(..) “La nature bureaucratique de l’EZLN se traduit, entre autres, par le contrôle de la parole. Les voix des révoltés du Chiapas se réduisent à une seule voix, qui parle et écrit au nom de toutes les autres. Que des bourgeois de la gauche-caviar défendent Marcos au nom d’une conception élitiste, cela n’est point étonnant. Il serait un ” artiste ” et ” le meilleur écrivain latino-américain d’aujourd’hui “, le représentant ” d’une poignée de jeunes gens bien doués “. “Il (Marcos) ne parle pas à leur place, il transforme ses compagnons en personnages de conte ou de nouvelle. Avec cette subjectivité affichée mais collective, il invente une nouvelle façon de dire je qui résonne avec le nous sans s’y substituer, un je ouvert et mutant que chacun peut reprendre à son compte et prolonger à sa façon. (34) “. Les militants enthousiastes se sentent parfois gênés par le spectacle du sous-commandant. Ils redoublent d’efforts pour nous rassurer, garantissant que Marcos ne parle pas à la place du peuple, dont il ne serait que le porte-parole. Il n’y aurait pas de danger de caudillisme. Mais comment reconnaître la parole du peuple si l’on n’entend que Marcos? Seul Marcos le peut, bien sûr! Et l’on tourne en rond. D’autres, enfin, ne craignent pas le relent de totalitarisme et expliquent que : ” Le masque dit que tous peuvent parler par la bouche d’un seul. Le masque dit que personne n’est irremplaçable. (35) ” Puisque tout le monde est égal, ajouterions nous avec cynisme. De son côté, le sous-commandant se justifie : ” ce qui est nouveau ce n’est pas l’absence de caudillo; ce qui est nouveau est le fait qu’il s’agit d’un caudillo sans visage. ” (36) Pour nous, bien entendu, l’anonymat du chef n’est pas la fin du chef, c’est au contraire la forme abstraite de l’autorité. Le culte du héros n’est pas dépassé, il se manifeste sous sa forme pure. La modernité s’offre à nous sous la forme d’une caricature du passé : on croyait avoir liquidé l’avant-gardisme bolchevique et l’on se retrouve avec l’avant-gardisme de Zorro. L’EZLN c’est le dirigisme en passe-montagne démocratique.” (…) https://sites.google.com/site/comuneiro/home/ezln/reeve