Ce qui suit est mail d’un pote qui se trouve dans la ville de Oaxaca.

« De ma prison secrète, voilà quelques lignes pour revenir sur la journée
d’hier, samedi 25 novembre. Prison, car les choses ont si mal tourné,
enfin plus ou moins car j’ai eu la chance de tomber sur un convoi de la
Limedh (Ligue Mexicaine des Droits de l’Homme) qui m’a mis en lieu sûr,
que nous sommes tous cachés, sans possibilité de sortie ( maintenant si,
puisque vous recevez ce mel), sur le qui-vive à chaque personne qui frappe
à la porte, ravitaillés en bouffe et clopes par quelques solidaires,
informés par tout un relais tèlèphonique qui s’est mis en place.

Hier, donc, la APPO avait convoqué à la septième mégamarche, qui, de
manière pacifique, devait se conclure par un bloquage de 48h, par le biais
de barricades, du zocalo, grouillant de vermine policière.

Personne ne savait vraiment comment ça allait se passer mais le ton était
donné qu’une épreuve de force allait se dérouler. La veille, un groupe de
touristes français nous prevenait qu’ils allaient, sous les conseil de
leur guide, fuir la ville. La « Jornada » (plus grand quotidien mexicain)
annonçait une journée de violence.

Il fallait être naïf pour ne pas voir que ça allait a ponerse feo comme
ils disent (devenir laid, en gros).

Les rumeurs couraient que les gens de la Sierra (région de l’Etat de
Oaxaca), exaspérés des séquestrations, violations et assassinats impunis,
étaient descendus armés. Les milices autonomes d’auto-défense, ou brigades
mobiles de la APPO, encadraient la marche, les autobus chargés à craquer
de pêtards, bazookas artisanaux, pierres, casques, vinaigres, coca-cola,
frondes et boucliers.

Tous les commerces fermaient, sur quelques rues la PFP posait des
barbelés. Arrivée de la marche vers 15h30 dans le centre historique.
Repos, tambouille et prises de position sur chaque rue, face aux Robocops.

On allait en découdre aujourd’hui, épuisés de 6 mois de lutte sans
réponse, et ça se voyait.

Les rues étaient en folie, dans la principal, qui va du zocalo a Santo
Domingo, des centaines voire des milliers de personnes entonnaient « hoy
voy hacer… una fogata con los de la PFP » (aujourd’hui je vais faire un
feu de joie avec ceux de la PFP -litteralement c’est pas vraiment ça mais
c’était à comprendre comme ça).

Et puis tout s’est enflammé, et après vous trouverez facilement la suite
de la journée décrite minute par minute sur IndyParis.

Fatigués, mal organisés, trop fougueux, après des combats acharnés on
s’est vite fait déborder, bouffés jusqu’à la moelle par les gazs
lacrymogènes.

A la tombée de la nuit, les milices paramilitaires et la police municipale
ont fait leur entrée avec leurs flingues. A une rue adajacente c’est 3
tirs qui arrivent dans notre direction, 1h plus tard 6 autres, gazs,
courses, repli. Un enfer.

Fidèles a la Commune et sa semaine sanglante, les insurgés ont brûlé et
amoché plusieurs bâtimens et voitures dans leur déroute. Les patrouilles
de la PFP se lancent alors à la recherche des survivants et la répression
commence.

Elle est terrible et continue ainsi, avec l’aide de toute la technologie
qu’elle dispose. A partir de 9h ce soir la police commence à entrer dans
les maisons pour arrêter les gens, qui sait si la maison oú je me trouve
sera « visitée ». Encore une putain de nuit en perspective, déjà que hier
j’ai pas dormi et que j’entends plus rien a cause d’une vieille grippe que
j’ai choppé (ça me bouffe les oreilles c’est horrible) dans la froideur
d’hier.

Les hélicoptères rodent en permanence, le centre ville inonde de
flicaille, et Ulises Ruiz le gros connard a promi que tous les
participants d’hier seront appréhendés. APPO est une association
criminelle, le mouvement social doit et va être etouffé dans le sang pour
avoir osé élever des voix contre la tyrannie.

On compte 143 détenus pour le moment, 3 morts, une quarantaine de blessés,
des dizaines de disparus dont Sarah, pour qui j’ai envoyé un message, et
multiples compas de tous les jours. Les médias alternatifs aussi sont
persécutés.

Bon j’ai tellement mal a l’oreille que je vous laisse sans pouvoir cracher
toute la haine, la peine et la rage que je ressens. Avant tout j’en
appelle a la solidarité internationale sous forme d’actions de tous genre,
que des commissions d’observation de droits de l’homme se rendent sur
place ici, que les consulats mexicains ne puissent plus vivre en paix
s’ils ne prennent pas position dès maintenant pour la sortie définitive
d’Ulises Ruiz Ortiz et de la PFP de Oaxaca.

la lucha sigue. a+ compa »

Flics et paramilitaires main dans la main pour saigner un mouvement populaire !

Nos larvaires médias dominants ne nous montreront rien de tout ca mais nous si !
Si nous les occupons et diffusons le message d’un peuple en détresse qui pour le seul crime de se révolter contre sa pauvreté et massacré !!

A bonne entendeur !