N’importe quel travail vaut mieux que pas de travail du tout… il n’y a pas de travail plus dur que de pas en avoir
Bill Clinton 1998

Le principe moral est le droit qu’a l’Homme à son travail… A mon sens, il n’est rien de plus atroce qu’une vie oisive. Nul n’y a droit. Dans la civilisation, il n’y a pas de place pour les oisifs.
Henry Ford

L’engagement civique doit être récompensé et non pas rémunéré. Celui qui pratique l’engagement civique perd la souillure d’être chômeur et de toucher une aide sociale…
Ulrich Beck L’âme de la démocratie 1997

Rappel historique du contexte de la réforme :

Le Revenu minimum d’insertion (RMI) a treize ans. Créé en 1988 comme une aide pour sortir de l’exclusion, il peut être à juste titre considéré comme une avancée sociale majeure. Il constitue le minimum vital pour ceux qui vivent en état de grande exclusion et contribue indéniablement un moyen de lutte contre la pauvreté. il s’agit d’une allocation temporaire de survie qui donne les moyens et incite l’insertion.

Aujourd’hui, près de 1100 000 bénéficiaires.
Le montant moyen s’élève à 304 euros
765 000 contrats d’insertion ont été signés
7,5 milliards d’euros constituent le budget de cette allocation.

Deux objectifs sont contenus dans la réunion des trois lettres RMI : la création d’un revenu minimum et une aide à l’insertion mais aujourd’hui, chacun s’accorde à reconnaître que le RMI est un échec.
Seulement un allocataire sur deux bénéficie aujourd’hui du contrat d’insertion prévu par la loi.
Au total, une trop faible part d’allocataires accède à l’emploi et ceux qui bénéficient du RMI depuis plusieurs années s’éloignent encore plus du monde du travail.
La dimension insertion est insuffisante, voire totalement absente. A ce propos, la Cour des comptes relevait que la «contractualisation demeure le point faible du dispositif» et la nécessité de «renforcer l’efficacité du volet insertion».

Reste à comprendre pourquoi.

Le RMI est-il un handicap au retour à l’activité?
Ce paradoxe a fait l’objet d’études, en particulier de la part du Commissariat général au Plan.

Les allocataires du RMI préféreraient-ils s’accommoder du minimum social plutôt que d’accomplir un travail ne procurant que des revenus faiblement supérieurs ?

Le faible différentiel, voire le différentiel négatif qui existe entre le RMI et les revenus rémunérant une activité salariée, notamment lorsque celle-ci est exercée à temps partiel expliquerait-elle la faible incitation au retour à l’activité ?

Bien souvent, la faiblesse de cet écart ne suffit pas à compenser la diminution progressive de l’aide au logement, l’imposition de l’ensemble des revenus, les coûts supplémentaires liés à la reprise de l’activité (frais de transports, garde d’enfants…).

Il faut reconnaître, avant tout, l’hypocrisie du I compris dans Insertion de RMI et admettre qu’il existe des personnes qui, pour des raisons diverses, ne retrouveront jamais de travail.

Il n’y a pas ici de jugement de valeur, mais un simple constat : Certains bénéficiaires du RMI sont et resteront durablement exclus de l’emploi.
Or, il est hors de question de priver une personne d’un revenu minimal, mais il s’agit de mettre fin à l’hypocrisie de leur prétendue possibilité d’insertion professionnelle.

Aujourd’hui l’Etat se prépare à dépenser sans compter pour que des centaines de milliers d’hommes et de femmes simulent le travail disparu dans d’étranges « ateliers de formation » ou d’entreprises d’insertion » afin de garder la forme pour des emplois qu’ils n’auront jamais.

On invente toujours de nouvelles mesures encore plus stupides que les précédentes simplement pour maintenir l’illusion que la machine sociale qui tourne à vide peut continuer à fonctionner indéfiniment.

L’Etat se charge une fois de plus de ce que le marché n’est plus à même de garantir en instituant un nouveau programme de création d’emplois

Cette simulation étatique du travail, qui s’accompagne de la réduction de la durée de l’assurance chômage, est aujourd’hui encore plus violente et répressive qu’elle n’a jamais été.

Ce fanatisme de la bureaucratie du travail ne tolère pas que les exclus, les chômeurs, les sans avenir se réfugient dans les dernières niches, pourtant très étroites du néo-Etat social en lambeaux.

Elle incarne la volonté encore et encore de maintenir coûte que coûte la domination de l’idole travail même après sa mort. Aujourd’hui les exclus, s’ils ne veulent pas vivre de charité chrétienne et d’eau fraîche, vont devoir accepter n’importe quel sale boulot, n’importe quel travail d’esclave ou n’importe quel contrat d’insertion aussi absurde soit-il, pour prouver leur inconditionnelle disponibilité au travail.

En simulant « l’emploi » et en faisant miroiter un futur positif de la société du travail, on crée la légitimation nécessaire pour sévir plus durement contre les chômeurs et ceux qui refusent de travailler. Grand paradoxe : la contrainte au travail imposé par l’Etat, même si il n’a aucune chance d’aboutir, reste néanmoins un point de repère idéologique pour une large couche de la population menacée par la déchéance.
Avec un stock de 100 000 RMA dont 30 000 dans le secteur marchand attendu en fin d’année 2004, Capital & Travail sont définitivement les deux faces de la même médaille.