Buissonnière, « libre » ou gratuite, L’école, depuis L’Académie de Platon et Aristote jusqu’à la ZEP, semble chercher à la fois à se faire admettre, autoriser et comprendre, mais encore à faire qu’un enfant sache « penser par lui-même ». Mais de nos douloureux souvenirs aux « incivilités » d’aujourd’hui, le temps des bons points est revenu à la mode. La Brique, curieuse et mauvaise élève du « journalisme », porte son regard vers les pédagogies alternatives, qui semblent faire une vraie place aux enfants.

Premier volet de notre enquête sur ces laboratoires du futur soial.
Lexicalement, l’éducation fait penser à un mélange : voué à
l’émancipation, à la libération. Le mot semble ainsi né d’un préfixe
privatif é- (comme dans é-vider, é-conduire), puis du radical verbal
-ducare, de dux (guide), en latin. Quelquechose comme « faire sortir des sentiers battus ». Mais un mix aux résonnances glaçantes, aussi, parfois. Coups de règles sur les doigts, zéro de conduite, blouses et
redressement… De quoi parle-t-on, en « éduquant » ? Ordre ou justice, où se trouve la priorité ? Allez savoir. Là où s’entendent néanmoins Luc Ferry et les anars, c’est sur la nécessité d’accompagner le jeune. Vers quoi ? Ça dépendra de la culture maison. Discipline et obéissance, ou développement et autonomie.

{{{De Charlemagne à Ferry, l’Etat et son éducation
}}}

En rendant obligatoire l’école, voici 127 ans, le législateur, plus que
préparer à l’armée et au travail, a laissé à l’enfance le bénéfice de
surtout ne pas taffer 15h. par jour dans une mine ou une auberge.
En la rendant laïque, il a enlevé à l’Eglise le monopole des mythes
fondateurs : on descend du singe grâce à Lamarck et Darwin, tandis qu’Adam et Eve reprennent leur place dans un roman célèbre, La Bible. Mais ces mythes sont bien vite remplacés. Histoire de France, Vercingétorix, De Gaulle ou Rousseau. Plus de religion, mais de l’Instruction Civique. Et quand l’Etat opère le passage de l’ex-Instruction Publique à l’Education Nationale, en utilisant l’Ecole, il semble n’avoir pas laissé tout le monde satisfait. Les réacs,
mais aussi des progressistes. Ainsi, si l’éducation ne passe pas seulement par l’Ecole, pour « tirer vers le haut », faire « progresser » un jeune, voire la société entière, il conviendrait alors de ne plus compter sur la seule bienveillance des amis autoproclamés de la jeunesse. Télévision, religions, marchandisations : les chausses-trappes et les pièges,définitivement, restent nombreux.

L’école et l’éducation sont des sujets politiques. Tout pays serait le
produit de son école, et non l’inverse ? En France, le Certif’ (-icat
d’études), le bac ou la licence sont des moments particulièrement
marquants de la vie. L’école nous marque jusqu’à la digestion des valeurs qui sont censées guider la société, pour les ériger en dogmes dominants. Sans ça, comment accepter la compétition, la sélection
(« à-condition-que-les-chances-soient-égales »), le respect de la Culture, des règlements et des premier-es de la classe ? Celui des hiérarchies et de l’Ordre ?

{{{Dressage ou autonomie ?
}}}

Pour contrôler ou libérer, la pédagogie est le ciment du métier d’éducation. Afin de caractériser ces micro-sociétés que sont les lieux
dits « éducatifs », {La Brique} s’intéressera autant aux matraques qu’aux mains tendues. On pourrait basiquement opposer la pédagogie classique, autoritaire, allant du maître vers l’élève, à des pédagogies modernes, fondées sur des principes coopératifs ou anti-autoritaires, accompagnant l’enfant dans une recherche d’autonomie.
Au lieu de ça, ce qui transparaît aujourd’hui, c’est ce mélange des
pratiques de « cours » mis en place par les profs, mais surtout et
toujours les plaintes d’idéologues s’exprimant sur tout, et notamment sur le besoin d’un regain d’autorité. Sarkozy, comme Chirac ou Royal avant lui, ne veut-il pas « restaurer la place du maître et de l’adulte » ?
L’adulte, récemment, se serait-il fait « flouer » ?
Restauration, le mot est lancé. Les enfants ne comprendraient que
l’autorité, le respect, l’honneur et l’obéissance. Tendance lourde et
tenace du conservatisme, même si la gauche gouvernementale a su parfois favoriser l’installation de lieux alternatifs, tels les lycées autogérés de Saint-Nazaire, le Lycée Autogéré de Paris ou encore l’école Freinet de Mons-en-Baroeul. À défaut de leur donner toujours des moyens de subsistance dignes de ce nom.

{{{Des essais de pédagogies alternatives
}}}

Bien avant que Gaby Cohn-Bendit n’en appelle à Mitterrand dans un appel resté célèbre[[Jean-Gabriel, frère de Daniel, lance un appel qui aboutit à la création d’écoles expérimentales, comme celle de St-Nazaire, et dont il fut fondateur.]], des pédagogies et des écoles alternatives ont été développées au cours du XXème siècle. Ces pionnier-es étaient éducateur, éducatrice, psychologue, enseignant-e, infirmière… Tous et toutes tendaient à mettre en place une éducation populaire, sociale et souvent militante. Les liens avec le mouvement social, réformiste ou révolutionnaire (du PS aux anarchistes en passant par le PCF), ont permis la concrétisation de projets. Citons l’école Bonaventure à l’Ile d’Oléron (1981-2001) ou Summerhill, structure alternative en Angleterre (depuis 1921). Les écoles du réseau Montessori se sont également distinguées dans la mise en oeuvre de pratiques libératrices pour les enfants.

Le mouvement Freinet a attiré notre attention en premier. Direction
Mons-en-Baroeul, groupe scolaire Hélène Boucher (210 élèves sur neuf classes), une école où tous les enseignant-es pratiquent cette pédagogie. L’Education Nationale a accepté sa mise en place sous condition d’une évaluation par une équipe de chercheurs. Les résultats sont très positifs d’après les conclusions du rapport. La Brique tente de faire le point sur cette expérience pédagogique, militante et … humaine.