Nantes, 19 janvier : raz de marée populaire
Catégorie : Local
Thèmes : Retraites 2023
Lieux : Nantes
Plus de 50.000 personnes à Nantes contre la casse des retraites
Jeudi 19 janvier, matinée glaciale et pluvieuse à Nantes. Pourtant la vaste esplanade du miroir d’eau se remplit rapidement. Et elle est vite noire de monde, une foule compacte, impressionnante. L’avant du cortège s’ébranle après 11h, il s’étire à perte de vue.
Combien sommes nous ? Des dizaines de milliers. Plus de 50.000 dans la rue. Alors qu’un premier tour du centre-ville est effectué par l’avant du défilé, le point de départ de la manifestation est encore rempli de personnes qui n’ont pas démarré. Dans le cortège, des tracteurs, des étudiant-es, des retraité-es et des lycéen-es, tous les syndicats, collectifs et partis de gauche. La foule des grands jours.
Selon la presse locale, il n’y a pas eu une aussi grosse manifestation à Nantes depuis 20 ans. Et c’était contre Jean-Marie Le Pen en mai 2002, pas en plein mois de janvier par grand froid. La colère est là, massive, partagée. On se souvient aussi de manifs à 100.000 personnes en 2006 contre le CPE, qui avait fini par être retiré par le gouvernement De Villepin.
Pourtant, cette marée populaire est restée calme, et même sage. La créativité du cortège de tête s’est manifestée devant quelques agences d’intérim, repeintes le long de la Loire, et par de nombreuses affiches et tags sur le parcours. Par endroits des batucadas, fanfares et chorales donnaient de la joie et du rythme. Mais globalement, la déferlante a terminé sa course tranquillement sur la grève, sans grands remous.
Vers 13h, sur l’île de Nantes, les énergies douchées par la pluie se dissipaient. C’est un paradoxe : si les rues de la ville ont rarement été aussi remplies, elles ont aussi rarement été aussi calmes. Dès l’après-midi, c’est comme s’il ne s’était rien passé.
Macron et ses conseillers savaient que leur projet destructeur et violent allait mettre du monde dans la rue. Peut-être n’avaient-ils pas anticipé l’ampleur exceptionnelle de l’opposition, mais cela entrait dans leurs prévisions. Ce gouvernement de combat est capable d’encaisser encore d’autres journées de manifestations massives. Si elles ne bloquent rien, le pouvoir ne bougera par d’un centimètre sur les retraites. Macron l’a d’ailleurs dit dans les médias : quelle que soit l’ampleur de la mobilisation, il ne compte pas reculer. Il faudra donc davantage pour qu’il se sente menacé.
Maintenant qu’une masse immense a pris la rue pour cette première date, et que la grève a été massivement suivie, comment transformer cet élan populaire en victoire ? Le plus dur est fait : sortir de l’impuissance qui a duré toute la séquence électorale l’an dernier. Désormais, c’est à notre portée.
D’autres rendez-vous sont déjà prévus à Nantes :
- Samedi 21 janvier, 14h, place Bretagne, à l’appel des Gilets Jaunes
- Jeudi 26 janvier, pour une deuxième journée de grève et de mobilisation
source : https://contre-attaque.net/2023/01/19/nantes-19-janvier-raz-de-maree-populaire/
C’est quand même grave que vous validez encore les publications de Contre Attaque alors que des accusations graves viennent d’être rendues publiques. Soit vous vous rendez pas compte de la violence que vous perpétuez en donnant de la visibilité à ce site, soit vous vous en rendez compte et vous êtes d’un parfait cynisme et dans ce cas il ne faut plus vous revendiquer du combat contre les oppressions. Faut pas s’étonner qu’après tant de complaisance, tant de personnes “désertent” les milieux activistes et en viennent parfois à se faire violences jusqu’au suicide dans le pire des cas, dans le meilleur à écrire dans des publications confidentielles sur papier, pas en ligne parce que les violences seraient encore perpétuées par des agresseurs (en majeure partie des mecs). Bref. Indymedia et ceux qui te relaient comme “Vive l’anarchie” vous avez choisi votre côté, celui des oppresseurs, ce n’est pas le mien.
Ce commentaire ne respectait pas la charte.
La journée de mobilisation du 19 janvier contre le projet de réforme des retraites est un indéniable succès. Il doit nous donner confiance en notre force. Mais les obstacles sont nombreux, et les perspectives incertaines nous laissent dans le flou alors qu’une nouvelle journée est annoncée pour le 31 janvier. Alors que pouvons-nous faire ?
