[zad de la dune] la milice de bretignolles et reprise des travaux préparatoires en toute illégalité
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Catégorie : Local
Thèmes : EcologieRépression
Lieux : Brétignolles-sur-merVendée
Brétignolles : reprise des travaux préparatoires en toute illégalité
En marge du démantèlement de la ZAD, les “bénévoles” présents sur place procèdent actuellement à la reprise des travaux préparatoires de déboisement ! La municipalité ne s’en cache pas et l’indique dans Ouest France Saint Gilles Croix de Vie : “les branchages des arbres coupés en septembre pendant les travaux préparatoires vont également être ramassés”
Ces travaux ont pourtant fait l’objet d’un appel d’offre dont le marché a été attribué à une société spécialisée, laquelle est tenue de procéder à l’exécution de ces travaux et d’assurer le respect des normes en vigueur (sécurité, assurance, droit du travail…)
Le cahier des clauses techniques particulières de ce marché public indique explicitement :
“Les travaux de débroussaillage et abattage des arbres comprendront l’enlèvement de tous les éléments végétaux PAR DES EQUIPES QUALIFIÉES, y compris l’extraction des arbres de quelque nature que ce soit et des racines principales ainsi que l’évacuation en décharge agréée de l’ensemble des déchets ou la valorisation par une filière de valorisation adaptée”
Les “bénévoles” non qualifiés, non assurés pour de tels ouvrages procèdent donc en ce moment même sous l’autorité des services municipaux à la réalisation de travaux réservés à l’entrepreneur titulaire du marché et soumis à des conditions strictes d’exécution.
Le Coordinateur sécurité et protection de la santé (CSPS) pour cette opération et les autorités préfectorales ont donc été alertés de tout ces manquements aux règles élémentaires. – avec France Nature Environnement Vendée, LPO Vendée, Préfet de la Vendée et La Vigie.
Profitant d’une opération de gendarmerie menée dans le cadre d’une procédure pour violence, injures et dégradations, 70 personnes ont incendié la ZAD de Brétignolles-sur-Mer, à l’appel du maire sortant Christophe Chabot, promoteur d’un projet controversé de port de plaisance.
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J’en ai vomi tellement le procédé m’a choqué. » Au téléphone, la voix semble comme éteinte. Bien loin de l’énergie qui anime d’ordinaire Jean-Baptiste Durand.
Ce vendredi matin, le président de la Vigie est comme sonné. « Bien sûr que depuis son déménagement du terrain privé vers la parcelle communale voisine, la ZAD était en infraction », reconnaît cet opposant historique au projet de port de plaisance de Brétignolles-sur-Mer, qui précise que, « contrairement à ce qu’affirme la municipalité, [son] association n’a jamais soutenu les zadistes ». « Mais, ajoute-t-il, est-ce une raison pour mobiliser ce que j’appelle une milice ? »
Martine Lucé, aussi, en reste estomaquée. « J’habite à 600 mètres de la mer et, depuis les arrêtés préfectoraux du 18 mars et du 3 avril, l’accès à la plage, aux dunes et aux chemins côtiers est interdit, sous peine d’amende pour violation des règles de confinement. Et, là, à l’appel du maire, ils sont 70 à mettre le feu à ce qu’il reste des cabanes ? »
Dans un courriel qu’elle adresse à la préfecture de la Vendée, le 9 avril au matin, soit le lendemain de l’évacuation litigieuse, la présidente de Demain Brétignolles s’interroge « sur ce rassemblement en plein confinement. Ces personnes ont-elles obtenu une dérogation spéciale ? » Il faudra moins de 24 heures pour que la réponse tombe dans sa boîte mail.
« L’opération qui s’est déroulée hier soir à Brétignolles-sur-Mer était une opération d’interpellation conduite sous l’autorité de Madame le procureur près le tribunal judiciaire des Sables-d’Olonne, détaille le sous-préfet, Thierry Bonnet. Le départ des individus interpellés a permis à la commune de Brétignolles-sur-Mer, sous l’autorité de son maire, de reprendre possession des lieux qui lui appartiennent et qui étaient occupés illégalement. »
Une réponse de l’État qui ne satisfait ni les zadistes ni leurs soutiens , qui ont annoncé ce weekend réfléchir à porter l’affaire en justice.
Outre la légalité de cette opération d’évacuation, improvisée à la suite d’une opération de gendarmerie diligentée après qu’une altercation a eu lieu sur la « route des chicanes » entre des zadistes et un couple d’automobilistes, le mercredi matin, plusieurs camions auraient été vandalisés, « dont un très lourdement », assure David Potier.
Ce dernier, qui est tout à la fois avocat et l’un des acteurs de la ZAD, l’affirme : « Jamais nous n’avons eu de copie d’ordonnance d’expulsion. » « Nous comptons porter plainte contre X pour dégradation, vraisemblablement en bande organisée », précise-t-il, ce samedi, à nos confrères de L’Humanité.
