La reproduction artificielle de l’humain. (a propos de la procréation médicalement assistée)
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Catégorie : Global
Thèmes : DuEcologieEmbryonsEugénismeGpaMarchandisationPmaPollutionPosthumanismeStérilitéTranshumanismeVivant
Introduction :
Fin 2012, début 2013. Le débat sur le mariage homosexuel occupe la scène politique et médiatique française. Manifestations, grandiloquences de tous bords, débats sans fin à l’Assemblée nationale, diatribes dans la presse et sur les plateaux télés s’enchaînent des mois durant. Tapage entretenu par le gouvernement socialiste tout juste élu pour divertir l’opinion de sa politique économique.
Au-delà du mariage homo, des collectifs et associations LGBT (Lesbiennes, gays, bi et trans) imposent dans le brouhaha l’extension du droit à la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes. L’inter-LGBT en a fait un enjeu de la campagne présidentielle. La PMA, jusqu’alors réservée aux couples hétérosexuels médicalement infertiles, est travestie en condition impérieuse de l’égalité homos/hétéros. Le débat est sciemment réduit à cette fausse symétrie.
Le chantage paye et le mot d’ordre est repris par l’ensemble de la gauche. On voit émerger tel collectif « Oui, oui, oui » – oui au mariage, oui à la filiation, oui à la PMA. Du Parti socialiste à la mouvance anarchiste, de la très institutionnelle inter-LGBT aux féministes queer du pink bloc, des éco-techs d’Europe-Ecologie aux mélenchonistes du Front de gauche : tous reprennent le dernier cri de l’époque : « La PMA pour tous et toutes ! ». En quelques semaines celle-ci est érigée en norme. Elle devient le marqueur identitaire d’une gauche qui peine à se distinguer de la droite en matière sociale et économique. Qui-ne-sou-tient-pas-la-P-M-A-n’est-pas-de-gauche-ouais-ouais ! Forts de cet unisson, membres du gouvernement, actionnaires du Monde, militants gays ou féministes libérales unissent leur voix pour réclamer la légalisation de la gestation pour autrui (GPA), c’est-à-dire des mères porteuses.
Au même moment, dans la rue et sur les plateaux télés, la « manif pour tous », un mouvement social hétéroclite de grande ampleur, emmenée par Frigide Barjot s’oppose au « mariage pour tous ». Elle réunit pêle-mêle catholiques, militants et citoyens de droite, défenseurs de la famille, homos opposés au mariage. À sa marge, nazillons, identitaires et cathos intégristes, réunis sous les bannières de Civitas et du Printemps français de Béatrice Bourge. La droite institutionnelle y joint sa voix. Non que Copé ou Fillon soient de fervents défenseurs de la Famille. Les libéraux de droite n’ont qu’une valeur : le fric. L’UMP ne réchauffe le vieux discours familialiste que pour raccrocher le peuple de droite, embarrasser la gauche au pouvoir et profiter des retombées électorales d’un mouvement qu’elle n’a pas initié. Des centaines de milliers de personnes manifestent drapeaux bleus-blancs-roses au vent. Même si tous les marcheurs ne sont pas homophobes, nombre de ceux qui protestent contre le mariage, l’adoption homosexuelle, la PMA ou la GPA défilent en fait contre l’homosexualité.
Les officiels du Parti Progressiste, tiennent d’autant mieux leurs troupes que celles-ci ne leur opposent nulle volonté de penser par elles-mêmes. Quiconque critique le mariage homo ou la PMA « fait le jeu de la droite ». Quiconque critique le régime soviétique fait le jeu de l’impérialisme US. Marie-Jo Bonnet, ancienne militante du MLF, du FHAR (Front homosexuel d’action révolutionnaire), et cofondatrice des Gouines Rouges en 1971 a pris ce risque :
« Aucun argumentaire de gauche contre le mariage ne peut s’exprimer. Si l’on est de gauche, il faut être unanimement favorable au mariage, qui signifie l’égalité des droits et la reconnaissance de l’homosexualité. Ses adversaires, eux, sont forcément de droite, réactionnaires et homophobes. Les positions sont tellement tranchées, qu’on a l’impression que le débat a bien plus pour thème l’homosexualité, et plus exactement les gays, que le mariage, c’est-à-dire l’aspiration d’une petite partie de la communauté à l’assimilation, en s’intégrant à la norme petite bourgeoise de la respectabilité conjugale et familiale [1] ».
Idem pour la PMA. Il y a quelque chose de révélateur dans la rapidité de la gauche à reprendre cette revendication. Débat sur la question : rien. Néant. Nada. Comme si être de gauche et soutenir la reproduction artificielle de l’humain allaient nécessairement de pair.
