordonnée et déclenchée les 3 et 4 mai 2006 par les autorités conjointes de la municipalité, du gouvernement de l’État de Mexico et de l’État fédéral, s’est soldée par la mort de deux jeunes garçons, par de nombreux blessés, par le viol de plus de trente femmes lors de leur transfert en détention et par plus de 200 arrestations accompagnées d’actes de torture.

Saisie, la Cour suprême de la nation mexicaine, qui avait reconnu que de graves atteintes aux droits humains avaient été commises, vient pourtant de statuer sur l’absence de responsabilité des autorités commanditaires de cette opération. Seuls quelques fonctionnaires de bas niveau ont subi des sanctions administratives pour « actes libidineux ».

Par contre, plusieurs dizaines de personnes détenues les 3 et 4 mai 2006 ont passé des mois, pour certains plus de deux ans en prison et 13 d’entre elles y sont toujours, condamnés à de lourdes peines (de 31, 67 et 112 ans de prison). Tous ont été accusés de délits fabriqués et la plupart d’entre eux ont été arrêtés sur des lieux éloignés de l’endroit où étaient censés se dérouler les faits qui leur sont reprochés.

Pour lancer cette campagne en France, nous souhaitons organiser une réunion publique le 18 mars à 19 heures au CICP (21 ter, rue Voltaire, 75011 Paris, métro Rue-des-Boulets et Nation). Le choix de la date coïncide avec la clôture du Salon du livre, où le Mexique sera cette année à l’honneur. C’est là une occasion d’interpeller l’opinion sur la situation d’impunité qui prévaut au Mexique, de dénoncer la criminalisation des mouvements sociaux et d’exiger la liberté pour tous les prisonniers politiques au Mexique et pour ceux d’Atenco en particulier.

Afin de donner une ample répercussion à cette campagne, nous vous invitons à vous y joindre activement :

Nous vous invitons à signer et faire signer cet appel ici en France.

L’idée de cette rencontre du 18 mars est que l’ensemble des présents puisse faire savoir aux prisonniers que, quoique isolés par la force de la répression, ils ne sont pas seuls et que ce soit l’occasion de témoigner de notre solidarité avec les luttes qu’ils incarnent : contre la répression, contre l’impunité, pour la justice, pour la défense de la terre.

Le gouvernement veut faire taire les paysans d’Atenco en les jetant aux oubliettes, unissons nos voix pour clamer haut et fort que nous ne les oublions pas…

Vous trouverez ci-dessus, le lien (en espagnol) avec le site de la campagne nationale et internationale « liberté et justice pour Atenco » et ci-dessous l’appel traduit en français ainsi que le nom des personnalités mexicaines signataires. Certaines d’entre elles seront d’ailleurs présentes au Salon du livre (et nous tenterons d’obtenir qu’elles puissent également nous accompagner le 18).

L’initiative du 18 est destinée à donner un coup d’envoi à cette campagne, elle se veut le point de départ d’autres initiatives… individuelles ou collectives, nationales ou locales, dans l’immédiat ou dans la durée…

Pour Atenco, liberté et justice !

Envoyez vos signatures à justicepouratenco@gmail.com

TEXTE DE L’APPEL

Campagne nationale et internationale LIBERTÉ ET JUSTICE POUR ATENCO

Nous, personnes et organisations, presque trois ans après les terribles événements répressifs de San Salvador Atenco, voulons exprimer ce qui suit.

1. Le mouvement pour la défense de la terre qui a surgi en 2001, face à l’initiative gouvernementale d’exproprier la terre afin de construire un nouvel aéroport pour la ville de Mexico, est un mouvement social dont les causes et les revendications sont justes, légitimes, et possibles à satisfaire. La violence n’aurait jamais dû être la réponse de l’État face à ce mouvement de paysans et d’habitants. Le Front communal pour la défense de la terre (FPDT) représente ce mouvement. L’État a commis une erreur en polarisant le conflit à l’époque, et en optant pour une issue autoritaire face à ce problème social.

2. Les innombrables violations des droits humains lors de l’opération lancée par les gouvernements fédéral, de l’État et municipal en mai 2006 sont un fait déplorable qui a été démontré sur le plan national et international par des organismes reconnus de défense des droits humains. Diverses instances de l’État et même des fonctionnaires fédéraux ont reconnu la gravité des violations et des exactions commises à San Salvador Atenco. Il n’existe aucun doute sur le fait que ces violations ont été commises. Hélas, dans sa délibération de la semaine dernière, la Cour suprême de justice a évité de se prononcer sur les responsabilités des dirigeants policiers et politiques qui ont participé à ces faits.

Par la manière, la répétition et le modèle des arrestations, de la brutalité policière, des abus sexuels contre les femmes arrêtées, la torture et les irrégularités de procédure, nous considérons qu’il y a indubitablement des responsables politiques clairement identifiables, soit par leurs actions, soit par leurs omissions, soit par leur place dans la chaîne de commandement.

