Scandale ! (le western est-il compatible avec l’écologie urbaine?)
Catégorie : Global
Thèmes : Contrôle socialEcologie
Tout le monde a eu peur ce soir-là. Et tout le monde a été étonné, stupéfait, que les flics aient si ostensiblement voulu blesser, voire tuer. Personne n’y a vraiment vu la banalité de la violence policière.
Ce qui s’est passé ce 8 juillet tient clairement de la démonstration de force, de la démesure, de l’événement ; une suraffirmation du pouvoir policier dans la gestion de la ville.
L’action de la police est à la fois quotidienne et événementielle. La police, hier « gardiens de la paix », aujourd’hui « bacqueux musculeux », fait quotidiennement la guerre à tous les indésirables: jeunes, basanés, traînards, soûlards et autres cafards. Quotidiennement, la BAC harcèle des habitants de La Noue ou La Boissière : contrôles d’identité musclés, courses-poursuites effrénées, ou juste une claque en passant, comme ça, l’air de rien, vite fait bien fait. Mais parfois la démonstration de force se fait plus spectaculaire, appuyée par un déploiement de troupes démesuré, les camions encerclant complètement la cité assiégée. Mélange de terreur quotidienne et de coups de force militaires. Une police de western : la violence légale pure, avec carte blanche de l’État, alternant la loi des armes de quelques sherifs et autres rangers, et les expéditions punitives des tuniques-bleues.
Avec la bande à relous qui fréquentait la Clinique, la police jouait plutôt la contention molle, la placidité face à l’hostilité. Comme une équipe de rugbymen qu’on oblige à jouer en défense malgré l’agressivité de l’adversaire. À contrecœur. Ordre préfectoral ou pression municipale, peu importe.
Le 8 juillet, ils ont pu se rattraper et tirer dans le tas et les têtes. Les flics, ce soir-là, ont montré que c’était terminé, qu’ils commandaient de nouveau. « On tient la rue », diront-ils encore après avoir chargé la manif d’autodéfense le lundi suivant.
Administrée par le parti outsider de la Gauche décomposée, Montreuil est aujourd’hui un véritable laboratoire de gestion urbaine. Or, cette écologie urbaine cherche la cohabitation entre différentes populations, la propreté et la bonne entente citoyenne, la bonne gestion de paix. Il faut que les rues soient sûres et propres, il faut virer les traînards de la rue, les encombrants, les indésirables, mais discrètement, en toute invisibilité. L’écologie urbaine veut une ville où les conflits sont pacifiquement gérés ; ce n’est ni plus ni moins qu’une forme de police, polie et policée. Et elle a besoin de la police en bleu, la basse police, mais discrète, qui n’entretient pas les tensions, ne s’attire pas l’hostilité des habitants. C’est cela qu’elle appelle la « police républicaine », de proximité.
L’écologie urbaine semble donc théoriquement peu compatible avec le western se donnant en spectacle. Et la police républicaine ne peut tenir la démesure au quotidien, même avec des fusils à « létalité atténuée » qui leur permettent d’assouvir leur désir de shooter les hors-la-loi sans tuer à chaque coup. De terroriser en laissant vivre.
Les procédures de l’IGS, les pétitions citoyennes contre le flashball, les déclarations et projets de loi des politiciens, sont donc venus rassurer, reconstruire l’image d’une bonne police républicaine, sous contrôle de l’État démocratique. En même temps, elles ont contribué à l’émergence du scandale.
Car l’événement a bien fait scandale. Il y aura un avant et un après.
Nous ne saurons jamais qui, à l’ordre de qui, pourquoi, on a tiré dans les têtes ce soir-là. Peu importe. L’enjeu n’est pas là. Comme il n’est pas dans les éternelles alternatives infernales qui réémergent dès que nous sommes faibles : gauche démocrate ou insurrectionalisme sans contenu, positivité affirmative ou négativité critique, interdiction du flashball ou fermeture de la police, démarches institutionnelles ou affrontement direct avec les shérifs.
Il s’agirait plutôt de se demander comment partir de ce scandale pour faire reculer la police dans l’occupation croissante de nos rues. Chercher à faire que le scandale ne se cristallise pas sur le seul événement « fusillade du 8 juillet ». Donner à voir comme scandaleuse, insupportable, l’action quotidienne de la police. De toutes les polices.
