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TW : Propos islamophobes et violents ci-dessous

« covid-19 ou pas les INTEGRISTES de plusieurs cultes, sectes, religions continuent leurs rassemblements; QU’IELS CREVENT! »

« des ISLAMISTES à la mosquée Arrahma boulevard René Cassin à Nantes…. »

« des MUSULMANS parmi les plus FACHO-CONSERVATEURS ( les plus NOCTURNES aussi) rue Benoit Frachon ou des FANS D’ERDOGAN Boulevard du Batonnier Chollet »

« ces différent-e-s CROYANT-E-S, ENNEMI-ES DE L’EMANCIPATION HUMAINE ont poursuivi leurs rassemblements »

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Ces extraits sont tirés d’un article publié sur le site d’Indymedia Nantes lors du premier confinement, ils n’émanent non pas d’un groupe d’extrême-droite, mais bel et bien de la gauche nantaise auto-proclamée.

Si nous l’évoquons aujourd’hui, c’est que ces propos violents et islamophobes, ouvertement tenus et cautionnés, ciblent particulièrement les musulman-e-s de Nantes et leurs lieux de culte et font échos à l’incendie criminel qui a récemment ciblé la mosquée Arrahma à Nantes, distinctement citée dans ces extraits avec son adresse, et présentée comme le point de ralliement d’« islamistes ».

On peut voir une énième fois la gauche blanche étaler sans problème son islamophobie la plus crasse sur ses médias et ses réseaux, en se cachant derrière l’anonymat garanti par le site d’Indymedia (qui n’a même pas jugé utile de refuser le texte). Nous voilà donc avec un-e ou plusieurs obscur-e-s individu-e-s appelant allègrement à ce que des musulman-e-s “crèvent” car considéré-e-s à leurs yeux comme « islamistes » (sans même définir ce terme colonial et fourre-tout, chargé d’une forte ambiguïté, qui est utilisé aussi bien pour désigner les musulman-e-s que les adhérant-e-s à un « « islam politique » » faisant usage de la violence, mais selon Darmanin, rien qu’être musulman-e pratiquant-e et portant des signes religieux comme le hijab, ce serait déjà islamiste), ou tout simplement en raison du fait qu’ielles sont « croyant-e-s », donc jugé-e-s « ennemi-e-s de l’émancipation humaine », et cela en toute impunité sur une plateforme pourtant sensée être militante et d’extrême-gauche. Les milieux militants seraient donc des espaces où débattre de la pertinence ou non de voir “crever” les personnes musulmanes ? Quelle belle leçon de liberté d’expression ! Nous-mêmes personnes racisées n’avons jamais appelé à ce que nos oppresseurs/euses blanc-he-s « crèvent » et si jamais certain-e-s d’entre nous finissaient par le faire par dépit, on peut déjà imaginer le scandale et les graves conséquences qui leur tomberaient dessus. Il semble donc que les plateformes et médias de l’extrême-gauche servent tout autant de transmetteurs à la banalisation de discours de haine et d’appel au meurtre, que ceux de l’extrême-droite, et cela envers des personnes qui ne les oppriment même pas.

C’est d’ailleurs sur cette même plateforme que Nantes Révoltée avait employé exactement les mêmes termes il y a tout juste quelques mois à notre encontre, nous appelant à « crever » en nous accusant d’être des « islamistes racistes et fascistes à combattre », alors que nous leur disions simplement de cesser leur islamophobie belliciste semant la confusion et mettant de l’huile sur le feu dans un climat déjà tendu et hostile envers les musulman-e-s. Comme quoi, l’appel à la violence contre les personnes racisées est déjà très courant dans ces milieux soi-disant d’extrême-gauche.

