C’est par le média indépendant Mediacoop de Clermont-Ferrand que nous avons appris la nouvelle de l’incarcération de Tristan Arnaud, jugé coupable de racisme, harcèlement et violences. A 29 ans, Tristan Arnaud va goûter pour la deuxième fois à la privation de liberté. Et pour la deuxième fois, il retourne au centre pénitentiaire de Riom (Puy-de-Dôme). C’est ce mercredi 10 janvier qu’est tombée la sentence : 2 ans d’emprisonnement dont un an avec sursis.

Mediacoop était présent au tribunal et nous fait le récit du procès, en réalité deux. (1)

Ce multirécidiviste, coupable de plusieurs agressions n’a pas changé depuis ses 15 ans et le début de son activisme à l’extrême-droite quand il habitait à La Roche-sur-Yon. Le jour de son procès, il cumulait déjà 6 inscriptions dans son casier judiciaire et 9 condamnations, on se demande bien qui est « la racaille ». Par cet article, nous allons retracer son parcours au sein de l’extrême-droite.

A La Roche-sur-Yon, Tristan Arnaud vivait seul avec sa mère dans la petite cité Sadi Carnot. Il a fait ses études au lycée Kastler avant de s’en faire viré pour apologie du IIIème Reich, déjà. Il ira ensuite au lycée De Lattre de Tassigny, pas longtemps, il mettra fin à ses études.En 2010, il adhère à ses 16 ans au Front national jeune (FNJ) de Vendée, dirigé alors par François-Xavier Gicquel, étudiant à l’ICES. Ce dernier s’est fait connaître pour avoir commémoré -le bras tendu- la mort de Mussolini en 2012 avec les Jeunesses Nationalistes, ce qui lui vaudra d’être exclu du FN Vendée où il avait été candidat à plusieurs élections. (2)

En parallèle du FNJ Vendée, Gicquel recrute pour le groupuscule Renouveau français. Tristan Arnaud en sera un des militants. En octobre 2010 à La Roche-sur-Yon, une douzaine de fafs du Renouveau français venus de Nantes (avec Eric Sellenet en chef) et de Vendée (dont le très jeune Bryan Guitton), viennent perturber une manifestation contre la réforme des retraites voulue par Sarkozy. Après plusieurs minutes d’incompréhension sur leurs intentions, ils se feront chassés sur plusieurs centaines de mètres, protégés par les flics, qui feront usage de flashballs, une première dans une manifestation en Vendée. Le 9 mai 2011, Tristan Arnaud est présent au C9M à Paris avec d’autres boneheads. (3) Ce jour là, il ne savait pas qu’il serait employé au « service d’ordre » de cette même manifestation 12 ans plus tard, nous en reparlerons plus loin dans cet article.

En janvier 2012, Jean-Marie Le Pen vient faire campagne pour les présidentielles à La Roche-sur-Yon. Le mouvement antifasciste au courant, lance l’initiative d’un rassemblement dans le centre ville. La veille, par provocation, des tags pro-Le Pen sont inscrits sur le lieu du rassemblement. Le lendemain, 250 personnes sont présentes contre le FN. A peine les prises de paroles commencées, une dizaine de fafs arrivent en gueulant « la France aux français », Tristan Arnaud en tête. Les kamikazes n’auront pas le temps de faire 10 mètre de plus qu’une foule d’antifascistes se ruent sur eux mais la police en nombre fait barrage. Les fafs seront raccompagnés dans les voitures de la police pour leur protection. Pour finir cette journée, le lieu où se trouve Le Pen, tenu jusqu’alors secret, est trouvé. Une centaine de manifestant.es prennent la route jusqu’à la salle de l’hôtel IBIS à 5 km. Sur place, un cortège se forme pour une arrivée en force. Deux voitures remontent le cortège, ses passagers rigolards font des doigts d’honneurs aux antifascistes. Ce sont les 10 fafs vus plus tôt. Reconnus, les voitures sont prises à partie, les rires disparaissent. Une voiture réussit à fuir sans trop de dégâts. L’autre sera méticuleusement déboîtée, une vitre explose par un coup de poing rageur, les portières sont forcées pour en sortir les provocateurs mais après de très dangereuses manœuvres ils finissent par s’enfuir pour rejoindre le gueuleton du FN.