L’insémination pratiquée à domicile avec le sperme d’un proche n’est pas la PMA. La première n’exige qu’un pot de yaourt et une seringue. Elle soulève essentiellement la question de l’accès aux origines pour l’enfant : lui dire qui est son père ? La PMA en revanche, pratiquée en laboratoire, soumet les couples à l’expertise médicale, transforme la procréation en marchandise, place les embryons sous la coupe du biologiste et entraîne leur sélection : l’eugénisme. C’est la PMA que réclame la gauche et la mouvance LGBT.
Les rares personnes estampillées « de gauche » ayant tenu sur le sujet des positions discordantes ont été ignorées ou accusées de faire le jeu de la droite et de la réaction. Ainsi Sylviane Agacinski, qui dénonce depuis des années la gestation pour autrui et le business de la reproduction artificielle dans des termes qui devraient parler à tous les militants de gauche[2] – si l’on croit que la gauche s’oppose à la marchandisation du corps et de tous les aspects de la vie. Les trois écologistes inspirés de Jacques Ellul et d’Ivan Illich, qui ont fait connaître leur opposition n’ont pas connu meilleur sort. On peut discuter leur idée de la nature, mais il faut discuter leurs critiques de la PMA, balayées d’un revers de main par les progressistes : déshumanisation, pouvoir des experts, fuite en avant technologique, négation de l’Autre et atomisation des individus dans le capitalisme mondialisé [3]. Ajoutons qu’ils ont critiqué à propos, sur le vif ; il est trop facile d’avoir raison trop tard, quand tous les arguments ont été remâchés par tous. D’autres se sont exprimés depuis des années, qui sans traiter exclusivement de la PMA, auraient permis d’y réfléchir à deux fois : dénonciation des manipulations génétiques, de l’eugénisme scientifique, de l’artificialisation du vivant, du transhumanisme, de la médicalisation de tous les aspects de la vie. En vain.
Sans doute, l’unanimité en faveur de la PMA n’est-elle que de façade et de nombreuses personnes à gauche ne se reconnaissent pas dans cette innovation. Mais en politique, seules comptent les apparences. Les silencieux ont tort.
Fortes de ce mutisme, les avant-gardes de la gauche cybernétique – philosophes post-modernes, transhumanistes, post-féministes, médecins et biologistes spécialisés dans la procréation – s’en donnent à cœur joie. L’homophobie de droite, qu’elle soit réelle ou montée en épingle (il y a aussi les Gays Libs, une droite homo, une bourgeoisie gay), leur permet de présenter leurs délires sous un jour émancipateur. Cette gauche cyber-libérale travestit le combat pour la liberté individuelle en apologie de la liberté marchande. Elle confond égalité politique et uniformisation biologique des individus. Elle rêve d’un eugénisme libéral, de l’abolition du corps et d’utérus artificiel. Elle fantasme une post-humanité par re-création technologique de l’espèce humaine. Sous le masque de la transgression et de la rébellion : l’adhésion enthousiaste au technocapitalisme.
* * *
Pendant des mois, j’ai espéré voir quelqu’un exprimer ces évidences : que la PMA n’a rien à voir avec l’égalité des droits ; qu’elle doit être critiquée en tant que telle, et non pas pour son extension aux homosexuels ; que nous n’avons rien à gagner, et tout à perdre à nous laisser embarquer sur la voie de la reproduction artificielle de l’humain. Constatant qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, je me résous dans ces pages à dire pourquoi les partisans de la liberté et de l’émancipation (mais sont-ils encore de gauche ?) doivent s’opposer au développement de la reproduction artificielle de l’humain. Ni pour les homos, ni pour les hétéros : la PMA pour personne !
Chapitre 1 : La stérilité pour tous et toutes !
Les progrès du techno-capitalisme depuis deux siècles concourent à la stérilisation chimique de la population, contraignant les hommes et les femmes à recourir à la PMA pour faire un enfant. La procréation elle-même devient une industrie, soumise à la guerre économique. La « PMA pour tous et toutes » n’est pas le dernier cri de l’égalité, mais l’avenir auquel nous sommes tous condamnés.
Chapitre 2 : Au bazar du beau bébé
La reproduction artificielle de l’humain est avant tout un gigantesque business. Elle génère un nouveau prolétariat contraint de louer son corps et de vendre les produits qui en sont issus. Elle transforme les enfants en produits manufacturés, monnayables sur un marché de l’enfant. Elle est une nouvelle forme de la traite des êtres humains qui ne dit pas son nom.