Nul doute que cette extrême-gauche blanche se défendra en disant que ces extraits font partie d’un ensemble d’informations où d’autres religions ont été mentionnées : en effet, l’article entier consiste en une petite compilation de lieux présentés comme repaires d’« intégristes religieux » aux environs de Nantes. Cependant, cet article est rédigé sans une once d’analyse politique, sans aucune définition, sans source et sans prendre en considération l’islamophobie ambiante et les conséquences de tels propos (tenus non pas en privé, mais publiquement, l’article restant facilement accessible en un simple clic sur ce site connu comme référence pour l’extrême-droite de la région qui le visite pour se tenir au courant des faits de l’extrême-gauche). Ainsi, il n’est par exemple jamais expliqué ce que le ou les auteur-e-s entendent par « intégristes ». Et bien que le texte soit court, l’ensemble des adresses indiquées recouvre une large zone autour de Nantes, c’est un véritable réseau de lieux parfois à 80km d’écart, qui n’a clairement pas été conçu par une seule personne en plein confinement. Il est d’ailleurs étonnant de compter parmi ces « lieux de rassemblements intégristes » quasi autant de lieux dits catholiques (4) que de lieux dits musulmans (3), alors que ces derniers sont beaucoup moins nombreux sur l’agglomération de Nantes, qui est une région largement blanche et catholique, donc c’est dire l’obsession pour les musulman-e-s dont cet article témoigne.

Si vous trouvez « normal » et « nécessaire » d’exposer ainsi publiquement des lieux de culte musulman et leur adresse en les qualifiant de repères d’« islamistes » (sous prétexte que selon vous, il y aurait soit-disant des membres et des groupes problématiques, question qui d’ailleurs ne vous regarde pas, et qui est déjà gérée par les communautés musulmanes elles-mêmes), vous êtes totalement odieux-ses et irresponsables, il s’agit ni plus ni moins d’une grave MISE EN DANGER de minorités.

Cet article où « croyant-e-s » et « intégristes » sont confondu-e-s et qualifié-e-s d’« ennemi-e-s », indique les adresses de 2 mosquées et d’1 centre culturel turc, jetées en pâture et offertes à l’extrême-droite, alors qu’il s’agit avant tout de lieux publics, ouvert à tou-te-s, où se rendent régulièrement des fidèles, des familles et leurs enfants. Leur sécurité ne vaut donc rien ? Parce qu’une poignée de musulman-e-s poserait problème, il faudrait condamner la majorité et la mettre en danger ? Cibler ainsi des lieux de vie, de prière, d’éducation, d’échange et d’entraide, où des centaines de musulman-e-s se rassemblent, en les assimilant à des « islamistes » et des « intégristes » qui devraient « crever » car pratiquant librement leur religion, c’est tout simplement INADMISSIBLE, c’est un appel à la haine et la violence.

De plus, ces propos s’inscrivent pleinement dans les politiques répressives et islamophobes de l’Etat français : en effet, le gouvernement avait déjà commencé son offensive islamophobe à l’époque de la publication de cet article et avait notamment annoncé sa chère loi « contre les séparatismes » (loi retardée par la pandémie), destinée à cibler encore davantage les populations musulmanes, soupçonnées de faire de « l’islam politique » (appelé aussi « islamisme » ou « islam radical », notions confuses et jamais définies), qui serait à l’origine du terrorisme, de la perte des valeurs républicaines et du risque de putsch et d’ingérence étrangère sur la France (notamment par la Turquie). Le gouvernement prend donc déjà pour cibles les mosquées et toutes les associations musulmanes, en forçant leur mise sous surveillance, parfois leur dissolution et en rendant obligatoire la signature de la « charte des imams » sous prétexte que ce serait des « lieux de prédilection de radicalisation », alors même que plusieurs études contredisent ce propos et démontrent que les groupes sectaires, violents et fascistes musulmans prennent lieu principalement sur internet, en attirant des personnes musulmanes isolées, converties ou apprenant leur religion sur le tard. Ainsi, cet article Indymedia valide et légitime cette politique islamophobe et y contribue, en visant expressément des mosquées et des centres culturels accusés on-ne-sait-pourquoi d’ « islamisme » et de fanatisme pour Erdogan. Cette gauche dite radicale qui ne cesse de crier à la « poucave » dès qu’elle est affichée pour son racisme et sa violence envers les minorités et qui prend pour sujets de prédilection la surveillance de masse et la répression, la voilà donc en train d’alimenter elle-même les services de renseignements de l’Etat, par le fichage et le traçage des populations musulmanes, faisant ainsi peser encore plus de suspicions sur les musulman-e-s et leurs lieux de rassemblements : c’est tout simplement de la complicité.

