Migration: en matière d’accueil, qui s’occupe de quoi en france ?
Publié le , Mis à jour le
Catégorie : Local
Thèmes : Immigration/sans-papierEs/frontieresJohanna RollandSquare daviais
Lieux : Nantes
En Théorie l’accueil des migrant.es en France est très simple: c’est l’Etat qui gère. En ce qui concerne Nantes donc, c’est la Préfecture qui doit prendre en charge l’accueil et le traitement des dossiers des personnes arrivant sur le territoire français.
En attendant que leur dossier soit instruit et leur demande de papiers acceptée ou rejetée, qui prend en charge ces personnes ? Logement, nourriture,…Là encore, c’est l’Etat, et donc les préfectures. Ont donc été établi d’abord des CPA (Centre de Premier Accueil), puis des CAES (Centre d’Accueil et d’Evaluation des Situations). C’est quoi la différence ? Bah le premier mettait encore l’accent sur l’aspect accueil, le 2nd déclare clairement que l’accueil c’est pas inconditionnel et qu’il faut montrer patte blanche.
Ces centres proposent un hébergement temporaire pour les personnes en attente de réponse pour leurs papiers. Comme autre dispositif, l’Etat peut aussi louer des chambres d’hôtel, ou s’adresser à des associations pour louer des appartements (enfin ça, c’est plus réservé aux demandeurs/euses d’asile).
Parce que oui, il y a de grandes différences dans les statuts: si vous êtes originaire d’un pays reconnu comme “non safe”, vous pouvez déposer une demande d’asile afin d’obtenir le statut de réfugié.es. C’est à nouveau la préfecture qui va statuer là-dessus. Si vous êtes mineur.e, vous relevez alors de l’ASE, l’Aide Sociale à l’Enfance, qui elle dépend du Département.
On vous a pas perdu ? :) Bon, et demanderez-vous, le rôle des mairies dans tout ça ? Et bien en Théorie, la mairie n’est effectivement pas investie de la mission de premier accueil des exilé.es. C’est le rôle de la préfecture, comme le répète à qui mieux mieux la maire. Mais alors pourquoi est-ce que tout le monde en veut à cette bonne Jojo Rolland ?
Hé bien, nous allons quitter cette bonne Théorie où tout se passe bien, pour observer la Réalité: les centres d’accueil sont complètement insuffisants, leur gestion n’est très souvent pas menée par l’Etat comme on pourrait le penser, mais par des sociétés privées ou des associations. Pourquoi c’est pas bien ? Parce que l’Etat ce faisant, sous-traite auprès du privé ce qui devrait être de l’ordre de la mission publique. Et que c’est la porte ouverte à toute sorte de maltraitance, négligence et trafic de gros sous. Bien sûr il y a aussi des associations qui font aussi bien qu’elles le peuvent, mais souvent leurs moyens sont insuffisants. Et l’Etat ainsi se décharge de ce qui est de sa responsabilité.
Les exilé.es sont souvent laissé.es à elleux-même, les repas ne sont pas assurés, et surtout aucun effort n’est fait pour leur permettre d’évoluer au sein de la société française (pas de cours de langue, pas de rencontre, isolement total…). De plus, il est bien plus facile pour l’Etat de procéder à ses logiques de tri, avec la complicité de certaines associations, afin d’expulser à tour de bras. L’infâme “procédure Dublin”, qui consiste à dire que les exilé.es doivent déposer leur demande de papiers auprès du premier pays où iels ont été enregistré.es, en est un bon exemple.
En Réalité, l’essentiel de l’accueil est garanti par les associations, et très souvent des collectifs citoyens indépendants. Ce sont eux qui prennent en charge tout l’accompagnement (c’est à dire qui ont compris que l’accueil ne consiste pas à installer quelqu’un.e sur un lit et ensuite débrouille-toi pour le reste). Donc le “je suis pour un accueil humain mais c’est pas à moi de le faire” de Jojo, ça nous fait bien rire, ce n’est pas aux collectifs de faire le travail de l’Etat mais ils le font quand même.
La mairie n’a pas d’obligations à prendre en charge les exilé.es qui arrivent sur son territoire administré, soit, mais elle n’est pas non plus obligée de ne rien faire et d’expulser à tour de bras les lieux ouverts par les collectifs. Il y a là-dessous un véritable choix politique à faire, et on voit bien celui qu’a fait Johanna Rolland, qui a beau jeu de se défausser sur la préfecture. Oui, la préfecture manque à tous les devoirs d’Humanité et de Dignité, mais ce n’est pas une raison pour faire de même n’est-ce pas ?
Une fois les exilé.es arrivé.es en ville, on ne voit pas en quoi ce serait illogique que la mairie mette en place ses propres procédures d’accueil: ouverture des bâtiments non utilisés, installation de sanitaires et de douches, installation et mise en place d’un dispositif de ramassage des ordures…pourquoi pas une carte délivrée inconditionnellement garantissant la liberté de circuler sur le territoire de la métropole, et l’accès gratuit aux services publiques ? (hé oui on aime rêver) Et enfin, un vrai dialogue et une vraie stratégie menée de concert avec les collectifs et les exilé.es, afin d’interpeller tous les autres acteurs impliqués (préfecture, département, rectorat, gouvernement…), pour vraiment changer les choses.
Au lieu de ça, on a droit aux hashtags électoralistes, aux vieilles rengaines de l’extrême-droite (“ça va faire appel d’air!”), à des accords de couloir, et à une indifférence complète.
C’est pourquoi il ne faut pas s’y tromper, cette absence de réaction trahit en réalité des choix et une volonté politiques clairs, et qui ne sont pas ceux de l’accueil, ni de la Fraternité qui est pourtant gravée sur le fronton de leurs bâtiments. Ce n’est pas qu’on ne “peut pas accueillir toute la misère du monde”, c’est bien qu’on ne “veut pas l’accueillir” (raison pour laquelle on essaie de faire passer quelques centaines d’exilé.es pour “toute la misère du monde”).
Aujourd’hui encore, la police est passée au square Daviais harceler les exilé.es, et a embarqué une personne qui n’avait pu montrer les papiers idoines (petit scoop pour la préfecture: contrôler les papiers de personnes attendant d’en avoir, ça n’a aucun intérêt). Un appel à été lancé pour l’attendre devant le commissariat de Waldeck Rousseau, et à passer en soutien au Square (avec de l’eau fraîche si possible ? :) )
Honte à la préfète Nicole Klein, honte à la maire Johanna Rolland! Nantes se vante de son audace et de son innovation, on constate que ce sont toujours les mêmes vieilles recettes immondes que vous nous concoctez en matière d’accueil et de société!
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