La situation après le retrait du CPE

Il y a eu 3 millions de manifestants le 28 mars et de nouveau autant le 4 avril. La classe ouvrière a ainsi appuyé l’intense mobilisation de la jeunesse scolarisée qui est entrée en lutte contre le gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy et contre les mesures de flexibilité et de précarité de l’UMP, le principal parti bourgeois.

Cependant, aucun secteur de la classe ouvrière n’a débordé le dispositif des « journées d’action » des bureaucraties du mouvement ouvrier (aidés par les faux trotskystes de LO, de la LCR, etc.) qui ont systématiquement limité les revendications au « contrat première embauche » (CPE) et qui ont toujours remis la décision aux instances de la 5e République : Conseil constitutionnel, parlement, gouvernement, présidence de la République.

Les directions syndicales ont refusé d’appeler à la grève jusqu’au retrait de la loi Villepin et se sont adressées à Chirac le soir du 28 mars. De même, les partis réformistes (PS, PCF, LCR) ont appelé avec plusieurs partis bourgeois le gouvernement UMP et le président à agir dans « l’intérêt du pays » :
L’exécutif fait prévaloir des intérêts particuliers et ses luttes internes sur l’intérêt du pays… Le gouvernement doit répondre aux attentes de l’immense majorité des jeunes, des salariés, des citoyens. Les organisations et partis politiques de gauche demandent solennellement à Jacques Chirac le retrait du CPE… (Déclaration PCF, PS, LCR, Verts, Parti radical de gauche, MRC, 31 mars)

Tout sauf la rue, tout sauf la grève générale !

Le pouvoir a utilisé cette capitulation. Chirac a promulgué le 31 mars la loi Villepin. Le 10 avril, le gouvernement a remplacé l’article 8 de la loi (le CPE), par un dispositif supplémentaire d’aides aux patrons.

Sans la mobilisation étudiante et lycéenne, sans l’appui de gros bataillons de travailleurs salariés, le président Chirac, le gouvernement Villepin et la majorité UMP auraient asséné un coup supplémentaire à la classe ouvrière. Le pouvoir exécutif est sorti de cette épreuve affaibli, d’autant qu’il avait déjà subi des échecs électoraux et qu’il avait mis plusieurs semaines à maîtriser la révolte de la jeunesse des quartiers pauvres de novembre 2005.

Le mouvement de mobilisation contre la loi Villepin a contraint le gouvernement à un recul, mais n’a pas obtenu une victoire complète, ni chassé le gouvernement au service du capital. Car les appareils corrompus du mouvement ouvrier (PS, PCF, directions de la CGT, de FO, de la FSU…) et leurs projections dans la jeunesse (UNEF, CE, FIDL, UNL…) ont réussi à protéger le pouvoir, à empêcher l’alliance de la jeunesse en lutte avec le prolétariat.

Le CPE a été remplacé par de nouvelles aides aux patrons, adoptées à toute vitesse par l’Assemblée et le Sénat avec la complicité des groupes parlementaires du PS et du PCF. Le reste de la loi Villepin a été maintenu, ce qui permet l’apprentissage à 14 ans (au lieu de 16), le travail de nuit dès 15 ans, la coupure des prestations aux familles disloquées, les stages jusqu’à 6 mois, la rééducation des jeunes par la police et l’armée.

Chirac, le gouvernement et les medias bourgeois annoncent une offensive pour limiter le nombre des étudiants, pour soumettre plus étroitement l’université aux besoins du patronat français. Ils veulent reprendre l’offensive pour flexibiliser le « marché du travail », d’autant que les directions syndicales ont annoncé qu’elles étaient prêtes à « négocier » dès le mois de mai avec eux sur « l’emploi » et la « sécurisation des parcours professionnels ».

En d’autres termes, ceux qui avaient laissé passer les attaques contre les retraites et les travailleurs immigrés, laissé passer le CNE et la loi Villepin, s’apprêtent maintenant à avancer vers l’officialisation du chômage dans la vie des travailleurs et vers le « contrat unique » de travail cher à Sarkozy et au MEDEF.
L’irruption massive de la jeunesse a démontré que les travailleurs en formation subissent moins le poids des défaites précédentes : rétablissement du capitalisme en Russie et en Europe centrale, trahisons répétées des directions traditionnelles tant syndicales que politiques, défaites de la classe ouvrière des pays impérialistes, interventions impérialistes en Serbie, en Afghanistan et en Irak, terrorisme de l’Etat sioniste et réduction du peuple palestinien à la charité internationale et aux attentats-suicides, etc.
Cette nouvelle génération de travailleurs et de futurs travailleurs qui se lève non seulement en France, mais sur tous les continents, est la base sur laquelle pourront s’édifier de nouveaux partis ouvriers, révolutionnaires, et mettre sur pied une internationale, marxiste, qui seront capables de conduire à des victoires décisives, de renverser la bourgeoisie locale, d’instaurer le pouvoir les travailleurs, d’ouvrir l’issue du socialisme mondial.

Paris, le 17 avril 2006

www.revolution-socialiste.info