Et si vous pensez qu’ « il ne faut pas en faire un drame » et qu’ « il n’y a aucun risque », ce sont pourtant des propos violents qui invitent clairement à réagir, dans un climat islamophobe déjà palpable. C’est un appel à s’en prendre à des lieux de culte musulmans qui se cumulent à tant d’autres émis par l’extrême-droite. Preuve en est que ces lieux ne sont pas épargnés par les menaces d’attentats islamophobes, les 2 mosquées visées dans l’article ont justement été prises pour cibles quelques mois après, l’une a été menacée par des courriers contenant des balles d’arme à feu et l’autre a été incendiée.

Et c’est cette même gauche blanche islamophobe qui en ce moment verse des larmes de crocodile et prétend appeler à faire front contre l’islamophobie, du haut de sa posture hypocrite, alors même qu’elle cautionne ce genre de propos violents, dignes de l’itinéraire d’un suprémaciste blanc informant où aller viser des musulman-e-s, avec la note écrite mine de rien à la fin « Que chacun-e utilise ses informations pour sa propre réflexion ! ».

Pire encore, ce texte semble clairement émaner de la mouvance auto-proclamée antifasciste du milieu militant nantais, avec leur étrange fascination et obsession pour les groupuscules fascistes (dont elle n’est pourtant pas la principale cible). On le repère à leur style habituel d’écriture, qu’on retrouve sur les pages d’Action Antifasciste et sur des sites tels que La Horde, groupe antifa de référence à portée nationale. Ce style qui consiste à jouer de la révélation sur les faits et gestes de groupes d’extrême-droite et/ou d’intégristes religieux avec force détails issus d’on-ne-sait-où, avec des constats et des liens faits on-ne-sait-ni-comment-ni-pourquoi, sous le mode d’une « enquête exclusive », remplie de sensationnalisme choc qui promet de dévoiler les coulisses des virées nocturnes de musulman-e-s de Nantes bravant le confinement, et ceci sans aucune analyse politique, avec une grille de lecture blanco-catho-centrée, et seulement dans l’objectif de dire « on vous l’avez dit, tou-te-s les religieux-ses sont fachos, se rejoignent et méritent de crever ».

C’est typiquement du travail (si on peut l’appeler ainsi) effectué par ces groupes blancs auto-proclamés antifas, travail qui consiste à scruter les groupuscules d’extrême-droite et à faire des listes d’individus “classés fachos” (qu’ils se réservent entre dominant-e-s et avec lesquels ils jouent les experts). Voilà à quoi est réduit l’antifascisme (et en plus, ils sont frustrés car il n’y a pas assez de fachos à leurs yeux, ils élargissent donc leur spectre aux militant-e-s antiracistes et aux musulman-e-s). Et visiblement, il semble en vogue de révéler que telles ou telles associations musulmanes seraient en réalité en lien avec l’extrême-droite (à partir de raisonnements douteux et incompréhensibles et sans aucun élément concret), ce qui a longtemps justifié le silence, la passivité et les réactions tardives d’une partie de la gauche à propos des menaces de dissolution du CCIF et de Barakacity, qui étaient selon elle identifiés comme proches de fascistes musulman-e-s (et qui méritaient donc le sort réservé par l’Etat français).

