RENNES DANS LE VISEUR !

Le déroulement de la manifestation des chômeurs et précaires du samedi 5 décembre, quadrillée dès son amorce par des armadas de bleus, aura eu le mérite d’avoir diffusé parmi tous les manifestants l’évidence que la police constitue un obstacle suffisament encombrant pour tous ceux qui luttent.

Divers collectifs, singularités en lutte et curieux ont été interdits de manifester en l’espace de deux mois à Rennes. Le 17 octobre (soutien aux luttes de l’ouest) et le 5 décembre (marche des chômeurs). Comprenons bien que ce qui est visé par là n’est pas le droit de manifester sur lequel repose l’équilibre social français, mais bien des manières de manifester et de vivre.
N’importe quel badaud aura bien vu qu’à cette occasion les flics, eux, ont pu sur-manifester.

Le 17 octobre, avant le début de la manifestation, des membres de la BAC ont décidé de pourrir toute tentative d’organisation en venant s’introduire, par effraction, et sans souci de légalité dans une maison occupée qui avait eu le tort d’avoir servi de lieu de préparation à la journée festive. A cette occasion, les malfrats n’ont pas hésité à souiller le lieu, à voler le matériel, qui plus tard, fut taxé d’armes de guérilla urbaine ainsi qu’à kidnapper sur place un pré-terroriste pour le garder pendant plusieurs heures au commissariat. Tout cela, afin de justifier aux yeux de la population la terreur que nécessite le besoin de dépendance de la police et de gouvernement. Cette intervention « préventive » n’est pas sans évoquer la prolifération d’arrestations préventives, des délits d’intention qui ont cours dans le monde entier; sous le prétexte ineffable de NOTRE SÉCURITÉ. Il y a quelques jours en Grèce, plus de 150 personnes ont été arrêtées avant un rassemblement commémorant l’assassinat par la police, il y a un an, du jeune Alexis, et le soulèvement qui avait suivi. Le dispositif policier qui a été déployé à Rennes le 17, ( flics amassés sur toutes les places, autour de tous les carrefours, au croisement des rues du centre ville avec mitrailette armés jusqu’aux dents, prêts à tuer) est lisible dans la foulée des propos de Brice Hortefeux qui en fidèle rat sarkozyste a fait de Rennes le foyer contagieux à vacciner.

Samedi dernier, 5 décembre, la marche des chômeurs a été étouffée. Nouvelle manifestation, nouvelle répression. Nouvelle contagion, nouveau traitement, d’une brutalité qui fut assurément prescrite. A nouveau, les casseurs ont eu les coudées franches − les casseurs de grève. Tabassage en règle. Mais pas de fausse pudeur: le plaisir qu’ont pris les flics à cogner les crânes et à faire claquer la chair fait partie du métier. Le sadisme, les flics l’ont incorporé. Leur fonction implique cette perversion, nécessaire à la domination. La question n’est pas que la police ait le droit ou pas de nous casser, c’est plutôt qu’elle s’arroge l’impunité, qu’elle contient le droit, qu’elle l’utilise ou s’en détourne pour mieux le faire valoir d’où son besoin de victimes, de sang neuf. La justice est un moyen de la police. Pour nous libérer de la brutalité policière, des pratiques d’humiliation quotidiennes, de la torture civilisée, c’est bien une confrontation à tous les niveaux de la société qu’amorce nos mouvements jusqu’ à faire débander ces sadiques de flics.

Chaque fois qu’un camarade subit la matraque de la justice, chaque fois qu’un camarade perd un oeil, est isolé, rapté, emmuré vivant dans une prison, c’est toute la base du mouvement qui en est affectée, et tous ceux qui partagent de près ou de loin ses pratiques et ses pensées. La peine est réciproque. Parce que sa peine est aussi la nôtre. À travers les corps de nos camarades enjusticiés, c’est aussi bien notre élan qui est attaqué. Car nous purgeons tous une peine qui pourrait ne jamais finir. Et il n’y a que dans le refus absolu de cette peine perpétuelle d’être gouverné, que nous recouvrons un peu de liberté et de bonheur. Ceux qui luttent contre cette peine ont toujours été voués à être bannis de l’humanité. Tel est le sens de la création, de toute pièce, de la menace terroriste d’ultra-gauche qui vise bien à nous terroriser, à nous replier sur nous-mêmes, sur nos identités, en diffusant la peur qui éloigne du courage.

« Ils ne veulent rien »

On dit que les mauvais manifestants, les mauvais chômeurs « ne veulent rien ». Qu’ils seraient des MOINS QUE RIEN, moins que des citoyens, moins que des humains, moins que des travailleurs. Puisqu’ils ne veulent rien. Mais qu’y aurait-il à vouloir? Quelque chose qui serait déjà là, en magasin? Ce qu’on voudrait posséder, parce que d’autres l’ont; parce qu’on l’a perdu? Travail, salaire, statut social, identité, assurance contre la mort… Autant de choses qu’on admettrait que nous voulions les négocier. En effet nous ne voulons de vos miettes de Rien. Pourtant, nous voulons autre chose, qui n’est pas négociable. Autre chose que les carottes qu’on nous tend. Ce que vous dites n’être RIEN n’est pas RIEN. Nous ne reconnaissons pas ce qui nous exploite et nous tue, peu à peu: l’économie et sa justice. La détermination collective que nous partageons est de ne pas nous résoudre à défendre nos intérêts, privés et publics. Les pratiques politiques que nous assumons sont celles qui crééent une situation où nos voix résonnent avec d’autres, composent et se lient avec tout ce qui désire ne plus subir ce que le pouvoir administre. Nous partons des communautés de lutte qui sont là, et combattons ensemble.

Si Rennes est dans le viseur, c’est bien parce qu’elle recèle encore des foyers d’opposition à la recomposition du capital. Ce sont les élus et fonctionnaires de la préfecture de Rennes qui administrent la politique qui cherche à neutraliser tout ce que le centre ville contient encore d’hostile à son emprise. Les zones d’opacité de la rue Saint Michel doivent faire place à la lumière transperçante, à la transparence sans reste des vitrines. En somme de tout ce qui, en vitrine, « fait sale », et rappelle son dehors à l’économie. Là encore ce qui leur fait peur, c’est là où nous nous regroupons, là où nous sommes impénétrables, ingouvernables. Là où d’autres rapports que ceux polarisés par l’économie, la police et la politique adviennent.

Nous n’avons pas besoin de police pour apprendre, jouir, aimer, partager. Ni d’économie, ni de politiciens. Voilà qui précipitera leur fin. Car d’autres affaires sont en cours, le mouvements des subjectivités indésirables. Lorsque nous ne sommes plus isolés, nous éprouvons cette vérité que le capitalisme n’est pas une fatalité. Que d’autres formes de vie ont toujours existé. Nous voulons faire rejaillir, la voix d’un possible. Celui de la communisation de nos luttes, de nos forces, de nos pensées, de nos mots d’ordre et de nos corps.
Ça déborde, Ça débordera !

Manifestons
Samedi 12 décembre
à 15h
place de la mairie
RENNES