L’antisémitisme un racisme contre-révolutionnaire
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Catégorie : Global
Thèmes : AntifascismeImmigration/sans-papierEs/frontieresRacisme
Cet article a été écrit avant la semaine tragique du début janvier 2015. Le meurtre de quatre Juifs dans la supérette cachère est apparu aux yeux de beaucoup comme annexe par rapport à ceux qui liquidèrent la rédaction de Charlie Hebdo. Auparavant il y avait eu ceux de Bruxelles au Musée juif, ceux de Toulouse au groupe scolaire Ozar-Hatorah. Les meurtres de Vincennes n’étaient pas un accident. Partout, dès que des troubles s’installent, des Juifs, parce que Juifs, meurent. Constitutif de l’idéologie de l’extrême-droite depuis la fin du XIXe siècle, l’antisémitisme plonge ses racines dans un passé au moins bimillénaire. Dans un numéro consacré aux résurgences fascisantes, il importait de faire le point sur ce sujet.
Un juif rencontre un autre arabe. Quelle histoire courte et pourtant si lourde de non-dits ! Voilà une donnée toute simple qui contient en six petits mots une grande partie de l’histoire du monde occidental. Sur le chemin de la révolution sociale, la question de l’antisémitisme resurgit constamment. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, à cette expression particulière du racisme se mêle de façon subtile et perverse la question du sionisme et de son opposition, l’antisionisme. Il serait vain de penser que cette peste concerne uniquement les tenants d’un extrémisme de droite, que la gauche, et particulièrement l’extrême gauche, est immunisée contre elle. Le négationnisme des années 1970 nous raconte le contraire. Dans nombre de manifestations en soutien à Gaza, alors sous les bombes, sous prétexte d’antisionisme il y eut des attaques contre les Juifs en tant que tels. La question est donc de tenter de comprendre pourquoi, à travers les siècles, de façon larvée ou aiguë, la judéophobie puis l’antisémitisme surnagent et restent un écueil contre lequel nous venons nous heurter sans cesse, particulièrement dans nos sociétés euraméricaines.
Les différents racismes
La xénophobie n’est pas un racisme, il s’agit, pour sa manifestation la plus bénigne, d’un rejet de celui qui n’est pas de sa communauté. « La xénophobie, c’est la peur de l’autre », avance Philippe Breton. Arrivant en Alsace à la fin des années 1960, je fus surpris, malgré mon nom à consonance germanique, d’être traité plus ou moins gentiment de « Hase » ou de « Hergelofener (1) », mais jamais de « Schwob », cela étant réservé aux Allemands, les Souabes, de l’autre côté du Rhin. Dans les villages alsaciens comme partout ailleurs, au moment des fêtes, des bagarres homériques opposaient les garçons du village à ceux des villages voisins qui venaient danser avec les filles. Gilles Pudlowski, dans son livre consacré à la gastronomie alsacienne, raconte cette anecdote à propos de cette xénophobie locale :
« Un Alsacien qui détestait tellement les étrangers que, lorsqu’il partait hors de sa région et de son pays, il finissait par se détester si fort qu’il décidait au plus vite de rentrer chez lui. »
La mondialisation s’étendant, le voisin venait d’un peu plus loin, puis d’ailleurs, et devenait alors reconnaissable à sa physionomie. La xénophobie est soluble dans le quotidien, mais il en faut peu pour que le racisme vienne y ajouter son poison. Celui-ci semble apparaître, selon certains historiens, au début du XVI e siècle. En Espagne, au moment de la conversion forcée des musulmans et des juifs, la question de faire la différence entre vieux chrétiens et nouveaux se posa. Le critère fut alors la couleur de peau, les catholiques venant du nord ayant une peau plus blanche. C’est à la même période que la question de l’âme des Indiens d’Amérique fut posée au cours de la célèbre controverse de Valladolid. Il faut se rappeler que c’est une époque où la justification religieuse des actes était fondamentale. La traite des Noirs, envoyés au Nouveau Monde remplacer les Indiens décimés, nécessitait une justification biblique. C’est à ce moment-là qu’apparaît en Hollande un nommé Georg Horn qui va chercher dans la Bible une classification autorisée des races. Pour cela, il remonte à Noé qui a eu trois fils, Sem, Cham et Japhet. Ce dernier devient le père des Européens, Cham le père des Noirs et Sem donne naissance aux habitants de l’Asie. Or il se trouve que Noé, ayant forcé sur la bouteille, s’effondre ivre et nu sous sa tente. En entrant, Cham voit le sexe de son père, sort et prévient ses frères qui recouvrent le patriarche en tournant la tête. Celui-ci, recouvrant la raison (il va vivre cinq cents ans…), se met en colère et maudit Cham en la personne du fils de ce dernier, Canaan. Le texte biblique rapporte ceci :
« Lorsque Noé se réveilla de son vin, il apprit ce que lui avait fait son fils cadet. Et il dit : Maudit soit Canaan ! Qu’il soit l’esclave des esclaves de ses frères ! »
Voilà donc ce dont les marchands d’esclaves avaient besoin, ils restaient bons chrétiens et avaient droit au paradis. Avec l’arrivée des Lumières au XVIIIe siècle, un tel argument ne tient plus. Il faut trouver des justifications scientifiques. Il va falloir, comme pour la botanique ou le monde animal, établir des classifications. Le terme de « race » semble apparaître dans la littérature scientifique vers 1684. Son auteur, François Bernier, qui a voyagé jusqu’en Inde, sans établir de hiérarchie apparente, avance que, hors les Européens, les autres habitants de la planète sont de « vilains animaux (2) ». Pour Siep Stuurman, historien hollandais, cela vient combler la perte de crédibilité de l’histoire sacrée comme l’impasse de la cosmographie née de la Renaissance avec sa multiplication kaléidoscopique de nations et de tribus.
