L’OPÉRATION POLICIÈRE « LOI ET ORDRE » CONTRE EXARCHEIA ET ROUVIKONAS SERAIT PRÊTE À ÊTRE LANCÉE

Selon le nouveau ministre de l’ordre public, Michalis Chrysochoidis, et le sous-ministre en charge de la politique pénale et pénitentiaire, Lefteris Economou, le plan de l’État serait prêt pour attaquer le quartier rebelle d’Athènes.

Un énorme dispositif policier se prépare, avec des MAT (CRS), des voltigeurs DIAS, des agents des services de renseignements, des équipes antiterroristes et d’autres unités.

Le nouveau premier ministre, Kyriakos Mitsotakis, veut absolument que son mandat commence en frappant un grand coup, au plus vite, contre « les « anarchistes et « les cagoulés » qui seraient soi-disant responsables du trafic de drogues et du trafic d’armes dans la capitale. « Les migrants » seraient également responsables de cette chienlit, selon les chaînes de télé, plus précisément « employés par les antiautoritaires » dans une sorte de « mafia libertaire et internationale au centre-ville ».

Bref, une très grosse parano dans tous les médias à la botte pour justifier l’offensive imminente de l’État grec contre un des rares bastions d’autogestion en Europe. Un quartier d’Exarcheia qui « donne de très mauvaises idées ailleurs, depuis trop longtemps », notamment dans sa résistance contre les incursions policières.

Le nouveau gouvernement a annoncé l’évacuation imminente de tous les lieux occupés, quel que soit l’objet du squat, dans la totalité du quartier, et de nombreuses perquisitions pour chercher de la drogue, des armes et d’autres équipements utilisés dans les luttes.

Les principaux chefs de la police se déclarent prêts à intervenir et certains de leurs subalternes ont même fait le buzz sur Facebook en annonçant leur joie d’aller casser de l’anar et du migrant. Par exemple, le flic Konstantinos Iliopoulos a déclaré :
« À partir de demain, anarchistes de merde et fils de putes, nous serons dans Exarcheia comme chez nous avec l’équipe Delta » (groupe tristement célèbre de voltigeurs très violents recrutés dans l’extrême-droite la plus virulente).

Le pouvoir caresse également l’idée de classer Rouvikonas parmi les organisations terroristes, chose à laquelle ses prédécesseurs avaient renoncé il y a un an(1). « Empêcher définitivement de nuire Rouvikonas est la priorité du premier ministre » a rappelé son porte-parole. Le K*Vox, place Exarcheia, est donc plus que d’autres dans le collimateur de cette opération qui devrait commencer un des prochains matins à l’aube.

Difficile de dire exactement quand ni même comment les choses vont se dérouler, mais on s’attend à beaucoup de violences de la part des CRS, impatients de pouvoir se venger contre ce quartier qu’ils détestent depuis longtemps, et contre les membres du mouvement social qui s’y trouvent.

Ce qui est certain, c’est que Exarcheia ne se laissera pas faire et, surtout, que garder durablement le contrôle du quartier sera plus difficile que d’y rentrer. Je n’en dirai pas plus ici.

Merci de votre soutien d’où qu’il vienne : il faut faire savoir qu’une fois de plus un état veut mater une zone de résistance, un laboratoire d’autonomie, d’expériences autogestionnaires et libertaires, mais aussi une formidable alternative d’accueil aux sordides camps de réfugiés. Pour le dire autrement, une fois de plus, le pouvoir veut faire disparaître l’utopie pour ne pas lui-même disparaître.

Tôt ou tard, ce sera le pouvoir ou nous. La liberté ou la mort. Car le capitalisme et la société autoritaire nous mènent dans l’impasse à tous points de vue. Soit cette société mortifère va continuer à détruire le monde, soit nous parviendrons tôt ou tard à nous libérer, à sauver la vie, à essayer autre chose.

Bien sûr, les prochains jours seront difficiles et peut-être même tragiques. Parmi les nombreux policiers qui vont venir nous chasser, nous frapper, nous arrêter, dans le labyrinthe du quartier et ses zones d’ombres, il y aura des néonazis et d’autres vermines fascistes impatientes de nous faire souffrir, de se venger de la chute d’Aube Dorée, et de casser tout simplement du gauchiste, du migrant, de l’anarchiste. Mais nous n’avons pas peur.

Nous n’avons pas peur du présent parce que nous sommes déjà demain. Nous portons une autre façon de vivre ensemble dans nos têtes et dans nos cœurs, un monde libéré des horreurs qui le défigurent, une vie sans tyran et sans valet. Nous ne résistons pas pour Exarcheia, mais pour tout le monde : pour qu’un jour, d’autres que nous parviennent à sortir de la préhistoire politique de l’humanité.

Yannis Youlountas