PLUTÔT QUE LA RETRAITE
PRENONS L’OFFENSIVE !

Le système capitaliste se transforme – à l’échelle mondiale – de manière apparemment contradictoire. C’est au nom de l’idéologie moralisatrice d’une « société du travail » que Jospin a refusé le bénéfice du RMI aux jeunes de 18 à 25 ans ; c’est en invoquant le « temps libre » que son gouvernement a mis en place les 35 heures, accélérateur efficace de la flexibilité du travail. Aujourd’hui, la droite et le patronat réforment le RMI (devenu RMA) pour contraindre les plus précarisés – et singulièrement les femmes – à accepter des emplois encore moins intéressants et moins payés. C’est la généralisation du système anglo-saxon des working poors.

Ils réforment les retraites pour contraindre les salariés à travailler plus longtemps, et préparent le démantèlement définitif du service public, alors même que les grands groupes privés licencient à tout va et décentralisent leur production dans d’autres régions du monde. L’exploitation salariée classique se rendait moins insupportable dans nos régions par l’incitation financière et les garanties sociales. Peu à peu, il n’en reste que la contrainte, pas les salaires !

Dans l’enseignement, ils prennent aux pauvres (des crédits, des heures et des personnels) pour redonner aux riches ! C’est une belle illustration de l' »équité » qu’ils opposent à l’égalité et à la justice que nous voulons. Là comme ailleurs, le système est en train d’isoler et de priver de moyens des catégories de population jugées inutilisables (inemployables) et incontrôlables. Autant dire qu’il s’agit de les exterminer socialement. Ce sont les enseignants qui seront chargés du boulot de gardiennage, là où les flics ne s’aventurent plus depuis longtemps.

Si le passage de la gauche aux affaires a démontré quelque chose, c’est bien la radicale impossibilité de réformer le capitalisme en allant contre son mouvement propre. Les niaiseries d’Attac – changer le monde en créant des impôts de charité – sont le dernier surgeon de l’illusion réformiste incarnée en France par les socialistes et les staliniens.

Il y a dans l’actuel mouvement social un refus très légitime de l’aggravation des conditions du travail et de la survie. Il peine néanmoins à s’assumer. On entend des enseignantes expliquer que leurs élèves ne supporteraient pas une prof ridée ! Une fillette arborait dans les récentes manifs parisiennes une pancarte où il était écrit : « Je veux une maîtresse, pas une momie » ! Réfuter la malédiction d’une vie sacrifiée au salariat est trop sérieux pour emprunter ses arguments au système « Loréal-Gymnase Club ». Sans vouloir jeter la pierre aux camarades soucieux/cieuses de leur forme physique, nous estimons que pour comprendre et critiquer le monde qui risque de nous broyer, le muscle le plus utile reste le cerveau.

Il serait utile – et urgent – de nous en servir pour réfléchir ensemble, surtout lorsque grèves et manifs en fournissent l’occasion, à un autre monde à construire, à d’autres rapports, y compris avec notre propre corps, avec la santé, avec les enfants… Ce que nous reprochons aux sinistres guignols qui se croient nos maîtres, ce n’est pas de détruire, au hasard de leur pseudo-rationalisation, des institutions d’aliénation et d’exploitation comme l’école et l’usine, mais de sacrifier des vies concrètes, des êtres de chair et de sang.

Il existe dans tous les secteurs de la société (enseignants, personnels de santé, chômeurs en lutte, rescapés âgés du salariat, etc.), un grand désir d’accomplir des tâches réellement utiles aux autres, à la communauté. Ce constat peut permettre de dépasser la « défense républicaine du service public », qui nous piège dans les limites du système actuel. Il existe aussi un réservoir inépuisable de compétences niées, réprimées, oubliées. C’est de la confrontation de ces savoirs, de nos expériences de lutte, et de nos désirs d’une vie passionnante et utile que peut naître un projet commun, une force à opposer à ceux qui par bêtise ou par intérêt prétendent régenter nos vie au nom de l’Économie, du Travail ou d’un dieu quelconque (…qui revient très fort parmi les conneries nuisibles).

Ils ont fait de ce monde un désordre sanglant et misérable. Nous sortons à peine d’une guerre que déjà d’autres sont programmées, le mot réforme est devenu synonyme d’appauvrissement, la politique est en crise de crédibilité, les illusions démocratiques se fissurent. L’énergie de la lutte, la force riante et colorée des mobilisations montrent qu’il est possible de penser les questions de notre avenir hors des limites du système. Accepter la discussion dans les termes imposés par ceux qui ont le pouvoir revient à négocier la poursuite du désastre.
Voyons ! Il est nécessairement possible de faire mieux que ce gâchis…
On s’y met avant la retraite ?

D’autres sans-grade pour la grève générale

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