Un raz de marée encourageant
L’intersyndicale 44 annonce plus de 50 000 personnes à Nantes, un chiffre qui n’est pas exagéré. Comme dans beaucoup d’endroits, c’est davantage que le 5 décembre 2019, et du jamais vu depuis le mouvement retraites de 2010. Plus encore que dans les grandes métropoles c’est dans les petites et moyennes villes du département qu’on mesure l’ancrage de la mobilisation : 16 000 à Saint-Naz, 4 000 à Ancenis, 2 500 à Châteaubriant…
L’arc syndical unitaire a joué dans la réussite numérique du 19. Cette unité a compté pour motiver beaucoup de salarié.es, celles et ceux qui ont été sur le terrain dans les entreprises ont pu s’en rendre compte. A Nantes, le cortège CFDT en a surpris plus d’un par sa taille. Cette unité syndicale est bien sûr fragile. Tout le monde s’attend à la défection prochaine des “syndicats d’accompagnement” qui n’ont aucune envie de se retrouver partie prenante d’un mouvement de contestation qui pourrait s’ancrer et se radicaliser. Cette unité présente aussi des inconvénients car elle force les syndicats plus combatifs à bien des compromis pour ne pas briser l’unité. Malgré tout, cette unité nous reste profitable à l’heure actuelle en nous permettant de mobiliser plus largement.
Au delà du nombre, la manifestation a réuni un public plus hétérogène, dépassant largement les habituels bastions syndicaux. Beaucoup de salarié.es du privé, de petites et moyennes entreprises… Des gens venus en famille aussi, malgré la réputation plus ou moins fondée des manifestations nantaises. Cette plus large représentation du monde du travail montre l’étendue du rejet de cette réforme et de ce qu’elle représente politiquement. La pluie soutenue, quasiment tout du long de la manif, ne semble pas avoir entamé la détermination de la foule à marcher, un autre témoin de la colère. Au sortir de la manif, l’écrasante majorité des collègues présent.es témoignait sa satisfaction devant l’ampleur de la manifestation, mais aussi vis à vis de l’ambiance bon enfant et de l’absence d’affrontements.
Une grève forte mais peu vivante
Mais la journée du 19 présente aussi des faiblesses et en premier celle d’Assemblées Générales de grévistes aussi peu nombreuses que vivantes. Très peu d’AG de grévistes ont été organisées, même là où les taux de grève pouvaient être importants.
Là où elles existaient, comme à la SNCF, les AG étaient peu garnies et l’ambiance n’était pas celle d’un début de grande bataille. Les discussions entre collègues sur les suites étaient timides. A Nantes l’AG a réuni environ 150 grévistes, moitié moins que le 5 décembre 2019 par exemple et les discussions n’ont guère débordé les déclarations syndicales habituelles. L’AG du secteur éducation de l’après-midi, sans être ridicule était loin de pouvoir impulser une quelconque reconduction de la grève en l’état.
Les assemblées générales sont le préalable indispensable pour que la grève appartienne aux grévistes et que soit discutée la possibilité de la reconduire. Aussi, restons méfiants des calendriers d’actions bien définis vendus par certains, avec des grèves séquencées définies à l’avance. Il faut laisser aux grévistes de la souplesse.. la reconduction de la grève dans un secteur ou dans une entreprise peut parfois être le départ d’une généralisation des grèves, l’histoire nous l’a montré a bien des occasions.
Construire la grève, mais pas que..
C’est bien là une des difficultés que nous rencontrons : aucun secteur ne semble aujourd’hui réellement prêt à entamer une grève reconductible, même si il est possible que le succès du 19 augmente la combativité de certain.es. Car la grève reconductible, c’est bien ce dont nous avons besoin pour ancrer la contestation et faire céder le gouvernement. Les grosses manifestations comme celle du 19 ne suffiront pas. La grève, en bloquant l’économie, reste la force première de notre classe.
