La colère gronde face aux médias qui trahissent le mouvement social. Mais comment empêcher les suceurs de micro de sucer ?
Et faire comprendre qu’on ne peut à la fois critiquer le système médiatique et compter sur la télé pour faire passer des idées ?

Petit compte-rendu de la fin de la manif de soutien à José Bové (25/06/2003 à 20 H).

Lors de la dispersion de la manif, place du Châtelet, François Dufour, porte-parole de la Confédération Paysanne et Michel Tubiana, président de la Ligue des Droits de l’Homme, ont eu le sifflet coupé alors qu’ils s’apprêtaient à passer au 20 H de France 2. Un groupe de manifestants, aux cris de « télé Médef, télé poubelle ! », « télé nationale, télé du capital ! », « David Pou-ja-diste ! » ou encore « la télé, c’est nos impôts ! », « médias partout, infos nulle part ! » a empêché la transmission en direct. Dépité, François Dufour a regretté de ne pouvoir envoyer, en direct à 20 H, un message fort à son copain José, tout en admettant comprendre à 70 % les raisons de la colère des manifestants.

Pour François Dufour, « les manifestants ont raison sur le fond, mais ce n’était pas le moment… » Qu’il se rassure, José Bové aura des nouvelles de cette manif. On lui écrira. Et puis Millau ne s’est pas fait avec l’aide des médias. Il en sera de même du rassemblement au Larzac les 8, 9 et 10 août prochains.

S’estimant, allez savoir pourquoi, trahis lors des comptes-rendus du mouvement social par la plupart des médias, les empêcheurs de filmer et de radioter en rond, ont promis de remettre le couvert à la prochaine occasion.

Tandis que la journaliste, une pauvre stagiaire, pleurnichait (« nous, on n’empêche pas les manifestations de se faire, eux, ils m’empêchent de travailler ». La pauvre !), les techniciens de France 2, stoïques mais compréhensifs, remballaient leur matériel. David Pujadas, lui, sur le plateau, fulminait et regrettait « le comportement agressif » des manifestants. « Notre équipe a été bousculée, nous sommes dans l’impossibilité de transmettre le reportage » a-t-il affirmé.
Comme s’il voulait donner raison aux protestataires, l’arracheur de dents s’est surpassé :
1) l’équipe n’a pas été bousculée.
2) il s’agissait d’un direct et non d’un reportage. Après TF1 et France Info, chassés lors de précédentes manifestations du mouvement social (ils ne s’en sont pas vantés), au tour de France 2 (rebaptisée « Rance 2 » pour l’occasion) de subir la colère des manifestants. À qui le tour la prochaine fois ?

La balle est maintenant dans le camp des journalistes et, peut-être, de leurs syndicats. En répondant à la question « pourquoi notre corporation est-elle de plus en plus contestée et mal aimée ? » ils répondront en même temps à celle de leur sécurité dans les manifestations à venir…

Michel Ducrot