Plateforme internationale de lutte contre l’isolement (PILI)

Bulletin d’information

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Behiç Asçi, avocat, en grève de la faim au finish contre l’isolement

A l’occasion de la journée mondiale des avocats célébrée le 5 avril, Maître Behiç Asçi, avocat au Bureau du droit du peuple a décidé d’entrer en grève de la faim au finish pour dénoncer le régime d’isolement en vigueur dans les prisons de type F.

Nous reproduisons ci-dessous un extrait de sa déclaration « Demain, 5 avril, est la journée mondiale des avocats. Ce sera le prétexte à de grandes festivités et de grands discours exaltés qui serviront à camoufler la réalité de notre pays.

Dans nos prisons, au dehors et dans tous les terrains de la vie, nous subissons un isolement et une censure d’une violence extrême.

Dans cette stratégie d’isolement que le pouvoir nous a imposé, l’univers carcéral constitue un angle d’attaque fondamental.

Surtout depuis le 19 décembre, date à laquelle les prisons ont été inaugurées lors d’une opération militaire de « retour à la vie » (28 détenus tués, plus de 1000 blessés NDT)

A ce jour, 121 personnes ont perdu la vie suite à des actes de résistance, destinées à dénoncer ce régime d’isolement, notamment par des actions de jeûne jusqu’à la mort.

Néanmoins, les pouvoirs politiques n’ont apporté aucune solution. Au contraire, ils n’ont fait qu’aggraver la situation des détenus.

La seule chose qu’ils ont faite a été de censurer la cinglante réalité de ces 121 décès.

Face à leur indifférence, force est de constater qu’il leur faut que d’autres gens meurent.

Moi-même, j’entamerai à partir de demain une grève de la faim totale, jusqu’à la mort.

J’agis de plein gré, en connaissance des causes. Je considère que par cette action, j’assume mes devoirs d’être humain et d’avocat révolutionnaire.

Mes revendications sont la fin du régime d’isolement qui sévit dans les prisons et pour cela, l’engagement de pourparlers concluants entre les autorités et les représentants des prisonniers.

J’ai choisi d’entamer mon jeûne jusqu’à la mort un jour qui, pour les barreaux et le ministère de la justice, revêt une importance majeure. »

Source : Halkin Hukuk Bürosu (HHB), le 4 avril 2005

Email : halkinhukuk@e-kolay.net

Le président d’honneur de « Médecins du Monde »

aux côtés des grévistes de la faim contre l’isolement

Le 17 mars dernier, le Docteur Bernard Granjon, président d’honneur de « Médecins du Monde » rendit visite à Fatma Koyupinar, une gréviste de la faim récemment libérée mais à l’article de la mort.

Le lendemain, Docteur Granjon organisa une conférence de presse à la chambre des ingénieurs électriques (MEO) d’Istanbul avec les familles de TAYAD.

A cette conférence ont participé, l’architecte Hasan Kivircik, le président de TAYAD, Mehmet Güvel, le cinéaste Hüseyin Karabey ainsi que les frères de la gréviste, Mehmet et Hasan Koyupinar.

Dans son exposé, le président de TAYAD a souligné que leur association faisait « tout ce qui est en son pouvoir pour que Fatma ne soit pas la 122 e victime de cette grève de la faim. »

Le Docteur Granjon a, quant à lui, confié que « l’isolement carcéral en Turquie était le problème de tous ». Et d’ajouter, la voix chargée d’émotions : « je ne pourrais supporter la mort de Fatma. Nous pouvons et devons nous opposer aux effroyables conditions de détention dont souffrent les détenus. Toute la société civile doit se joindre à la lutte contre l’isolement. Parmi les pays qui pratiquent l’isolement et le régime de type F, il y a la Turquie bien entendu, mais également mon pays, la France, des pays qui n’accordent pas d’importance à la santé» En parlant de Fatma Koyupinar, le docteur Granjon n’a pu retenir ses larmes. Il a également promis la création par « Médecins du Monde » d’une commission indépendante qui rendra visite aux détenus en prison de type F afin de contrôler leurs conditions de vie et leur santé.

Le cinéaste Hüseyin Karabey lui aussi, profondément ému, a déclaré : « Je suis bouleversé par la continuation de ce mouvement de résistance contre l’isolement. Quand je pense aux grévistes de la faim, j’ai honte de moi. Nous devons reconstruire une opposition forte. »

Ensuite, Monsieur Hasan Kıvırcık établit que les particularités architecturales étaient expressément conçues pour gravement nuire à la santé des détenus.

Les frères de Fatma Koyupınar ont appelé à « faire vivre Fatma ».