L’islamophobie de cette extrême-gauche blanche se cache derrière des discours anti-religion, qui se prétendent antifascistes et anarchistes (comme elle l’entend elle, précisons-le). Elle se permettra ainsi de viser des mosquées et des synagogues en prétextant un « ni dieu ni maître » ré-interprété pour dominer, et en déclarant que les croyant-e-s sont des « ennemi-e-s », comme dans l’article Indymedia. Selon cette même logique, la religion serait intrinsèquement liée à l’extrême-droite : ainsi revendiquer et signifier son appartenance à une religion telle que l’islam révèlerait soit un état de soumission à une force fasciste de la part des “masses” que la gauche se donne le devoir de sauver, réveiller et encadrer, soit une adhésion claire et assumé au fascisme. A la rigueur, cette gauche peut concevoir qu’il y ait un folklore culturel et populaire autour de la religion à prendre sous l’angle de la dérision et/ou de l’appropriation culturelle (en sortant des « insha Allah », en se déclarant « islamo-gauchiste » et cela sans jamais être inquiétée pour ça, contrairement à ce qui se passe pour les personnes identifiée musulmanes), mais autrement, la religion ne serait qu’une tradition arriérée, subie et liberticide, qui peut être tolérée chez les anciennes générations, mais qu’il faudrait à long terme éliminer, ce serait pour elle un progrès au nom de la liberté. La religion ne pourrait donc ni être un choix éclairé et voulu ni s’inscrire dans une orientation politique de gauche révolutionnaire. Par conséquent, cette gauche blanche se retrouve frustrée à longueur de temps, parce que le débat politique tourne régulièrement autour des musulman-e-s, et parce qu’une grande partie des populations racisées de milieux précaires et modestes, que cette gauche blanche souhaite atteindre, demeure malgré tout attachée à leurs croyances et pratiques religieuses. A cela s’ajoute aussi le fait qu’une partie non négligeable des descendant-e-s d’immigré-e-s musulman-e-s n’adhère pas à l’assimilation française et choisit parfois d’embrasser l’islam comme voie d’émancipation et d’épanouissement, en la pratiquant parfois bien plus que leurs parents, qui n’osaient pas l’assumer ni l’enseigner, afin de mieux s’intégrer dans la société française.

Cette gauche le sait, son racisme transparait très vite dès lors qu’elle se permet de critiquer et de débattre des choix religieux des personnes racisées (comme au gouvernement) et c’est pourquoi leur combine est d’aborder le sujet en semant la confusion entre islam et extrême-droite, sans expliquer à aucun moment sur quelles bases et sous quels motifs elle se permet d’avancer de tels propos en qualifiant ici et là des musulman-e-s d’ « intégristes » , « de facho-conservateurs » et d’ « islamistes », sans considérer les répercussions de telles allégations en France. Mais cette gauche le sait ça aussi, et c’est bien pour ça qu’elle ne l’assume pas et qu’elle procède bien planquée, anonymement.

L’anti-religion et l’anti-cléricalisme que cette gauche veut imposer mine de rien sont à l’origine des affaires de blanc-he-s catholiques, datant du siècle des Lumières et ayant abouti à la laïcité actuelle. Cela s’inscrit donc dans le contexte strictement français : calquer ces analyses sur la religion musulmane n’est rien d’autre que la projection d’une vision blanco-centrée d’une gauche n’assumant pas d’être elle-même de tradition catholique.

Nous l’avions déjà souligné, l’extrême-droite assume son racisme, l’extrême-gauche, elle, n’assume pas son racisme et ne veut pas en entendre parler, deux extrêmes sensés s’opposer mais qui finalement, comme le prouve une énième fois cet article Indymedia, n’ont aucun mal à se retrouver sur l’islamophobie et le racisme en général. Si de tels propos avaient été tenus par la droite et l’extrême-droite, nous les aurions unanimement condamnés et ils nous auraient vivement inquiété-e-s car mettant en péril la sécurité des musulman-e-s, or là il serait tout à fait normal de laisser la gauche exposer ainsi son islamophobie ?

Tenir ce genre de discours dans un contexte aussi islamophobe et violent envers les personnes musulmanes relève de la mise en danger délibérée d’autrui, voire même de l’apologie du meurtre et du terrorisme ! On n’est même plus au niveau de l’irresponsabilité, on est niveau de la haine raciste islamophobe qui s’exprime en toute impunité !

La tolérance complète qui est laissée à ce genre de discours haineux et meurtrier, sous couvert de liberté d’expression et d’anti-autoritarisme, est absolument inacceptable ! L’islamophobie n’est pas une opinion à débattre, et les conséquences qu’elle engendre ne sont pas un détail de l’actualité !

Ainsi, en ce qui concerne l’incendie de la mosquée Arrahma, on a tou-te-s pensé instinctivement que l’extrême-droite en était responsable, nous les premier-e-s. Cependant, en songeant aux propos islamophobes rapportés ci-dessus, on est contraint-e d’admettre qu’il n’y a en fait aucune garantie que l’extrême-droite soit la seule à vouloir passer à l’acte. On tente malgré tout de se rassurer en se disant que la gauche, même très islamophobe, n’aurait pas de telles intentions politiques et que même si l’envie la traverse, elle se retiendrait au moins moralement, non ? Il serait impensable qu’elle franchisse cette limite, au pire, elle attendrait que l’extrême-droite le fasse en continuant de diffuser publiquement l’idée selon laquelle les croyant-e-s musulman-e-s, même en tant que minorités discriminées et stigmatisées en France, demeurent des ennemi-e-s à combattre… (ce qui lui permettrait d’ailleurs de débarquer ensuite en sauveurs/euses et de gagner sur tous les fronts). Jamais, on ne penserait cette extrême-gauche capable d’un tel acte islamophobe.

