Le Medef organisait à Limoges, ce mercredi, un forum intitulé « l’entreprise voit jeune ». Au menu des réjouissances patronales, la formation des jeunes,
et la diffusion de l’idée selon laquelle c’est l’entreprise qui seule est censée validée les formations, parce que c’est elle qui crée les richesses, qui crée les emplois, cf. Seillière, AG Medef, 18.01.05), et parce que c’est bien terrible, on a une société avec trop de savoir et pas assez de
« compétence ».

Sauf que…

Une soixantaine de personnes (quelques chômeurs, retraités, profs, et beaucoup d’étudiants) a répondu à l’appel à action lancée quelques jours auparavant et qu’un véritable piquet s’est mis en place un 1/4 d’heure avant le début du « forum » (à 16heures). Ce piquet a tenu jusqu’à 19 heures (horaire de clôture).
Quelques patrons locaux agacés ont tenté de forcer le barrage, en vain.
L’ex-doyen de la fac de droit, hôte de circonstance (le forum se tenait dans les locaux de cette faculté) a tenté de guider des participants au forum à travers le dédale de l’immeuble, par des portes dérobées. Avec plus ou moins de réussite (la mobilité ça a parfois du bon…).

Au final, un fiasco pour le Medef. Plus de la moitié des participants n’ont pu pénétrer l’amphithéâtre des horreurs. Une opération de com’ foirée pour le Medef : France 3 ne parle que de l’action, et pas du forum.

Ci-dessous le tract distribué à cette action.

Retranscription de l’action : Xavier.

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Contre la cuisine du Medef,
d’autres recettes sont possibles !

La principale organisation patronale de ce pays (le Mouvement des Entreprises De France) organise à Limoges, ce jour (mercredi 2 février), un forum intitulé  » L’entreprise voit jeune « . Il ne s’agit pas d’un débat, mais d’un exposé unilatéral, où la seule perspective est celle de l’entreprise. Pour le Medef, l’enjeu est de s’octroyer le droit de décider ce qui est ou n’est pas de la formation.

A l’université nous vivons une phase de réformes libéralisant l’enseignement supérieur. Le temps étudiant est de plus en plus soumis à la loi de l’entreprise (stage,  » professionnalisation « , jobs étudiants) tandis que les aides sociales versées aux étudiants s’amaigrissent d’année en année (augmentation du prix d’un repas universitaire, problème de logement,
bourses dérisoires). Un étudiant sur deux est contraint de travailler pour financer ses études, seulement 6,7% des étudiants ont droit à la bourse maximale (295 par mois). Les cursus étudiants tendent à s’individualiser,
les diplômes deviennent des CV, où s’inscrivent les  » compétences  » obtenues (stages dans telle entreprise, unité d’enseignement acquise dans telle université), dans un esprit de compétition et de sélection sociale accrue.
Les universités se voient couper leur budget, et elles sont sommées de rentabiliser leurs activités et de multiplier les partenariats avec le secteur privé : vente de services, pôles d’excellence, logique managériale, utilitarisme.

Dans les lycées, on ne compte plus les multiples partenariats avec l’entreprise où sous prétexte de professionnalisation, les stages ne sont toujours pas payés.

La  » formation « , selon le Medef, c’est aussi les bilans de compétence que l’on inflige aux chômeurs. Trop souvent, ces bilans de compétence se traduisent en déqualification de la formation et des désirs de la personne concernée, et en réorientation vers des emplois précaires et sous-payés.
C’est un élément de plus de contrôle social.

La question de la  » formation  » n’est qu’une partie d’un projet patronal d’ensemble : mettre l’entreprise au centre de la société, et faire de chaque individu, un entrepreneur qui prend des risques, sans droits collectifs.

Le PARE (plan d’aide au retour à l’emploi) a sacrifié ce qui subsistait de solidarité interprofessionnelle dans l’assurance chômage, en soumettant les chômeurs à plus de contrôle, de culpabilisation, moins d’indemnisations.
La destruction du régime de l’intermittence montre comment le Medef, au sein de l’UNEDIC (système d’assurance-chômage gérée par le Medef et les grandes confédérations syndicales), cherche à démolir la notion même de droits collectifs. Ce régime spécifique représentaient le seul régime salarial reconnaissant que le travail excède l’emploi, le seul régime qui protègeait un tant soit peu les salariés à l’emploi discontinu.

Cette  » refondation sociale » s’expérimente en grandeur réelle, d’abord et avant tout, sur les chômeurs, les travailleurs précaires et tous les salariés à l’emploi discontinu. Cette politique d’individualisation, de
généralisation de l’incertitude, précarise toujours plus. Elle s’étend à tous les droits sociaux (retraites, sécurité sociale, durée légale du travail, ). Elle est appliquée par ceux qui concentrent richesses et pouvoir.

Ce  » forum « , organisé par un parti patronal, est une provocation. Cette opération de communication ne pouvait pas rester sans réponse, car elle sert à véhiculer le mensonge selon lequel la formation ne sert qu’à l’emploi, et que seul l’emploi qualifie le temps de travail.

Non, le temps d’emploi ne résume pas le travail, c’est le cas pour les étudiants salariés, les chercheurs, les intermittents, et pour de plus en plus de salariés (en poste ou non). Non, nous ne sommes pas les valeurs
d’ajustement de leurs  » réformes « . Non, l’inflation du risque et la précarisation ne sont pas fatales.

Oui ! chacun, là où il est, peut combattre l’insécurité sociale qui est le principe de leur politique.
Oui ! nous pouvons le faire ensemble. C’est l’affaire de tous les concernés. Et personne ne le fera à notre place.

Aujourd’hui et demain, dans tous les secteurs, luttons pour sauvegarder nos droits sociaux et en gagner de nouveaux, pour tou-te-s.

AC ! – AGEL/FSE – CNT – Sud Etudiant