Au XIXe siècle, avec Gobineau (1816-1882), le monde entre dans le délire racial.
Au siècle suivant, Henri de Boulainvilliers (1658-1722) explique les privilèges de la noblesse par la domination raciale originale, les Francs ayant battu les Gaulois. Au XIXe siècle, avec Gobineau (1816-1882), le monde entre dans le délire racial. Son ouvrage Essai sur l’inégalité des races humaines (1853) va connaître un succès foudroyant. Curieusement, celui dont on fait le père de tous les racistes n’a pour les Juifs, qu’il appelle « peuple choisi (3) », que des termes élogieux :
« Et dans ce misérable coin du monde, que furent les Juifs ? Je le répète, un peuple habile en tout ce qu’il entreprit, un peuple libre, un peuple fort, un peuple intelligent, et qui, avant de perdre bravement, les armes à la main, le titre de nation indépendante, avait fourni au monde presque autant de docteurs que de marchands (4) . »
L’antisémitisme moderne aurait-il d’autres sources ?
L’antijudaïsme, un pré-antisémitisme
Pour remonter la piste de la haine du Juif, nous pouvons prendre celle des meurtres rituels. Les groupes religieux déviants sont souvent accusés de pratiquer ce type de sacrifice. De telles accusations servent les intérêts des groupes dominants qui se sentent insécurisés par des pratiques religieuses concurrentes. La religion juive, avec ses rites spécifiques, incompréhensibles tant dans le déroulé que dans leurs significations, prête le flanc à ces accusations et va en payer le prix fort. De tels meurtres sont dénoncés, en 1144 à Norwich, en 1147 à Würzburg, en 1171 à Blois, en 1182 à Saragosse, en 1462 à Innsbrück, en 1475 à Trente, en 1480 à Portobuffo, en 1485 à Vérone et à Marostica, en 1490 à La Guardia. Les Juifs sont accusés d’utiliser le sang de jeunes enfants dans la fabrication de leur pain azyme fabriqué pour la fête de la Pâque en souvenir de leur traversée du désert. Il va falloir remonter encore le temps pour trouver les origines de cette accusation. Le principal auteur des sources sur l’antijudaïsme antique est l’historien d’origine juive Flavius Josèphe (37-100 apr. J.-C.). Il rapporte qu’un historien grec, Damocrite (Ier siècle av. J.-C.), racontait que, une fois tous les sept ans, les Juifs sacrifiaient dans le temple un étranger capturé. C’est le plus ancien récit d’un meurtre rituel qui leur est attribué. Il avait probablement entendu parler des rituels athéniens mis en œuvre lors de la fête des Thargélies et de l’exclusion qui pouvait être sanglante des deux pharmakoï, victimes expiatoires dans un rite de purification. Selon Apion (Ier siècle apr. J.-C.), grammairien d’Alexandrie, Antiochus Epiphâne (environ 200 av. J.-C.), souverain grec ayant élevé un autel à Zeus dans le Temple de Jérusalem, y découvrit un homme allongé sur un lit au milieu de vivres. Il avait été capturé, mis à l’isolement et gavé par des étrangers (à lui). Il avait appris que « c’était la loi des Juifs de capturer un Grec ; ils l’engraissaient pendant une année puis le conduisaient dans une forêt où ils l’immolaient, son corps était sacrifié selon les rites prescrits, et les Juifs, goûtant de ses entrailles, juraient de rester les ennemis des Grecs ». On peut trouver dans la Bible des sources à ce sacrilège (5).
