La corruption, le pardon y la punition nous arrivent depuis les centres du pouvoir mondial. Ils mesurent la corruption, sur base de leurs propres paramètres, élaborent leurs classifications de pays plus ou moins corrompus. Ils remettent les prix aux gagnants et dénigrent les perdants. Mais il n’y a pas que des gens aveugles dans le premier monde. J’en veux pour preuve ce que l’on trouve dans le livre de la juge franco-norvégienne, Eva Joly: « La Corruption au cœur du pouvoir » (Editions Fondo de Cultura Económica. Buenos Aires. 2003).

La juge rappelle que les Îles Caimán sont un des dix centres financiers les plus importants de la planète, Sa souveraineté appartient à la Couronne Britannique. Son Gouverneur est désigné depuis Londres par le Ministre de la Justice. Les grandes banques nord-américaines ont des succursales dans ces îles éloignées des regards de Dieu, des policiers et des agents du fisc. Il s’agit d’un des paradis financiers les plus connus de l’univers dans lequel narcotrafficants, gérants de multinationales, dictateurs et génocides « recyclent » les dollars de la cocaïne ou envoient des fonds destinés à corrompre, pour des sommes qui, l’an dernier atteignirent les 400 milliards de dollars, rien qu’en matière de licitations (« La Razón », La Paz, Bolivie, 21-X-04).

Le nom bien connu du Grand-Duché du Luxembourg engendre une sorte de respect de révérence entre les hommes sans cravates, ni nœud-papillons. Peu d’entre eux savent, dit Eva Joly, que c’est dans cet « honorable » pays que se trouve la Cour Européenne de Justice, justement à l’endroit où environ 12.000 société-écrans et 320 banques de renommée mondiale ont leurs filiales profitant du fait que les juges du Luxembourg freinent, de manière systématique toutes tentatives destinées à intervenir dans ce havre de délinquance financière.

Le juge Baltasar Garzón, qui introduit le livre d’ Eva Joly, se plaint du fait des croissantes difficultés juridiques qu’affrontent les magistrats chargés de juger, en Italie, les délits de Silvio Berlusconi, paradigme de la corruption sur le vieux continent. Ses défenseurs assurent que de faire des recherches sur des comptes bancaires secrets constitue une violation des droits de l’homme. En réponse à ceux qui luttent contre le délit, Berlusconi a nommé sa nouvelle organisation politique : « Maison des Libertés ».

Dans ce registre de la corruption, ne s’agit-il pas de corruption lorsqu’on procède à la réélection de George W Bush, à la présidence des États-Unis, alors que celui-ci, en envahissant l’ Irak, sans l’accord des Nations-Unies, s’est converti en un criminel de guerre?

Depuis sa base en Allemagne, Transparency International (TI), institution qui dit lutter contre la corruption, fait savoir, sur son site WEB, que, grâce à ses démarches, l’ Organisation pour la Coopération et le Développement (OCDE), rassemblant les pays les plus riches du monde, a conformé une commission de lutte contre la corruption, financée, par des compagnies telles que Shell, Rio Tinto Zinc (RTZ), Price Water House et Citigroup. La Shell, en gonflant ses réserves a atteint les niveaux de corruption d’ ENRON. L’anglaise RTZ, que appuyait Hitler, est un partenaire du président déchu Gonzalo Sánchez de Lozada (GSL) et elle pille le cuivre du Chili et d’autres pays « en voie de développement ». Price Water House a couvert ENRON. Les délits du Citigroup ne sauraient être présentés dans un article aussi court.

Ce qui précède ne signifie pas qu’il ne faille point lutter contre la corruption en Bolivie et dans d’autres pays semi-coloniaux.. Il ne s’agit pas d’accepter l’adage « maux de beaucoup, consolation d’imbéciles ». Tout le contraire. La conviction que la corruption nous vide de notre substance et nous détruit spirituellement et économiquement nous a amené, en 1990, a présenter la Loi des Investigations de Fortunes qui, depuis lors, dort d’un sommeil profond, ainsi qu’à écrire « La Fortune du Président », livre qui présente les détails des aventures délictives de Gonzalo Sánchez de Lozada.

Mettre en tête de la corruption mondiale à des pays comme le Bangladesh, Haiti, l’ Equateur, la Bolivie ou le Paraguay, comme le fait TI, y ne pas mentionner aux premiers postes de ce classement à l’Angleterre, aux Etats-Unis, à la France, à l’ Allemagne, à l’Italie et à la Belgique, du fait de leurs liens avec les paradis financiers, de leur responsabilité dans la destruction de l’environnement et dans la fabrication la plus honteuse d’armes de destruction massives, implique une conviction du fait qu’en plus d’être des peuples pillés, nous sommes des peuples d’idiots.