Alors que des appels pour une justice pénale impartiale désespérés proviennent de tous les coins de la planète, un simple examen du Règlement financier et des règles de gestion financière de la Cour Pénale Internationale adoptés par l’Assemblée des Etats Parties en première session à New York les 3-10 septembre 2002 peut nous faire douter de la fiabilité éthique de cet outil conçu pour appréhender et juger des criminels de guerre et des criminels contre l’humanité… Nous avons affaire, ici, à un réel processus de privatisation de la justice pénale.
L’on est parfaitement en droit de se demander si les jugements de Charles Taylor, de Saddham Hussein, de Thomas Lubanga Dyilo ou de Drago Nikolic exerceront une quelconque influence sur la spéculation des matières premières ou sur le régime des privatisations au Libéria, en Irak, au Congo ou dans les Balkans ?….

Examen du Règlement financier et des règles de gestion financière de la CPI

 » Article 5 Constitution des fonds 5.1
Les ressources financières de la Cour comprennent :
a) Les contributions mises en recouvrement auprès des États Parties, conformément aux dispositions de l’article 115, paragraphe a), du Statut de Rome;
b) Les contributions versées par l’Organisation des Nations Unies conformément aux dispositions de l’article 115, paragraphe b), du Statut de Rome;
c) Les contributions volontaires versées par des gouvernements, des organisations internationales, des particuliers, des entreprises ou d’autres entités, conformément à l’article 116 du Statut de Rome;
d) Tous autres fonds que la Cour pourrait ultérieurement être en droit de percevoir ou qui pourraient lui être versés.

Article 6 Fonds divers
6.1 Il est créé un Fonds général où sont comptabilisées les dépenses de la Cour. Les contributions des États Parties visées à l’article 5.1, les recettes accessoires et les sommes prélevées à titre d’avances sur le Fonds de roulement pour faire face aux dépenses sont portées au crédit du Fonds général.
6.5 Des fonds d’affectation spéciale et des comptes spéciaux intégralement financés par des contributions volontaires peuvent être constitués et clos par le Greffier, qui en informe la présidence et, par l’intermédiaire du Comité du budget et des finances, l’Assemblée des États Parties.
Règle 106.1 Solde inutilisé des contributions volontaires La Cour dispose du solde inutilisé des contributions volontaires à des fonds d’affectation spéciale, des comptes de réserve et des comptes spéciaux lorsque les activités correspondantes de la Cour sont financièrement achevées conformément à l’accord en vertu duquel lesdites contributions ont été versées.

Article 7 Autres recettes
Règle 107.2 Réception des dépôts des contributions et autres recettes
a) Un reçu officiel est délivré aussi rapidement que possible à la réception d’espèces ou d’instruments négociables.
b) Seuls les fonctionnaires désignés par le Greffier sont habilités à délivrer des reçus officiels (voir aussi art. 10.1 b) du Règlement financier). Si d’autres fonctionnaires reçoivent une somme destinée à la Cour, ils doivent immédiatement la remettre à un fonctionnaire habilité à délivrer un reçu officiel.
c) Toutes les sommes reçues sont déposées sur un compte en banque officiel aussitôt que possible.
7.2 Le Greffier peut accepter des contributions volontaires, dons et donations, qu’ils soient ou non en espèces, à condition qu’ils soient compatibles avec la nature et les fonctions de la Cour et les critères qu’adoptera l’Assemblée des États Parties sur le sujet en vertu de l’article 116 du Statut de Rome. L’assentiment préalable des États Parties est requis pour l’acceptation de contributions qui entraînent pour la Cour, directement ou indirectement, des obligations financières supplémentaires.
7.3 Les contributions volontaires acceptées à des fins spécifiées par le donateur sont considérées comme des fonds d’affectation spéciale ou inscrites à un compte spécial.
7.4 Les contributions volontaires acceptées sans que leur objet ait été spécifié sont considérées comme recettes accessoires et sont portées comme « dons » dans les comptes de l’exercice.

Article 8 Dépôt des fonds 8.1
Le Greffier désigne la banque ou les banques dans lesquelles les fonds de la Cour sont déposés.
Comptes en banque Règle 108.1 Comptes en banque, pouvoirs et principes applicables
Le Greffier désigne les banques dans lesquelles les fonds de la Cour doivent être déposés, ouvre tous les comptes en banque officiels nécessaires à l’exécution des activités de la Cour et désigne les fonctionnaires auxquels le pouvoir de signer tous ordres relatifs auxdits comptes est délégué. Le Greffier autorise également toutes les fermetures de compte en banque.
Les comptes en banque de la Cour doivent être ouverts et utilisés conformément aux principes suivants :
a) Les comptes en banque sont qualifiés « comptes officiels de la Cour pénale internationale » et l’autorité compétente est avisée que ces comptes sont exonérés de tous impôts et qu’ils bénéficient des immunités prévues à l’article 6 de l’Accord sur les privilèges et immunités de la Cour;
b) Les banques doivent être tenues de fournir des relevés mensuels;
c) Deux signatures, ou leur équivalent électronique, doivent figurer sur tous les chèques et autres ordres de retrait, y compris les modes de paiement électronique;
d) Toutes les banques doivent reconnaître que le Greffier est habilité à recevoir, à sa demande, aussi rapidement que possible, tous renseignements concernant les comptes en banque officiels de la Cour.