Damocrite racontait que, une fois tous les sept ans, les Juifs sacrifiaient dans le temple un étranger capturé
Nous touchons là aux origines du problème. Pourquoi tant de haine envers un petit peuple sur les bords de la Méditerranée ? Les traces d’antijudaïsme d’avant le christianisme sont récurrentes. Elles tiennent à mon avis à la contradiction fondamentale entre le monothéisme juif et le polythéisme antique. L’adoration du Yahweh juif exclut totalement celle d’une autre divinité, au contraire du polythéisme antique qui se faisait une joie d’empiler les dieux dans des temples ad hoc. Au-delà du fait purement religieux, un dieu jaloux opposé aux divers panthéons des peuples dits païens, il y a antagonisme entre une ou plutôt la vérité révélée et une conception du monde flottante. Le monothéisme religieux déborde sur le monothéisme philosophique ou politique, ce qui est vérifiable encore de nos jours. Les Juifs, donc, refusent de se fondre dans le polythéisme ambiant et d’accueillir en leur sein des sacrifices à d’autres dieux. La Bible est pleine de ces règlements de comptes religieux sous couvert de conquêtes territoriales. Ce sera d’ailleurs là l’origine des guerres judéo-romaines. Refusant l’acceptation d’autres dieux, les Juifs se mettent à part de la communauté antique. Je pense que l’antijudaïsme trouve là son origine. Cette attitude va se trouver amplifiée avec le développement de cette secte juive qui, sous le nom de christianisme, va prendre le pas sur le polythéisme dans le monde occidental.
L’affrontement de deux monothéismes, c’est-à-dire de deux vérités, entraîne de fait l’abaissement, la soumission du groupe le plus faible.
L’affrontement de deux monothéismes, c’est-à-dire de deux vérités, entraîne de fait l’abaissement, la soumission du groupe le plus faible. De l’exécution du prophète chrétien aux crimes rituels le chemin est court et évident pour tous ceux qui cherchent des responsables aux problèmes socio-économiques rencontrés. À partir des XIIe et XIIIe siècles l’activité professionnelle des Juifs est limitée. Certaines activités comme l’artisanat ainsi que la possession des terres et le travail de fermier leur sont interdits. Il ne reste pour la plupart que l’exercice de la médecine ou celui du commerce, dont fait partie l’argent. Le mythe du banquier juif est né. Soljenitsyne rapporte que, en Russie tsariste, les Juifs seront souvent ceux qui fabriquent et vendent la vodka, moyen pour le tsar de lever l’impôt universel. À tout cela s’ajoute que l’instruction des enfants se fait systématiquement dans les communautés juives. Pour être un bon Juif il faut savoir lire la Torah. Dans l’Occident haut-médiéval chrétien ils sont donc les seuls, avec les membres du clergé, à être instruits. Tous les ingrédients nécessaires à l’antisémitisme sont réunis. Les Juifs sont instruits, donc ils savent, ils sont riches, ils sont secrets, avec des rituels incompréhensibles, et enfin ils n’ont pas de pays défini bien qu’ils soient une race précise et aient une langue commune. Dans l’imaginaire collectif, ils rejoignent les différentes appellations de Tsiganes, Gitans et autres romanichels. Il va falloir attendre le XIXe siècle pour que les choses changent. C’est aussi le moment où le mouvement ouvrier prend conscience de lui-même. On peut ainsi interroger les positions des grands leaders de l’époque.
Proudhon, Bakounine,Marx, Judéophobie ou antisémitisme ?
La question se pose. Dans Juifs et anarchistes (6) Rudolf de Jong évoque l’antisémitisme de deux de nos grands anciens en ces termes :
» Comme chez tant d’antisémites, on trouve un mélange de qualifications irrationnelles sur des Juifs chez Proudhon et Bakounine : nation, religion, peuple, classe non productive, capitalistes, etc. «
On peut avancer la même chose à propos de Marx. Cela suffit-il pour en faire des antisémites ? Ce n’est pas mon opinion. Revenons à la source avec quelques citations.
