Au printemps, la criminologue Sylvie Frigon a publié éditions du Remue-ménage à Montréal un« L’homicide conjugal au féminin, d’hier à aujourd’hui» dans lequel elle analyse les moments forts des procès de 28 femmes canadiennes condamnées pour homicide conjugal au cours de 1866 à 1954. Elle passe ensuite en revue des décisions légales plus récentes relativement aux femmes maricides, en s’attardant à l’arrêt Lavallée qui a consacré l’admissibilité du syndrome de la femme battue (SFB) comme défense. Le dernier chapitre de son livre est consacré à des témoignages de femmes maricides et à ceux d’intervenant-es. Les femmes qui tuent dans le contexte de la vioence conjugale le font généralement pour se défendre ou préserver la vie de leurs enfants. L’auteure conclut, à la suite d’autres expert-es, que le droit canadien est discriminatoire pour les femmes, notamment, pour les femmes accusées dans un contexte de violence conjugale et qu’il en tient pas compte ni de leur réalité ni de leur point de vue.

L’auteure s’attarde au syndrome de la femme battue (SFB), reconnu comme défense dans plusieurs pays, dont le Canada, et en analyse la portée et les limites. Ce syndrome n’est pas une maladie, mais un ensemble de signes cliniques post-traumatisme et il fournit quelques éléments de réponse aux questions souvent posées : «Mais pourquoi se laissent-elels battre ? Pourquoi ne partent-elels pas ?» C’est le syndrome de la femme battue, «c’est comme un tableau persistant qui s’intensifie avec l’accélération des gestes de violence causés par le conjoint abuseur. La femme victime d’abus se sent isolée et impuissante. Elle croit que son conjoint est tout-puissant et elle s’y soumet passivement. Ses perceptions sont restreintes, toutes ses énergies se concentrent sur des stratégies de survie à court terme. Elle est constamment en alerte face aux comportements de son conjoint et à ses moindres changements d’humeur. Dans une tel contexte, la femme en vient à développer une impuissance apprise qui ne lui permet plus de trouver des solutions pour sortir de la situation d’abus, comme par exemple en se réfugiant dans un centre pour femmes en dificulté, en laissant derrière elle le conjoint abuseur. Lorsque ces femmes en viennent à craindre pour leur vie, la seule solution envisageable devient alors de se défendre contre le conjoint avant que celui-ci les supprime. Il ne s’agit pas d’un choix délibéré ni d’un geste prémédité, la capacité de ces femmes de trouver des solutions plus adaptées étant nettement altérée par le perpétuel contexte de violence dans lequel elles ont vécu.»

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« L’homicide conjugal au féminin, le droit au masculin », par Micheline Carrier