Arthur Mac Caig est mort le jeudi 6 novembre à Belfast suite à un œdème pulmonaire. Cinéaste militant il n’avait de cesse de faire des films pour expliquer avec un grand talent pédagogique et à l’opposé des clichés et des stéréotypes, des problématiques complexes comme celle du conflit irlandais. Des films comme « Patriot game » ou « Irish ways » qui motivèrent bon nombre de gens à aller faire un tour du coté de Belfast, donnaient les clés pour comprendre la situation et faire le tri dans le brouhaha médiatique en provenance d’Irlande du Nord.

Expliquer mais aussi dénoncer car si Arthur ne faisait pas des films de propagande, il avait néanmoins choisi son camp, celui des opprimés. C’est cela sans doute qui l’amena à s’intéresser au Pays basque où il réalisa en 84 « Euskadi hors d’Etat ». Là encore il fit mouche en réussissant à embrasser dans un seul film les dimensions historique, politique et humaine du conflit. Car tous ses films avaient cette particularité d’être situé au raz des hommes et des femmes impliqués dans la situation qu’il décrivait.

Et puis il y eu les attentats du GAL au Pays basque et dès 86 Arthur participait à la réalisation d’un film-enquête, « Les mains sales » diffusé sur Antenne 2. A l’époque la trame des commanditaires restait encore dans l’ombre. Arthur et son équipe prirent des risques, posèrent les bonnes questions notamment à certains hauts responsables policiers espagnols, les mêmes qui 10 ans plus tard se retrouveront inculpés et condamnés pour l’organisation de la guerre sale au Pays basque. Puissance de la télévision : le lendemain de la projection commentaires et discussions allaient bon train dans les bars et les commerces au Pays basque. Ce que la mouvance et la presse militante abertzale répétait depuis 3 ans sur les responsables de cette période tragique était devenu évident pour une bonne partie de la population.

Cette période du GAL avait profondément touché Arthur et il parlait souvent de tourner une fiction sur le sujet. Il n’en eut pas l’occasion mais n’en resta pas là pour autant. A la fin des années 90, après que certains responsables eurent été démasqués et condamnés à Madrid il reprit sa caméra pour réaliser avec Sylvie Garat « Terreur d’Etat au Pays basque » diffusé par la chaîne Arte. Il porta alors à l’écran l’ensemble des présomptions, des questions sans réponse concernant l’implication politique de l’Etat français ainsi que celle de fonctionnaires de police de la République dans cette vague d’attentats. Arthur nous fit l’honneur de présenter son film en avant-première au forum Oroi eta Sala de décembre 2000 à Bayonne. Ce film est et restera une pièce à conviction majeure sur la période du GAL. 25 ans après les faits, le revoir ou le visionner pour la première fois reste un moment d’émotions, d’incrédulité et de révolte intenses, ainsi qu’ont pu l’éprouver les spectateurs de l’Autre cinéma en mai dernier. La véritable histoire du GAL ne sera peut-être jamais totalement éclaircie mais les habitant-e-s du Pays basque et tout-te-s les démocrates en général seront à jamais redevables envers Arthur Mac Caig d’avoir réalisé un tel film.

Il y a quelques mois Arthur était revenu en Pays basque Nord après une longue absence avec un nouveau projet : raconter l’histoire politique d’Iparralde ces 30 dernières années. Encore et toujours à l’opposé des modes. Encore et toujours expliquer la vie et la lutte des pays et des gens qu’il aimait.

Arthur est parti mais nous sommes heureux de l’avoir connu.

Collectif Oroit eta Sala
Pour l’éclaircissement de l’implication de l’Etat français
dans la guerre sale contre le peuple basque