Dans ses Carnets, Proudhon éructe contre les Juifs :
« Juifs. Faire un article contre cette race, qui envenime tout, en se fourrant partout, sans jamais se fondre avec aucun peuple. Demander son expulsion de France, à l’exception des individus mariés avec des Françaises ; abolir les synagogues, ne les admettre à aucun emploi, poursuivre enfin l’abolition de ce culte. Ce n’est pas pour rien que les chrétiens les ont appelés déicides. Le Juif est l’ennemi du genre humain. Il faut renvoyer cette race en Asie, ou l’exterminer… Par le fer ou par le feu, ou par l’expulsion, il faut que le Juif disparaisse… Tolérer les vieillards qui n’engendrent plus. Travail à faire. Ce que les peuples du Moyen Âge haïssaient d’instinct, je le hais avec réflexion et irrévocablement. La haine du Juif comme de l’Anglais doit être notre premier article de foi politique. » (26 décembre 1847)
De son côté, Marx n’en dit pas moins dans De la question juive :
« Quel est le fond profane du judaïsme ? Le besoin pratique, l’utilité personnelle. Quel est le culte profane du Juif ? Le trafic. Quel est son Dieu profane ? L’argent. Eh bien, en s’émancipant du trafic et de l’argent, par conséquent du judaïsme réel et pratique, l’époque actuelle s’émanciperait elle-même. Une organisation de la société qui supprimerait les conditions nécessaires du trafic, par suite la possibilité du trafic, rendrait le Juif impossible. »
Bakounine en a, lui, contre les Juifs allemands. Il se rend bien compte dans une lettre à Herzen qu’il va un peu loin dans son Étude sur les Juifs allemands. Il dit :
« Ce chapitre pourra paraître trop cru, trop grossier. » Voici un extrait de cette étude : « Les Juifs ont un pied dans la banque et l’autre dans le mouvement socialiste […]. Eh bien, tout ce monde juif, formant une secte exploitante, un peuple sangsue, un unique parasite dévorant, étroitement et intimement organisé, non seulement à travers les frontières des États, mais encore à travers toutes les différences des opinions politiques – ce monde juif est aujourd’hui en grande partie à la disposition de Marx d’un côté, de Rothschild de l’autre. »
Les opinions de Proudhon, de Bakounine comme celles de Marx relèvent de la judéophobie la plus classique. Pour passer à l’antisémitisme il va falloir qu’un saut conceptuel ait lieu, celui de l’invention d’un complot ourdi par les Juifs pour mettre la main sur le monde. Voici comment Moishe Postone (7), un universitaire américain, l’explique : « Les Juifs sont considérés comme un groupe détenant un pouvoir mondial extrêmement puissant, abstrait, immatériel, qui domine le monde. » Celui qui va élaborer, décrire ce complot n’est pas un Allemand mais un Français, Édouard Drumont.
L’antisémitisme, mutation de la judéophobie
C’est donc au XIXe siècle, avec la montée des nationalismes, que l’antijudaïsme devient un problème de société, que la question juive se pose et qu’apparaît l’antisémitisme. L’idée de nation, exaltée par la Révolution française, est reprise et revendiquée d’un point de vue tant culturel que politique. C’est essentiellement au sein de l’Empire austro-hongrois et sur les marges de l’Empire ottoman que l’on voit apparaître de telles revendications. La guerre d’indépendance grecque accélère la diffusion de cette idée. C’est dans ce contexte que des Juifs, poussés par des persécutions sanglantes, particulièrement dans la sphère slave, élaborent l’idée du retour à Sion. C’est au nom de chacun dans sa nation que la droite développe le concept d’antisémitisme : les Juifs, peuple sans terre, n’ont rien à faire chez nous. À cela s’ajoute l’idée qu’ils sont un peuple inférieur, resurgissement du concept de race. Simultané- ment, dans la sphère scientifique, apparaît le questionnement sur les origines de la civilisation européenne. Pour l’archéologue spécialiste du néolithique, Jean-Paul Demoule,
« l’Europe chrétienne est depuis le Moyen-Âge dans une situation schizophrénique. Comme toute société humaine elle avait un mythe d’origine. Mais elle le tenait des Juifs, pourtant les seuls non-chrétiens à vivre sur ce continent, symbolisant l’inquiétante étrangeté de l’Autre et qui devenaient des boucs émissaires à la moindre crise ». Pour remédier à cela, des scientifiques vont chercher l’existence d’une langue commune originaire. Le sanskrit découvert à la fin du XVIII e siècle va remplir ce rôle. Les langues européennes vont alors devenir des langues d’origine indo-européenne. Ce terme, en allemand, devient indo-germanisch. Demoule ajoute qu’« au XIXe siècle on ajoutera en outre une “race” originelle et c’est ce modèle, comme avec une loupe grossissante, qu’appliquera le nazisme dans toutes ses conséquences ».
C’est le texte phare, pivot, de cette peste qui continue dès lors à nous polluer, et ce dans tous les pays du monde.