Chapitre 3 : De la reproduction du bétail humain
Sélection des reproducteurs, sélection des embryons, manipulation génétique des embryons : ce qu’on fait aux animaux, on le fait aux humains. Il n’y a pas de reproduction artificielle sans eugénisme. Cet eugénisme n’aura rien de « libéral ». Nous y serons contraints par les impératifs de l’État et de l’économie.
Chapitre 4 : Les crimes de l’égalité
Derrière la prétendue « lutte pour l’égalité des droits » : le fantasme d’un monde d’hommes et de femmes rendus, non pas égaux, mais identiques par la technologie. Un monde de cyborgs unisexe et monocolore, où manipulations, sélection génétiques et embryonnaires, implants bioniques et technologies convergentes effacent les différences, et uniformisent les corps – et les esprits ? A l’ère du capitalisme technologique, la lutte pour la domination de la nature, qui fut facteur d’émancipation, devient facteur d’asservissement. La destruction de nos fondements biologiques se paye au centuple en soumission au capitalisme, à la technologie, à l’Etat et à l’expertise médicale. L’émancipation sera politique ou ne sera pas.
Bonjour,
Suivant vos recommandations, je me permets de republier mes quatre contributions en un seul article.
Je crois aussi qu’il y avait un doute sur le sujet : sachez que l’intégralité du livre est librement téléchargeable.
Bien à vous,
Alexis
Pourriez-vous donner le lien de téléchargement pour que l’article soit complet et que nous puissions voir aussi ce qui nous avait géné lors du premier commentaire ?
Merci.
tous les liens de l’article ne fonctionnent pas du coup c’est pas super pratique de suivre…
Bon, on a fait l’effort d’aller chercher les liens morts et les remplacer par des liens qui marchent et mêment vers le téléchargement.
Comme dit plus haut, reste une discussion entre modérateurices à avoir car le refus total de la PMA ne nous met pas super à l’aise, on l’a déjà dit.
Et comme en ce moment il y a beaucoup beaucoup beaucoup de mouvement sociaux à Nantes, il est possible que la validation prenne du temps (ce qui n’empêche personne de lire l’article…)
J’avoue ne pas comprendre ce qui vous met mal à l’aise avec le refus de la PMA pour tous et toutes.
S’il ne s’agit que de l’insémination artificielle, elle n’a pas besoin d’être médicalisée. (Cf l’introduction : L’insémination pratiquée à domicile avec le sperme d’un proche n’est pas la PMA. La première n’exige qu’un pot de yaourt et une seringue. ) Les lesbiennes américaines la pratiquent depuis longtemps avec des résultats qui n’ont rien à envier aux laboratoires spécialisés. Cette médicalisation de l’IA est un hold up de businessmen en blouse blanche.
S’il s’agit de la fécondation in vitro : elle est intrinsèquement eugéniste (car elle met plusieurs embryons à portée de main du biologiste), médicalisée, et marchande. Autant de raisons de la critiquer et de la refuser.
Enfin, il est évident qu’on peut refuser la PMA, sans s’opposer par exemple à l’homoparentalité et en soutenant l’adoption pour les homos et pour les hétéros. (Cf le chapitre 4)
Bon, puisqu’il faut tout expliquer : quand on valide ou non un article, c’est qu’on l’a lu. Quand on lit, ça prend du temps. Et là, du temps, on en a peu et pour lire, et pour se voir pour discuter de points sur lesquels on se questionne et là, tu nous en prends déjà vraiment beaucoup, du temps, à gérer tes contributions dans tous les sens, à ne pas comprendre qu’on puisse souhaiter prendre du temps CAR IL Y A D’AUTRES URGENCES !!!! Donc tant que personne de l’équipe de modo n’aura TOUT lu, et tant que nous n’aurons pas fait une réunion de modération pour en parler, bah y’a juste à attendre. Et c’est pas dramatique. T’es pas en taule en train d’attendre que du monde soit au courant, ou avec un oeil en moins, ou sur des rails, ou…
C’est plus clair comme ça ?
(désolé-e-s pour le ton mais ça devient relou, là…)
Il y a malentendu : je ne me suis jamais plaint du délai de modération. Effectivement, il n’y a pas urgence, et je comprend tout à fait que vous soyez débordés en ce moment. Mon précédent commentaire visait juste à répondre à cette question du « malaise ».
Bien à vous, et bon courage alors.
un commentaire émanant d’une personne anti-parentalité pour les homosexuels (et ravi de ce texte) a été masqué. il y a bien assez de tribunes pour ce genre d’écrits normatifs et excluants : indymedia n’est clairement pas le lieu pour ça.
de plus, sur indymedia, on ne « censure » pas les textes : quand on les refuse, il sont visibles dans la rubrique refusés, et puis c’est tout.
Cette maxime, souvent dévoyée, inclus la science sans conscience (marchande en un seul mot!)