Mais les habitant.es de Notre-Dame-des-Landes nous disent également qu’il reste une seconde manche, qu’elle n’est pas encore gagnée. Et nous sommes convié.es, nous lectrices-lecteurs de cet appel (voir le document joint), à « prêter main forte » pour le « déploiement d’une lutte victorieuse ».

« Seconde manche », c’était déjà le titre, en avril 2018, d’un article publié par un magazine culturel, situé radicalement à gauche de L’Obs et qui paraît le lundi matin. Cet article a été mis en ligne le dimanche 8 avril (#141), la veille de la dernière opération policière-militaire contre ce qui était encore une zad. En introduction de cet article, la rédaction du magazine indique que le texte lui a été confié par « des amis sur place ». Autrement dit, la rédaction ne marque aucune distance avec l’article.

Dans cet article, est conceptualisée une opposition binaire entre les partisans de la victoire — celles et ceux qui écrivent aujourd’hui pour nous demander de leur prêter main forte — et les autres. Qui sont ces autres ? Que pensent ces autres de la situation ? Ces autres ont-ils seulement une pensée ? L’article ne le dit pas. Les autres n’ont pas même le statut d’opposant politique (comme dans les démocraties, par exemple). Leurs positions ne sont pas à discuter. Elles n’en valent pas la peine. À leur sujet, les « amis sur place » disent que ces autres sont « incapables de scruter l’horizon autrement qu’avec des schémas préconçus et la passion de la défaite. » Ces autres qui vivent au même endroit, mais qui défendent d’autres positions que celle qui consiste à négocier avec la préfecture, en vérité nous dit-on, ont la passion de la défaite.

« Victoire/ passion de la défaite » : la tenaille est mise en place, avec l’amitié d’une rédaction pour laquelle cette lutte (« contre l’aéroport et son monde ») a longtemps fait figure de référence centrale.

Eh bien, aujourd’hui encore, c’est la même tenaille. Il s’agit de continuer la « victoire ». Avec pourtant plus de deux ans de recul, la possibilité même d’une position critique est toujours par avance annulée.

Le discours de la « victoire », c’est le discours de celles et ceux qui disent aux autres : « fermez-la ! »

P.-S. :

Envoyé en septembre aux soutiens, le document joint est accompagné de ces mots :

« Comme c’est une situation complexe pour laquelle nous peinons à donner des nouvelles claires, voici en pièces pointes un point de situation à l’intention de nos soutiens concernant l’état des négociations avec les différentes institutions sur les bâtis et habitations diverses de la zad.
La situation n’est pas simple mais c’est aussi l’occasion de faire émerger des revendications ambitieuses. »

On y apprend, notamment, que plus de trente demandes de permis de construire ont été déposées, mais aussi que le conseil départemental refuse de vendre le bâti aux habitant.es, alors que le fonds de dotation La Terre en Commun avait justement été créé pour acheter les terres et les bâtis de l’ex-zad.