A cette date, en janvier 2016, nous, agriculteurs résistants, étions dans le tunnel, craignant des amendes exorbitantes qui nous auraient mis dehors, quelque soient les bonnes volontés et la solidarité de nos voisins occupants qui ne voulaient pas que l’argent soit un facteur de décision.

Les manifestations de janvier et février ont été formidables par leur ampleur, leur détermination et leur cohésion. Mais quand le pouvoir veut être sourd, il choisit d’être aveugle en même temps.

Fin janvier : victoire ! Amende zéro ! On est expulsable, on savait bien qu’on y arriverait. C’est comme tout le monde ici, c’est inconfortable surtout pour des fermes, mais c’est jouable.

Puis, le ministère de l’écologie prend les choses en main : une étude par ses experts ! L’espoir d’une sortie à la Sivens, un vrai espoir de remise à plat sincère du projet, un vrai espoir de victoire.

Et hop ! Coup bas ! Un referendum sorti du chapeau du président en février, à la demande du premier ministre ! Ah non, un referendum ce n’est pas possible, on va faire une consultation. Il faudra en écrire tout le cadre juridique pour Notre Dame. On organise donc un vote ! La parole au peuple : pour ou contre l’emploi ? Pour ou contre les violents zadistes ?

Mme Royal et ses experts expliquent en mars que le projet est surdimensionné, que poursuivre l’activité sur l’aéroport actuel est techniquement possible. C’est aussi une victoire ! Des experts reconnaissent nos arguments et, de fait, justifient une annulation de la DUP puisque cette hypothèse de poursuite à Nantes Atlantiques a d’emblée été écartée lors de l’enquête d’utilité publique.

On se retrouve donc en juin à voter pour ou contre un projet surdimensionné détruisant des zones humides. Et les braves gens votent oui. Ce n’est pas une victoire pour nous, mais ce n’en est pas une pour les politiques porteurs du projet puisque les Nantais votent oui par 100 voix d’écart. Les nantais pour qui ce projet est soi-disant essentiel n’en sont pas convaincus…

Rendez-vous donc en octobre pour une intervention déterminée : table rase et hop les travaux !

Les occupants ont dit qu’ils n’étaient pas tous expulsables, loin de là ! 40000 personnes sont venues dire le 8 octobre : « pas d’accord pour une intervention ! ». Très bon choix stratégique cette manifestation du 8 octobre !

Et Octobre passe !

Novembre : la rapporteur publique au tribunal administratif explique que le projet de Notre Dame, au vu des déclarations de l’Etat, de la DGAC et d’AGO, est incompatible avec les directives européennes et la loi française sur le respect de l’environnement. Pendant 8 jours, beaucoup ont cru à la victoire. Les pro aéroport y ont beaucoup cru, à notre victoire. Alors, ils ont sali la rapporteur. Mentir et salir, c’est leur truc ! Puis, les juges ont pris leur décision : « ah non, il faut poursuivre ce projet. L’entretien de Nantes atlantiques couterait trop cher. Il ne faut pas appliquer le droit de l’environnement ! »

Que les juges aient reçu un coup de fil de Jean Marc Ayrault ou qu’ils aient décidé par eux-mêmes, c’est dans tous les cas infiniment triste ! Mais, il n’empêche, la victoire n’est pas passée loin !

Novembre passe ! Valls passe aussi ! Et décembre passe !

Ce n’est pas une victoire cela ?

Je vous rappelle que dans le business plan, les avions décollent en 2017. C’est très mal parti !

Par contre, en 2017, l’Europe donnera son avis sur le dossier du SCOT : influence sur l’environnement de l’ensemble des aménagements prévus sur Nantes- Saint Nazaire. C’est le seul cas, grâce à nous, où elle peut donner son avis sur un projet, alors, que d’habitude, elle ne fait que constater les dégâts.

Et, bien sûr, il y aura le recours des propriétaires disant : « M le juge, qu’en pensez-vous ? Il n’y a pas eu de travaux ! Cela fait 5 ans que l’on nous a exproprié, c’est-à-dire enlevé nos droits contre notre volonté. Alors, l’Etat doit nous rendre nos biens ! ». Espérons que ce ne soit pas un juge nantais qui réponde à la question.

Et il y aura bien entendu, d’autres initiatives que notre intelligence collective saura inventer, alors bonne année militante 2017 !

Et surtout, disons nous clairement, que, moi, comme chacun d’entre vous, je pense avoir les meilleures idées et analyses. Il serait donc légitime qu’elles soient retenues. Mais, seul, je serai écrasé comme un vers de terre, alors que ensemble, dans notre diversité et nos complications, nous avons tenu l’impensable, et demain, nous continuerons !

De Marcel, paysan à Notre Dame des Landes