Et cela, malgré la répression policière : les centaines de blessés graves, les manifestants éborgnés et les mains arrachées, les traumatismes dus aux tabassages brutaux, les milliers de grenades en tous genres tirées dans les cortèges, l’utilisation d’armes de guerre et de véhicules blindés d’assaut face aux manifestants, les milliers d’arrestations, les rafles dans les gares et les dizaines de milliers de contrôles préventifs les jours de manifestation, le bouclage des zones de rassemblements, le déploiement de militaires de l’opération « Sentinelle » (dite « antiterroriste ») dans le dispositif de maintien de l’ordre bourgeois, la dislocation des ronds-points occupés et autres lieux de lutte, de discussion et d’organisation du mouvement.

Et cela, malgré la répression judiciaire : les centaines de condamnations à la prison ferme, les milliers de condamnations avec sursis en guise d’avertissement, les interdictions de manifester, la « loi anticasseurs », les assignations à résidence.

Et cela, malgré la répression journalistique : tous les mensonges publiés dans les torchons de la classe dirigeante, justes bons à allumer un brasier, tout le mépris de classe que les larbins journalistes-flics et autres idéologues de l’Etat expriment à notre égard, nous « les gueux », « la vile populace », « la plèbe », « la canaille », « la racaille », nous autres prolétaires.

Et cela, malgré la répression syndicale : ces officines étatiques (qui n’ont plus rien, ou même n’ont jamais rien eu, d’ouvrier) dont la mission essentielle est précisément d’empêcher et le cas échéant d’encadrer, d’étouffer, de légaliser et de ramener sur une voie de garage inoffensive, l’explosion de notre rage dévastatrice de prolétaires en colère, que nous soyons porteurs de gilets jaunes ou pas, en lutte contre l’exploitation et la misère.

Et cela, malgré le mépris hautain affiché par la plupart des sectes de l’ultragauche (autoproclamées « gauche communiste »), pour qui, du haut de leur piédestal idéologique et rempli de leur suffisance et de leur morgue, le mouvement des « gilets jaunes » n’incarne pas la « pureté » du prolétariat dont ils se rêvent d’être les « leaders bienaimés » menant leur troupeau docile sur le droit chemin des « lendemains radieux » du « socialisme réel ».

Et cela, malgré tous les autres pièges, fausses solutions, alternatives-bidons, dressés sur notre chemin : la « démocratie directe et participative » (RIC et autres foutaises), par exemple, ne permettra seulement aux opprimés que de mieux et ouvertement participer à leur propre oppression ; c’est en fait tout le système de la politique (bourgeoise), et des rapports sociaux capitalistes qui vont avec, qu’il faut chambouler, éradiquer, annihiler, effacer, détruire, dont il faut se débarrasser et qu’il ne faut pas réformer.

Fondamentalement, « nous ne sommes pas français, nous ne sommes pas le peuple, nous ne sommes pas des citoyens, nous sommes le prolétariat ». Nous sommes la révolution qui vient, nous sommes la solution finale de toutes les contradictions sociales qui divisent l’humanité en deux classes aux intérêts diamétralement et viscéralement antagoniques : les détenteurs de la propriété privée des moyens de production contre les dépossédés des moyens d’existence qu’ils veulent se réapproprier.

Personne ne s’étonnera dès lors, au vu du développement de ces luttes, que cette année le 1er mai sera probablement plus virulent, plus radical, et donc plus violent que jamais auparavant, exprimant ainsi ce que cette journée symbolique représente historiquement au niveau international : une journée de lutte et de combat du prolétariat mondial qui trouve son origine dans le massacre de nos camarades ouvriers et anarchistes communistes lors des événements de Haymarket Square à Chicago (USA) en 1886.

Déjà des « black blocks » appellent à la mobilisation sur Paris, « pour un 1er mai jaune et noir », en convergence avec les franges les plus radicales des « gilets jaunes » : « Ce 1er mai sera une journée de lutte. Une journée en enfer pour les personnes qui défendront le système. Mais pour nous (…) cette journée sera une fête, une journée où l’on pourra exprimer notre colère et notre révolte. Une journée où le destin va basculer. » (« Black Bloc France », 9 avril 2019)

Nous ne croyons pas que le murissement des conditions matérielles et des luttes soit tel à ce jour que « le destin va basculer ». Néanmoins, que ce 1er mai, certaines rues et quartiers bourgeois de Paris et d’autres villes de France et de Navarre soient la proie des flammes de la juste et saine colère de notre classe, que des magasins de luxe soient pillés (comme lors de la mise à sac des Champs Elysées le 16 mars dernier) et la marchandise si pas abolie du moins redistribuée parmi « les damnés de la terre » (réappropriation de richesses sociales produites par nous autres prolétaires), que les mercenaires armés à la solde de la classe des capitalistes en prennent enfin pour leur grade et soient obligés de reculer ou de déserter (comme l’ont fait les flics qui passèrent avec armes et bagages dans le camp du prolétariat insurgé en Bolivie en 2003), rien de plus normal et logique, rien de plus sain et salutaire, il serait même affligeant que rien de tout cela ne se passe. Mais il serait aussi tout autant affligeant (pour d’autres raisons, certes) et nuisible pour la suite de notre mouvement d’opposition à l’ordre des choses présent que tout cela se passe simplement et qu’on en reste là, qu’on se limite à une violence de classe risquant de se transformer en spectacle de la violence, qu’on n’aille pas plus loin, qu’on n’approfondisse pas la brèche, le gouffre qui nous sépare d’eux, nous l’humanité en lutte et eux les capitalistes et leur monde, fait de misère, d’exploitation, de guerre, de souffrances.

Ce dont le mouvement de lutte des « gilets jaunes » (et plus globalement le prolétariat) a le plus besoin, ce n’est pas du sempiternel recommencement, « Acte » après « Acte », samedi de manif après samedi de manif, des mêmes confrontations avec des forces répressives entrainées à ce petit jeu « du gendarme et du voleur » (bien que nous ne marquions aucune opposition à la violence de notre classe contre les forces de la Mort), mais ce dont nous avons besoin, c’est bien de développer nos perspectives, nos ruptures et notre radicalité envers ce monde, de briser la cohérence des flics et des gendarmes qui nous répriment, d’aller chercher les maîtres qui nous gouvernent jusque dans leurs forteresses imprenables, d’incendier leurs palais et leurs châteaux, d’abattre les citadelles du profit, de piller leurs banques, de bloquer toute l’économie, de dissoudre leur taux de plus-value et par la même occasion notre exploitation, d’organiser la véritable grève de notre classe : la grève générale insurrectionnelle, etc.

Tant que ces points essentiels ne seront pas aborder, tant qu’une réponse pratique ne sera pas mise en avant et assumée comme telle, c’est-à-dire comme la négation totale de l’ordre des choses présent, dès lors l’émergence d’un monde nouveau que nous avons tous à gagner (nous autres prolétaires) et l’affirmation de l’ordre des choses à venir ne sera que pure spéculation.

En attendant donc que les mauvais jours finissent…

Gilets jaunes (ou pas), black blocks (ou pas)
Pour un 1er Mai de combat, Action directe anticapitaliste

22 avril 2019
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