Faisant suite à des mouvements sociaux d’une nature complètement nouvelle, la lutte contre le Contrat Première Embauche déborde largement de sa définition médiatique, encore plus par ses conséquences.

Effectivement, comme on peut le lire ici ou là, la question du débouché politique de cette lutte est consciemment posée, non pas comme une interrogation de pure circonstance – et qui se dégonflerait ensuite sous la pression du quotidien ; mais bien parce que le temps est enfin venu d’aller au-delà du mur des bonnes intentions. Lutte contre le Front National après le scrutin de 2002, émeutes de novembre, lutte contre la loi sur « l’égalité des chances », que faut-il de plus pour comprendre que la politique est de retour ; et que nous étions entrés depuis longtemps dans une période pré-révolutionnaire – dont la réalité se dévoile au fil des évènements : en effet, nous faisons l’expérience concrète, lutte après lutte, qu’aucun changement n’est jouable dans le cadre institutionnel existant (au sens large, ce qui inclut aussi bien le champ politique classique que les structures syndicales, et associatives ). Mais également, une course de vitesse est engagée entre toutes les forces de la réaction, et celles du dépassement anti-capitaliste.

Certes, les victoires parcellaires semblent toujours laisser en marge les forces neuves qui les ont remportées, comme si on ne courait jamais assez vite… Mais ce n’est qu’une illusion : il est facile de constater que des luttes importantes, dans ces cinquante dernières années, ont fait naître des générations de militants, dont un nombre appréciable n’a pas décroché ensuite. Si tout reste à inventer pour que nous soyons vraiment acteurs de la volonté de changement qui se manifeste, la situation est loin d’être désespérée ! Les consciences sont là : il ne nous manque que d’ être concrets.

Dans les temps qui ont suivi les premières insurrections de 1789, une forme inédite de structure révolutionnaire avait été trouvée, et qui me paraît répondre à l’exigence actuelle de rassemblement historiquement anti-capitaliste : les clubs (Jacobins, Cordeliers, etc) A la fois lieux d’agitation et de parole ouverte, ces clubs devraient être ré-inventés aujourd’hui, comme points transversaux d’action et de recomposition politique.
Les générations doivent pouvoir s’y côtoyer, porteurs d’intentions pratiques, hors de tous les ghettos : facs, cités, partis, groupuscules.. Pour être encore plus concret, un tel club, créé sur Nantes, pourrait se saisir immédiatement des deux luttes déjà « dans les tuyaux » : le projet de loi sur « l’immigration de bantoustan », et la popularisation d’une demande d’amnistie pour les inculpations de novembre 2005 et celles de mars-avril 2006.

La création d’une telle structure pourrait émaner de la lutte étudiante nantaise, en débordant immédiatement de ce milieu, bien entendu.