Monsieur le président de Rennes II,

Nous avons eu écho comme toute la France de la situation dans votre université au cours de la semaine passée. Nous en avons vu les images également, qui sont loin de nous réjouir et nous informent au contraire sur la dérive que connaît notre pays.
Notre nouveau gouvernement a engagé des réformes qui vont au-delà de ce que la droite traditionnelle voulait, et je dirai même plus, qui réalisent ce dont les ultra-libéraux rêvaient. Certaines universités ont eu la présence d’esprit de penser à l’avenir de l’enseignement supérieur, à l’image de Lille 1 dont le Conseil d’Administration a diffusé le communiqué suivant :
Communiqué de presse du 15 novembre 2007.
La lutte contre la loi LRU ces 10 derniers jours a prise énormément d’ampleur et l’AG de Lille 1 a décidé d’interrompre les enseignements afin de permettre aux étudiants et personnels de s’approprier cette problématique. Dans le Nord ce sont les universités de Valenciennes, de Boulogne et de Lille 2 qui ont rejoint dans la lutte contre la loi LRU celles de Lille 1 et Lille 3.
Nous avons noté que les informations erronées relayées par les médias tendent à discréditer ce mouvement. TF1 parle de « 3 universités bloquées » à son JT de 13h. Des journaux locaux tels que Voix du Nord, Lille Plus ou Nord Eclair, ont par manque d’information fiable relaté une version altérée de la réalité au sujet des modalités de vote de nos assemblées générales décisionnelles (en réalité : vote avec cartes étudiantes, plus de 2200 votants…).
L’assemblée des étudiants de Lille 1 a toujours cherché à permettre aux médias de faire leur travail. Elle a d’ailleurs contacté ces derniers pour leur donner les informations qu’ils attendaient. Nous affirmons qu’il ne suffit pas de prôner l’objectivité pour que celle ci soit réelle.
Nous appelons donc les médias à vérifier leurs informations avant publications, nous sommes prêt dans ce domaine à les aider. Un mouvement universitaire voit le jour et risque de durer. Notre université a interrompu ses enseignements, celle de Lille 3 également, les lycéens sont actuellement appelés à rejoindre le mouvement. Nous nous attendons à ce que la presse relaye nos actions de façon la plus exacte possible. Nous ne voulons pas que les médias soient exclus de nos AG. Mais s’il nous apparaissait à nouveau que nos propos n’étaient pas entendus, il existe un risque que la communauté universitaire finisse par ne plus souhaiter leurs présences dans les AG.
L’assemblé générale de Lille 1.
Ce que nous voyons, c’est qu’à Rennes II la présidence de l’Université, en votre nom, a opté pour la méthode dure, celle des Khmers rouges (une allusion que vous n’auriez pas dû faire, car elle se retourne contre vous), en faisant appel à la police pour venir violer un espace sacré dévoué à la culture, au progrès, à la réflexion, à la liberté d’expression… Nous ne considérons pas comme tolérable, et je parle là au nom d’une majorité silencieuse (celle qui s’est exprimée par exemple par un vote administratif à 1631 voix pour le blocage à Lille 3 contre 1037 la semaine dernière, mais aussi celle des 5 millions de précaires que notre système engendre chaque jour), que des forces de l’ordre se permettent de venir sur un campus universitaire y frapper ses étudiants. Notre pays est-il tellement malade qu’il tolère ce genre de procédés digne de la junte Birmane ? Je commence doucement à m’en convaincre : nos concitoyens ont intégrés la violence comme faisant partie de leur vie. Face à la logique du marché, on doit se plier, s’adapter, accepter, être flexible. Et si nous nous rebellons, la contrainte physique est la seule réponse que nous obtenons, processus nocif dans lequel vous vous êtes inscrits en appelant la milice frapper de ses bottes cloutées le parvis de votre université.

Je vous entends déjà me rétorquer avec sang-froid et sûr de vous que chez vous (oui, car cette réforme enterine un long processus qui fera de vous et vos collègues présidents les propriétaires inconditionnels de nos établissements) la majorité s’est exprimée contre le blocage. Soit, mais vous semblez oublier que c’est l’absence de conscience politique de ceux qui préfèrent voter centriste plutôt que de s’engager franchement d’un côté ou de l’autre qui tue la démocratie, sans compter cette majorité silencieuse qui dédaigne les AG, vote pour la conservation de ce qui existe, la tranquillité, et vient ensuite contester notre démocratisme. Je voudrais vous rappeler que ce sont des Assemblées telles que celles-là qui ont amené en 1789 et 1848 la République, car la majorité, elle, était rurale et monarchiste. Aujourd’hui le monarque c’est notre président et sa politique libérale est une forme moderne de l’absolutisme, celui du Marché. La majorité quant à elle n’est plus rurale, mais reste acquise au monarque. C’est une triste réalité que nos mouvements étudiants pointent du doigt. Et vous, telle une égoïste Nomenklatura, voulez nous empêcher d’améliorer NOTRE avenir. Ayez au moins la décence de rester en dehors de nos luttes, car c’est de notre devenir qu’il s’agit. Vous avez pourri notre présent en 1968, alors je vous invite à suivre l’exemple du CA de Lille1 et de ne pas venir faire des comparaisons désobligeantes devant les caméras de médias qui sont acquis à votre ligne conservatrice et n’attendent que ce genre de sorties médiocres pour faire leurs choux gras.

Renseignez-vous sur nos motivations dans le 4 pages ci-joint, si tant est que vous ayez un intérêt pour les questions sociales qui nous touchent tous.
Respectueusement,