Il serait fastidieux d’énumérer les publications antisémites de la fin du XIXe siècle (8). Arrêtons-nous un instant sur ce livre d’Édouard Drumont, La France juive. Publié en 1886 puis réédité à plusieurs reprises, il le sera dernièrement en 2012 par Alain Soral. Drumont avance le premier l’idée d’un complot juif afin de mettre la main sur le monde. Dès le début de son introduction il annonce la couleur : « Je veux écrire La Conquête juive. » Il continue en affirmant :
« Le seul auquel la Révolution ait profité est le Juif. Tout vient du Juif, tout revient au Juif. »
« Sous l’action juive, la vieille France s’est dissoute, décomposée, comment à ce peuple désintéressé, heureux, aimant, s’est substitué un peuple haineux, affamé d’or et bientôt mourant de faim. »
Partout, pour Drumont, derrière tous les événements malheureux, il y a les complots des Juifs. Au-delà des problèmes religieux, au-delà des problèmes de race, ce qui prédomine dans l’antisémitisme, c’est l’existence de ce complot visant à faire des Juifs les maîtres du monde. Il suffit donc de se débarrasser des Juifs pour libérer le monde. La droite se saisit de cette opportunité pour développer sa haine de ce qui n’est pas son camp. En France, ce sera l’affaire Dreyfus. Un militaire, alsacien, juif de surcroît, sera accusé de trahison et d’espionnage au profit de l’Allemagne. Ce moment-là, considéré comme la création du concept d’intellectuel, verra se mélanger bien des notions antagonistes, comme le combat pour la liberté, l’antigermanisme, l’antimilitarisme et, bien sûr, l’antisémitisme. Au même moment, les Protocoles des sages de Sion sont rédigés à Paris (9), puis publiés en 1903-1905 en Russie. C’est le texte phare, pivot, de cette peste qui continue dès lors à nous polluer, et ce dans tous les pays du monde. Toute réfutation, quelle qu’elle soit, illustre a contrario la force des Juifs. C’est pain bénit pour tous les amateurs de complots.
L’acte antisémite
Dès 1925, dans Mein Kampf, Hitler l’évoque en ces termes :
« Comme la direction de nos affaires a été prise par les Juifs depuis la fin de la guerre, et de la façon la plus ostensible, on ne peut vraiment pas admettre que notre malheur soit dû simplement à un défaut d’intelligence de notre situation ; on doit être convaincu, au contraire, que l’on mène sciemment notre peuple à sa perte. Considérée de ce point de vue, la conduite de notre politique étrangère n’est pas aussi insensée qu’elle le paraît ; elle est dictée par une logique subtile et d’une froideur glacée, mise au service du plan juif de conquête du monde et du combat livré pour réaliser cet idéal. »
Une tentative de résoudre cette question, de libérer le monde de l’emprise juive, a lieu sous la férule nazie de 1933 à 1945. Annoncée dans Mein Kampf, elle commence à se mettre en œuvre dès janvier 1933. Selon qu’on l’appelle judéocide ou Shoah, la réalisation du crime a nécessité une période d’accoutumance d’une petite dizaine d’années. Son exécution par différents moyens en camps ou dans la nature va créer une situation intellectuelle inédite dans l’histoire, une sorte de no man’s land idéologique. Dans cet espace, hormis le compte rendu a posteriori de ce qui s’est passé, la pensée se heurte à l’incompréhensible. Ce n’est pas faute d’avoir essayé. De Primo Levi à Jonathan Littell, toutes les tentatives pour penser ce qui s’est passé nous laissent incrédules. D’une certaine façon, même s’il est revenu là-dessus par ailleurs, cette phrase terrible d’Adorno, prononcée en 1949, « écrire un poème après Auschwitz est barbare », demeure comme une espèce de malédiction. Le magnifique travail réalisé par Hannah Arendt à partir du procès d’Eichmann au début des années 1960 ne répond pas à la question. Le sort fait au concept la banalité du mal énoncé par Hannah Arendt illustre cette impasse. Au lieu d’accepter le fait que cela concernait seulement l’attitude du dirigeant nazi, qui ne comprenait pas ce qu’on lui reprochait puisqu’il n’avait fait que son devoir, les commentateurs avancèrent que, puisque c’était banal, tout un chacun en était capable. De cette façon, ils tentaient d’exorciser ce crime absolu en en faisant porter la responsabilité à tout le monde. Puisque cela devenait ordinaire, nul besoin de réfléchir à ce propos.
Les génocides commis depuis, que ce soit au Cambodge, au Rwanda ou en ex-Yougoslavie et maintenant sous les coups de l’État islamique, n’ont en rien atténué ce qui s’est passé sous le nazisme. Il aura fallu le procès Eichmann pour que la question sorte des milieux avertis et touche le grand public. Le questionnement de Hannah Arendt sur la responsabilité supposée des conseils juifs dans les ghettos sous contrôle nazi va embraser le monde intellectuel. Les travaux méticuleux de différents historiens vont faire apparaître par le détail l’immensité de l’horreur. Il faudra attendre le début du XXIe siècle pour que l’histoire de la Shoah par balles, c’est-à-dire les exécutions systématiques de masse en Ukraine, entre autres, soit rendue publique. Que fallait-il dire, penser, dans les années qui suivirent la fin de la guerre ? On parle aujourd’hui du grand silence de 1946 aux années 1960 avec le procès Eichmann. Qu’en est-il ?
