«Les graves atteintes aux droits humains qui continuent d’être signalées chaque jour
dans tout le pays contredisent les promesses que le gouvernement chinois a faites
lorsqu’il défendait sa candidature pour les Jeux olympiques, a déclaré Catherine
Baber, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International. Ceux
qui militent sur le terrain en faveur des droits humains, y compris pour venir en
aide aux personnes chassées de leur habitat pour la construction des sites
olympiques, sont harcelés et emprisonnés. Des milliers de personnes sont exécutées à
l’issue de procès iniques pour des infractions comme la contrebande ou la fraude.»
«L’année qui vient de s’écouler a donné lieu à une nouvelle vague de répression des
journalistes et des internautes contraire à l’engagement qu’avaient pris les
autorités chinoises d’établir une liberté totale des médias pour les Jeux, a ajouté
Catherine Baber. L’état actuel des choses va à l’encontre de l’esprit des Jeux
olympiq!
ues, dont l’élément fondateur est le respect de la dignité humaine.»

Amnesty International a envoyé ses conclusions au CIO, qui a déclaré qu’il
interviendrait si la Chine ne respectait pas les engagements qu’elle avait pris en
matière de respect des droits humains. L’organisation prie instamment le CIO d’user
de son influence auprès des autorités chinoises et d’évoquer le cas de personnes
comme Ye Guozhu. Ye Guozhu a été évincé de chez lui lorsqu’il s’est avéré que son
logement se trouvait sur un site devant être utilisé pour la préparation des Jeux
olympiques. Il a été condamné à quatre ans d’emprisonnement après avoir demandé
l’autorisation d’organiser une manifestation à Beijing avec d’autres victimes
d’expulsions forcées en décembre 2004. Amnesty International considère Ye Guozhu
comme un prisonnier d’opinion. Il s’est avéré récemment que Ye Guozhu avait été
torturé en détention en étant, par exemple, pendu au plafond par les bras et frappé
à coups de matraques électriques.

Les autorités de la ville de Beijing ont non seulement procédé à des expulsions
forcées sur des sites liés aux Jeux olympiques mais elles ont également décidé
d’améliorer l’image de la ville d’ici l’ouverture des Jeux en élargissant la
«rééducation par le travail» – incarcération sans inculpation – à des délits tels
que la publicité ou la distribution de prospectus illégales ; la conduite d’un taxi
ou une activité commerciale sans licence ; le vagabondage ; la mendicité. «À quoi
servent des stades resplendissants et des défilés spectaculaires si les journalistes
et les défenseurs des droits humains ne peuvent toujours pas s’exprimer librement,
si des personnes sont toujours torturées en prison et si le gouvernement continue de
garder le secret sur les milliers de personnes exécutées ?», s’est interrogée
Catherine Baber. «Nous demandons instamment aux autorités chinoises de tenir les
promesses qu’elles ont faites en ce qui concerne l’amélioration de la situation des
droits hu!
mains, afin qu’en août 2008 le peuple chinois puisse être fier de tout ce que leur
pays peut offrir au monde.»

Note aux rédacteurs

Amnesty International procède régulièrement à une évaluation de quatre domaines dans
le secteur des droits humains qui doivent être réformés d’ici l’ouverture des Jeux
olympiques. Ces domaines constituent le cœur d’un programme plus vaste de réforme
dans le domaine des droits humains que l’organisation propose à la Chine. Voici
quelques données, événements et recommandations émanant de la dernière évaluation :

Peine de mort

– ce châtiment est toujours prévu pour environ 68 infractions dont la fraude fiscale
et les infractions à la législation sur les stupéfiants. Selon des estimations
d’universitaires chinois, entre 8000 et 10000 personnes sont exécutées chaque année
;
– personne n’est condamné à mort à l’issue d’un procès équitable : parmi les
défaillances de la justice on note l’impossibilité d’entrer rapidement en contact
avec un avocat ;
– l’absence de présomption d’innocence et l’utilisation d’éléments à charge obtenus
sous la torture ;
– des organes sont prélevés de manière massive sur les corps des personnes exécutées
; la nouvelle réglementation adoptée en juillet 2006 à ce sujet concerne uniquement
le prélèvement d’organes sur des donateurs vivants ;
– le fait que la Cour populaire suprême soit de nouveau investie du pouvoir
d’examiner toutes les sentences capitales et de se prononcer à leur sujet permet
d’espérer une réduction des condamnations à mort.

