LES 35 H : TOUJOURS ET MIEUX !

De le Retraite à l’assurance maladie, des salaires à l’emploi, des services publics au code du travail tout ce qui participe à la cohésion et à la régulation sociale est visé.

http://www.lesverts.fr/IMG/pdf/tr35h0501.pdf

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LOI « REFORME DES 35 HEURES » : « VOTRE ‘TEMPS CHOISI’, C’EST CELUI DES PATRONS ! »

PAR MARTINE BILLARD / Députée Verte de Paris

Intervention en discussion générale. 3ème séance (nuit) du mardi 1er février 2005.

: http://martinebillard.org/

Madame la présidente, Messieurs les ministres, chers collègues,une nouvelle fois, vous nous demandez de modifier des dispositions du code du travail, sans même prendre l’avis aux partenaires sociaux.

N’osant pas attaquer de front le Code du travail, vous avez décidé de faire sauter les verrous législatifs les uns après les autres, afin d’éviter une réaction groupée du monde du travail. Vous avez d’abord fait voter la loi dite de « dialogue social » qui a ouvert la porte aux accords d’entreprises et d’établissements moins favorables aux salariés que les accords de branche. Cela vous permet maintenant d’utiliser cette possibilité pour casser le code du travail.

Pour cela, vous avez inventé la formule du « temps choisi » comme si la question du travail était de « choisir la durée du travail » et non le salaire dont on a besoin pour manger, se loger, se soigner, éduquer ses enfants ou se cultiver. Vous oubliez tout simplement que la majorité des salariés est favorable aux 35 heures car elle leur permet de consacrer plus de temps à leur famille, à leurs loisirs, ou à pratiquer des activités de bénévolat. Ce que demandent les salariés, ce sont tout simplement des augmentations de salaires que justifient les augmentations de productivité de ces dernières années, sans pour autant souhaiter travailler plus.

Mais selon vous, le pouvoir d’achat doit être obtenu en travaillant plus, au mépris des conditions de travail, de la santé et du nécessaire repos des salariés qui ont un emploi, et au mépris du nombre croissant des salariés rejetés vers le chômage. Réduction et partage du temps de travail ne font pas partie de votre projet de société : la seule possibilité d’augmenter son salaire serait de travailler sans fin. Je rappelle que les 48 heures sont une limite imposée par une directive européenne. C’est elle seule qui vous empêche d’aller encore plus loin.

Vous cherchez à faire croire que votre loi va mettre en avant la liberté de chaque salarié :

– Mais quid des négociations dans les PME, où la présence des syndicats est très faible ?

– Quid de la possibilité de refuser de travailler plus, pour un salarié subissant les pressions de son employeur ; celui-ci rétorquant qu’avec près de 10 % de chômeurs, il n’est pas le seul à vouloir travailler ?

Cette augmentation de travail doit entraîner, selon vous, une augmentation de salaire… Cette affirmation est elle-aussi trompeuse ! En effet, en augmentant le contingent autorisé des heures supplémentaires au-delà de 220 heures, vous repoussez par là même le déclenchement de la majoration de 100 %.
De plus, Le Medef réclame le pouvoir de contourner l’obligation de majorer les heures supplémentaires, et de dépasser le contingent annuel sans demander l’autorisation de l’inspection du travail. Aucun problème : vous modifiez le compte épargne temps et vous inventez les « heures choisies ». Mais, comble du cynisme : le Compte Epargne Temps est entièrement monétisé et donc réduit à un simple compte d’épargne. A l’initiative de l’employeur, la totalité du versement des augmentations de salaire sera reportée et il n’y aura aucune garantie sur le taux de liquidation des droits acquis. Ainsi, au nom du « temps choisi », des salariés risquent de céder au mirage d’une augmentation de revenus qu’ils ne verront jamais ! Au final, avec cette loi, c’est bel et bien l’employeur qui décide du temps choisi des salariés.

Autre mirage encore plus diabolique ! : tout ce qui sera affecté sur le CET pour la retraite collective ne sera pas soumis à cotisations sociales. Les salariés feront l’amère découverte qu’en cas de chômage, les Assedic auxquels ils auront droit seront moindres, puisque tout ce qui aura été affecté ne sera plus considéré comme salaire pour le calcul de ces indemnités. De même, au moment de prendre leur retraite, les salariés auront peut-être économisé pour un plan d’épargne retraite, mais leur retraite de base, elle, sera diminuée car les sommes versées ne seront pas prises en compte pour le calcul du salaire de base.

Alors, quel salarié peut vraiment être intéressé ?

– pas ceux qui espéraient suivre des formations professionnelles : votre dernière loi a privilégié la formation hors du temps de travail au prétexte que les salariés pouvaient utiliser leur RTT. Ce ne sera plus le cas !

– pas les salariés âgés. Comment feront-ils lorsque le choix sera entre augmenter le temps de travail ou le licenciement ? Et s’ils arrivent à tenir le coup, ils risquent de ne plus beaucoup profiter de leur retraite ensuite.

– Pas les ouvriers : ce sont eux qui ont déjà le moins accès aux formations. Ce sont eux qui font les boulots les plus durs, qui soulèvent le plus des charges lourdes, et qui travaillent déjà le plus la nuit et le samedi, selon la dernière enquête SUMER.

– Pas les femmes : elles ont déjà du mal à jongler entre temps de transports, heures de travail et famille. Beaucoup sont à temps partiel et voudraient travailler plus, notamment dans la grande distribution (16,4 % des femmes qui sont à temps partiel). Les incantations du Président de la République qui feint de découvrir le problème paraissent bien vaines. Car pour elles qui demandent réellement du temps choisi, vous ne proposez rien. Vous n’en parlez pas et ce n’est pas un hasard car votre temps choisi, c’est celui des patrons.

La suppression des limites de dépôt en nombre de jours sur le CET aboutit à la suppression de la cinquième semaine de congés payés. De plus, avec les 220 heures supplémentaires, vous réintroduisez la semaine de 40 heures. C’est la première fois depuis 1936 qu’un gouvernement ose une telle régression en terme de congés payés et de temps de travail !

Votre incantation sur la liberté recouvre surtout la possibilité, dans les entreprises où les salaires sont déjà soumis à un rapport de force défavorable, d’aggraver la dégradation des conditions de travail et de rémunération.

Les députés Verts ne peuvent que s’opposer à ce texte.

Pour en savoir plus : Les amendements présentés par les députés Verts (Martine Billard, Yves Cochet, Noël Mamère) (pdf – 108 k)

: http://www.lesverts.fr/IMG/pdf/amdtt0502.pdf