Après la transmission d’images de Fatma Koyupinar prises depuis une maison du quartier de Küçükarmutlu à Istanbul, où elle poursuit son jeûne, Ebru Timtik, avocate du bureau du droit du peuple a exposé la situation des rapports entre gardiens et détenus : « un détenu de droit commun a été ligoté à la manière appelée « nœud de cochon » (mains et pieds liés les uns aux autres dans le dos) pendant 15 jours et nourri de la main des gardiens ».

Source : Halkin Sesi TV, 20 mars 2006

Nouvelle campagne de TAYAD : « Je voudrais t’expliquer l’isolement »

L’association d’entraide avec les familles des détenus a lancé voici quelques semaines, une nouvelle campagne de sensibilisation contre le régime d’isolement et les règlements coercitifs, en vigueur dans les prisons de type F depuis leur sanglante inauguration, il y a 6 ans.

Cette campagne qui rencontre un franc succès consiste à recourir à tous les moyens de communication possibles pour contourner la censure absolue imposée par les autorités sur le drame des prisons: placardage massif d’affiches, conférences de presse, pétitions, porte à porte, concerts, distribution de tract, stands d’information, grèves de la faim tournantes, fixation de calicots…

Les autorités, elles aussi, recourent à tous les moyens légaux et illégaux, pour empêcher la solidarité de la population envers ses familles.

Ainsi, le 2 mars dernier, 6 membres de TAYAD ont été pris à partie et arrêtés devant les portes de l’hôpital de Gebze, en périphérie d’Istanbul, où la détenue du DHKP-C Fatma Koyupinar en grève de la faim depuis près de 300 jours venait d’être transférée pour y être alimentée de force. Trois jours plus tard, 19 autres membres de TAYAD connaîtront le même sort.

Le 19 mars, à Mersin (sud de la Turquie), sept membres de TAYAD qui collaient des affiches pour protester contre les conditions de détention dans les prisons de type F, sont tabassés par la police avant d’être placés en garde à vue. Le reporter de l’hebdomadaire ‘Yürüyüs’, Mehmet Tas, est lui aussi agressé et son appareil photographique endommagé.

Le 2 avril dernier, sept colleurs d’affiches de TAYAD ont été arrêtés, mis en garde à vue et torturés .

Malgré cette répression, le mouvement de soutien aux prisonniers politiques s’accroît sensiblement.

Ce n’est pas la première campagne massive que lance TAYAD : l’an dernier, les membres de l’association avaient diffusé pas moins de 22 millions de flyers dans tout le pays.

En outre, les familles de TAYAD observent une grève de la faim tournante depuis 934 jours, à Ankara, dans le parc Abdi Ipekçi qui se situe à proximité du quartier des ministères.

Cette grève de la faim se poursuit à l’ombre d’un monument hautement symbolique : deux mains meurtries, tournées vers le ciel, implorantes et avides d’espoir.

Le 5 avril 2006

Source : extraits de communiqués de TAYAD

www.tayad.org

Des policiers torturent des membres de TAYAD à Antalya

Il s’agit de Murat Yilmaz ,Gülsah Nefesoglu , Ufuk Bayrak, Birkan Sati,Umut Durmaz,Cagri Nefesoðlu et Serhan Senem.

D’après le témoignage de Cagri Nefesoglu, « les policiers en civil nous ont aspergés de gaz au poivre en visant les yeux. »

Les membres de TAYAD auraient ensuite été traînés par les cheveux jusqu’à leur camionnette.

« Nous leur avons répondu par des slogans et nous sommes débattus » ajoute-il.

Là-dessus, les agents de police auraient proféré des insultes. L’une des membres de TAYAD aurait également été victime d’attouchements sexuels.

Cagri Nefesoglu poursuit son témoignage : « Arrivés au poste, nous avons refusé de descendre du véhicule, suite à quoi, le chef de la police nous a versé le seau de colle sur la tête puis nous a agressé avec son spray au poivre à bout portant, en visant les yeux. Pendant ce temps, ses collègues ont fermé les pare-brises du véhicule pour augmenter l’effet toxique. Nous avons ensuite été roués de coups. Nous étions couverts de blessures mais malgré cela, les policiers nous ont fait attendre pendant une heure debout, ventre à plat contre le mur et bras levés. (…)

Nous avons unanimement refusé de faire de déclaration. Ils nous ont alors menacé de passer au hachoir (c’est le nom que les policiers donnent à leur salle de torture).