Amnesty International demande au gouvernement chinois de faire preuve d’une plus
grande transparence en rendant publiques toutes les données sur les condamnations à
mort et les exécutions, en vue de l’abolition totale de ce châtiment.

Procès équitables, torture et emprisonnement sans inculpation («détention
administrative»)

– des centaines de milliers de personnes seraient détenues dans des centres de
«rééducation par le travail» ou soumises à d’autres formes d’incarcération sans
inculpation dans l’ensemble du pays ;
– la police a le pouvoir sans restriction d’infliger des peines pouvant aller
jusqu’à trois ans d’emprisonnement pour des «infractions mineures» ;
– les personnes incarcérées dans de telles structures risquent fortement d’être
torturées ou soumises à d’autres formes de mauvais traitements, en particulier si
elles se montrent résistantes au «changement».

Amnesty International lance un appel en faveur de l’abolition de la «rééducation par
le travail» et des autres formes de détention administrative.

Défenseurs et militants des droits humains

– la population manifeste de plus en plus souvent son désaccord en public : 87000
mouvements de protestation, manifestations et autres «troubles à l’ordre public» ont
été recensés par le gouvernement, par rapport à 74000 en 2004 ;
– les militants, y compris les avocats et les journalistes, sont confrontés à des
obstacles considérables lorsqu’ils veulent attirer l’attention sur des violations
des droits humains ; ils sont harcelés, arbitrairement arrêtés et torturés ;
– une réglementation concernant les avocats adoptée en mai 2006 renforce les
contrôles officiels et risque de les dissuader d’assister les victimes d’atteintes
aux droits humains au niveau local.

Amnesty International appelle le gouvernement à modifier les clauses extrêmement
vagues du Code pénal concernant notamment la «divulgation de secrets d’État à
l’étranger» et l’«atteinte aux pouvoirs de l’État», qui sont fréquemment utilisées
pour mettre fin à des activités légitimes dans le domaine des droits humains.

Liberté des médias

– les sites web de centaines d’organisations internationales continuent d’être
bloqués par les autorités chinoises, et de nombreux sites chinois ont été fermés au
cours de l’année qui vient de s’écouler ;
– la police a arrêté des journalistes étrangers à au moins 38 occasions au cours des
deux dernières années, selon le Club des correspondants étrangers de Beijing ;
– les autorités chinoises ont intensifié le contrôle des médias chinois tout au long
de cette année, interdisant des publications telles que Bingdian, et renvoyant des
journalistes critiques à l’égard des autorités.

Amnesty International prie instamment le gouvernement chinois de libérer tous les
journalistes arrêtés uniquement pour avoir mené leur travail de reporters de manière
pacifique et de faire le nécessaire pour que les journalistes chinois et étrangers
puissent couvrir les sujets d’actualité sans être censurés. Les résultats complets
de l’évaluation menée par Amnesty International seront disponibles à partir du 21
septembre 2006 à 00h01 TU sur le site de l’organisation, à l’adresse électronique
suivante :
http://web.amnesty.org/library/Index/engasa170462006;

Le président du CIO, Jacques Rogge, a fait régulièrement référence aux promesses de
la Chine en matière de respect des droits humains lors d’interviews publics sur la
Chine et les Jeux. Lors de l’émission Hardtalk sur la BBC en avril 2002, il s’est
engagé à intervenir si ce qui se passait en Chine en matière de droits humains ne
lui convenait pas.

Source:
http://www.amnesty.fr/index.php/amnesty/s_informer/communiques_de_presse/