Mais finalement, au bout d’un moment, pourquoi pas ?

Sur les réseaux, on peut voir des gens soupçonner les musulman-e-s elles/eux-mêmes d’être à l’origine de l’incendie, pendant que des personnes sans domicile fixe sont présumées coupables par l’enquête officielle selon les médias : donc comme d’habitude, il serait normal de suspecter les dominé-e-s ? Deux poids, deux mesures. Il paraîtrait donc plus plausible de dire que les musulman-e-s elles/eux-mêmes auraient mis volontairement le feu à leur propre mosquée, que d’émettre l’hypothèse qu’une partie de la gauche blanche islamophobe puisse être à l’origine d’un tel acte, vu ses appels à s’en prendre à cette mosquée ?

En fait, qu’est-ce qui pourrait retenir une gauche haineuse, identitaire bretonne et confusionniste, de commettre un tel acte ? Elle, qu’on ne regarde jamais car on se tourne systématiquement vers les dominé-e-s puis l’extrême-droite. Elle, qui déplore après coup « l’islamophobie d’Etat/systémique » (donc traduisons-les : pas leur islamophobie) alors même que Darmanin se prête au même jeu, en s’offusquant de l’incendie, tout en étant responsable de la montée de l’islamophobie. Pourquoi donc la préserver alors qu’elle crache son islamophobie sur le net et qu’elle sort à tout-va aux musulman-e-s et leurs milieux de « crever » ?

Lorsqu’on voit qu’une partie de cette prétendue extrême-gauche cherche à instiller chez celui ou celle qui la lit la haine et l’envie de violence contre des musulman-e-s de façon à favoriser le passage à l’acte, avec un attrait certain pour le feu, on est en droit de se poser la question : finalement quel extrême est responsable de l’incendie de la mosquée de Nantes ? Celui qui accuse les musulman-e-s de tous les maux de la France, notamment de son islamisation et du grand-remplacement, les qualifient d’ “ennemi-e-s de l’intérieur” et rend clair sa volonté fasciste de purifier la nation française ? Ou celui qui, sous couvert d’idéologie anti-religion et pseudo anti-fasciste, sème la confusion et rend tout-e croyant-e et pratiquant-e musulman-e responsable de tous les maux de l’humanité en le/la qualifiant d’ “ennemi-e-s” des libertés, et en les positionnant politiquement d’office à l’extrême-droite pour justifier de les cibler ? En sachant que trop souvent encore, certains groupes et membres de ces deux bords politiques se retrouvent dans une mouvance confusionniste ? Il est clair que nous ne recevrons jamais de notification lorsque des militant-e-s traditionnellement de gauche décident de convoler vers l’extrême-droite, parfois sans jamais l’assumer, en validant leurs théories derrière des airs d’ultra gauche anticapitaliste, révolutionnaire, anti-police et pro-Palestine. Et qu’on ne dise pas que ça n’est jamais arrivé et que c’est seulement des cas isolés, de véritables courants politiques fascistes se revendiquent de cette confusion entre droite et gauche, et ce glissement vers l’extrême-droite, on le voit partout dans les milieux militants, sur le net et dans l’actualité, même si c’est un tabou et un problème inavouable (qu’on refuse de regarder en face, de comprendre et de résoudre). En revanche, comble de l’hypocrisie, les racisé-e-s elles/eux sont facilement affiché-e-s pour cette dérive, on n’hésite pas à les qualifier de traitres ou de fascistes qui aurait infiltré la gauche. Or les militant-e-s blanc-he-s, y compris antifas, ne sont clairement pas épargné-e-s par cette attirance vers l’extrême-droite, et certain-e-s passent même à l’acte, rien que le 29 Octobre 2020 à Avignon, un militant au PCF encore jusqu’en 2015 a fini par attaquer des personnes nord-africaines par arme à feu en se revendiquant de Génération Identitaire.