A la même période, Tristan Arnaud, avec sa bande de nazi-skins, se livreront à plusieurs expéditions punitives contre un squat (dans l’ancien bâtiment des ASSEDIC Rue Gaston Ramon) où sont réfugié.e.s des familles « étrangères ». Une nuit, un parpaing est lancé à travers une fenêtre, manquant de peu de tomber dans le lit d’un enfant. Un soir c’est une banderole qui est arrachée à la façade du bâtiment, puis postée comme trophée sur les réseaux sociaux, en montrant armes aux poings (voir photo) leurs véritables intentions : tuer. Un autre soir, les agresseurs qui tentaient de rentrer dans le squat sont surpris par les habitants, ils devront fuir en voiture, pourchassés jusqu’à ce qu’ils trouvent refuge devant le commissariat.

Arrive l’année 2013, La manif pour tous enchaîne les manifestations homophobes à La Roche-sur-Yon. Tristan Arnaud sera de plusieurs de ces manifs. Il profite de ces manifestations pour coller des autocollants promotionnels de groupes de «musique » NSBM (national socialist black metal) dont le groupe français Peste Noire. Ce qu’il ne sait pas encore, c’est que quelques années après, il fréquentera le leader du groupe à Clermont-Ferrand, qui fait partie de la Mysanthropic Division. (4)Néonazi jusque dans la peau, il se fait tatouer sur le haut du front un SkinS (sic) avec les S cassés de la SS nazie (voir photo où il porte le sweat-shirt du groupe de « musique » néonazie Blood and Honour). Plus tard, il se fera tatouer à l’avant bras gauche un 88 qui est un code signifiant HH pour Heil Hitler. (voir photo)A l’époque c’est la CNT qui mène la lutte antifasciste en Vendée, ne laissant pas de répit aux homophobes. Le 1er juin, la CNT se voit interdire par la Préfecture un rassemblement contre l’homophobie. Ce jour là, la police et une compagnie de CRS sont présentes pour interpeler toustes manifestant.e.s qui ne respectent pas l’interdiction. Tristan Arnaud venu en découdre, se fera contrôler avec un de ses amis en possession d’un poing américain.

Turm von Frankreich

Il partira de La Roche-sur-Yon vivre quelques temps à Bourg-en-Bresse (Ain). Retour dans l’ouest, dans le Morbihan. Il y retrouvera d’autres néo-nazis de Vendée partis habiter en Bretagne. Tritrou (son surnom), y fréquentera la bande de boneheads de Quimper (Kemper Krew), qui s’est fait connaître pour de multiples agressions. (5) Avec ses connaissances en Bretagne il monte un groupuscule clairement néo-nazi, le White Rebels Crew (voir photo). Ce groupuscule est lié à la Misanthropic Division (MD). Avant sa dissolution en 2015, la MD sert d’unité de combat dans le régiment néonazi Azov, dans l’est de l’Ukraine, contre les séparatistes pro-russes. La MD utilise son réseau à l’internationale pour former et recruter des combattants. (6)

Tristan Arnaud fréquente aussi les militants d’ADSAV, parti nationaliste breton créé par des collabos du régime nazi. En octobre 2014, Tristan Arnaud invite à La Roche-sur-Yon un de ses amis bretons. Il est néonazi comme lui et tout autant homophobe. Après avoir picolé, ils se mettent en tête d’une proie pour assouvir leur violence et leur haine. Ils choisissent d’aller s’attaquer à des homosexuels qui fréquentent un coin de nature tranquille aux abords de la ville. Ils veulent « en choper un », ce qu’ils feront : coups de poings, coups de matraque. (7)

