Voici une proposotion visant à limiter le droit de grève dans la fonction publique par l’obligation du vote à bulletin secret avant d’entreprendre une grève.
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N° 3204
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 juin 2006.
PROPOSITION DE LOI
visant à instaurer une consultation obligatoire, à bulletin secret,
des personnels visés à l’article L. 521-2 du code du travail,
pour toute décision de recours ou de reconduction de la grève,
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS
MESDAMES, MESSIEURS,
Selon le Préambule de la Constitution de 1946, partie intégrante du bloc de constitutionnalité, « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ».La liberté du travail est également consacrée au rang des principes à valeur constitutionnelle, comme la liberté d’entreprendre. Les droits et libertés fondamentaux, s’ils ne se hiérarchisent pas, doivent néanmoins coexister les uns avec les autres, étant entendu que la contrepartie du droit de grève est la liberté du travail. Ainsi, l’exercice d’aucun droit fondamental ne peut être le prétexte au sacrifice d’une liberté fondamentale, la conciliation doit être le guide. L’équilibre des droits et libertés fondamentaux ne doit pas être brisé.

Deux textes de valeur législative, l’article L. 412-1 du code du travail et l’article 431-1 du code pénal affirment de façon incontestable mais indirecte le principe de la liberté du
travail. Le premier de ces textes dispose que « l’exercice du droit syndical est reconnu dans toutes les entreprises dans le respect des droits et libertés garantis par la Constitution de la République, en particulier de la liberté individuelle du travail ». Le droit de grève se définit, de manière prétorienne, comme la cessation collective et
concertée du travail en vue d’appuyer des revendications d’ordre professionnel.

Les récents événements ayant entraîné la paralysie prolongée de villes entières ont démontré l’importance de la réglementation du droit de grève. En effet, le droit de grève étant un droit individuel s’exprimant de manière collective, la grève peut être le fait d’une minorité de salariés. La pratique du vote à main levée peut être la source de pression sur les salariés désireux de ne pas prendre part à une grève ou souhaitant y mettre fin. Or, la consultation des salariés comme du personnel de la fonction publique se doit comme toute autre consultation, de respecter les principes généraux du droit électoral. Ainsi, le recours à la grève doit être entendu comme un recours ultime et non comme un préalable à la négociation et ne peut en tout état de cause être le fait d’une minorité. En effet,les conséquences des grèves abusives sont particulièrement importantes car elles mettent en péril l’emploi comme l’économie locale et nationale. Aussi, il apparaît nécessaire que la consultation des personnels de l’État, des régions, des départements et des communes comptant plus de 10 000 habitants ainsi que des personnels
des entreprises, des organismes et des établissements publics ou privés lorsque ces entreprises, organismes et établissements sont chargés de la gestion d’un service public, s’effectue à bulletin secret pour toutes décisions de grève ou de reconduction de grève. L’exigence d’une concertation préalable assure l’existence de la démocratie participative
locale au sein de l’entreprise ou de l’administration concernée.
L’adoption de cette proposition de loi permettra de garantir la juste représentativité de la volonté des salariés du secteur privé, comme du personnel des services publics. C’est la raison pour laquelle je vous demande, Mesdames et Messieurs les Députés, de bien vouloir adopter cette proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

Après l’article L. 521-3 du code du travail, il est inséré un article L. 521-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 521-3-1. – La décision du recours à la grève ou de sa reconduction est prise après consultation obligatoire de l’ensemble des personnels concernés visés à l’article L. 521-2. Cette consultation, qui précise les motifs du recours à la grève ou de sa poursuite, prend la forme d’un scrutin organisé à bulletin secret à l’instigation des personnels concernés eux-mêmes ou de leurs représentants. Le résultat de ce scrutin est rendu public et affiché sans délai.
« En cas de grève engagée ou reconduite pour une durée indéterminée, la même consultation doit être périodiquement organisée auprès des personnels concernés.
« Les modalités d’organisation du scrutin et de la publication du résultat sont déterminées par décret en Conseil d’État. »

Composé et imprimé pour l’Assemblée nationale par JOUVE