Les années du silence
Les survivants du cauchemar ont peu parlé ou trop parlé, mais à qui ? Qu’auraient-ils pu dire qui ne les oblige pas à revivre l’horreur à laquelle ils avaient échappé ? Appelé à témoigner contre Eichmann, un écrivain israélien du génocide s’était évanoui d’effroi en voulant raconter ce qu’il avait traversé (10) . Les intellectuels français se sont tus. Souvent ils étaient accaparés par d’autres réflexions. Dans les rangs anarchistes, le souvenir espagnol était encore sanglant. Dans les rangs marxistes, qu’ils soient staliniens ou d’opposition, la question soviétique supplantait tout. Les premiers étaient tout à l’affirmation de la primauté de Staline et de l’exemplarité du combat du Parti communiste français et de la mise en place d’un culte de leur Résistance. Les seconds, dans les groupes oppositionnels, débattaient de la vraie nature du communisme russe. La réflexion sur ce qui venait d’arriver passait au second plan.
Pourtant, dès 1946, Jean-Paul Sartre publie ses Réflexions sur la question juive. Dans ce texte, il tente de comprendre ce qui fait l’unicité du Juif, mais il n’aborde pas la question du judéocide, probablement était-il trop tôt. Du côté anarchiste, il faut noter la désastreuse trajectoire, au sein de la Fédération anarchiste d’alors, du nommé Rassinier, revenu du camp de concentration de Dora, et de son livre Le Mensonge d’Ulysse paru en 1950 (11) . Dans cet ouvrage il avançait ceci :
« Mon opinion sur les chambres à gaz ? Il y en eut : pas tant qu’on le croit. Des exterminations par ce moyen, il y en eut aussi : pas tant qu’on l’a dit. »
Dès 1948, une historienne, Olga Wormser-Migot, avait, à propos des camps de Buchenwald et de Mauthausen, avancé la même chose. Il y aura polémique à ce propos, mais bien des années après, vers 1970. Les survivants ont parlé pendant ces années, c’est ce que rappelle François Azouvi dans son ouvrage Le Mythe du grand silence. Auschwitz, les Français et la mémoire, paru en 2012 chez Calmann-Lévy. Ils ont parlé, ils ont commémoré, ils ont défilé et ils étaient seuls. Des enquêtes, des livres ont été publiés sur la parole ou le silence des survivants dans leurs familles. Les enfants de ces gens en portent les stigmates encore aujourd’hui. L’un d’eux me disait que sa mère, rescapée d’Auschwitz, lui rappelait que, s’il était en camp, il mangerait sa soupe bien plus rapidement. Chez d’autres, le silence était tout aussi pesant. Cette période cesse au moment où se conjuguent trois éléments sur lesquels nous vivons toujours.
Le début de l’affrontement
Eichmann, le tiers-mondisme et la guerre des Six-Jours, ce sont les composants de la situation actuelle. Le procès qui s’ouvre à Jérusalem le 11 avril 1961 est l’occasion tant attendue dans le monde juif de réécrire le procès de Nuremberg de son point de vue. Le monde entier a les yeux fixés sur cette salle du tribunal où paraît un être falot, un petit fonctionnaire allemand qui a des centaines de milliers de morts sur la conscience. Ce qu’il niera jusqu’au bout. Il n’aura fait que son devoir.
À la même époque, l’idée que les peuples opprimés, colonisés, doivent et peuvent se libérer de l’oppression occidentale, et ainsi par voie de conséquence libérer les pays colonisateurs de leurs velléités colonisatrices, est dans bien des esprits (cf. Frantz Fanon). La guerre du Vietnam bat son plein, celle d’Algérie est sur le point de se terminer, la décolonisation est inévitable. En 1964, à Jérusalem, est créée l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) qui rassemble plusieurs autres organisations plus anciennes luttant pour la libération du pays.
Puis vient en 1967 la guerre des Six-Jours, la défaite arabe ouvre la voie à la colonisation de ce qui reste de la Palestine et l’État israélien construit alors l’idéologie du « seul contre tous ». Les institutions de la communauté juive française prennent fait et cause pour Israël. Pour Tom Segev (12) , à partir de ce moment-là, toutes les décisions d’Israël ont été élaborées à l’ombre du génocide.
Le monde se trouve donc face à un peuple qui se bat pour sa liberté et un autre qui se bat pour ne pas disparaître. Les premiers incarnent l’idéal révolutionnaire des pays colonisés, les autres renvoient les puissances occidentales à leur mauvaise conscience. À la même période, en Europe comme aux États-Unis ou au Canada, le vieux monde tremble sur ses bases. La jeunesse fait irruption et demande des comptes. En France, a lieu la plus grande grève générale de l’histoire de ce pays. La révolution est aux portes. La révolution n’a pas lieu. Mais quelque part des gens continuent à se battre et deviennent un centre de ralliement pour beaucoup de ceux qui espéraient. La lutte palestinienne devient « notre lutte ». Ce sera à ce moment-là, au moment de la décrue révolutionnaire, qu’adviendra l’épisode négationniste au sein de l’ultragauche française.