La victime arrive à s’échapper et donne un signalement aux flics. Fiché S depuis 2011, Tristan Arnaud est tout de suite reconnu. Au tribunal, ils reconnaissent leur homophobie. Julien Poyac, l’ami rennais de Tristan Arnaud, dira aux juges : « J’ai mon point de vue. Il y a des choses que je ne tolère pas, comme l’homosexualité ». 18 mois de prison ferme pour Poyac. Tristan Arnaud écope d’un an de prison dont six mois avec mise à l’épreuve, sans mandat de dépôt. Il échappe de peu à l’enfermement mais ne changera rien à ses convictions de haine. De la haine, il en a aussi contre la communauté juive. Pour preuve il prend fièrement la pause (voir photo) avec Robert Faurisson, négationniste de la Shoah, mort à…Vichy en 2018.

Il vivra aussi un peu à Nantes, mais des histoires de drogues l’ont contraint à vite déguerpir. En 2016, il se retrouve à Clermont-Ferrand. Là-bas, avec son background, il deviendra rapidement un des leaders du Bastion social (ex GUD). Comme dans d’autres villes, le Bastion social ouvre un local. Vite trouvé par les antifascistes locaux, la pression est mise pour le faire fermer. Les fafs ne le vivent pas sereinement et sont nerveux. Un soir de septembre 2018, pour une raison futile ils agressent violemment quatre personnes passant devant le local. Dans la nuit, ils fuient à Strasbourg, ils s’y feront cueillir par les flics. Mediacoop relate la comparution immédiate et le procès. ( 8 )

On y apprendra que Tristan Arnaud est jugé pour une seconde affaire au même moment, pour une agression raciste à la sortie du stade de Clermont-Foot. Il fréquente le stade avec son groupe la Brigade Arverne, plus porté sur la baston que sur le supporterisme. Son casier judiciaire est loin d’être vierge, avec 6 condamnations depuis 2013 notamment pour vol en réunion, violence en réunion et port d’armes, vol avec violences. Verdict : trois ans de prison dont deux ans de sursis, et mise à l’épreuve. Le voilà enfermé pour la première fois au centre pénitentiaire de Riom. Il n’a pu le droit de revenir dans le Puy-de-Dôme.

Contraint à l’exil Après son année de taule, il revient quelques mois en Vendée. Il est embauché par la STEF comme chauffeur-routier. L’employeur a fermé les yeux sur le passif de son nouvel employé, faut dire que cette entreprise n’a rien à redire sur les problèmes liés au racisme. (9)

Tristan Arnaud part plus au sud, à Bordeaux. N’ayant absolument pas mis d’eau dans son vin, il rejoint le groupuscule néonazi local : Bordeaux nationaliste (BN). Créé en 2016, avec la bénédiction du Front national de la Gironde, ils partageront le même local, le Menhir. En peu de temps, Tristan Arnaud s’impose comme un des leaders de BN. S’en suivent agressions et provocations dans la ville et les alentours. Avec sa troupe, ils iront à Paris en février 2020 lors d’une manifestation anti-PMA (Marchons enfants), ils y feront la rencontre d’autres groupuscules fafs, un début de l’interfafs. (10)Cette interfafs existent aussi plus localement. C’est le cas dans le sud-ouest où à Toulouse, lors d’une manifestation contre le pass-sanitaire le 11 septembre 2021, différents groupuscules d’extrême-droite locaux s’associent (avec des renforts de Nîmes, de Montpellier et de Bordeaux nationaliste) pour attaquer le cortège anti-autoritaire composé de plusieurs antifascistes locaux. Les fafs attaquent violemment, armés, les coups pleuvent, le sang coule. Un temps désarçonné, les antifascistes réagissent et repoussent par deux fois les attaques. Le déroulé complet est décortiqué avec de nombreuses photos par le blog fafwatch. (11) 5 interpellations ont lieu en fin de journée dans un bar, 2 sont toulousains et 3 sont de Bordeaux, dont Tristan Arnaud. Ils seront tous relaxés par la justice. A noter qu’Yvan Benedetti (antisémite notoire et multi-condamné) lui apportera son soutien personnellement après son interpellation, pas étonnant de voir que l’avocat d’Alain Soral et du parti Les Nationalistes, Pierre Marie Bonneau, sera celui qui le défendra à Clermont-Ferrand ce 10 janvier. Après de nouvelles agressions à caractères racistes, BN se retrouve dans le viseur de Darmanin. Le 1er février 2023, le conseil des ministres dissout Bordeaux nationaliste, qui se reforme rapidement sous le nom de Bastide bordelaise.

