Fossilisé, loin de la vie, sous la couche de poussière protectrice des discours de repentance, en une accumulation de formes réifiées, celles de la Marchandise qui partout envahit les éventaires, le cadavre de Mai 68, nous dit-on, bouge encore. Un souffle d’air libre circulerait toujours, comme l’imminence d’une bourrasque, n’en déplaise à ses contempteurs. à nous d’en saisir les courants, d’appréhender les formes de vie qui l’insufflent. pour que le vif saisisse le mort.

Comment alors se dépêtrer de la lecture libérale de Mai 68, éprouver à nouveau l’incandescence de ces êtres portés par le bouleversement d’une époque, comment redonner à cette année de commémoration le goût d’un monde qui vacille… toute la saveur d’un moment de l’histoire qui nous donne en héritage la question suspendue de la révolution.

Peut-être en cherchant du côté de ce que les forces étatiques ont toujours essayé en vain de détruire ou de récupérer. Nous parlons là, par exemple, de ces films et ces images restées inaccessibles pendant plusieurs dizaines années. Au-delà du rapport esthétique à l’événement, ces bobines, oubliées pour certaines dans une cave et remisées pour d’autres dans l’arrière-fond d’un laboratoire, posent la question de la mémoire, celle de la transmission. Et par-delà celle d’une Histoire médiatisée par les représentations dominantes que la société met « à la disposition » des dominés pour penser leur situation.

Samedi

15 h (séance gratuite)
– Bambule, Ulrike Meinhof et Eberhard Itzenplitz Allemagne,
70 min, 1970
Le film raconte une journée dans un centre fermé pour jeunes filles à Berlin-Ouest, la situation catastrophique dans ces foyers et la révolte
des jeunes récalcitrantes.

– Documents d’accusation, 15 min, 1967
Ce court métrage produit par le Studio des Films de
Hanoï est ce qu’on appelle un film affiche. C’est une
compilation d’images des atrocités commises par
l’armée américaine au Vietnam.

17 h 30
– Les Guérilleros, Jacques Rialland, 15 min, 1968
Cet instantané de l’époque qui montre les premières manifestations estudiantines à Nantes pose la question de la révolution et de ses représentations dans la jeunesse.

– Prélude , Janneck Trzepizur, 21 mn, 1968
Un film quasi inconnu qui, par le biais d’un montage
virtuose, Retranscrit sur le plan sensible l’atmo-
sphère de mai, au coeur même du quartier latin.

– Révolution , Pierre Clémenti, 23 min, 1968
Mi journal filmé, mi ciné-tract sur les événements
de mai 1968. Pierre Clémenti participe aux événements
et réalise ce film oublié dans une cave pendant plus
de 35 ans.

– Cinétracts , 27 min, 1968
Ces films de deux ou trois minutes, réalisés tantôt par des amateurs, Tantôt par des cinéastes chevronnés, furent utilisés pour l’agit-prop pendant mai 1968.

20 h
– Grands soirs et petits matins , William Klein,
97 min, 1968-1978
William Klein filme au jour le jour les assemblées
générales, les Débats improvisés dans la rue, les
manifestations et les désaccords, et fait ainsi le
portrait d’une génération qui voulait changer la
société.

22 h 30
– Sud aviation , Pierre William Glenn, 30 mn, 1968
Pierre William Glenn filme l’occupation de Sud-Aviation,
première usine à se mettre en grève en France. Un té-
moignage sur les aspirations révolutionnaires de la
classe ouvrière nantaise.

– Inédits de mai , Marie-Claire Schaeffer, 52 min, 1968
Une succession d’interviews filmées présente toutes les figures possibles des situations conflictuelles exorcisées par une « parole libérée » lors des Evénements de Mai.

– La reprise du travail aux usines Wonder , Jacques Willemont,
9 min, 1968
Ce film montre les ouvriers de chez Wonder qui, le
matin du 9 juin 1968, viennent de voter la reprise.

Dimanche

15 h (séance gratuite)
– Prologue , Robin Spry, 87 min, 1969
Fiction et images d’archives s’entrem’lent dans cette évocation des émeutes ayant marqué la convention du Parti démocrate à Chicago, en 1968.

17 h 30
– Ice , Robert Kramer, 132 min, 1969
Portrait analytique d’un groupuscule révolutionnaire
pratiquant la guérilla urbaine à New-York.

21 h
– Le Gai savoir , J.L. Godard, 95 min, 1968
La pratique révolutionnaire de deux personnages à
travers la critique des Sons et des images émis par la
bougeoisie.