[bure] audience du 16 janvier : 6 mois fermes requis pour menaces et refus de signalétique !
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Places: Bar-le-duc
L’article de l’Est Républicain de ce mercredi 17 janvier est sans ambiguïtés dans son titre : à Bure on entend faire « régner la loi ». Suit un texte un peu confus où l’entrée en fonction d’un nouveau substitut, d’une juge des libertés et de la détention et d’une assesseure se retrouvent mêlés aux bonnes résolutions de notre bien-aimé procureur Olivier Glady qui entend se battre sur tous les fronts de l’injustice meusienne : la délinquance burienne, les stupéfiants, les harcèlements sexuels. Une lecture un peu rapide du titre et du contenu prêterait presque à penser que Bure est le Gotham du crime dont Olivier Glady sera le Batman. En tous cas, M. Glady nous avait prévenu l’année passée en demandant au feu juge
En attendant, la couleur est annoncée avec cette première audience burienne de l’année et trois autres audiences inscrites par le procureur pour le 13 février prochain puis une autre le 6 mars. Ce mercredi la salle était emplie aux deux tiers avec une cinquantaine de personnes dont une quarantaine de soutiens pour notre ami X qui comparaissait après avoir été interpellé à la Maison de Résistance, lors de sa perquisition le 20 septembre dernier..
Deux autres audiences passent avant :. la première en visio-conférence depuis Fleury-Merogis : le détenu prend 6 mois ferme pour « évasion », pour ne pas être rentré à la prison de St Mihiel à l’issue d’une permission de sortie. La seconde audience change de composition, le juge Fabien Parmentier est remplacé par le Juge Le Fur, le même qui conduit la commission rogatoire ayant amené aux perquisitions du 20 septembre à Bure pour « association de malfaiteurs » suite aux dégradations commises à l’Hôtel du Bindeuil en juin 2017. Une histoire d’escroquerie où assistance, cours et procureur se perdent dans une plaidoirie interminable et labyrinthique de l’avocat de l’a défense.
Enfin, vers 15h l’audience débute avec le juge Fabien Parmentier qui revient avec ses deux assesseures.
Le juge ouvre l’audience « Vous êtes M. x., ça se prononce comme ça ? »
X est assisté de Matteo Bonaglia, aviocat au barreau de Paris
Les motifs de la comparution sont relus par le juge :
« À Bure le 20 septembre 2017 vous êtes accusé d’avoir seul et sans armes opposé une résistance violente aux gendarmes.
À Ligny-en-Barrois le 20 septembre 2017, vous êtes accusé d’avoir refusé de vous soumettre aux prélèvements signalétiques
À Ligny-en-Barrois le 20 septembre 2017, vous êtes accusé d’avoir refusé de vous soumettre aux vérifications d’alcoolémie dans l’enceinte des locaux de la gendarmerie alors que vous étiez l’auteur présumé d’un crime ou d’un délit
À Ligny-en-Barrois le 20 septembre 2017, vous êtes accusé d’avoir proféré des menaces de mort à l’encontre de représentants des forces de l’ordre. «
Le juge informe du droit à des déclarations spontanées et à garder le silence.
Il donne ensuite la parole à l’avocat pour les conclusions de nullités qu’il à présentées
Matteo B. : « J’ai fait des conclusions de nullités pour prendre un peu de recul sur cette affaire et pour la recontextualiser. Les faits prennent place à la Maison de Résistance se retrouvent en commun pour organiser la résistance. Un juge de votre juridiction a décidé de perquisitionner sur commission rogatoire et les forces de l’ordre, à 6h du matin, réalisent cette perquisition. Il faut 1h30 pour que les gendarmes qui sont dans toute la maison remarquent la présence d’un homme qui dort. Ça dénote d’une certaine incompétence.
Trois hommes armés et cagoulés réveillent M. x. et lui demandent son identité. Il semble normal que sur un lieu perquisitionné on vérifie une identité conformément au code de procédure pénal sur les droits concernant la vérification d’identité. Mais il est prévu dans le code qu’il faut qu’on justifie par « tous les moyens » de son identité. Il est important de justifier de son identité mais il n’est pas précisé que seule la carte d’identité permet de le faire.