Troublé par cette affaire, c’est peu de dire que Jean-Baptiste Durand l’est encore, 72 heures après les faits. « Déjà, envoyer une cinquantaine de gendarmes, assistés d’un hélicoptère et de drones, pour interpeller des zadistes qui ne sont plus qu’une vingtaine, cela interroge, dit le militant. Mais qu’un élu de la République en profite pour organiser une évacuation en dehors de toutes règles, alors même que le pays vit, depuis près d’un mois, sous un régime d’exception, c’est tout bonnement incompréhensible. »
Pour seule explication à ce casse-tête législatif, les deux représentants associatifs devront se contenter de cet argument, avancé par le sous-préfet des Sables-d’Olonne : « Selon le maire que j’ai interrogé à ce sujet, les bénévoles qui ont participé au nettoyage des lieux l’ont fait au titre de la participation à des missions d’intérêt général, sur demande de l’autorité administrative, une dérogation prévue par les textes. Ils étaient porteurs d’une attestation en ce sens. » Le fonctionnaire précise qu’« il leur a été remis des gants, des masques, et les consignes relatives aux gestes barrière [sic] ont été rappelées. Du gel hydroalcoolique était à leur disposition sur le site ».
Pourtant, à regarder de près les photos et vidéos de l’évacuation, qui tournent sur les réseaux sociaux, « il n’est pas toujours évident de vérifier si les règles de distanciation sociale ont, ou non, été respectées », glisse Martine Lucé. « Ce qui vient de se produire avait clairement été annoncé pendant la campagne des municipales, accuse Jean-Baptiste Durand. Christophe Chabot [le maire – ndlr] et ses équipes n’attendaient qu’une occasion pour évacuer la ZAD. Il a profité du confinement et de la difficulté de se mobiliser pour lancer son appel dès que l’occasion s’est présentée. »
Le vendredi 21 février 2020, du temps où l’on pouvait encore se réunir à plus de 100 dans une salle communale, ils étaient près de 500 à se presser pour assister à la première réunion publique organisée par l’équipe de Réussir Brétignolles. En tête d’affiche, Frédéric Fouquet remplaçait Christophe Chabot, qui, après trois mandats consécutifs, avait choisi de rétrograder à la 5e place sur la liste de la majorité.
Celui qui est encore adjoint aux sports et aux associations ouvre alors la campagne. Sans surprise, le projet de port et, plus encore, l’évacuation de la « ZAD de la Dune » monopolisent les débats. Dans un enregistrement audio de la soirée, que Mediapart a pu écouter, pas moins de 31 minutes et 16 secondes sont consacrées à ces deux thèmes.
Au micro, les « Quand est-ce qu’elle va partir, cette ZAD ? » succèdent aux « Tout le monde y pense à “zone à détruire” » … « Par quoi je commence, en fait », répond Frédéric Fouquet, qui, après un long couplet sur ceux dont « la seule motivation est d’être hébergés gratos, nourris gratos », dit avoir « une très forte pensée » pour son futur prédécesseur « qui depuis des mois passe à peu près 20 heures par jour à ne penser qu’à ça. Il ne dort plus, ne mange plus. Il pense “évacuation ZAD”. Il ne travaille qu’à ça, tous les jours, depuis des mois ».
Répondant à l’inquiétude de ses partisans, celui qui a ensuite été élu avec 60,4 % des suffrages mais pas encore désigné maire du fait de la suspension des municipales, promet « que tout ce qui peut être fait pour que cette ZAD dégage est fait. Tout » : « Dans la salle, je suis sûr que je peux identifier une cinquantaine de personnes qui m’ont tous [sic] dit, individuellement : “Quand tu veux qu’on y aille, on y va.” Si ça bouge avec l’État, on sera là pour bosser avec et si ça ne bouge pas, c’est nous qu’allons le faire, voilà. »
En écho, des applaudissements nourris se font entendre. « Il y a une chose qui est sûre, précise alors Frédéric Fouquet, nous, on a fait un choix qui est celui de rester dans le droit. On n’en sortira pas. C’est le choix qu’on fait les élus actuels, dont je fais partie. On n’en sortira pas et on gagnera, on gagnera en respectant la loi, contrairement à eux. »
Quarante-sept jours plus tard, Christophe Chabot lance un appel à « ses bénévoles pour nettoyer le site ». Maire en exercice jusqu’à la fin du confinement, ce dernier a partagé « son soulagement de pouvoir réinvestir les lieux » dans les colonnes de Ouest-France du 10 avril. « Les zadistes ont quitté la zone sans violence. Le but, maintenant, c’est de retrouver la sérénité dans la commune et de remettre le site en état pour créer de bonnes conditions à la saison estivale, dont on ne sait pas grand-chose encore. »
Toute la journée de vendredi, les tractopelles des services municipaux ont terminé de déblayer le terrain, évacué 48 heures plus tôt. « Ils en ont profité pour faire tourner les broyeuses à plein régime, s’étrangle Jean-Baptiste Durand, cela pour faire disparaître toute trace des végétaux et des arbres abattus le 6 octobre dernier, avant l’arrêt des travaux et l’occupation du site par la ZAD. Alors même que le code de l’environnement interdit toute action de taille et d’élagage en période de nidification, c’est-à-dire, au printemps ! »
Ne pouvant faire appel à un huissier, le président de la Vigie a profité de son heure quotidienne de sortie pour aller constater les faits. « Et, alors que j’étais en train de prendre des photos, j’ai été contrôlé par les gendarmes, à qui j’ai remis mon attestation de déplacement dérogatoire, raconte le militant. Ils m’ont dit que je marchais sur la dune et que cela était interdit par deux arrêtés préfectoraux successifs. Résultat, ils n’ont rien dit pour Chabot et sa milice mais, à moi, ils m’ont collé un PV de 135 euros… »