Pendant le premier confinement, en mars-avril 2020, certain.e.s avaient une opinion bien tranchée de ce qu’il fallait faire vis-à-vis de la pandémie de coronavirus : porter le masque, ne pas le porter, confiner les plus faibles, confiner tout le monde etc. Et moi, comme tant d’autres, même si j’étais scandalisé qu’on nous impose un confinement, j’étais perdu. Mais, alors que nous en sommes à la n-ième vague, je n’ai plus de problème avec le fait de l’avoir été. Comment moi, seul dans mon appartement, j’aurais pu avoir une réponse à la question de savoir ce que les humain.e.s ou même les Français.es ou même les habitant.e.s de ma ville ou de mon quartier devaient faire ? Je n’étais pas dénué de volonté et j’avais évidemment une préférence pour telle et telle solution basée sur ce que je pensais savoir, car chaque possibilité m’engageait personnellement. Mais je veux vivre l’autonomie politique, et je dois accepter que personne ne peut savoir ce qu’une communauté basée sur ce principe doit décider pour elle-même. Déjà parce que dans une communauté basée sur l’autonomie politique, les décisions qui ne concernent qu’elle sont éclairées par la connaissance de la situation, mais elles ne sont aucunement contraintes par ce savoir. Car nous pourrions être certain.e.s que la moitié de notre communauté sera décimée si nous ne prenons pas telles mesures et pourtant choisir de ne pas les prendre. Et vouloir vivre l’autonomie c’est, sans refuser le savoir, sans tomber dans l’obscurantisme et/ou le complotisme, refuser le pouvoir des spécialistes, comme celui de celles et ceux qui veulent nous diriger – et y arrivent, malheureusement. Qui a décidé du fait que nous ne pouvons plus sortir à certaines heures, que nous ne pouvons plus voir certaines personnes ? Qui se donne le droit de hiérarchiser les moments que nous passons les un.e.s avec les autres, de les appeler des « interactions sociales » et de les classer selon leur utilité ? Mais la contrainte ne date pas de la Covid-19 : qui a décidé de toutes ces lois que nous devons respecter? Une communauté basée sur l’autonomie politique refuse de subir le pouvoir de quiconque, même s’il prétend représenter quelqu’un.e : les personnes qui la composent choisissent ensemble, au consensus, en respectant la volonté de chacun.e, ce qu’ils décident pour eux-mêmes (1). Il est certain qu’il faut faire une distinction entre consensus et consentement. Quand nous parlons de consensus nous le comprenons en son sens fort d’accord de volontés éclairées poursuivant leurs propres fins et non dans le sens de l’acquiescement d’individus dont on aurait bourré le crâne (2.) La question est : que voulons-nous ? Mais si on veut répondre à cette question il faut d’abord répondre à la question de savoir qui est ce nous ? L’impossibilité, pour celles et ceux qui veulent l’autonomie politique, de savoir ce que les humain.e.s doivent faire vient aussi du fait que les humain.e.s ne constituent pas une communauté ou une fédération de communautés basée sur l’autonomie. Mais cela vaut déjà pour l’Europe, la France, telle ville, tel quartier etc. La pandémie que nous vivons nous met encore, comme mille autres situations, face à ce problème de toujours : comment parvenir à constituer des communautés qui pourraient décider pour elles-mêmes de la manière dont elles veulent vivre ? Nous sommes beaucoup à penser qu’il faut détruire le pouvoir de certains et tous les systèmes politiques basées sur la hiérarchie si nous voulons l’autonomie politique de toutes et tous – nous sommes beaucoup à penser que la solution, c’est la révolution. Rebattons les cartes !

 

1. C’est une des caractéristiques politiques de l’anarchie (étymologiquement : « absence de pouvoir, d’autorité, de chef ») qui est l’état politique et social dans lequel les humain.e.s combattent toute forme de domination.

2.On sait par exemple que l’État préfère que ses citoyens acceptent ce qui est dans son intérêt plutôt que d’avoir à les contraindre par la violence.