Pourtant interdit de se présenter dans le Puy-de-Dôme, Tristan Arnaud revient à Clermont-Ferrand en janvier 2022 avec d’autres membres de Bordeaux nationaliste. Il a interdiction de se présenter dans le Puy-de-Dôme depuis son procès en 2018. Évidement, il rejoint le groupuscule néonazi local, Clermont-Ferrand Nationaliste. Quelques mois plus tard, ils créent un nouveau groupe : Clermont-Non-Conforme. Ils se feront connaître dans le Puy-de-Dôme pour leurs violences et pour avoir fait le « service d’ordre » du C9M à Paris, un défilé de néonazis qui a choqué bien au delà des frontières. Comme nous l’écrivions au début de cet article, il est pour cette occasion passé de militant de base à cadre puisqu’officiellement membre du « service d’ordre » du défilé organisé par le GUD. (12)Pour le reste, c’est l’article de Mediacoop sur Clermont-Non-Conforme qui vous renseignera au mieux sur ce groupuscule néonazi. (13)

Visiblement, Tristan Arnaud, n’a d’autre projet de vie que d’être un néo-nazi, ce qui le conduit à agresser avec violence celleux qui ne lui reviennent pas. Il est clair qu’il est un danger pour tout le monde. Selon nos informations, Tristan Arnaud n’en a pas fini avec la justice et devra comparaître pour de nouvelles affaires dans les mois à venir. Rien qu’en France, des militants comme Tristan Arnaud, il y en a d’autres, beaucoup d’autres. L’extrême-droite passe des mots aux actes. Pour la Vendée, nous pensons bien évidemment à Bryan Guitton (Virido Galia), lui aussi multi-condamné pour son activisme à l’extrême-droite, qui aura lui aussi un procès à venir pour ses violences. (14)

(1) : https://mediacoop.fr/…/proces-du-neo-nazi-tristan…/…

(2) : https://lahorde.samizdat.net/loeuvre-francaise-40-ans…

(3) : https://reflexes.samizdat.net/9-mai-2011-loin-deyzieu…/

(4) : https://www.streetpress.com/…/1622043599-famine-star…

(5) : http://www.cva22.lautre.net/…/roz_tattoo_et_les_neo… et https://www.ouest-france.fr/…/quimper-sept-skinheads…

(6) : https://indextreme.fr/autres/misan.html

(7) : https://france3-regions.francetvinfo.fr/…/la-roche-sur…

( 8 ) : https://mediacoop.fr/…/comparution-immediate-des…/ et https://mediacoop.fr/…/proces-du-bastion-social-des…/

(9) : https://www.ouest-france.fr/…/vendee-apres-leur-retour…

(10) : https://lahorde.samizdat.net/Meurtre-de-Thomas-a-l…

(11) : https://fafwatch2.noblogs.org/…/midi-pyrenees-toulouse…/

(12) : https://www.francetvinfo.fr/…/quatre-questions-sur-le…

(13) : https://mediacoop.fr/…/enquete-qui-se-cache…/…

(14) : https://lahorde.samizdat.net/nantes-parcours-de-bryan…

 

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