Les agents spécifient que s’il le fait (justifier son identité), il ne sera pas emmené . Il le fait avec un justificatif de perte de papier d’identité et le tribunal a la confirmation que l’identité affirmée par ce papier était avérée. Le fait que un des papiers présentés est officiel et corroboré par la carte bancaire est suffisant mais je ne pense pas que ce sont les consignes qu’ont eu ce jour-là les forces de l’ordre.
On a ici une mesure contraignante qui conduit M. x. au commissariat pour une vérification d’identité et conduit à un récit dont vous n’avez pour l’heure que la version policière dans le dossier.
Vous êtes donc invités ici à établir la régularité de ce contrôle d’identité.
Cette invitation de force dans un commissariat a porté préjudice à M. x. Si cette nullité est retenue, toute la procédure tombe mais je vous demanderai néanmoins de la conduire au fond car il est important de signifier aux forces de l’ordre qu’un militant opposé à un projet politique n’est pas un citoyen de seconde zone.
Dans un article récent du Figaro je lis que près de « 75 analyses de la gendarmerie » se penchent sur des lieux de lutte tels que Notre-Dame-des-Landes ou Bure et dans un autre article de la revue Regards je lis que Bure subit une « pression (policière) inimaginable »,avec « un contrôle quasi-colonial du territoire. ». Les militants ne doivent pas être traités comme des citoyens de seconde zone.
Le juge passe la parole au substitut du procureur, Bruno Fleury à propos des nullités invoquées :
« Non, Monsieur x. n’est pas un citoyen de seconde zone ! »
Nous connaissons bien tous les éléments concernant la lutte à Bure, ici, il n’est pas question de parler politique mais de dire quelles sont les circonstances juridiques.
Monsieur Fleury rappelle que nous sommes dans le cadre d’une commission rogatoire avec des personnes susceptibles d’avoir commis les actes mis en cause, et affirme que la police judiciaire est soumise à la souveraineté de l’autorité judiciaire
Et la loi sur le contrôle d’identité est claire : dans une maison où tout le monde n’est pas propriétaire et est susceptible d’avoir commis des délits, il est normal qu’on procède à la vérification d’identité.
Or ce n’est pas parce-que Monsieur x. déclare s’appeller x., et qu’il montre une carte avec ce nom inscrit dessus que cela prouve son identité. L’identité a donc été établit au bureau de la police : le nom correspond à la photo donné, ça matche.
Concernant la perquisition, et plus précisemment le dispositif policier : ces 150 policiers étaient là pour éviter que personne ne soit blessé. Il n’y a donc pas nullité, le contrôle est valable »
Le procureur demande donc le rejet des nullités.
Le juge dit être d’accord avec le procureur et rejette la nullité. Le juge relit les faits telles qu’ils sont apparaissent dans le dossier et interroge x de temps en temps, lui demandant si ce qu’il lit est juste.
X revient sur les circonstances. À 6h du matin, plusieurs hommes armés le réveillent et lui demandent sont identité. Il répond qu’il la perdu, leur montre un document le justifiant, et on le conduit au commissariat. Ses souvenirs de la GAV sont confus de par l’état de choc dans lequel il se trouvait, et il dit ne pas comprendre pourquoi, parce-qu’il est militant, on l’arrête.
Le juge intervient, rétorquant que les gendarmes ne disent pas tout à fait cela: selon eux, x a été découvert à 7h25, a été virulent, et à refuser de déclarer son identité. X répond, sur conseil de l’avocat, qu’il va désormais user de son droit de garder le silence pour laisser la parole à celui-i. Les assesseurs ne font aucune observation.
On en vient aux éléments de la personnalité de x et à son casier judiciaire(voir dossier)
Une assesseure demande à x s’il a consommé de l’alcool le jour de son arrestation. X garde le silence. L’assesseur insiste, en vain, et le juge rappelle que x a décidé de garder le silence. Il n’y a plus d’observations de la part des assesseurs, et le procureur semble affligé. Le juge lui laisse la parole.