Nous avons protesté contre ses mesures en entamant une grève de la faim mais ils ont refusé de nous donner de l’eau et du sucre. Nous avons passé la nuit sur du béton humide. Mon épouse Gülsah a été tabassée devant mes yeux puis forcée à rester debout. Ils l’ont une nouvelle fois rossée et là, elle a perdu connaissance. Ces crapules n’ont ni morale ni sens de la pudeur. Un jour, ils devront rendre des comptes devant la justice populaire. »

L’épouse de Cagri Nefesoglu, Gülsah explique : « Les policiers nous ont menacé d’être lynchés en nous disant cyniquement : ‘Il semble que vous avez vite oublié le lynchage de vos amis à Trabzon. Apparemment, vous voulez également connaître le même sort »

En chemin et au poste de police, j’ai été sexuellement agressée par les policiers.

Ils m’ont tabassée et forcée à rester debout sous prétexte qu’il n’y avait plus de places assises. J’ai perdu mon équilibre. J’ai chuté et j’ai perdu conscience. On m’a alors coincée entre deux armoires pour me tenir debout. Ils m’ont complètement déshabillée et roué de coups alors que je suis souffrante et reconnue comme tel par un rapport médical.

Au cabinet des médecins légistes, les docteurs du pedigree de Mengele, qui ont oublié leur serment d’Hippocrate, m’ont dit avec agressivité : ‘Es-tu une terroriste? Ou un rejeton du terrorisme?’

Nous avons subi toutes ces humiliations pour avoir simplement collé des affiches. Nous avons été menotté, maltraité et menacé d’être incarcérés alors que les criminels circulent paisiblement, en toute impunité. Jamais la répression n’est parvenue à entamer la détermination de TAYAD. Nous allons continuer notre combat honorable comme nous l’avons toujours fait ».

Une autre victime des brutalités politicières, Serhan Senem, a déclaré « encore ressentir les effets du gaz lacrymogène » et que ses vêtements « complètement déchirés, ont été réduits à l’état de loques ». Il affirme aussi qu’en raison de sa garde à vue, il n’a pas pu se rendre à ses examens scolaires.

Les sept membres de TAYAD sont couverts de traces de coups, d’ecchymoses et de douleurs musculaires.

Mais leur calvaire ne s’est pas achevé là. En effet, les tortionnaires de la police d’Antalya ont introduit une plainte auprès du tribunal de paix d’Antalya à leur encontre pour « rébellion de plus d’une personne contre les force de l’ordre » en se basant sur l’article 263, alinéas 1 et 3 du Codé pénal turc (TCK). Et à l’instar de la machination policière orchestrée lors de l’opération internationale du 1 er avril (visant les milieux de la gauche révolutionnaire), la police a remis aux juges un CD rempli d’images prises durant des manifestations pacifiques organisées par TAYAD et ce, en vue de les utiliser comme preuves à charge.

Chaque membre de TAYAD a été condamné à 3.294 nouvelles livres turques (l’équivalent de 2407 euros). Le tribunal a interdit les inculpés de quitter le pays et les a mis sous obligation de contrôle judiciaire en se rendant à la préfecture de police d’Antalya tous les lundis.

A la sortie du tribunal, les membres de TAYAD ont déclaré : « nous avons été arrêtés en raison de notre engagement contre la torture de l’isolement. Nous continuerons d’élever la voix jusqu’à la levée complète de ses tortures ».

Sources : Halkin Sesi TV, le 4 avril 2006 ( www.halkinsesi-tv.com ),

Zeynep Erdugrul, victime d’un lynchage fasciste et châtiée par la justice

Le 15 mars dernier, Zeynep Erdugrul, une jeune femme de 26 ans active au sein de l’association des familles des prisonniers politiques (TAYAD), a été arrêtée à Trabzon (nord de la Turquie) et immédiatement incarcérée. Elle avait été victime le 6 avril 2005, ainsi que quatre de ses camarades, d’un lynchage massif orchestré par les milices d’extrême droite connues sous le nom de « Loups Gris » et par la police.

Zeynep Erdugrul et ses amis ne faisaient pourtant que distribuer des tracts dénonçant les exactions dans les prisons cellulaires de type F comme ils avaient l’habitude de le faire ces dernières années, par solidarité avec les grévistes de la faim parmi lesquels, ces 6 dernières années, 121 détenus et proches avaient perdu la vie.

Zeynep Erdugrul a ainsi été doublement châtiée pour ces idées et son action démocratiques : une fois lors d’une agression sauvage de la part de fascistes et une deuxième fois, par une justice inique rendue par le tribunal de Trabzon qui donna raison à ses agresseurs en la condamnant à quatre mois de prison pour une prétendue « rébellion contre les forces de l’ordre ».

Sources : Millyet, 15 mars 2006 ( www.milliyet.com.tr )