Facile à dire…
par la police le 8 juillet dernier à Montreuil
Police, prison, justice, psychiatrie, contrôles sociaux, tout est fait pour nous faire rentrer dans le moule.
Comment s’auto-organiser face aux violences d’État ?
Dimanche 27 septembre
Prix libre
17/20h : Infos, discussions, bouffe
20h pétantes, concert
Necrofilles (duo grunge Dyi – Angers)
Monocle (Trip noise déjanté – Le Mans)
Sleazy, Inc. Operated (Post punk trash – Liebzig)
à la coordination des intermittents et précaires
14 quai de charente, Paris 19°, M° Corentin Cariou, ligne 7
Mais que fait la police ?
http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4568
De mon avis personnel, les évènements de Montreuil sont le paroxysme médiatique du processus d’immoralisation de la police qui a commencé il y a quelques années déjà.
Pour raconter ma vie, et parce que je suis sur que ça vous intéresse ;) , plus jeune j’ai voulu rejoindre les forces de l’ordre, j’ai vu l’envers du décor : des gens sympas qui faisaient un boulot pas facile, principalement à cause des ordres qu’ils reçoivent et de plus en plus à cause de la façon dont la population les perçoit.
Et puis j’ai réfléchi, je me suis dit que suivre aveuglément les ordres n’aurait pas fait de moi le représentant de la « moral » et de la « justice » que je pensais pouvoir devenir. Ce qui a toujours été le cas finalement dans la police, alors j’ai caressé l’idée de passer les concours pour rentrer officier et me suis dit que si je donnais les ordres, ça irait.
Mais, pendant mes études ont éclatées les émeutes, a été supprimée la police de proximité, je me suis fait « houspiller » par quelques CRS, et j’ai réalisé que la police devenait une milice aux ordres du gouvernement, et que même les officiers suivaient les ordres ou étaient virés (ou mis en retraite s’ils dénonçaient les dérives du système). Aujourd’hui, même les juges ont été mis au pas, l’Etat ne cherche plus à protéger les citoyens, il veut être rentable, faire du chiffre. Alors on met en garde à vue pour 3g de beuh, pour ébriété publique manifeste ou pour avoir participé à une manif. On condamne à de lourdes amendes de braves types parce qu’ils ont été de bons samaritains (affaire Zataz, cf la video de Maître Eolas ) ou « pour délit de solidarité ». Et on multiplie les amendes pour outrage.
Le processus judiciaire est entièrement dévoyé, il condamne coupables et innocents, Hadopi veut condamner pour « défaut de sécurisation » comme si on condamnait quelqu’un qui s’est fait cambrioler après avoir laissé les volets ouverts. Demain on condamnera sans doute ceux qui refuseront de se faire vacciner contre la grippe A.
Or, tous ceux qui prennent ces décisions politiques ne sont pas ceux qui les appliquent sur le terrain. On leur met la pression, on leur fait hululer le spectre du chômage et de la crise pour leur faire croire qu’ils n’ont d’autres choix que d’obéir. Et ils obéissent parce que c’est ce qu’ils ont toujours fait.
Est-ce à nous de leur ouvrir les yeux ? Ou est-ce déjà trop tard et n’a-t-on d’autres choix que la lutte ?
Je n’ai pas encore arrêté de réponse sur la question, mais malheureusement lorsqu’on se documente sur la révolution de 1789 on voit que les premières cibles des révolutionnaires furent les représentants de la justice (juges ou prison). Pendant la commune, ce furent les mairies et les tribunaux… Il ne semble donc pas facile de leur faire ouvrir les yeux.
L’injustice entraîne l’insurrection qui parfois débouche sur la Révolution.
Et notre période moderne est particulièrement injuste, sous prétexte de vouloir contrôler l’insécurité, on multiplie les policiers dans la rue alors qu’on ampute les moyens de la police financière. On interdit aux personnes condamnées de passer des concours publiques alors qu’on nomme ministres des gens ayant fait de la prison. On licencie dans des hôpitaux alors qu’on y dépense jusqu’à 200 000€ pour recevoir le président. On multiplie les caméras dans les centre-villes alors qu’on ne diffuse pas les images filmées par la télévision officielle…
Alors, certes les évènements de Montrueil étaient une grosse bavure, mais ce ne sont pas les bavures qui font les révoltes, mais la tentative par l’Etat de les banaliser, d’en faire une violence normal, de tous les jours.