Article 9 Placement des fonds
9.1 Le Greffier peut placer à court terme les fonds qui ne sont pas nécessaires pour faire face à des besoins immédiats; il fait périodiquement connaître à la présidence et, par l’intermédiaire du Comité du budget et des finances, à l’Assemblée des États Parties les placements ainsi faits.
Règle 109.1 Principes généraux
a) Les investissements à court terme sont des inv estissements pour une période inférieure à 12mois.
b) Le Greffier veille, notamment en énonçant les directives voulues et en choisissant des établissements financiers de bonne réputation contre toute perte résultant des investissements, à ce que les fonds soient placés sans risques en préservant la liquidité nécessaire pour répondre aux besoins de trésorerie de la Cour. Outre ces critères principaux, et sans que cela y déroge, les investissements doivent être choisis en vue d’obtenir le taux de rendement raisonnable le plus élevé et doivent être compatibles, dans toute la mesure possible avec l’indépendance et l’impartialité de la Cour et avec les buts et principes de la Charte des Nations Unies… » (extrait Règlement financier et règles de gestion financière -CPI)

Quelques matériaux d’histoire

Tribunal pénal international pour l’ancienne Yougoslavie (TPI-y)
I-Le Tribunal pénal international pour l’ancienne Yougoslavie (TPI-y) a été mis sur pied par le Conseil de sécurité des Nations Unies en 1993. Il a pour mandat de poursuivre les personnes présumées coupables d’avoir commis des atteintes graves au droit humanitaire international, dont des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et le génocide, dans l’ancienne Yougoslavie depuis 1991.
Depuis ses débuts, la charge de travail du Tribunal s’est considérablement alourdie. Son personnel est passé à 1 062 personnes provenant de 79 pays, tandis que son budget a grimpé de 276 000 $ US en 1993 à plus de 270 millions de dollars américains en 2004-2005. Le budget de 2004-2005 devrait représenter un sommet dans le financement requis pour le Tribunal, alors que les enquêtes diminuent.

II-Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR)
Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a été mis sur pied en 1994 par le Conseil de sécurité des Nations Unies afin de traduire en justice les dirigeants et planificateurs du génocide de 1994 au Rwanda, qui a fait 800 000 victimes chez les Tutsis et les Hutus modérés, selon les chiffres estimatifs. Le TPIR est basé à Arusha, en Tanzanie.
Le budget de 2005 du TPIR dépasse les 100 millions de dollars et son personnel provient de plus de 80 pays. Le TPIR suit un échéancier semblable à celui du TPI-y. Ainsi, toutes les enquêtes doivent être closes à la fin de 2004 (but atteint), tous les procès devront être terminés en 2008 et tous les appels à la fin de 2010.

III-Tribunal spécial de la Sierra Leone
Le 14 août 2000, le Conseil de sécurité adopte la résolution 1315 demandant au Secrétaire général de négocier avec le gouvernement de la Sierra Leone afin d’établir un tribunal spécial indépendant qui serait saisi des atteintes graves au droit humanitaire international et au droit de la Sierra Leone. En janvier 2002, le Secrétaire général et le gouvernement de la Sierra Leone ont officiellement signé l’entente créant le Tribunal spécial. Celui-ci a été constitué en 2002 et est situé à Freetown, en Sierra Leone.
Le Canada a joué, et continue de jouer, un important rôle de leader dans la création et la gestion du Tribunal spécial. En juin 2005, le Canada a repris la présidence du Comité de gestion du Tribunal spécial aux Nations Unies. Un nombre important d’employés du Tribunal spécial travaillant au sein de divers secteurs du tribunal sont Canadiens. Parmi ceux-ci se trouvent un juge de la Chambre d’appel, le procureur en chef, l’enquêteur en chef et de nombreux avocats et stagiaires.
Alors que les progrès du Tribunal ont été remarquables, son travail est menacé en raison d’un important manque de financement. Le tribunal est financé grâce à des contributions volontaires. Le Canada a versé un total 3,25 millions de dollars et a généreusement fourni des experts au Tribunal, dont des enquêteurs de la GRC et des stagiaires en droit. Lors d’une récente conférence pour les annonces de contributions aux Nations Unies, le Canada s’est engagé à fournir 1,7 million de dollars supplémentaires et à continuer à prêter du personnel afin d’aider le Tribunal à mener à terme son mandat de première importance.

Très solidairement pour une justice pénale indépendante, Christian Pose
http://linked222.free.fr/cp/links/crime.html