La version de l’enquête officielle sur l’incendie de la mosquée Arrahma s’oriente vers « un individu isolé, alcoolisé et marginalisé » n’ayant « par conséquent » rien contre les musulman-e-s ni la mosquée, logique n’est-ce pas ? Cette supposée personne (qui à l’heure de ces révélations n’avait même pas été retrouvée) aurait mis seule le feu à la porte de la mosquée, à l’aide de 3 poubelles remplies de cartons et de cannettes d’essences, rien que ça (un incendie donc pas-du-tout-criminel et pas-du-tout-organisé, l’individu « alcoolisé » se promenait juste avec de l’essence sur lui, et aurait vu la mosquée et des poubelles au loin, et oups, un feu) ! Cette version des faits ressemble bien trop aux habituelles stratégies racistes pour ne surtout pas qualifier d’attentat les attaques contre des lieux et/ou personnes racisées en faisant disparaître toutes traces de motif raciste. Ces attentats ne seraient alors que « l’acte d’un déséquilibré qui finalement ne savait pas trop ce qu’il faisait » et surtout pas un acte politique raciste visant expressément une catégorie de la population.

L’incendie de la mosquée n’a pas été revendiqué et aucun tag n’a été trouvé permettant de savoir quelle mouvance avait pu commettre cet acte. La gauche nantaise quant à elle, s’est montrée mitigée, entre les un-e-s qui en ont parlé sous le conditionnel en déclarant que c’était un incendie « apparemment criminel » et les autres qui ont pris du temps à digérer l’info, comme Nantes Révoltée qui a pris 2 jours pour la relayer, sans même incriminer l’extrême-droite (ce qui ne ressemble pourtant pas à leurs habitudes). Donc il est difficile de se prononcer. Mais en tout cas, nous pouvons observer que le motif de l’acte, l’islamophobie, n’est pas spécifique à l’extrême-droite et est largement partagé par l’auto-proclamée extrême-gauche, et que tous deux avaient cette mosquée dans leur collimateur.

En conclusion, la gauche blanche est bien celle à qui on ne demande jamais rien, celle qui semble “de toute évidence” être dans le « camp du bien”, comme si c’était un fait naturel. Il nous semble qu’il est plus que temps pourtant de lui demander des comptes, au vu de ses comportements et discours, dignes de l’extrême-droite, qui ne datent pas d’hier et se sont accumulés avec le temps sans que personne n’y trouve à redire. Être de gauche n’est ni un état ni une identité : c’est faire le choix d’une orientation politique impliquant engagements et luttes, et surtout, c’est un effort constant, ce n’est pas une valeur absolue. Nous entendons par là que “être de gauche” signifie toujours de se situer politiquement par rapport aux autres courants politiques. Ainsi donc, si pour le milieu militant nantais être de gauche revient à l’être par rapport au pire de l’extrême-droite, ce n’est pas placer le curseur très loin. Pour savoir où se placer à gauche, il convient en effet de regarder ce qui se trouve à sa droite la plus proche. Si donc immédiatement à droite de l’extrême-gauche nantaise, on trouve l’extrême-droite, c’est qu’il y a un sacré problème. Cela signifie que cette dernière garde sciemment une proximité dangereuse avec l’extrême-droite, qui fait qu’on finit par ne plus bien discerner où cette dernière finit et où “la gauche” commence. Et nous rappelons que ne pas tenir une ligne ferme à gauche mène tout droit à la droite voir à l’extrême-droite. Quoi qu’il en soit, après avoir tenu et/ou toléré la publication de discours aussi islamophobes que ceux que nous avons relevés, ce n’est pas la peine de venir prendre des mines horrifiées après en feignant de s’étonner de voir exploser les conséquences dramatiques des dits discours. Comme la figure du pompier pyromane, vous provoquez l’incendie, vous nous mettez tou-te-s en danger et vous venez ensuite jouer les sauveur-se-s mine de rien, ce n’est plus ni moins que la stratégie actuelle du gouvernement.