C’est l’État mexicain et les hauts fonctionnaires qui ont eu la charge des opérations qui sont responsables des violations des droits humains commises à San Salvador Atenco. Ces opérations ont eu deux buts politiques : traiter comme des criminels celles et ceux qui constituent un mouvement social légitime, et essayer de désarticuler et décapiter la structure organisationnelle de ce mouvement. L’État a commis une erreur en ne parvenant pas à régler un petit conflit ne concernant que huit vendeurs de fleurs et en polarisant ce conflit. Les 3 et 4 mai 2006, l’État a lancé une opération planifiée, délibérée et calculée pour instaurer la peur et infliger un châtiment exemplaire, à travers la violence autoritaire, au mouvement social du Front communal pour la défense de la terre et aux organisations solidaires qui l’accompagnaient. Le chapitre de l’obtention de la justice par les victimes est incomplet. Pour l’instant, la justice est en suspens.

3. À cause de ces déplorables événements, treize personnes sont toujours en prison, avec des peines allant de 31 ans à 67 ans et même 112 ans, dans un pénitencier de haute sécurité. Tous ont été condamnés à de terribles et injustes sentences pour des délits qu’ils n’ont pas commis. Le système de justice a été employé contre eux de manière factieuse. Ils ne sont pas des délinquants, certains sont les dirigeants les plus visibles du mouvement pour la défense de la terre et d’autres de simples et humbles habitants, quelques-uns même n’avaient jamais participé à aucun mouvement social.

La façon dont ils ont été arrêtés, les abus et les violations des droits humains auxquels ils ont été soumis, les irrégularités dans leurs procès et leurs condamnations montrent encore une fois qu’ils sont prisonniers sans véritable fondement juridique et légal.

Ces treize personnes sont des prisonniers politiques. Et la justice ne peut suivre son chemin tant que les violations aux droits humains continuent. Ces violations continuent tant qu’ils restent emprisonnés. Il devient urgent sur les plans national et international d’exiger la LIBERTÉ des treize prisonniers, et c’est pour cela que nous nous sommes réunis nombreux, acteurs et actrices, musiciens, journalistes, écrivains, peintres, académiciens, religieux, défenseurs des droits humains, organismes civils, solidaires, familles des prisonniers, avocats de la défense et le Front communal pour la défense de la terre lui-même, pour réaliser ce qui suit.

APPEL À LA SOCIÉTÉ CIVILE NATIONALE ET INTERNATIONALE

Nous appelons la société civile nationale et internationale, les femmes et les hommes, de tous les âges, de toutes les entités du pays, de tous les continents du monde, de la ville ou de la campagne, de toutes les professions, arts et métiers, de toutes les orientations et préférences sexuelles, toutes les personnes, familles, collectifs, organisations, réseaux et mouvements indigènes, syndicaux, paysans, urbains populaires, de femmes, écologistes, des droits humains, étudiants et religieux qui luttent pour la liberté et la justice à participer à la campagne nationale et internationale

LIBERTÉ ET JUSTICE POUR ATENCO. Celle-ci commence ce 17 février et sa première phase se terminera les 3, 4, et 5 mai de cette année, avec l’intention de rassembler les voix qui demandent :

La LIBERTÉ des treize prisonniers politiques.
L’annulation des sentences de condamnation.
L’annulation des mandats d’arrêt contre les gens poursuivis.
Le respect absolu des droits humains des gens arrêtés et poursuivis.
La condamnation et l’arrêt de la criminalisation des mouvements sociaux au Mexique.

Cette campagne est une initiative civile et pacifique qui cherche à promouvoir la participation nationale et internationale de personnes, de familles, de groupes, de collectifs, d’organisations, de réseaux et de mouvements autour de la demande de liberté pour les treize prisonniers politiques d’Atenco. C’est une initiative de la société civile mexicaine, lancée par une dizaine d’organismes de défense des droits humains, civils, solidaires, d’avocats de la défense, de familles des treize prisonniers et poursuivis politiques, tous convoqués par le Front communal pour la défense de la terre.

La campagne intégrera diverses actions au niveau national et international :

Une campagne de messages aux treize prisonniers politiques d’Atenco en provenance de tout le pays et du monde entier pour que les citoyens et citoyennes puissent exprimer par écrit leur soutien à chacun des prisonniers.

Une campagne nationale d’information où nous distribuerons des milliers de tracts et d’affiches informant la population sur la situation des treize prisonniers. La campagne nationale comprendra des productions radiophoniques et vidéo pour distribuer du matériel par divers médias.

Une campagne d’information dans les médias commerciaux et alternatifs, où quelques-unes des personnalités qui ont rejoint la campagne ainsi que les organisations qui y participent demanderont des espaces aux médias de masse pour expliquer la situation des treize prisonniers politiques et inviter les citoyens à participer à cette campagne.