Selon lui, il est dommage que le mis en cause choisisse de ne pas s’exprimer pour échanger en toute démocratie. Le procureur demande toutefois la relaxe pour deux des chefs d’inculpation : 1° la rébellion : bien qu’il soit dit que x ne soit pas content, il est dit qu’après être menotté, il se laisse emmener -certainement parce-que le menottage est là pour le protéger de lui-même. 2° le refus de donner son identité, puisque de fait, x la donné, comme il pouvait, après s’être fait réveiller. Il y aura toutefois une peine requise pour le « refus de donner ses empreintes », et les « menaces de morts » qui auraient été portées à l’encontre des gendarmes : 2 mois de prison ferme pour le premier, 4 mois de prison ferme pour le second. Selon lui, les propos adressés aux forces de l’ordre, tel que « je vais tuer quelqu’un en sortant d’ici » ne sont pas à prendre à la légère, d’autant que c’est déjà arrivé que de telles menaces soient réalisées après être prononcées.
L’avocat choisit de revenir sur le fond : « Cette procédure commence à s’étioler, c’est pour ça que je tenais à amener cette affaire au fond, car au vu des faits commis à Bure, les opposants sont traités comme des citoyens de seconde zone sous contrôle « quasi-colonial ».
Ici il n’est pas question d’opposer la parole de M. x à celle des policiers. Car dans la plupart des dossiers de ce genre, j’ai des agent s qui me disent une chose mais qui n ‘ont pas d’éléments probants. Je ne souhaite donc pas m’attarder là-dessus. »
Pour défendre qu’il n’y a pas eu rébellion, il s’appuie sur deux questions qui ont été posées à x par les gendarmes :
-« pourquoi t’es tu tapé la tête contre le mur? »
-« quel a été le but? »
Ces deux questions prouvent bien qu’il n’y a pas eu rébellion : x ne s’en prenait qu’à lui-même.
Il ajoute que le test d’alcoolémie avait pour but de savoir si x était « en mesure de comprendre la portée de ses droits : le condamner pour cela n’a donc strictement aucun sens.
Quant au refus signalétique, celui ci est une infraction qui sanctionne quelqu’un qui, étant dans l’impossibilité de justifier son identité, refuse par suite de justifier son identité. Or pour pouvoir sanctionner, il faut recevoir une autorisation du procureur, ce qui n’a pas été fait. Il s’agirait donc ici d’une infraction non constituée.
Enfin, et il reste le cœur de ce dossier qui doit être regardé en gardant en tête tout ce qui s’est passé avant : les menaces de mort. Selon lui, contrairement à ce que Monsieur Fleury avance, l’infraction n’est pas « parfaitement constituée » : il faut que les menaces soient directement proférées « à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique. »
Or aucune ne l’est ! Tout au plus, ACAB est-il un outrage mais pas une menace. Et la situation ne présentait aucun risque de dommage : x était attaché à un poteau tout au long de sa garde à vue.
Il a été ici fait le choix de trouver tout ce qui est possible de trouver contre celles et ceux qui se mobilisent contre un projet périlleux pour l’environnement. et comme les fonctionnaires de police ont vu que x avait été condamné pour les mêmes faits dans le passé, alors ils ont choisi cette infraction pour lui donner plus de poids.
« C’est un abus de pouvoir et un détournement de procédure »
L’avocat revient alors sur ses condamnations précédentes pour évoquer sa personnalité. Il invoque le droit à l’oubli pour des faits vieux de 14 ans. Il souligne que x est vice-président de l’association des sans domicile fixe. Il ajoute que, plutôt que d’aborder la question de la personnalité sous le point de vue du logement, de l’emploi et de l’insertion, il préfère produire l’attestation de M. Jacques Bérès (cofondateur de Médecins Sans Frontières) qui témoigne, dans une lettre, de l’investissement de x au sein des enfants du canal.
L’avocat conclue : « je ne pense pas que la personne qui vous est présentée aujourd’hui corresponde au portrait brossé par le dossier »
Le juge demande alors à x s’il a quelque chose à ajouter.
X répond : « pendant 7 heures je suis menotté à un poteau de béton dans une position inconfortable, et avec une opération récente à l’épaule. Et je récolte que moqueries et quolibets lorsque je demande à être détaché alors que j’ai très très mal. »
Le délibéré est fixé au 30 janvier 2018, à 9h, au tribunal de grande instance de Bar-le-Duc. Nous étions là au procès, nous serons là pour entendre le délibéré !
Face à un réquisitoire aussi lourd, nous ne laisserons pas notre ami aller seul au-devant d’une justice qui isole et individualise : nous vivons et luttons ensemble, le procès de l’un d’entre nous est donc le procès de l’ensemble d’entre nous !
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