Le Sénat (connu pour être plus réactionnaire que l’Assemblée Nationale) a récemment durci le texte de loi « contre les séparatismes », de nombreuses dispositions ont ainsi été prises contre le port du voile (pour les mineurs, pour les mères accompagnatrices scolaires et durant les compétitions sportives), contre le burkini à la piscine, contre les prières à l’université, pour la suspension des allocations familiales en cas d’absentéisme scolaire, pour la dissolution d’associations faisant des réunions en non-mixité racisée et pour la possibilité de s’opposer à l’ouverture d’école hors contrat soutenues par un État étranger hostile à la République (aka la Turquie). Désormais, les député-e-s et les sénateurs/trices doivent se réunir en commission mixte paritaire début Mai pour tenter de trouver un compromis, et en cas d’impossibilité, le texte sera réexaminé en nouvelle lecture. Et même si finalement, les dernières dispositions du Sénat ne sont pas intégrées à cette loi, rien que le débat est déjà problématique et amène de la confusion car beaucoup de Français-e-s penseront que ces mesures sont déjà actées et promulguées, et risqueront d’agir en conséquence.

Ainsi, l’effet de ces politiques islamophobes est déjà palpable au quotidien et elles déchainent les haineux-ses islamophobes, puisque qu’en l’espace de quelques jours seulement et à l’approche du Ramadan, plusieurs mosquées et centre culturels dans l’Ouest de la France ont été pris pour cibles. Et aussi hypocrite soit-il, le gouvernement s’en est indigné et s’est même déplacé pour mieux condamner ces agissements. Mais personne n’est dupe, ce jeu de communication n’est qu’apparence. Seulement, c’est aussi le signe que nous ne sommes pas encore sous la gouvernance d’un pouvoir fasciste (malgré les fameux « LREM = FN/RN » répandus par la gauche blanche, alors que pour le FN/RN, cette loi séparatisme n’est clairement pas suffisante, il est dangereux de diffuser l’idée que ce parti nazi se réduira à ce niveau d’islamophobie s’il obtient le pouvoir), il s’agit bien d’un gouvernement de droite libéral, qui emploie divers stratégies pour parvenir à ses fins et conserver ses privilèges de classe, race et genre. Ce gouvernement est opportuniste et saisit les occasions : il n’est donc pas étonnant de le voir empiéter sur le territoire de l’extrême-droite par la promulgation de lois racistes, sans que cela ne lui pose de problème de conscience, d’autant plus si cela peut lui garantir une position aux présidentielles de 2022.

Face à cette offensive islamophobe, des musulman-e-s tentent tant bien que mal de s’organiser et de s’opposer collectivement, de nombreuses femmes musulmanes portant le hijab essaient notamment de faire entendre leur voix et de réfléchir à la suite de la mobilisation. Mais malheureusement, à ce stade-là, les campagnes de communication, les hashtags et les pétitions ne suffiront pas, surtout pour surmonter 2022 qui approche à grand pas, et se cumulent à ça les risques de répression qui limitent considérablement l’auto-organisation. De fait, beaucoup d’attentes reposent sur l’action de la gauche blanche et notamment des élus, qui ont les ressources pour se mobiliser à d’autres niveaux (et pas juste par des moyens de performance) et qui ont le devoir de soutenir activement les concerné-e-s. Mais cette gauche est dans un état tellement catastrophique et peu stable au sujet de l’islamophobie et du racisme en général, qu’on ne peut clairement pas lui faire pleinement confiance et se lancer dans un front commun sans la confronter précédemment sur ses contradictions et son racisme violent et décomplexé, alors même qu’elle émet ou cautionne des appels confus et violents à l’encontre des musulman-e-s et de leurs lieux de culte et qu’elle est capable de nous lâcher, de nous utiliser pour ses propres intérêts et d’incendier elle-même une mosquée.

Il est hors de question d’ignorer ces faits et ces glissements à droite, voire l’extrême-droite. Si la gauche blanche se permet d’étaler son islamophobie et de renforcer quotidiennement le climat hostile envers les musulman-e-s et qu’elle refuse toujours autant de gérer ce problème au sein de ses milieux politiques, alors il n’y a absolument RIEN à attendre d’elle, si ce n’est qu’elle DEGAGE et assume enfin d’être de DROITE. C’est à cette gauche de nous démontrer le contraire et d’agir en conséquence pour nous garantir son soutien inconditionnel contre l’islamophobie.