Il existe depuis des années une petite librairie nichée au sein du quartier Latin à Paris qui porte le nom de cet animal qui, comme la révolution, dixit Marx, creuse ses souterrains pour surgir n’importe où. Il s’agit de la Vieille Taupe. On y trouvait alors tout ce qui existait d’écrits antistaliniens et libertaires paraissant en France. Les années 1970 verront la fin de nombre de groupes libertaires ou d’ultragauche incapables de comprendre ce qui était en train de se passer.
C’est aussi le moment où la droite dure prend le pouvoir en Israël. C’est le moment où apparaît l’antisionisme de gauche. Autour de la Vieille Taupe et de son animateur, Pierre Guillaume, se rassemblent des gens qui vont contester le discours dominant à propos d’Israël et de la Palestine. Afin de soutenir la « juste lutte du peuple palestinien », ils vont nier l’importance du génocide. C’est en octobre 1978 qu’un certain professeur Faurisson, lors d’un colloque à Lyon portant sur « Les Églises et les chrétiens dans la Seconde Guerre mondiale », conteste l’existence des chambres à gaz. Sous prétexte de défendre la liberté d’expression, il trouvera des soutiens dans un camp opposé au sien, lui qui a des liens avérés avec l’extrême droite fasciste. Je ne peux qu’inviter ceux qui, parmi les lecteurs, seraient intéressés par cette histoire sinistre où se mêlent les noms de Gabriel Cohn-Bendit, Noam Chomsky, Gilles Dauvé alias Jean Barrot, Pierre Guillaume, Jean-Pierre Carasso ou Serge Quadruppani, à lire l’excellent dossier rassemblé à ce sujet par Yves Coleman intitulé Increvables négationnistes (13) .
Antisionisme et/ou antisémitisme
Il n’y a jamais eu autant de livres, d’enquêtes, de travaux d’historiens, de romans, de biographies, d’autobiographies autour ou de lycéens font le voyage vers un camp d’extermination, que ce soit en France ou en Allemagne. Les mises en garde de tous bords contre les dangers de l’antisémitisme et les mensonges des négationnistes abondent. Puisque tout le monde sait tout, l’antisémitisme ne devrait-il pas avoir disparu ? Pourtant, il demeure. Pourquoi ? Il y a au moins deux raisons à cet état de fait, d’une part, l’inexplication du génocide juif et, d’autre part, la solution simple aux misères du monde, c’est la faute aux Juifs !
Comment expliquer la Shoah ? Les historiens ont exposé comment cela s’est passé, où cela a eu lieu, combien de gens ont perdu la vie, dans quelles situations. Rien n’est caché. Nous savons qui a commis les crimes, sous quels ordres, avec quelles philosophies. Shoah, le film de Lanzman, sans rien montrer, en dit plus que tout autre, et pourtant ! Il suffit de regarder l’extraordinaire téléfilm (14) réalisé par les Anglais à partir du verbatim retrouvé de la conférence de Wannsee où cela fut planifié pour ne plus rien comprendre. Deux théoriciens juifs ont tenté une réponse. Yehuda Bauer (15) rappelle que pour des théologiens juifs la question de savoir s’il y a eu colère de Dieu se pose. S’il y a eu « colère de Dieu », cela revient à exonérer les auteurs de ce crime de toute responsabilité objective puisqu’ils n’ont été eux-mêmes que le bras armé d’un Dieu vengeur. C’est une impasse ! Pour Zygmund Baumann (16) , « la Solution finale a marqué l’endroit où le système industriel européen a dérapé ». Les camps ne seraient alors pas autre chose qu’une extension de ce système. L’Holocauste serait « un test significatif des possibilités cachées de la société moderne » auquel le discours nazi ne viendrait que donner un habillage idéologique. Voilà une réponse qui n’est pas satisfaisante. Peut-on dire avec Bauer que « l’Holocauste est un événement inexplicable, son étude représente une perte de temps » ? Pour ma part, je dirai non à la seconde partie de cette affirmation, et je fais mienne la première partie. Le génocide juif est indicible, même si on peut en décrire précisément le déroulement, c’est ce qui fait sa spécificité. Il interroge jusqu’au plus profond l’humanité du monde. Il est universel. La Shoah est une plaie ouverte, insupportable. Ne pouvant être acceptée, elle est niée. Quand sous prétexte d’antisionisme on s’en prend aux Juifs, c’est cette plaie que l’on rouvre sans cesse. Certains font de même quand ils utilisent cette plaie pour justifier ou excuser leur oppression en Palestine.
Les repères sont troublés. Comment être l’un sans être l’autre ? La justification ultime des dirigeants israéliens quant à l’appropriation indue continue des territoires palestiniens repose sur les arguments religieux de la droite extrémiste. Comment s’opposer à cela sans se voir taxé d’antisémitisme ? Une autre forme d’antisémitisme est celle qui refuse aux Juifs, à partir du moment où ils ont décidé de créer un État, de se comporter comme des gens ordinaires simplement soucieux de conserver et d’étendre leurs biens. Sous prétexte qu’ils seraient Juifs ils devraient agir différemment des autres individus du monde. À l’intérieur d’Israël comme en dehors, bien des gens disent que, si l’on refuse la politique de cet État, c’est que l’on nie le danger d’une nouvelle Shoah.