Il faut pour cela la généraliser, l’étendre partout où c’est possible et éviter à tout prix l’écueil de la grève par procuration. C’est-à-dire l’idée que certaines grèves seraient inutiles pendant que d’autres disposeraient d’un pouvoir bloquant, comme dans le rail ou dans les raffineries… Mieux vaudrait donc soutenir ces secteurs stratégiques que de faire grève soi même… Mais la grève par procuration a déjà montré son inefficacité : les secteurs qui sont isolés dans la grève se démoralisent et le gouvernement joue le pourrissement. Les travailleurs.euses des entreprises du transport qui ont été fer de lance de la grève de 2019 gardent un souvenir amer de leur isolement et n’ont de cesse de rappeler dans les discussions qu’ils ne veulent pas constituer la locomotive du mouvement cette fois-ci. L’entrée en grève d’entreprises du privé pourrait changer la donne, à condition que les grévistes se rencontrent et discutent.
Il faut donc convaincre autour de nous que la grève ça doit être l’effort de tout le monde quand cela est possible, même des débrayages d’une heure ou deux seulement…Il s’agit parfois d’un travail de fourmis, à petite échelle. Mais il sera toujours plus efficace que d’invoquer, en vain, la grève générale reconductible du jour au lendemain.
La précarité des emplois, les déserts syndicaux mais encore plus, la terrible pression de l’inflation sur les salaires ne permettra pas à beaucoup de salarié.es de multiplier les journées de grèves. Dans la manifestation du 19, beaucoup sont d’ailleurs venu.es sur des congés ou RTT.. Cette difficulté doit nous pousser à articuler différentes formes d’actions : manifs de masse, grève reconductible, actions coup de poing (coupure d’électricité, actions de blocage…), manifs le samedi et bien plus encore ! Il va falloir être souple et inventif. Ce qui compte : que ces actions impliquent la participation réelle des travailleurs et travailleuses et pas seulement des petits milieux militants car dans ce cas, elles ne feront peur à personne !
Préparer le 31 janvier et passer la seconde
Parmi les plus militant.es beaucoup sont déçu.es que la prochaine journée de grève n’intervienne pas plus tôt. Un sentiment beaucoup moins partagé en dehors des cercles militants. En réalité, tout dépend de ce que nous faisons des 10 jours qui séparent les deux dates. Ce temps peut nous permettre de construire ce qui nous manque actuellement : des secteurs prêts à l’idée de reconduire la grève. Une journée plus en amont n’aurait pas permis de changer la donne dans des secteurs soumis à des déclarations préalables de 48h comme dans les transports. Dix jours pour convaincre, pour aller chercher ceux et celles qui n’étaient pas là, pour organiser de vraies AG, pour faire de l’agitation en se basant sur la démonstration de force que nous avons réalisé le 19, ce n’est pas de trop ! À nous de construire le 31 janvier comme une nouvelle étape et non comme une simple nouvelle journée de mobilisation, au risque de rentrer dans un cycle de journées saute-moutons qui ne nous permettra pas de gagner.
Et la jeunesse ?
Comme toujours, lycéen.nes et étudiant.es disposent d’une force considérable. Leur entrée massive dans la lutte peut en changer nettement l’ambiance. La jeunesse en lutte est une force d’agitation à même d’installer dans le pays une ambiance de mouvement utile à rompre l’isolement des grèves. Elle constitue un possible facteur de politisation et de radicalisation du mouvement. Pour le pouvoir c’est aussi un dangereux laboratoire d’apprentissage politique générationnel. Les gouvernements l’ont bien compris et répriment sans vergogne à coups de matraque les moindres tentatives de mobilisations lycéennes alors que les organisations de jeunesse sont trop faibles pour y répondre. Dans les universités, les mouvements étudiants peinent depuis quelques années à dépasser le stade embryonnaire. Mais de nombreux jeunes étaient présents dans la manifestation du 19. La précarité étudiante, l’absence d’avenir proposée par la société, l’inaction des gouvernements face à la crise écologique sont des facteurs qui peuvent pousser la jeunesse à se mettre en action. Il faut y contribuer !
Nous pouvons gagner
Reste une chose essentielle : nous devons nous convaincre que la victoire est possible. Le pouvoir est faible, sa réforme largement rejetée. Les conditions de vie ne cessent de se dégrader pour une partie toujours plus importante de notre classe, charriant ainsi son lot de colère. Ne sous-estimons pas notre force, la victoire est possible mais il faut commencer par nous en convaincre nous-mêmes.
Donnons nous les moyens de réussir la journée du 31 janvier et surtout, efforçons nous de provoquer des réunions, des AG de grévistes, des piquets et des actions de grévistes communes… pour créer les conditions d’un mouvement fort et radical.