Toutes les organisations, réseaux, collectifs, familles et personnes pourront prendre l’initiative d’actions civiles et pacifiques de diffusion et de protestation exigeant la LIBERTÉ pour les treize prisonniers politiques d’Atenco. Un exemple : les étudiants et professeurs d’université ont déjà organisé ce mercredi 18 à 13 heures à la faculté de droit de l’Université nationale autonome du Mexique un forum juridique qui analysera l’affaire d’Atenco ; le jeudi 19 également à l’UNAM aura lieu un forum d’analyse sur le mouvement social représenté dans le Front communal pour la défense de la terre. C’est pourquoi, dans cette campagne, il y aura de multiples forums, actions culturelles, prières, collectes et réunions d’information, des lettres, des argumentaires et des manifestes.

Nous ouvrirons des centres de collecte de matériel pour soutenir le plantón (campement) que maintiennent depuis bientôt trois ans diverses organisations devant le pénitencier de Molino de Flores. Les gens pourront donner des vivres et autre matériel pour soutenir cette initiative.

Plusieurs des personnalités membres de cette campagne réaliseront personnellement des visites aux pénitenciers de l’Altiplano et de Molino de Flores, pour rencontrer directement les prisonniers politiques.

Nous irons trouver diverses instances, en particulier celles qui défendent les droits humains, pour leur exposer notre opinion sur la libération des prisonniers.

Nous suivrons et soutiendrons la défense légale des treize prisonniers.

Nous renforcerons le processus d’investigation des violations des droits humains. En son temps, nous évaluerons la pertinence de s’adresser à des instances internationales.

Nous appelons la société civile nationale et internationale à participer aux journées du troisième anniversaire des événements d’Atenco. Nous les invitons à réaliser des actions de protestation civile et pacifique dans leurs localités, leurs quartiers et leurs communautés, dans leurs écoles et lieux de travail, et les 3, 4 et 5 mai à réaliser des mobilisations pour la liberté des treize prisonniers politiques d’Atenco.

Il y aura information publique sur la forme et les dates de toutes ces activités.

Notre page web atencolibertadyjusticia.com recevra les inscriptions de toutes celles et tous ceux qui désirent réaliser une action pour la liberté et la justice. À travers elle, on pourra envoyer à chaque prisonnier un message par écrit. On pourra également y inscrire les actions que, dans tout le pays et dans d’autres nations, la société civile décidera de mener.

Enfin, cette initiative ne dispose d’aucune ressource ni financement. Les activités se dérouleront avec les ressources que toutes et tous nous donnerons pour les frais qu’impliquent plusieurs de ces activités. Nous avons ouvert un numéro de compte qui recevra des dons uniquement et exclusivement pour ces activités. Il ne faut pas confondre ce compte avec aucun autre type de soutien, il ne sert qu’à réaliser les activités qui font partie de la campagne. On pourra donner 50 pesos dans n’importe quelle succursale de BANORTE sur le compte 0608878038 au nom de María Antonia Trinidad Ramírez Velázquez pour soutenir – exclusivement – les frais de la campagne nationale et internationale LIBERTÉ ET JUSTICE POUR ATENCO.

Bien à vous.

Comité liberté et justice pour Atenco.

Envoyez vos signatures à justicepouratenco@gmail.com

Signataires au lancement de la campagne au Mexique :

Samuel Ruiz García, évêque émérite du diocèse de San Cristóbal de Las Casas, Ofelia Medina, actrice, Manu Chao, musicien, Julieta Egurrola, actrice, Carlos Montemayor, écrivain, Ana Francis Mor, actrice, Raúl Vera, évêque du diocèse de Saltillo, Coahuila, Francisco Toledo, peintre, Diego Luna, acteur, Roco, chanteur du groupe de rock Maldita Vecindad y los Hijos del Quinto Patio, Adolfo Gilly, professeur d’université, Luis Villoro, philosophe, Bruno Bichir, acteur, Paco Ignacio Taibo II, écrivain, journaliste, Daniel Giménez Cacho, acteur, Miguel Angel Granados Chapa, journaliste, Demián Bichir, acteur, Fray Miguel Concha Malo, frère dominicain, directeur du Centre de droits humains Fray Francisco de Vitoria, Luis Hernández Navarro, journaliste, Rubén Albarrán, chanteur du groupe de rock Café Tacuba, Jorge Zarate, acteur, Los de Abajo, groupe de ska et rock.

Organisations participant :

Centre de droits humains Miguel Agustín Pro Juárez, Centre national de communication sociale (CENCOS), Comité Cerezo, Comité Monseigneur Romero, Colectif d’avocats zapatistes (CAZ), Groupe pour le dialogue parlementaire et l’équité, Front communal en défense de la terre (FPDT), La Voladora Radio, Femmes sans peur, Services légaux et études juridiques, Services et assesseurs pour la paix (SERAPAZ).

http://www.atencolibertadyjusticia.com/

Traduit par el Viejo.