Pour en finir avec l’antisémitisme ?
Un sondage effectué sur cette question par l’Ifop au profit de la Fondapol (17) en octobre 2014 a donné des résultats intéressants. Un questionnaire a été construit pour interroger les individus qui ont accepté d’y répondre. Ces questions sont aussi éclairantes que les résultats donnés entre parenthèses :
− Les Juifs utilisent aujourd’hui dans leur propre intérêt leur statut de victimes du génocide nazi pendant la Seconde Guerre mondiale (35 %) ;
− Les Juifs ont trop de pouvoir dans le domaine de l’économie et de la finance (25 %) ;
− Les Juifs ont trop de pouvoir dans le domaine des médias (22 %) ;
− Les Juifs ont trop de pouvoir dans le domaine de la politique (19 %) ;
− Il existe un complot sioniste à l’échelle mondiale (16 %) ;
− Les Juifs sont responsables de la crise économique actuelle (6 %).
Un peu plus de la moitié de la population interrogée (53 %) répond ne partager aucun de ces six préjugés, 3 % partagent les six préjugés. De ces chiffres on peut déduire que 44 % des gens interrogés partagent au moins un de ces « préjugés ». Le dimanche 11 janvier 2014, 40 000 personnes défilaient à Strasbourg. Une semaine après 3 000 personnes assistaient au spectacle de Dieudonné dans la même ville. Les attentats contre Charlie Hebdo ont semblé cacher, au moins dans un premier temps, l’antisémitisme, malgré les quatre morts de l’Hyper Kacher. Certains croient avec Marx et d’autres qu’il suffit de faire la révolution pour faire disparaître ce problème. Est-ce si sûr ?
Notes :
- (1) Hase, « lièvre » en allemand ; les Français ont la réputation de fuir comme des lapins dès que les Allemands arrivent. Hergelofener, « celui qui vient d’ailleurs ».
- (2) Siep Stuurman, « François Bernier and the Invention of Racial Classification », in History Workshop Journal, 50, 2000.
- (3) Nous sommes là face au terme ambigu de « peuple juif » qu’un auteur récent, Schlomo Sand, qualifie d’invention.
- (4) Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines, livre 1, 1853-1855. L’auteur prend son information dans Joseph Salvador, Histoire des Juifs, in-8°, Paris, 1835.
- (5) cf. Livre de Daniel, chapitre 9, verset 27.
- (6) Juifs et anarchistes – histoire d’une rencontre, Éditions de l’Éclat, Paris, 2008.
- (7) « Antisémitisme de gauche et antisionisme » , « Nos tares politiques », tome 2, Ni patrie ni frontières, n° 44-45, Paris, septembre 2014.
- (8) À ce propos, il est intéressant de consulter le travail de Marc Angenot et particulièrement Ce que l’on dit des Juifs en 1889. Antisémitisme et discours social, Presses universitaires de Vincennes, Paris, 1989, et aussi du même auteur : « Juifs, trahison et littérature », in Miscellanées en l’honneur de Gilles Marcotte, Fides, Montréal, 1995; voir http://marcangenot. com/wp-content/ uploads/2012/04/ Juif-espion.txt.pdf ; vu en décembre 2014.
- (9) Plagiat d’un texte de Maurice Joly écrit contre Napoléon III. Cf. Wikipédia.
- (10) Tom Segev, Le Septième Million. Les Israéliens et le génocide, Liana Levi, Paris, 1993.
- (11) Pierre Sommermeyer, « Questionnements sur et autour d’un ouvrage », in « L’anarchiste et le juif, histoire d’une rencontre », À contretemps , n° 35, décembre 2009.
- (12) Tom Segev, op. cit.
- (13) « Increvables négationnistes ! “Ultragauches”, libertaires et antisémitisme : un long aveuglement (1948-2014) », « Nos tares politiques », tome 3, Ni patrie ni frontières, n° 46-47, Paris, octobre 2014.
- (14) Conspiration, téléfilm HBO, 2001.
- (15) Repenser l’Holocauste, coll. « Frontières », éditions Autrement, 2002, 290 p. 16. Modernité et Holocauste, éditions La Fabrique, 2002, 285 p.
- (16) Modernité et Holocauste, éditions La Fabrique, 2002, 285 p.
- (17) Fondation pour l’innovation politique, http://www.fondapol. org/wp-content/ uploads/2014/ 11/CONF2pressAntisemitisme-DOC6-web11h51.pdf
mise en débat le temps de lire ça et passage des commentaires en modération à priori (pas le temps en période de menace d’expulsion)